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Japon

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LE JAPON est un pays de contrastes. Il est formé de quatre îles principales et de beaucoup d’autres, plus petites. Son terrain montagneux a la forme d’un croissant allongé qui s’étend du nord à l’ouest, de Hokkaido, couverte en grande partie par la neige, à Kyushu, située dans la zone subtropicale. Quant aux plaines, elles ne représentent que 15 pour cent de terre arable. La plus grande partie des habitants s’entassent dans les villes côtières. Les cultures en terrasses de paddy produisent du riz. Il existe également une grande variété de fruits de saison, et l’océan produit en abondance du poisson, des plantes marines et d’autres denrées délicates. Dans une large mesure, le Japon se suffit à lui-​même pour ce qui est de la production alimentaire, bien que la population soit maintenant supérieure à 105 millions d’habitants.

Le Japonais est généralement petit, adroit, travailleur et fier de ses traditions. D’un bout à l’autre du pays, on ne parle qu’une seule langue, et les variantes dialectales sont peu nombreuses. Le japonais, qui s’écrit au moyen de 1 850 caractères chinois courants, est assez compliqué ; pourtant, 99 pour cent des habitants savent lire et écrire. En fait, les Japonais aiment la lecture. Leur esprit inventif et leur aptitude à perfectionner les inventions étrangères ont permis à la nation de devenir l’une des principales puissances industrielles du vingtième siècle.

De nos jours, au Japon, les vêtements européens sont beaucoup plus répandus que les vêtements orientaux. Pour ce qui est des repas, le pain remplace bien souvent le riz. Là où il y avait des maisons en bois et en papier, s’élèvent aujourd’hui des immeubles en béton armé, hauts de douze à vingt étages. Mais le développement industriel est à l’origine de la pollution qui devient inquiétante.

LA RELIGION AU JAPON

Selon l’Encyclopédie britannique, “l’histoire ancienne du Japon, telle qu’elle est rapportée dans les annales du pays, est à ce point imprégnée de légendes mythologiques, qu’elle n’est absolument pas digne de foi”. D’après la mythologie, l’empire japonais aurait été fondé en 660 avant Jésus-Christ, par l’empereur Jimmu. Celui-ci, ainsi que les 124 empereurs qui lui ont succédé jusqu’à Hirohito, seraient les descendants d’Amaterasu Omikami, déesse du soleil, qui apporta la lumière au monde quand on l’incita à sortir de sa grotte en lui faisant voir le reflet de sa beauté dans un miroir. Au cours des siècles, le shinto (“la voie des dieux”) s’est développé ; il est principalement fondé sur le culte des ancêtres et des forces de la nature. Jusqu’à ce jour, chaque commune observe la fête annuelle shinto, à l’occasion de laquelle des hommes et des garçons à moitié nus marchent en procession bruyante, portant sur leurs épaules un sanctuaire modèle réduit. Dans cette fête, le miroir, les joyaux et l’épée sont à l’honneur en tant que symboles shinto. Jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, le shinto était la religion d’État ; il mettait surtout l’accent sur le culte de l’empereur.

Toutefois, la plupart des Japonais pratiquent plus d’une religion. Ils pensent prendre ainsi le meilleur de chacune d’elles. Lorsque, de la Chine et de la Corée, le bouddhisme s’étendit au Japon au sixième siècle de notre ère, de nombreuses pratiques bouddhistes s’implantèrent dans la vie des Japonais. Les religions shinto et bouddhiste coexistèrent. Il n’est pas rare de voir, l’un à côté de l’autre, un sanctuaire shinto et un temple bouddhiste. Dans beaucoup de maisons japonaises il y a, à l’entrée, une étagère consacrée aux dieux shinto et, placé bien en vue à l’intérieur, l’autel familial bouddhiste. On y dépose des offrandes de fleurs, de fruits et autres, pour le plaisir des esprits des ancêtres.

Conformément à la tradition, les couples sont mariés et leurs enfants bénis selon les rites shinto, tandis que les funérailles et les cérémonies commémoratives qui suivent sont conduites par un prêtre bouddhiste. Le shinto attache beaucoup d’importance à la purification de toute souillure ; en revanche, le bouddhisme prescrit les rites du culte des morts. Il existe en réalité des centaines de sectes shinto et bouddhistes.

Au temps où le shinto d’État occupait une place prépondérante, les Japonais vouaient un culte à l’empereur. Beaucoup étaient animés d’un zèle empreint de nationalisme et de militarisme, qui atteignit son paroxysme au plus fort de la Seconde Guerre mondiale. Des vies furent sacrifiées au culte de l’empereur, et ceux qui choisissaient de se rendre plutôt que de mourir pour lui étaient souvent considérés comme des renégats. Lorsque le Japon fut vaincu, des armées entières refusèrent de capituler et préférèrent se détruire elles-​mêmes. Tant que durait le militarisme, la prédication de la bonne nouvelle relative au “Prince de la paix” ne semblait pas devoir réussir au Japon.

En fait, toute l’histoire de ce pays a été marquée par des guerres intestines, des assassinats, des suicides par hara-kiri, des révolutions et des combats à l’épée. Peu de pays ont eu un passé caractérisé par tant de violence, passé qui est encore glorifié dans les pièces de théâtre et les films ayant pour thème les chevaliers samouraï et le culte du bushido (“la voie du guerrier”). Au cours des guerres acharnées que se livrèrent les adeptes des sectes bouddhistes rivales, les rues de Kyoto, l’ancienne capitale du Japon, étaient vraiment rouges du sang des prêtres guerriers et de leurs partisans.

LA VENUE DES MISSIONNAIRES DE LA CHRÉTIENTÉ

La chrétienté pourrait-​elle prendre pied au Japon, parmi toutes ces sectes bouddhistes et shinto, le shinto d’État jouant un rôle prépondérant dans la vie des Japonais ?

Les religions de la chrétienté commencèrent à envoyer des missionnaires au Japon au milieu du seizième siècle. On prétend que dans la région de Nagasaki, 150 000 personnes se convertirent au catholicisme. Toutefois, après avoir dit que la religion catholique romaine devint plutôt pour les Japonais un “symbole de la civilisation européenne”, l’Encyclopédie britannique ajoute : “Bien que certains paysans opprimés accueillirent favorablement l’évangile de salut, les marchands et les seigneurs mercantiles et guerriers considérèrent le catholicisme comme un lien important entre eux et le continent européen en expansion.” La religion catholique devint un instrument entre les mains des marchands et des trafiquants d’armes ; en conséquence, le shogoun Toyotomi Hideyoshi ordonna sans tarder l’extermination de ses membres au moyen d’une violente persécution. Désespérés, les catholiques de l’ouest du Japon s’insurgèrent, mais ils furent pratiquement exterminés en 1637. Certains survivants renoncèrent à leur foi tandis que d’autres, contraints à la clandestinité, sont devenus des “chrétiens cachés”, dissimulant leurs images catholiques derrière des symboles bouddhistes.

Jusqu’à son “grand réveil”, qui a commencé avec l’ère Meiji en 1868, le Japon était pratiquement fermé à toute influence étrangère, même religieuse. Cependant, quand le pays s’ouvrit de nouveau au monde extérieur, les Églises de la chrétienté envoyèrent de très nombreux missionnaires. Quels en furent les résultats ? Les Japonais ne se convertirent pas en masse. Ils étaient satisfaits de leurs croyances shinto et bouddhistes dont s’étaient contentés leurs ancêtres. Le bouddhisme n’enseigne-​t-​il pas de bons principes moraux ? Comment la chrétienté pouvait-​elle prétendre que sa religion était la meilleure, elle dont l’histoire est marquée par les guerres et l’oppression coloniale ? Les Japonais ont donc pris dans les religions de la chrétienté tout ce qu’ils estimaient utile et l’ont ajouté à leurs propres croyances traditionnelles, tout comme ils l’avaient fait, des siècles auparavant, avec les doctrines du confucianisme et du bouddhisme.

Ayant constaté qu’ils ne progresseraient guère en prêchant un “évangile de salut”, les missionnaires de la chrétienté ont alors cherché à atteindre leur but en construisant des hôpitaux, des écoles et des universités ; c’était un moyen indirect d’encourager les Japonais à adopter l’une des Églises de la chrétienté. Ont-​ils mieux réussi dans ce domaine ? De nombreux Japonais se sont montrés reconnaissants pour l’instruction et les soins médicaux reçus ; ils ont fait bon usage de ce qu’ils ont appris, mais très peu y ont vu une raison d’embrasser une religion de la chrétienté. Aujourd’hui, bien que le Japon compte plus de 100 millions d’habitants, un demi-million seulement de personnes confessent une religion chrétienne.

De nos jours, beaucoup de Japonais ont une Bible et disent qu’ils ont suivi des cours bibliques dans l’une des écoles de la chrétienté. Toutefois, même s’ils ont une religion, ils se contentent de suivre celle que pratiquaient leurs ancêtres, senzo dai-dai (“de génération en génération”). Les Églises de la chrétienté ont surtout impressionné les Japonais par leur célébration de la Noël, avec son clinquant, ses paillettes et ses réjouissances bruyantes qui excluent toute retenue. Un commerçant japonais a dit ce qui suit à un missionnaire de la Société Watch Tower : “Je suis à la fois un bon chrétien et un bon shintoïste. Je vends des sapins à Noël et d’autres arbres pour la nouvelle année shinto.” Noël n’a pu inciter les Japonais à devenir chrétiens.

LE MESSAGE DU ROYAUME PÉNÈTRE AU JAPON

À l’occasion de son congrès tenu du 1er au 10 septembre 1911, l’Association internationale des Étudiants de la Bible nomma un comité “chargé de faire le tour du monde et de fournir un rapport exact sur la situation réelle existant dans les pays orientaux, généralement qualifiés de ‘païens’”. Cette décision faisait suite à la proposition émanant d’un certain mouvement missionnaire laïc, qui se proposait de collecter une somme de 30 000 000 de dollars pour la conversion immédiate du monde. Le comité désigné, comprenant le pasteur Russell, R. B. Maxwell, le Dr L. W. Jones, le général W. P. Hall, J. T. D. Pyles, le professeur F. W. Robison et E. W. V. Kuehn, partit sans tarder et après une escale aux îles Hawaii, poursuivit sa route vers le Japon.

Frère Russell et ses compagnons entreprirent un voyage de 1 100 kilomètres à travers le Japon, visitant Yokohama, Tokyo et d’autres villes, jusqu’à Nagasaki, à l’ouest. À Tokyo, où frère Russell prononça deux discours, il remarqua que les missionnaires de la chrétienté étaient considérablement découragés. Dans son rapport, il souligna que sur le plan religieux, les Japonais étaient enclins à “l’infidélité, au doute et à l’athéisme”. Il se référa à un récent sondage effectué dans trois sections de l’université de Tokyo, selon lequel sur 409 étudiants, il y avait 4 chrétiens, 17 bouddhistes, confucianistes ou shintoïstes, 46 sans opinion, 60 athées et 282 agnostiques. Frère Russell résuma les données en disant :

“La situation du christianisme au Japon est pratiquement la même qu’en Amérique et en Europe, et ceci sous deux rapports : 1) il existe de vrais adorateurs, des croyants fervents, mais ils sont peu nombreux ; 2) un grand nombre pratiquent uniquement pour les avantages matériels qu’ils en retirent de façon ou d’autre — par exemple, les cours du soir, les mouvements de jeunesse, les gymnases, etc.”

Plus que tout ce qu’ils avaient entendu jusque-​là, les sermons du pasteur Russell donnèrent aux Japonais matière à réflexion. Celui-ci conclut son rapport en ces termes : “Ce dont les Japonais ont besoin, c’est de ‘l’évangile du Royaume’, annonçant la seconde venue de Jésus comme Messie glorieux, dans le but de régner, de guérir et d’instruire toutes les familles de la terre.”

En 1915, sœur F. L. Mackenzie, colporteur de nationalité britannique, visita la Chine, la Corée et le Japon, rendant un excellent témoignage. Elle plaça ou prêta de nombreux exemplaires des Études des Écritures. En 1918, elle effectua une seconde tournée de visites en Orient. Dans une lettre qu’elle écrivit à des personnes bien disposées, elle attira leur attention sur le chapitre 15 du livre Le divin Plan des Âges, où il est question de la période “de grands troubles qui a déjà commencé dans le monde et qui a été annoncée il y a presque quarante ans, conformément à la chronologie biblique”.

L’ÈRE DE LA “TODAISHA”

Le 6 septembre 1926, Junzo Akashi, Américain d’origine japonaise, arriva au Japon comme missionnaire de la Société pour le Japon, la Corée et la Chine. Il ouvrit une filiale à Kobe, qui fut transférée par la suite à Ginza, puis à Tokyo et finalement à Ogikubo, dans la banlieue de Tokyo, où une imprimerie fut installée. Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, le Japon, la Corée et Taïwan étaient visités par des colporteurs japonais de la Watch Tower. Le nombre de ces serviteurs à plein temps atteignit un maximum de 110 en 1938. Il semble qu’il n’y avait pas de réunions telles que l’étude de La Tour de Garde, mais l’accent était mis sur les réunions dans les rues et sur la diffusion de l’édition japonaise de L’Âge d’Or (qui devint plus tard Consolation). Rien qu’en 1938, 1 125 817 périodiques furent distribués. Akashi donna le nom de “Todaisha” à l’organisation, mot qui signifie “Le phare”.

Depuis l’incident survenu en Mandchourie le 18 septembre 1931, le militarisme ne cessait de croître au Japon. Aussi, le 16 mai 1933, Akashi et de nombreux autres frères furent arrêtés et interrogés, car ils étaient soupçonnés d’avoir violé la loi de 1925 sur la préservation de la paix, loi édictée par l’État policier qu’était devenu le Japon. Cependant on ne tarda pas à les relâcher en raison de l’insuffisance de preuves relevées contre eux. Mais des nuages menaçants s’amoncelaient à l’horizon.

Après que le Japon eut signé avec l’Allemagne un pacte anticommuniste, en 1936, toutes les religions eurent à subir de fortes pressions de la part du gouvernement. En conséquence, l’Église catholique romaine changea sa position à l’égard du culte rendu aux sanctuaires shinto, considérant désormais de telles cérémonies comme “dénuées de caractère religieux”. Le gouvernement demanda à toutes les Églises d’envoyer leurs représentants au front, afin qu’ils prient pour la victoire du Japon ; la plupart d’entre elles acceptèrent. Conformément à la loi de 1939 sur les religions, les sectes bouddhistes et les Églises de la chrétienté furent respectivement invitées à s’unir. En 1944, l’Alliance protestante (Kyodan) et l’Église catholique devinrent membres de l’Association religieuse patriotique du Japon en guerre, au même titre que les sectes shinto et bouddhistes. Comment les témoins de Jéhovah furent-​ils traités durant le règne tyrannique des shogoun, soutenus par un panthéon de quelque “huit millions de dieux” ?

Un rapport succinct rédigé en 1947 par le ministre japonais de l’Intérieur décrit en ces termes cette époque de troubles : “En mai 1933, Akashi et plusieurs de ses compagnons (...) furent arrêtés pour crime de lèse-majesté, et emmenés à la préfecture de Chiba ; la Todai-sha fut dissoute. Elle fut réorganisée et un grand nombre de ses membres (...) (quelque 200 au total, dont 50 habitant Tokyo) furent envoyés à travers le Japon, la Mandchourie, la Corée, Taïwan, etc.; ils prononcèrent des discours et distribuèrent des publications [traduites] par Akashi. Ils affirmaient que la doctrine de la trinité est fausse et préconisaient le monothéisme, le culte de Jéhovah. Selon eux, toutes les religions autres que celle de la Todai-sha sont d’origine satanique, tout comme le système politique du monde, qui a provoqué une guerre oppressive et engendré la pauvreté et la maladie. Ils prétendaient que le Christ se lèvera pour détruire ces inventions sataniques à Harmaguédon et établir le Royaume de Dieu. Enfin, et cela fut le point crucial de l’affaire pour les tribunaux japonais qui, autrement, ne se seraient pas plus intéressés aux doctrines de cette religion qu’à celles des autres Églises, ‘la Todai-sha prenait une part active à l’établissement de l’organisation et du système de Jéhovah’. Cette déclaration étant considérée comme une menace pour l’État japonais (Kokutai), les membres de la Todai-sha furent arrêtés le 21 juin 1939, et certains ont été reconnus coupables.”

Le premier tome de l’Étude de la résistance en temps de guerre, édité par l’Institut d’étude des sciences culturelles de l’Université Doshisha de Tokyo, et publié en 1968, contient un rapport assez long sur les activités et les persécutions des témoins de Jéhovah au Japon, avant et pendant la Seconde Guerre mondiale. Ce rapport est essentiellement basé sur des documents juridiques authentiques. Certains témoins de Jéhovah, y compris ceux qui ont quitté la vérité, furent également interviewés. Le rapport fait allusion au premier décret du tribunal, datant de 1939, selon lequel la diffusion de La Tour de Garde et de la plupart des autres publications de la Société était interdite. Toutefois, le rapport précisait qu’en 1938, plus de 105 000 imprimés avaient été publiés chaque mois. (Il s’agissait principalement de L’Âge d’Or, qui devint plus tard Consolation.) Suit un compte rendu sur les emprisonnements et les jugements, dont voici quelques extraits :

En janvier 1939, trois membres de la Todaisha furent traduits devant le tribunal militaire. Ils déclarèrent : “Nous n’adorerons aucune créature qui s’élèverait au-dessus de Jéhovah, et nous ne nous inclinerons pas devant le palais ou la photographie de l’empereur.” Ils ajoutèrent : “Étant donné que l’empereur est une créature du Créateur de l’univers, Jéhovah Dieu, et qu’aujourd’hui il n’est autre qu’un instrument dans le gouvernement inique du Diable, nous ne voulons pas adorer l’empereur ni lui jurer fidélité et obéissance.” Ils furent condamnés à une peine de deux à trois ans de prison.

Le 21 juin 1939, on arrêta dans une rafle 130 membres de la Todaisha — quatre-vingt-onze (y compris Junzo Akashi) à Tokyo et dans dix-huit autres préfectures du Japon, trente en Corée et neuf à Taïwan. Une centaine de policiers en armes encerclèrent le siège de la Todaisha à Tokyo, fouillant la maison de fond en comble. Là, ils arrêtèrent vingt adultes et six enfants. Akashi, sa femme, son deuxième et son troisième fils furent enfermés dans la cellule du commissariat de police d’Ogikubo.

En août 1939, seul Junzo Akashi fut transféré au commissariat d’Ogu. Pendant sept mois, des membres de la police spéciale chargée du service Religions l’interrogèrent. Ils eurent recours à la violence dans le but de lui arracher des “aveux”. On le tortura jour et nuit, et, pour compagnons de cellule, il avait des insectes venimeux, des moustiques, des poux et des punaises. Maintes et maintes fois on le roua de coups et on le jeta à terre ; on le frappa au visage jusqu’à ce qu’il soit méconnaissable. Son corps était couvert de blessures. Finalement, d’après le rapport établi par l’Université Doshisha, il abandonna la lutte et signa tout ce que les policiers lui soumirent. Après des contre-interrogatoires de plus en plus violents, la police compléta son rapport sur Junzo Akashi, le 1er avril 1940.

Le 17 avril 1940, Akashi et cinquante-deux autres témoins furent accusés d’avoir violé la loi sur la préservation de la paix. On accusa Akashi de sédition et de manque de respect envers l’empereur. Le 27 août de la même année, le gouvernement décréta que la Todaisha était désormais une organisation illégale qui incitait les Japonais au désordre. Le jugement de Junzo Akashi et des cinquante-deux autres témoins dura jusqu’en 1942; entre-temps, la maladie emporta l’un d’eux. Finalement, à l’exception d’un seul, tous ceux qui étaient en âge d’être mobilisés furent condamnés. Junzo Akashi se vit infliger une peine de douze ans de prison et les autres de deux à cinq ans.

Les interrogatoires que les policiers faisaient subir aux frères étaient accompagnés de tortures et de violences de toutes sortes. Les traitements les moins pénibles étaient les injures et les coups, mais les tortionnaires se montraient souvent sadiques au point de mutiler leurs prisonniers ou de les rendre infirmes. Après un long emprisonnement dans des cellules insalubres, beaucoup sont tombés malades ou sont devenus impotents. Certains sont morts en prison. Des familles entières ont été dispersées ou ont disparu, et un grand nombre de frères sont tombés dans la misère.

En juin 1939, on enferma un membre de la Todaisha dans la prison militaire Yoyogi à Tokyo, puis on le libéra le 16 décembre 1940. On l’arrêta de nouveau à Kumamoto le 1er décembre 1941, où on le garda pendant deux mois dans une petite cellule sans lumière, les bras liés derrière le dos. Il fut battu maintes et maintes fois. En août 1942, deux policiers militaires le frappèrent et lui donnèrent des coups de pied pendant une heure et demie, sous les yeux de son père, puis ils l’abandonnèrent, à demi-mort. Tout cela parce qu’il avait refusé de se prosterner dans la direction du palais de l’empereur. Dans la même prison, en décembre 1944, soit en plein cœur de l’hiver, on lui ôta ses vêtements, on lui lia les bras derrière le dos et on l’abandonna sur le sol humide en béton. On lui versa des seaux d’eau sur le visage jusqu’à ce qu’il s’évanouisse, puis on le laissa dans cet état pendant plusieurs heures, jusqu’au moment où il revint à lui. On le tortura ainsi inlassablement. Quand enfin il sortit de la prison Fukuoka, en octobre 1945, il était plus mort que vif.

Le livre Étude de la résistance en temps de guerre conclut en ces termes : “Mais en dépit d’une telle persécution, beaucoup de membres de la Todaisha gardèrent leur foi en attendant leur libération, qui survint en 1945.”

Oui, beaucoup gardèrent leur foi, et bon nombre servent toujours fidèlement en qualité de témoins de Jéhovah. Toutefois, il semble que la majorité des membres de la Todaisha aient suivi un homme, Junzo Akashi. Par exemple, l’homme qui a subi les dures épreuves que nous venons de décrire a été interviewé le 18 mai 1971, à l’occasion d’une émission télévisée (canal 12 de Tokyo). Après avoir parlé des activités de la Todaisha et des persécutions dont ses membres furent l’objet, le présentateur demanda à cet homme : “Qu’en est-​il aujourd’hui de la Todaisha ?” Il répondit : “Elle a atteint son but ; elle a disparu.”

Et qu’advint-​il de Junzo Akashi ? Moins de deux ans après sa libération, il écrivit au président de la Société Watch Tower une lettre datée du 25 août 1947, dans laquelle il révéla qu’il était en désaccord avec les publications de la Société parues depuis 1926. C’était donc avant qu’il n’accepte sa nomination comme surveillant de filiale au Japon. Ainsi, de son propre aveu, Junzo Akashi s’est comporté avec hypocrisie pendant plus de vingt ans.

DES EXEMPLES D’INTÉGRITÉ

Parmi les fidèles qui survécurent à cette époque difficile, figurent frère et sœur Jizo Ishii. En 1928, alors qu’il tenait une boutique de tailleur à Joto-Ku, Osaka, le jeune Ishii est entré en possession d’un exemplaire du livre La Harpe de Dieu. Il fut très vite convaincu d’avoir trouvé la vérité biblique. Sa femme et lui furent baptisés le 23 mars 1929, et en septembre, ils étaient nommés colporteurs. Dans leur prédication ils utilisaient les livres La Harpe de Dieu, Délivrance et Création, les périodiques La Tour de Garde (qui fut interdite en 1933) et L’Âge d’Or, ainsi que cinq brochures différentes en japonais. Ils visitèrent un territoire qui représentait les trois quarts du Japon, y compris Osaka, Okayama, Tokushima, Kyoto, Nagoya, Yokohama, Tokyo et la région de Kantō, Sendai et Sapporo.

En été 1930, frère et sœur Ishii furent affectés au bureau de la filiale de la Todaisha, à Tokyo. Là, ils furent chargés de confectionner des vêtements, de raccommoder et de repasser pour les frères qui servaient dans le champ. Parfois, les membres du Béthel partaient en groupe de quatre pour visiter les territoires avoisinants, allant même à bicyclette jusqu’à Numazu, au-delà du col de Hakone. Un des événements les plus lointains dont frère Ishii se souvienne est l’annonce du “Nom nouveau”, celui de témoins de Jéhovah, en 1931. Un frère travaillant à la filiale de Tokyo avait construit un récepteur de radio à ondes courtes, qui leur permit de suivre le programme de l’assemblée de Columbus, aux États-Unis ; Junzo Akashi en donnait l’interprétation. Ils entendirent donc frère Rutherford proposer l’adoption du “Nom nouveau” et les acclamations de tous les assistants. Au même moment, les frères de Tokyo unissaient leurs voix à celles des congressistes !

Les témoins de Tokyo apprirent que des voitures munies de haut-parleurs étaient largement utilisées aux États-Unis. Aussi, un frère menuisier construisit-​il une grande caisse comprenant des fenêtres et une double porte à l’arrière, qu’il monta sur un châssis de voiture. À l’intérieur, il y avait des étagères sur lesquelles étaient rangés des hamacs, des publications, des ustensiles de cuisine et des provisions. Un frère poussait le véhicule au moyen d’une poignée à l’arrière, tandis que d’autres le tiraient par une grosse corde accrochée à l’avant. On l’appelait le “Grand Jéhu”. Au moyen du “Grand Jéhu”, les frères ont prêché le long de la route menant de Tokyo à Shimonoseki, sur une distance de 1 100 kilomètres. Ils avaient également des petites remorques, ou “Petits Jéhu”, tirées par des bicyclettes et numérotées de 1 à 5. À l’aide d’un “Petit Jéhu”, deux jeunes frères ont rendu témoignage jusqu’à Hokkaido.

Par la suite, frère et sœur Ishii furent de nouveau nommés colporteurs. Le 21 juin 1939, tous deux furent arrêtés ainsi que d’autres membres de la Todaisha. À cette époque-​là, ils se trouvaient à Kure. On les emmena d’abord à Hiroshima puis à Sendai, ville située plus au nord. Là, on leur fit subir de nombreux contre-interrogatoires. L’inspecteur de police qui les interrogeait leur dit : “La Todaisha se prétend chrétienne, mais c’est en réalité une organisation secrète juive, la KKK.” Dans leur cellule en béton, la chaleur de l’été était insupportable, alors qu’en hiver le froid les transperçait jusqu’aux os. L’hygiène laissait beaucoup à désirer, il y avait des puces et des poux en abondance, et on ne leur permettait d’aller aux toilettes qu’à certaines heures. Ils dépérissaient et s’évanouissaient souvent. D’une cellule voisine, ils pouvaient entendre les cris démentiels d’un soldat que la guerre avait rendu fou. Pendant une année entière on leur interdit toute lecture.

Ils étaient heureux de pouvoir respirer l’air frais chaque fois qu’on les emmenait pour l’interrogatoire. Un jour, frère Ishii essaya d’utiliser la Bible, mais l’officier lui dit : “Ne répondez pas d’après la Bible. Utilisez vos propres termes. Vous êtes possédé des démons à force de toujours utiliser la Bible.” Tandis qu’il tentait d’expliquer les enseignements bibliques en ses propres termes, la colère de l’officier éclata sur son visage. Il dit : “Dans ces conditions, nous allons interrompre l’interrogatoire et vous n’aurez rien à manger ce soir. Réfléchissez bien lorsque vous serez dans votre cellule.” On les ramena donc dans leur cellule obscure. Le jour suivant, on les en sortit pour un nouvel interrogatoire, auquel assistait l’inspecteur adjoint. “Pourquoi ne vous libérez-​vous pas des démons ?” cria-​t-​il, tout en frappant frère Ishii sur la tête et au visage avec une corde. Ils entendaient d’autres frères, qui étaient battus avec des épées en bambou et jetés à terre.

Un jour, l’inspecteur s’emporta, jeta la Bible de frère Ishii par terre, la piétina et le regardant en face lui dit : “N’êtes-​vous pas fâché ?” “Cela ne me fait pas plaisir, mais je ne suis pas fâché”, répondit frère Ishii. Comme l’inspecteur ne comprenait pas, il ajouta : “La Bible n’est qu’un livre. Ce n’est pas ce livre qui nous sauvera. Mais nous avons reçu la promesse d’être sauvés si nous observons les enseignements de la Parole de Dieu et que nous y croyions et les mettions en pratique.” L’inspecteur ramassa la Bible, prit un mouchoir et l’essuya avec respect, puis il la replaça sur le bureau.

Au cours de l’interrogatoire de frère Ishii, un policier lui soumit une déclaration de Junzo Akashi faite sous serment ; ceci l’étonna beaucoup car il était clair qu’Akashi avait dévié de la vérité. Les policiers lui demandèrent : “Croyez-​vous Akashi ?” Il dit : “Non. Akashi n’est qu’un homme imparfait. Aussi longtemps qu’il suit fidèlement les principes de la Bible, il peut être utilisé par Dieu comme un vase à son usage. Toutefois, comme son témoignage a totalement changé, il n’est plus mon frère et je n’ai plus aucune relation avec lui.” Dans son témoignage, Akashi avait déclaré que lui-​même était le Christ.

Au cours du contre-interrogatoire de frère Ishii, l’officier essaya de lui faire dire que le Japon subirait la défaite vers le 15 septembre 1945. Mais frère Ishii répondit : “Je ne suis pas prophète pour annoncer quoi que ce soit à l’avance concernant l’année, le mois et le jour. Cependant, la victoire ne viendra pas au moyen de l’alliance des puissances de l’Axe.” Quelque temps plus tard, cet inspecteur de police fut révoqué, tandis qu’on relâchait frère Ishii. Il retourna à Kure. Après la guerre, il reprit contact avec l’organisation de Jéhovah quand, en compagnie de son fils âgé de six ans qu’il avait adopté après sa libération, il assista à la première assemblée d’après-guerre organisée à Tarumi, Kobe, en décembre 1949.

Au cours des dernières années, sœur Ishii a été un pionnier ordinaire très actif et frère Ishii a servi en qualité de pionnier temporaire. À la manière du colporteur qu’il avait été, il a placé 147 livres en un mois. Frère Ishii écrivit : “Nous nous réjouissons de continuer à recevoir la nourriture spirituelle au temps convenable. Quand de jeunes pionniers spéciaux furent envoyés ici, à Kure, une congrégation a été établie. Cette congrégation progresse et connaît l’accroissement. Nous avons maintenant deux pionniers spéciaux, dix-sept pionniers ordinaires et trente-six proclamateurs, soit au total cinquante-cinq témoins. Dimanche, 133 personnes étaient présentes au discours public du surveillant de circonscription.” C’était en 1971; en juin 1972, frère Ishii est mort, après avoir rendu un témoignage remarquable à l’hôpital à propos de la question du sang. Son fils est devenu pionnier spécial et surveillant dans la congrégation de Kobe Tarumi, et plus récemment dans la congrégation de Hiroshima Ouest.

Une des familles que sœur Ishii trouva au début de son activité de colporteur a également accompli un immense travail pour la vérité. Il s’agit de la famille Miura, qui habitait la petite ville d’Ishinomori, à environ quarante kilomètres au nord de Sendai. Quand Katsuo Miura se maria au printemps de 1931, il avait vingt-quatre ans, et sa femme, Hagino, dix-sept ans. Sœur Ishii avait remis à Katsuo Miura les livres La Harpe de Dieu et Délivrance, ainsi que d’autres manuels, et celui-ci ne tarda pas à discerner qu’ils renfermaient la vérité. Il se rendit au siège de la Todaisha à Tokyo, et de son côté, Junzo Akashi visita les Miura à Ishinomori. C’est là qu’en octobre 1931, Akashi les “baptisa” en les aspergeant d’eau dans leur baignoire. (Comme beaucoup d’autres ils ont d’ailleurs dû être rebaptisés par la suite.) En novembre, Katsuo et Hagino Miura devenaient colporteurs.

Les Miura vendirent tous leurs biens aux enchères et se rendirent au bureau de la Todaisha à Tokyo. Ils louèrent une pièce à proximité, à Suginami-Ku. Le lendemain, ils commencèrent à aller de porte en porte, sans que personne ne les forme, tant ils étaient zélés et désireux de diffuser le message du Royaume contenu dans La Tour de Garde et L’Âge d’Or. À l’époque, il n’y avait pas de réunions et ils prêchaient par eux-​mêmes. Chaque jour, de neuf heures du matin à quatre heures de l’après-midi, ils allaient de porte en porte ; les jours de pluie, ils ne sortaient pas mais restaient chez eux pour étudier ensemble la Bible.

Frère et sœur Miura ont visité de nombreux quartiers de la ville de Tokyo, et en 1933 ils se déplacèrent à Kobe. C’est là qu’en 1934 sœur Miura donna naissance à son fils, Tsutomu. Elle continua son service de pionnier même pendant les neuf mois de sa grossesse, tant son zèle était grand. Au printemps de 1935, les Miura se rendirent dans le Honshu occidental, où ils poursuivirent leur activité de pionniers dans les villes de Kure, de Yamaguchi et de Tokuyama ; ils s’installèrent finalement à Hiroshima, où ils partagèrent une maison louée avec deux autres familles.

Les Miura figuraient parmi ceux que la police arrêta le 21 juin 1939. On les incarcéra à la prison d’Hiroshima, tandis qu’on envoya leur jeune fils chez sa grand-mère, à Ishinomori. Huit mois plus tard, sœur Miura fut relâchée, si bien qu’elle aussi retourna dans le nord pour s’occuper de son enfant. Frère Miura attendit plus de deux ans en prison avant d’être jugé. Ses premier et second procès se déroulèrent à huis clos, et sa demande en appel fut rejetée. Étant donné que le tribunal lui offrait une excellente occasion de rendre témoignage, il fit de son mieux pour parler du Royaume de Dieu. L’officier qui l’interrogeait était furieux contre lui, le considérant comme un mauvais patriote. On le tira par les cheveux et il subit d’autres mauvais traitements. Après trois ans de prison, il fut reconnu coupable d’avoir violé la loi sur la préservation de la paix, et condamné à cinq ans de prison. Le juge lui dit qu’à moins d’abandonner sa foi, il resterait en prison jusqu’à la fin de ses jours. Mais il continuait de puiser force et réconfort dans la Bible.

Finalement, Katsuo Miura fut libéré de la prison d’Hiroshima. De quelle façon ? Laissons-​le raconter lui-​même l’incident. “C’était au matin du 6 août 1945, sept ans après mon arrestation. (...) Soudain, il y eut un éclair étrange qui illumina le plafond de ma cellule. Cela ressemblait à la foudre ou à la lueur d’un éclair de magnésium. Ensuite j’entendis un grondement terrible, comme si toutes les montagnes s’effondraient en même temps. Instantanément la cellule fut plongée dans d’épaisses ténèbres. Je me précipitai la tête la première sous mon matelas, afin d’échapper à ce qui semblait être un gaz épais. Après sept ou huit minutes, je levai la tête et (...) je regardai par la fenêtre. Je fus frappé de stupeur ! Les ateliers et les bâtiments en bois de la prison avaient été soufflés. (...) Le matin du troisième jour après l’explosion, j’étais parmi les quarante-cinq détenus que l’on avait attachés pour les conduire à la gare située trois kilomètres plus loin, en vue de les transférer dans une autre ville. C’est alors que j’ai vu l’ampleur des dégâts causés par le fléau dévastateur qui s’était abattu. Tout n’était que ruines à perte de vue. (...) Chacun semblait déprimé et désespéré. Je fus finalement libéré de prison deux mois après l’explosion de la première bombe atomique.” Frère Miura rejoignit alors sa femme et son fils dans le nord du Japon.

Lorsqu’en mars 1951 un groupe de cinq sœurs missionnaires commencèrent à parcourir la ville d’Osaka, le journal Asahi, qui est lu dans tout le pays, publia un article et une photo montrant comment elles s’adaptaient au mode de vie japonais. Grâce à cet article, frère Miura reprit contact avec l’organisation de Jéhovah, après douze ans d’isolement. Pendant plusieurs années encore et jusqu’à sa mort, il servit de nouveau comme pionnier ordinaire, et sa femme entreprit par la suite le service de pionnier spécial. Leur fils Tsutomu grandit et devint pionnier ordinaire, puis pionnier spécial, surveillant de circonscription, surveillant de district et depuis qu’il est diplômé de l’École biblique de Galaad à New York, il sert comme traducteur à la filiale de la Société à Tokyo.

UN NOUVEAU DÉPART APRÈS LA SECONDE GUERRE MONDIALE

Le Japon a connu des changements révolutionnaires après la Seconde Guerre mondiale. Après avoir reçu une nouvelle Constitution, le Japon se mit à chercher sa voie par des moyens pacifiques et non plus belliqueux. Le shinto, le bouddhisme, le catholicisme et l’Alliance chrétienne protestante (Kyodan) avaient tous perdu la face aux yeux du peuple pour avoir soutenu la cause perdue du Japon durant la guerre. Aussi beaucoup de gens cherchaient-​ils à combler ce vide religieux. En l’espace de quelques années, des centaines de nouvelles sectes bouddhistes ou shinto virent le jour, chacune suivant un chef humain. L’une d’elles, la Soka Gakkai, est issue du bouddhisme Nicheren ; elle est très active sur le plan politique et prétend réunir dix millions d’adhérents, beaucoup d’entre eux ayant été convertis par la force. Mais un grand nombre de Japonais désirent ardemment connaître la vérité.

L’empereur Hirohito était tombé de son piédestal lorsque le 1er janvier 1946 il renonça publiquement à son statut divin. On dit que l’empereur lui-​même aurait suggéré au général MacArthur que le christianisme devienne la religion d’État. Avec sagesse, le général refusa cette proposition et proposa plutôt que le peuple américain envoie dix mille missionnaires au Japon. C’est ainsi que la porte fut ouverte aux missionnaires de la Watch Tower. Les conditions étaient maintenant très différentes de celles décrites par le pasteur Russell avant 1914, quand “les missionnaires étaient considérablement découragés”. Le culte fanatique shinto ayant perdu de son prestige, les Japonais avaient enfin le droit de réfléchir par eux-​mêmes. Ils pouvaient désormais se nourrir des vérités bibliques et apprécier profondément Jéhovah et son Royaume. En outre, ils avaient eux-​mêmes été victimes des événements critiques annoncés dans la prophétie biblique, événements qui devaient marquer les “derniers jours”. Ils étaient donc en situation de comprendre le puissant message biblique pour notre époque.

Vers la fin de 1947, le surveillant de filiale d’Hawaii, Donald Haslett, reçut une lettre du président de la Société Watch Tower, frère Knorr, lui demandant : “Qui d’entre les frères hawaiiens accepterait d’aller au Japon après avoir été diplômé de l’École de Galaad ?” Quand Shinichi et Masako Tohara (qui avaient trois jeunes enfants), Jerry et Yoshi Toma et Elsie Tanigawa se portèrent volontaires, frère Haslett demanda à frère Knorr : “Et pourquoi pas les Haslett ?” Donald et Mabel Haslett se joignirent donc aux huit Hawaiiens d’origine japonaise et entreprirent le long voyage qui devait les amener, en plein cœur de l’hiver, de la région tropicale d’Hawaii à New York, et finalement à South Lansing, où ils arrivèrent en janvier 1948. Là, frère Tohara enseigna le japonais à vingt-deux élèves de la onzième classe de l’École de Galaad, qui avaient été choisis parmi un groupe de soixante-dix volontaires pour servir au Japon. Elsie Tanigawa l’aida dans sa tâche.

La Société fournit à frère Haslett une jeep rouge avec laquelle Mabel et lui traversèrent les États-Unis, en automne 1948. Ils s’embarquèrent pour Hawaii, où Mabel dut rester quelque temps tandis que Donald voguait vers le Japon. Il arriva à Tokyo au début de janvier 1949. Il était impossible de trouver une chambre d’hôtel ; les services de l’armée américaine coopérèrent aimablement en autorisant frère Haslett à demeurer pendant un mois à l’hôtel Dai-Ichi, quartier général de MacArthur. Chaque jour, Donald parcourait Tokyo en jeep, cherchant dans les ruines un local qui conviendrait à l’installation d’une filiale. Les soldats lui disaient qu’il ne réussirait pas. Cependant, après un mois de recherches, il put acheter une grande demeure de style japonais, près de l’Université Keio, à Minato-ku, Tokyo.

En février, alors qu’il faisait froid, frère Haslett campa dans la maison ; pour se chauffer et pour cuisiner, il utilisait un brasero. Les vivres étaient sévèrement rationnés. Frère Haslett devait faire la queue avec les gens du voisinage pour recevoir sa ration de riz et une longue carotte ou quelques feuilles de chou. À ce moment-​là, il prit des dispositions pour rencontrer quelques-uns des disciples de Junzo Akashi. La première réunion fut cordiale, mais lors de la seconde, les membres du groupe finirent par se mettre en colère et se montrèrent violemment opposés à la Société. Afin de sortir de prison, la plupart d’entre eux avaient signé un document par lequel ils renonçaient à Jéhovah et à son service. Il était évident qu’ils avaient totalement perdu l’esprit de Jéhovah.

C’est alors que Mabel Haslett reçut son visa pour entrer au Japon. Elle y arriva par avion le 7 mars 1949. Dans la grande maison vide, frère et sœur Haslett s’habituèrent à dormir sur des matelas futon, sous une moustiquaire et en compagnie de quelques rats. Plus tard, en mars, Jerry et Hoshi Toma arrivèrent par bateau. La famille Tohara et Elsie Tanigawa les rejoignirent en août.

À partir du mois de mars, ils commencèrent à répandre le message du Royaume dans les environs immédiats de la filiale de Tokyo. Cependant, ils ne disposaient pratiquement pas de publications et même les Hawaiiens devaient s’adapter au japonais parlé à Tokyo. Les missionnaires remettaient à leur interlocuteur une feuille de papier polycopiée intitulée “Ce que la Bible enseigne clairement”, en lui disant simplement “veuillez lire”. Sœur Haslett se souvient très bien de sa première nouvelle visite. Une dame âgée lui avait demandé des exemplaires supplémentaires de la feuille polycopiée. “Elle s’intéresse certainement à notre message”, pensait sœur Haslett. Mais lorsqu’elle revint voir cette dame, elle constata que celle-ci avait posé les feuilles renfermant le précieux message sur certaines plantes du jardin, croyant que ces “papiers saints” faciliteraient la croissance des plantes.

Un jour, deux instituteurs japonais se présentèrent à la filiale et demandèrent à frère Haslett s’il accepterait d’enseigner la Bible aux enfants de leur école. Ainsi, tous les samedis matin, les Haslett se rendaient en jeep à l’école secondaire Toride. Donald enseignait les élèves les plus âgés et Mabel s’occupait des plus jeunes. Leur manuel d’étude était La Harpe de Dieu en japonais, et ils en avaient également un exemplaire en anglais. Par la suite, ces leçons cessèrent ; mais plus de vingt ans après, Mabel eut l’agréable surprise d’être abordée à la Salle du Royaume de la filiale de Tokyo par une mère et son enfant. Celle-ci tenait à la main une photographie représentant les enfants de l’école Toride ; Mabel possédait la même dans son propre album. Cette maman figurait sur cette photo, et des années plus tard, elle était devenue proclamateur du Royaume. La graine semée il y a si longtemps avait porté du fruit !

À Tokyo, à la fin de l’année de service 1949, sept missionnaires et huit proclamateurs locaux remettaient un rapport d’activité. Mais ce n’était là qu’un commencement. Aujourd’hui, dans ce quartier de Tokyo, proche de la filiale, d’où les missionnaires commencèrent à déployer leur activité, il y a douze congrégations de témoins de Jéhovah. En juillet 1972, ces congrégations comptaient un total de 613 ministres du Royaume, dont 123 pionniers.

Six autres missionnaires arrivèrent à Yokohama le 31 décembre 1949; il s’agissait de Percy et d’Ilma Iszlaub, d’Adrian Thompson, de Lloyd et de Melba Barry et de Lyn Robbins. Les missionnaires étaient alors au nombre de seize, y compris les trois enfants Tohara. Parmi ces missionnaires arrivés en 1949, treize sont toujours dans le service à plein temps au Japon et à Okinawa, et aucun d’eux ne souhaiterait quitter le pays.

L’ŒUVRE MISSIONNAIRE S’ÉTEND À KOBE

Parmi les missionnaires arrivés en octobre, cinq furent désignés pour installer une nouvelle maison de missionnaires à Kobe, à environ 400 kilomètres au sud-ouest de Tokyo. Le gardien des bâtiments militaires appartenant au S. C. A. P. (commandant suprême des puissances alliées) loua à la Société la demeure spacieuse d’un ancien nazi allemand, et plus tard, celle-ci acheta cette belle propriété. Ici, à Tarumi, sur les bords de la mer Intérieure du Japon, les missionnaires se mirent au travail pour nettoyer la propriété ; les Haslett et les Tohara venaient les aider pendant leurs vacances. Depuis la maison, on apercevait des bateaux pittoresques avancer le long de la côte et l’on pouvait contempler des couchers de soleil féeriques sur l’île Awaji. C’était un endroit charmant pour une maison de missionnaires.

Pourtant, pendant plusieurs semaines, il fallut dormir sur le sol en bois. Il fut possible de résoudre en partie ce problème, en coupant les hautes herbes du jardin pour en faire des matelas, et les missionnaires dormaient entièrement habillés. Dans la salle à manger, il y avait une grande cheminée, mais la fumée refusait obstinément d’y monter et se répandait partout. Pendant quelque temps, on cuisina et on se chauffa au moyen d’un brasero japonais, mais cela s’avéra dangereux, car plusieurs missionnaires furent incommodés par l’oxyde de carbone qui s’en dégageait. Ils ont heureusement survécu à cela et à d’autres difficultés.

En ce temps-​là, il n’y avait pas de cours accéléré pour apprendre la langue. Les manuels étaient rares et incomplets. On manquait de publications pour le service du champ, aussi étions-​nous forcés de prêter aux uns et aux autres des chapitres polycopiés de “Que Dieu soit reconnu pour vrai !” en japonais. Pendant quelque temps, il nous fut possible d’avoir certaines publications d’avant-guerre en japonais, y compris le tome II du livre Lumière ; encore fallait-​il réussir à convaincre les gens qu’il n’était pas nécessaire de lire d’abord le premier tome. Rendre témoignage de maison en maison n’était pas chose facile pour les missionnaires — pas plus d’ailleurs que pour les personnes qui les écoutaient.

À l’École de Galaad, on leur avait appris que yoroshii veut dire “bon”, mais on ne leur avait pas dit que dans certaines régions yoroshii-wa équivaut à un “non merci” très net. Aussi, au début insistaient-​ils auprès de ceux qui avaient dit “yoroshii-wa” jusqu’à ce que certains, de guerre lasse, acceptent des publications. À cette époque encore toute proche de la Seconde Guerre mondiale, les gens s’intéressaient beaucoup à tout ce qui touchait le monde occidental, et l’on pouvait commencer des études bibliques dans de nombreux foyers, y compris ceux des personnes qui ne s’intéressaient pas vraiment à la Bible. Plusieurs missionnaires conduisaient plus de trente études bibliques par semaine !

Certaines de ces premières études ont porté de très bons fruits. Melba Barry relate que lors de sa première matinée de service au Japon, elle fut aimablement reçue par une dame, Miyo Takagi, dans l’une des toutes premières maisons qu’elle visita. Le fait que des missionnaires aient traversé un champ boueux pour arriver jusqu’à elle l’avait favorablement impressionnée. Pour les nouvelles visites, Melba et elle se servaient d’un dictionnaire japonais-​anglais, et finalement une excellente étude fut établie. Jusqu’à ce jour, Miyo Takagi et sa voisine, qui s’est jointe à l’étude, servent comme ministres du Royaume ; l’une d’elles a passé plus de dix ans dans le service de pionnier ordinaire.

La prédication au Japon pose des problèmes inhabituels. Dans les études bibliques, le missionnaire doit — autant que possible — prendre l’habitude de s’asseoir sur le sol, les jambes croisées, devant une table basse. Étant donné qu’il lui faut laisser ses chaussures sur le seuil de la maison avant d’entrer, il veillera à ce que ses chaussettes soient toujours en bon état ! Un jour qu’il s’apprêtait à quitter la maison où il venait de conduire une étude biblique, l’un des missionnaires, Lloyd Barry, eut la désagréable surprise de constater que ses chaussures avaient été volées !

Peu après l’arrivée des missionnaires à Kobe, on organisa la première assemblée théocratique au Japon. À quel endroit ? Dans la maison de missionnaires, à Tarumi, Kobe. Grâce à ses pièces spacieuses, on logea plus de quarante personnes. Le terrain (plus de 4 000 mètres carrés) et le portique furent utilisés pour la cuisine et la cafétéria, tandis que la grande salle de séjour avait été transformée en salle d’assemblée. En cette occasion, Donald Haslett baptisa trois nouveaux proclamateurs dans un établissement de bains situé à proximité. Les Japonais prennent leur bain très chaud ; aussi à peine frère Haslett était-​il entré dans l’eau qu’il en ressortait précipitamment, les jambes rouges comme des homards. Il fallut verser de nombreux seaux d’eau froide avant qu’il puisse y retourner pour baptiser les nouveaux frères.

Bien que l’assemblée ait été organisée du 30 décembre au 1er janvier, la période de l’année la plus chargée pour les Japonais, celle-ci fut un succès. Le dimanche 1er janvier 1950, 101 personnes étaient présentes au discours public donné à la salle de l’école de Tarumi, à Kobe. Certains de ceux qui ont assisté à cette première assemblée n’ont cessé de progresser jusqu’à ce jour. Il y avait parmi eux une jeune écolière de Tokyo, qui sert maintenant à la filiale du Japon sous le nom de Madame Yasuko Miura, femme de Tsutomu Miura, dont nous avons parlé précédemment.

En février 1950, les cinq missionnaires australiens de Kobe reçurent l’aide de cinq autres sœurs venues de Nouvelle-Zélande et d’Australie, à savoir Lois Dyer, Molly Heron, Moira Wesley Smith, Grace Bagnall et Nora Stratton. Si jamais on écrivait l’histoire de ce groupe, cela ferait de nombreux volumes. Lois Dyer, originaire d’Australie occidentale, eut des ennuis au début. Elle voulait dire : “Je prêche de maison en maison.” Mais à cause de sa prononciation défectueuse, cela donnait : “Je tousse de maison en maison.” Il se trouve qu’elle était vraiment enrhumée à ce moment-​là.

En raison du problème de la langue, les réunions organisées à Kobe se tinrent exclusivement en anglais pendant quelques mois. Mais pour la Commémoration, le 1er avril 1950, une personne qui s’intéressait à la vérité servit d’interprète. On invita donc tout le monde à y assister. Cent quatre-vingts personnes étaient présentes ! Nous ne nous attendions pas à pareille assistance. Les trois salles et le vestibule de la maison des missionnaires étaient occupés et certains durent rester dehors, écoutant par les fenêtres ouvertes. Après le discours, on annonça que des dispositions avaient été prises pour le service du champ ; à la surprise des missionnaires, trente-cinq nouveaux se présentaient le lendemain matin pour participer à la prédication. Chaque missionnaire emmena avec lui trois ou quatre compagnons, ce qui fit impression sur ceux à qui ils rendirent témoignage.

Les excellents progrès réalisés à Kobe permirent de former une congrégation dans cette ville, en avril 1950. À la fin de l’année de service, cette congrégation comptait soixante proclamateurs, dont certains servent encore aujourd’hui comme pionniers spéciaux et surveillants de circonscription. La salle de séjour de la maison des missionnaires ne tarda pas à devenir trop petite pour les réunions ; aussi, pendant plusieurs mois, celles-ci eurent lieu devant la maison, sur la vaste pelouse. Les assistants avaient le ciel pour toit, et la brise du large leur apportait une fraîcheur bienfaisante. On dénombra jusqu’à 120 assistants à la réunion de service et plus de vingt élèves masculins se firent inscrire à l’École du ministère théocratique.

Percy Iszlaub, premier surveillant de la congrégation de Kobe, “se battait” courageusement avec la langue. Un de ses discours, qu’aucune personne présente n’oubliera jamais, était basé sur Jean 21:15-17. N’étant pas grammairien, frère Iszlaub tordit légèrement le sens de la déclaration de Jésus à Pierre. Au lieu de dire : “Nourris mes petites brebis”, il dit : “Mange mes petites brebis.” Évidemment, on avait compris !

Quand éclata la guerre de Corée en juin 1950, huit missionnaires qui avaient dû quitter la Corée par avion se présentèrent un jour à la maison de Kobe. Certes, il y avait suffisamment de place pour que la famille de missionnaires s’agrandisse et compte dix-huit membres, ce qui, d’ailleurs, permit de rendre un excellent témoignage dans le territoire de Kobe. Bien qu’une grande partie de la ville ne fût plus que pierres et décombres, par suite des bombardements de la Seconde Guerre mondiale, les missionnaires cherchaient les “brebis” du Seigneur dans les caves, les baraques et les maisons réparées. En août 1950, les seize missionnaires qui étaient encore à Kobe conduisaient 359 études bibliques à domicile.

Ces missionnaires n’ont pas oublié le premier typhon de l’année 1950; ce fut le plus terrible de tous ceux qu’ils ont connus. Le dimanche matin, ils étaient tous sortis dans l’activité de maison en maison. Tout à coup, le vent se mit à gémir de plus en plus fort. Ils décidèrent donc de quitter leurs territoires respectifs pour rentrer à la maison. Certains y arrivèrent, mais d’autres ne rentrèrent qu’à minuit passé, et dans un état lamentable. Une sœur fut bloquée dans un train pendant sept heures, tandis que d’autres s’abritèrent dans des gares à l’épreuve du vent. La tempête arracha plus de quarante tuiles du toit de la maison des missionnaires et fit voler dans les vues des plaques de tôle ondulée provenant d’autres toitures. Elle brisa également les vitres des fenêtres donnant sur l’escalier, et il fallut clouer à la place des planches pour éviter que les trombes d’eau n’inondent la maison. Quel soulagement lorsque la tempête fut passée et que le dernier missionnaire rentra sain et sauf !

Ilma Iszlaub étudiait avec des voisins, un docteur et sa famille. Quand Nora Stratton, l’une des sœurs missionnaires, tomba malade, ce docteur la soigna pendant plus d’une année, jusqu’à sa mort, et ne réclama pas à la Société le paiement des soins médicaux. C’est lui qui, montrant du doigt le phare éclairé jour et nuit que l’on apercevait de la maison des missionnaires, dit un jour : “Cette maison de missionnaires deviendra comme ce phare — une source de lumière spirituelle pour les gens du voisinage.” Comme il avait raison ! Renversant les superstitions bouddhistes, la vérité s’est remarquablement propagée dans la région de Kobe, et l’expansion n’a pas cessé, même après que les missionnaires eurent emménagé dans une maison située plus au centre de leur territoire, en avril 1954. Dans les quartiers proches des maisons de missionnaires d’où l’activité de prédication a débuté, il y a maintenant onze congrégations qui comptaient 730 proclamateurs en juillet 1972, dont 76 pionniers.

DES MISSIONNAIRES S’INSTALLENT À NAGOYA

À partir d’octobre 1950, Don et Earlene Steele, Scott et Alice Counts, Gladys et Grace Gregory, Norrine Miller et Flo Manson, les huit missionnaires qui étaient arrivés de Corée, furent affectés à Nagoya, située à environ cent soixante kilomètres de Kobe. La Société y avait récemment acheté une maison spacieuse typiquement japonaise : sol revêtu de nattes en paille, portes en papier, etc. Pour avoir un peu d’intimité dans les pièces japonaises aux murs en papier, il faut acquérir une certaine philosophie qui consiste à ne pas tenir compte de ceux qui sont tout près ou à faire comme s’ils n’étaient pas là. Les missionnaires mirent du temps à s’adapter, et ils avaient l’habitude de plaisanter au sujet de “la demi-intimité de notre chambre”. Tout comme les premiers missionnaires arrivés au Japon, ceux de Nagoya apprirent la langue au prix de nombreuses difficultés et de fautes commises dans le service du champ.

Les missionnaires de Nagoya constatèrent que l’autorité des parents était encore très puissante au sein de la famille. Il n’était pas rare qu’un homme (ou une femme) âgé de plus de cinquante ans dise que sa mère ou son père ne lui permettait pas d’étudier la Bible. Le père ou la mère en question avait peut-être quatre-vingts on quatre-vingt-dix ans et était atteint de sénilité, mais il n’en continuait pas moins à diriger la famille. Une jeune fille qui se mariait devenait virtuellement l’esclave de sa belle-mère. Une sœur âgée tira parti, avec tact, de cette coutume, en laissant à sa belle-fille les corvées ménagères pour entreprendre le service de pionnier ordinaire, dans lequel elle persévère depuis plus de quinze ans. Par la suite, son mari, son fils et sa belle-fille ont tous accepté la vérité, ce qui a réellement uni la famille.

Gladys Gregory nous parle d’une famille qui habitait tout près de la maison des missionnaires, et avec laquelle elle a étudié la Bible. Pendant la guerre, alors que le mari était soldat, la femme faisait pousser des légumes dans des petites parcelles de jardin près de sa maison. De plus, un bébé attaché dans le dos, et tenant deux autres enfants par la main, elle avait l’habitude de faire des kilomètres à pied dans la campagne pour se procurer du riz. Le visage hâlé, vêtue d’un kimono, les cheveux attachés à la mode japonaise, elle paraissait plus que son âge, et pourtant, elle n’avait que trente ans. Quand les missionnaires visitèrent cette famille pour la première fois, celle-ci était prête à les écouter, et tous ses membres se réunirent pour étudier. Ils furent parmi les premiers proclamateurs de Nagoya. Sœur Gregory et la mère des trois enfants devinrent inséparables. Sœur Gregory lui enseignait la vérité ; la mère, en retour, lui apprenait le japonais. Au début, on disait de sœur Gregory qu’elle parlait japonais comme son amie, mais par la suite, c’était plutôt l’amie qui parlait avec l’accent étranger de sœur Gregory. Les membres de cette famille avaient été bouddhistes ; toutefois, quand le temple proche de chez eux fut bombardé et que les images s’avérèrent impuissantes à le protéger, ils ont commencé à chercher ailleurs la vérité. Ce sont les missionnaires de la Société qui les ont aidés à la trouver.

Un jour, un jeune homme arriva juste à la fin de la réunion publique, mais un missionnaire prit des dispositions pour étudier avec lui. Aujourd’hui, Eiji Usami est le surveillant de ville de Nagoya, et il imprime de grandes quantités de feuilles d’invitation pour la Société. Un autre missionnaire commença à étudier avec un jeune homme, Isamu Sugiura, qui avait appris l’anglais en suivant des cours donnés à la radio. Il devint l’un des tout premiers proclamateurs de Nagoya. Depuis lors, il a reçu une formation à l’École de Galaad, a servi en qualité de surveillant de circonscription, de district et d’instructeur à l’École du ministère du Royaume, et maintenant il fait partie de la famille du Béthel de Tokyo.

La deuxième assemblée théocratique organisée au Japon eut lieu à Nagoya, en octobre 1950. Cette fois encore, on fit en sorte que la plupart des congressistes soient logés à la maison de missionnaires ; afin de s’assurer quelque confort, certains proclamateurs japonais avaient même apporté leur literie, d’aussi loin que Kobe. On donna à cette assemblée le nom d’assemblée des “patates douces” ; tout le riz disponible ayant été consommé au premier repas, la cafétéria servit des patates douces les deux jours suivants.

Après avoir été utilisée pendant exactement dix ans, la maison de Nagoya fut vendue en août 1960, et les missionnaires s’installèrent dans d’autres maisons. Un excellent témoignage fut rendu à partir de cette maison. Jugez-​en plutôt : dans le territoire où les missionnaires ont commencé à exercer leur activité, il y avait en juillet 1972 dix congrégations comprenant un total de 608 proclamateurs du Royaume, dont 71 pionniers.

LES MISSIONNAIRES S’INSTALLENT DANS LA VILLE INDUSTRIELLE D’OSAKA

Depuis bien longtemps déjà, la ville d’Osaka, située à l’est de Kobe, avait entendu le message biblique. Comme nous l’avons dit plus haut, c’est là qu’en 1928, Jizo Ishii et sa femme avaient été touchés par la vérité. Toutefois, les premiers missionnaires de la Société qui s’installèrent dans cette région eurent un problème à régler. Un groupe d’Osaka, qui se prétendait détenteur de la vérité, assista à la première assemblée tenue à Tarumi, Kobe, pendant la période de la nouvelle année 1950. Mais leur célébration bruyante de la nouvelle année et leur mode de vie attestèrent qu’ils étaient loin de suivre les principes bibliques. Leur “chef” baptisait par aspersion et contre espèces sonnantes et trébuchantes. Quand il devint nécessaire de les exclure, la plupart des membres de ce groupe se dispersèrent chacun de leur côté. On prit des dispositions pour qu’Adrian Thompson, l’un des missionnaires de Kobe, passe plusieurs jours chaque semaine à Osaka pour aider et affermir la petite congrégation de cette ville.

Le 21 mars 1951, cinq sœurs missionnaires de la quinzième classe de Galaad arrivèrent au Japon et se rendirent à Osaka pour y ouvrir une maison de missionnaires. Dans un article leur souhaitant la bienvenue, le journal japonais Asahi les décrivit comme “des anges descendus du ciel au milieu des cerisiers en fleurs”. Grâce à l’excellent effet produit par cet article, les sœurs missionnaires furent submergées de lettres, et des étudiants, des hommes d’affaires et d’autres venaient personnellement les voir pour demander une étude biblique. Sur le soir, des études se tenaient dans pratiquement chaque chambre de la maison des missionnaires. Les gens étaient très pauvres à cette époque, mais leur générosité et leur désir de partager allaient droit au cœur. Ils apportaient des vases et des fleurs dont ils faisaient des bouquets pour la joie des yeux et du cœur des missionnaires. Si, pour quelque raison, ils ne désiraient pas poursuivre leur étude, ils offraient un présent, selon la coutume japonaise. Un jour, un homme vint dire qu’il cessait d’étudier parce que, selon ses propres termes, sa femme “se multipliait” et qu’il devait s’en occuper. D’un grand vase en forme d’urne, il sortit son cadeau d’adieu — une pieuvre vivante, qui étendait furieusement ses tentacules !

Dès leur arrivée à Osaka, une nouvelle sœur japonaise, Natsue Katsuda, se joignit aux missionnaires qui l’encourageaient à entreprendre le service de pionnier. À cette fin, sœur Katsuda vendit son commerce et cela fait maintenant vingt ans qu’elle est pionnier. D’autres témoins anciens dans la vérité ont également persévéré dans le service de pionnier jusqu’à ce jour. Une dizaine de frères qui avaient surmonté les dissensions survenues à Osaka furent rebaptisés (cette fois-​ci par immersion totale et gratuitement), et ils s’attachèrent aux justes principes de la Parole de Jéhovah. L’un d’eux, Otokichi Shiga, est encore surveillant de ville à Osaka, et plusieurs autres sont surveillants de congrégation.

À partir de juin 1951, Shinichi Tohara et sa famille quittèrent Tokyo pour la maison de missionnaires d’Osaka, où frère Tohara devint également responsable de la congrégation. Un excellent travail a été accompli par les missionnaires jusqu’à leur départ d’Osaka, en février 1953, et l’œuvre continue à se développer dans cette ville. Dans la région où les missionnaires ont commencé à exercer leur activité, il y a maintenant dix-huit congrégations, qui comptaient 746 proclamateurs en juillet 1972, dont 132 pionniers.

DANS LA VILLE PORTUAIRE DE YOKOHAMA

Au printemps de 1951, quinze missionnaires anglais et australiens de la seizième classe de Galaad arrivèrent au Japon. Quatre frères célibataires furent affectés à la filiale de Tokyo, et trois couples et cinq sœurs célibataires s’installèrent dans une grande maison de style japonais, que la Société avait achetée à Myorenji, Yokohama, le 1er mai. Là, ces missionnaires rencontrèrent certains problèmes. Pendant sept semaines, le précédent propriétaire continua d’occuper trois des onze chambres. Quand il rentrait de son travail, le soir, les missionnaires le questionnaient, lui demandant, par exemple : “Où pouvons-​nous acheter du riz ?” C’était une question très simple, n’est-​ce pas ? Eh bien, il commençait par appeler sa femme ; celle-ci en discutait avec sa mère. Puis, la mère sortait pour se renseigner auprès d’une voisine. Enfin, deux soirs plus tard, les missionnaires recevaient la réponse : “Il est rationné.” À vrai dire, presque toutes les denrées alimentaires étaient rationnées. Les missionnaires devaient s’adresser à de nombreux bureaux, fournir des photos en trois exemplaires, remplir des demandes, pour obtenir des carnets de tickets donnant droit à certaines denrées telles que le riz, le sucre et le thé.

Au début, toutes les personnes qui s’intéressaient au message venaient à la maison de missionnaires pour étudier. Une sœur conduisait jusqu’à onze études dans la même journée ! Par la suite, les missionnaires s’efforcèrent de sortir de maison en maison le matin, mais au bout de quelques mois, ces onze serviteurs à plein temps rapportaient 300 études bibliques à domicile. En ce temps-​là, les publications étaient peu nombreuses. Pour les études, chaque missionnaire disposait de trois ou quatre feuilles polycopiées des chapitres du livre “Que Dieu soit reconnu pour vrai !” en japonais. Ils échangeaient entre eux ces feuilles à mesure qu’ils abordaient le nouveau sujet dans le cadre de l’étude. Ces feuilles étaient très demandées, aussi ne pouvait-​on pas les prêter aux personnes bien disposées pour qu’elles préparent leur étude.

Gordon Dearn, premier serviteur de la maison de Yokohama, se souvient comme si c’était hier de sa première étude biblique au Japon. L’homme connaissait très peu l’anglais, et frère Dearn très peu le japonais. Ils donnaient davantage l’impression d’étudier le dictionnaire que les feuilles polycopiées.

La congrégation de Yokohama fut formée le 1er mars 1952 et tenait ses réunions à la maison de missionnaires. Très vite, un appel fut lancé pour des pionniers. Un jeune étudiant, Keijiro Eto, vint dire à frère Dearn qu’il désirait quitter son collège pour être pionnier. Mais il avait une jambe paralysée. Frère Dearn lui demanda donc si sa jambe le faisait souffrir. “Un peu”, répondit-​il. Frère Dearn ne pensait pas qu’il pourrait être pionnier, mais le jeune homme “fit un essai”, et il ne tarda pas à être nommé pionnier spécial ainsi que sa mère, qui était veuve, et sa sœur, Yuriko et Hiroko Eto. Cette famille a accompli un remarquable travail en aidant à la formation de nouvelles congrégations dans les villes de Kawasaki, de Yokosuka, de Shizuoka, de Mito et d’Odawara. Plus tard, le frère estropié put servir en qualité de surveillant de circonscription pendant sept ans. Dans les congrégations qu’il visitait, personne ne pouvait prétexter une mauvaise santé pour ne pas sortir dans le champ.

On vendit la maison de Yokohama en septembre 1957, et les missionnaires furent envoyés dans d’autres villes. Dans les territoires proches de cette maison, d’où les missionnaires ont commencé à déployer leur activité, il y a maintenant quatre Salles du Royaume et onze congrégations, qui comptaient 646 proclamateurs en juillet 1972, y compris 135 pionniers.

LE PRÉSIDENT DE LA SOCIÉTÉ WATCH TOWER VISITE LE JAPON

Cette visite eut lieu du 24 avril au 8 mai 1951, et elle marqua un tournant dans l’organisation et le développement de l’œuvre au Japon. Quand frère Knorr arriva à la base aérienne d’Haneda, le mardi soir, il fut salué par un groupe enthousiaste de quarante-cinq missionnaires et d’autres frères venus lui souhaiter la bienvenue. Il était tard, mais il se rendit quand même à la Salle du Royaume de la filiale de Tokyo et, à la grande satisfaction de tous ceux qui étaient présents, il fit un compte rendu de son voyage en Orient. À partir du jeudi 26 avril, débuta la troisième assemblée théocratique organisée au Japon. Elle se tint au Nihonishikai Kaikan, à Kanda, Tokyo, et pendant quatre jours les missionnaires et les frères locaux présentèrent un programme très instructif, composé de discours et de démonstrations. Un des points culminants de l’assemblée fut la publication, le premier soir, de la première édition japonaise de La Tour de Garde. Les 1 000 exemplaires disponibles de ce numéro du 1er mai 1951 furent rapidement enlevés par les assistants, qui désiraient s’en servir dans le ministère pendant l’assemblée. On annonça que 2 000 exemplaires de chaque édition seraient désormais imprimés. Vingt et un ans plus tard, le numéro du 1er mai 1972 de La Tour de Garde en japonais était imprimé à 230 000 exemplaires.

Le dimanche matin de l’assemblée, quatorze nouveaux frères et sœurs furent baptisés. L’après-midi, la foule se pressait au Kyoritsu Kaikan, à Kanda, où devait être donné le discours public ; on compta une assistance de 700 personnes dont 500 au moins nouvellement intéressées à la vérité, qui étaient venues par suite de la grande publicité faite autour de cette réunion. De même que tous ses autres discours, le discours public de frère Knorr fut très bien traduit par Kameichi Hanaoka, un frère hawaiien qui était venu au Japon quoique déjà âgé, pour aider à y répandre la vérité. Frère Hanaoka continua par la suite à servir au Japon ; il travailla quelque temps à la filiale, puis il fut pionnier spécial et pionnier ordinaire pendant de nombreuses années, participant à la formation de beaucoup de nouvelles congrégations, et ceci jusqu’à sa mort survenue le 22 avril 1971, à l’âge de quatre-vingt-deux ans.

Après l’assemblée, frère Knorr visita rapidement la maison de missionnaires qu’abrite la filiale de Tokyo, ainsi que les quatre autres maisons de missionnaires du Japon. Il put ainsi se rendre compte des conditions de vie et de travail des Japonais, après la guerre. Entre-temps, son secrétaire, Milton Henschel, était également arrivé au Japon, après une visite prolongée à Taïwan, et il accompagna frère Knorr dans son voyage.

Au cours des deux semaines que frère Knorr passa au Japon, il organisa efficacement l’œuvre dans ce pays. Plus que jamais, les quarante-sept missionnaires étaient déterminés à aller de l’avant dans leur activité. Les quatre réunions publiques organisées rassemblèrent 1 730 personnes, et déjà un nouveau maximum de 260 proclamateurs, y compris les missionnaires, était enregistré en avril. Mais les champs étaient mûrs pour une récolte plus abondante !

ORGANISATION DU SERVICE DE LA CIRCONSCRIPTION

Lors de sa visite au Japon en 1951, frère Knorr nomma Adrian Thompson, l’un des missionnaires de Kobe, surveillant de circonscription. Frère Thompson connaissait bien la langue et il était également qualifié pour l’enseigner aux nouveaux missionnaires.

Voulez-​vous accompagner frère Thompson dans sa circonscription ? Elle s’étend sur 3 000 kilomètres, d’un bout à l’autre du Japon. Visitons d’abord la petite congrégation de Tokyo, qui comprend trente proclamateurs et neuf missionnaires. Certains de ses membres parcourent de grandes distances pour venir à la Salle du Royaume, située au centre de la ville, au Béthel. Citons, par exemple, Joe Kopec, capitaine retraité de la marine marchande américaine, qui habite Chiba, à une heure et demie de train de Tokyo.

De Tokyo, frère Thompson monte ensuite vers le nord, pour se rendre dans la petite ville d’Ishinomaki, près de Sendai, où il a la joie de rencontrer la famille Miura, qui sert fidèlement depuis bien avant la Seconde Guerre mondiale. Puis, nous allons à Wakkanai, à la pointe la plus septentrionale d’Hokkaido, pour visiter l’unique personne manifestant de l’intérêt dans cette grande île. De la plage de Wakkanai, frère Thompson peut apercevoir, très loin à l’horizon, l’île Sakhaline qui appartient à l’Union soviétique. La bonne nouvelle atteindra-​t-​elle un jour la Sibérie ? Et au Japon, le message du Royaume sera-​t-​il proclamé dans tout le pays ? À cette époque, en 1951, à une ou deux exceptions près, les desseins de Jéhovah ne sont proclamés que dans les villes japonaises d’un million d’habitants ou plus.

Le voyage de retour (1 550 kilomètres en train), de Wakkanai à Yokohama, dure deux jours moins une heure. À Yokohama, où il passe deux semaines, frère Thompson donne chaque jour des cours accélérés de japonais aux missionnaires, une heure le matin et une heure le soir, et dans l’intervalle, il participe avec eux au service du champ. Il prend de nouveau la route pour visiter le groupe de missionnaires de Nagoya, où il suit le même programme, puis les congrégations et les maisons de missionnaires d’Osaka et de Kobe.

À Kobe, Keisuke Sato, le premier pionnier japonais d’après-guerre, est dans le service à plein temps depuis août 1950. Par la suite, d’autres entreprennent à leur tour le service de pionnier, y compris Asano Asayama, qui a connu la vérité par les livres du pasteur Russell alors qu’elle était bonne chez une sœur américaine âgée, Maud Koda, pendant la Seconde Guerre mondiale. Plus tard, frère Sato, sœur Asayama, ainsi que d’autres témoins de Kobe, assisteront à l’École de Galaad.

Frère Thompson passe ensuite une journée dans le train pour se rendre de Kobe à Kure, située à l’ouest, près d’Hiroshima, où il reste plusieurs jours pour étudier et prêcher avec Jizo Ishii et sa famille, qui servent fidèlement depuis avant la guerre. De Kure, il prend le bateau pour Beppu, où il arrive quelques heures plus tard. Là, il rend visite à une sœur américaine, femme d’un officier de l’armée d’occupation, qui s’efforce de rendre un excellent témoignage aux autres Américains ainsi qu’aux Japonais — en demandant à sa bonne de lui servir d’interprète. Frère Thompson termine sa tournée par la ville la plus méridionale du Japon, à savoir Kagoshima. Là, il rencontre frère Higashi, qui a connu la vérité avant la Seconde Guerre mondiale. Sa femme, ses cinq jeunes enfants et lui sont heureux de recevoir de plus amples explications sur la Bible, et frère Higashi décide d’ouvrir son foyer pour des réunions.

Frère Thompson n’avait que onze visites à effectuer, mais sa circonscription s’étendait de Wakkanai à Kagoshima. Aujourd’hui, il y a des congrégations florissantes dans ces deux villes extrêmes, et des centaines d’autres à l’intérieur de ce territoire. Par suite de l’accroissement rapide et de la formation de nouvelles congrégations, le nombre des circonscriptions est passé à vingt-cinq et celui des districts à deux, pour l’année de service 1973.

ASSEMBLÉES DE CIRCONSCRIPTION AU JAPON

Entre deux visites du surveillant de circonscription, on organisait des assemblées de circonscription. La première eut lieu en octobre 1951, à Osaka, et la deuxième en avril 1952, à Kobe. Deux autres assemblées eurent encore lieu, l’une réunissant les témoins du nord du Japon et l’autre ceux du sud et de l’ouest. Ces premières assemblées ont laissé un souvenir durable. Les missionnaires étaient loin de posséder la langue, pourtant tout le programme fut présenté en japonais, à la grande joie des nouveaux frères et des personnes bien disposées présentes à chacune de ces assemblées. En 1951, pratiquement toutes les denrées alimentaires étaient soit rationnées soit vendues en petite quantité seulement. Les frères japonais n’étaient pas riches, mais pour l’équivalent d’un franc français ou moins, de bons repas furent servis. Soit dit en passant, à cette époque-​là, les pionniers et les missionnaires ne recevaient pas de tickets de repas gratuits. Les missionnaires apprirent donc à casser un œuf cru sur leur riz du matin, et ils s’habituèrent à boire de la soupe au petit déjeuner et à manger le riz et le poisson avec des baguettes. Ils apprirent également à dormir sur des nattes en paille dans des dortoirs bondés de congressistes japonais.

Tous ceux qui assistèrent à ces premières assemblées s’émerveillent et se réjouissent en voyant l’augmentation du nombre des assistants à notre époque. Lors de l’assemblée de circonscription organisée pour tout le Japon à Kobe, au printemps 1952, il n’y eut que 410 personnes et 11 baptêmes ; en revanche, les vingt-cinq assemblées de circonscription qui eurent lieu de mars à juin 1972 réunirent 22 286 personnes, et il y eut 921 baptêmes. Indéniablement, Jéhovah a béni les assemblées de circonscription et les visites des surveillants itinérants ! Ceux qui ont été les premiers à participer à cette activité au Japon sont très heureux de voir la prospérité actuelle.

L’ŒUVRE DU ROYAUME SE DÉVELOPPE À OKINAWA

C’est après la Seconde Guerre mondiale que les habitants d’Okinawa commencèrent à entendre parler de la vérité, grâce à un groupe de frères philippins venus travailler sur l’île dans les services administratifs américains. C’était en 1950. La première personne d’Okinawa qui accepta la vérité fut Yoshiko Higa, qui sert maintenant comme pionnier spécial à Kyushu, au Japon. Comme elle ne connaissait pas l’anglais et que les frères philippins n’avaient pas appris le japonais, ils l’enseignaient en lui faisant lire une série de textes bibliques se rapportant à un thème bien défini. Pendant la guerre, sœur Higa ainsi que de nombreux autres habitants d’Okinawa s’étaient abrités dans les grands caveaux funéraires que l’on trouve un peu partout sur les collines. La vue de ces os humains l’avait amenée à la conclusion que les morts retournent à la terre et que l’homme n’est pas immortel. Elle accepta donc immédiatement ce que la Bible enseigne au sujet des morts, de la résurrection et de l’espérance du Royaume. Quand elle put lire la seule brochure disponible en japonais à cette époque-​là, La joie pour tous les hommes, son espérance s’affermit encore. Elle ne tarda pas à prêcher de maison en maison, devenant ainsi le premier témoin d’Okinawa.

Étant donné que le clergé local tardait à offrir ses services, la station radiophonique “La voix des Ryu-Kyu” invita sœur Higa à parler régulièrement de la Bible sur les ondes. Au cours de ces émissions radiodiffusées, elle lisait des passages appropriés de La Tour de Garde récemment publiée en japonais, y compris l’article “La voie de Dieu est une voie d’amour”. Ces émissions eurent lieu de novembre 1952 au printemps 1953.

À partir d’avril 1953, Lloyd Barry, surveillant de la filiale du Japon, eut la possibilité de visiter chaque année Okinawa. La première fois il y passa deux jours, durant lesquels il sortit dans le service du champ avec les proclamateurs pour les former. Il présida également les réunions, prononça un discours public en japonais et baptisa deux nouveaux proclamateurs. Il fit aussi deux visites à trois jeunes soldats enfermés à la prison militaire américaine pour la question de la neutralité. L’aumônier du régiment apprécia ces visites. En effet, ces trois jeunes gens se figuraient que prendre position pour la vérité signifiait refuser toute coopération avec leurs supérieurs ; de plus, ils chantaient des cantiques du Royaume à tue-tête, jour et nuit. Quand on leur expliqua à l’aide de la Bible ce qu’est exactement la position de neutralité, et quelle doit être la conduite du chrétien, ils changèrent immédiatement d’attitude, au grand soulagement des autorités. Peu de temps après, ils furent renvoyés aux États-Unis.

Sœur Higa devint pionnier en mai 1954; très vite, elle s’aperçut qu’elle “pouvait y arriver” — le premier mois de son service, elle rapporta 175 heures, 260 nouvelles visites et 15 études bibliques. La plupart de ses premières études étaient à Shuri, l’ancienne capitale d’Okinawa ; son activité causait du tort à l’Église de Shuri, au point que de nombreux membres la quittaient pour devenir témoins de Jéhovah. Certains d’entre eux furent baptisés à l’occasion de la première assemblée de circonscription tenue à Okinawa, en janvier 1955, et d’autres devinrent pionniers.

En 1963, Chukichi Une, surveillant de circonscription natif d’Okinawa, fut invité à l’École de Galaad. Lorsqu’il revint en 1964, il prit des dispositions pour construire la première Salle du Royaume d’Okinawa, à Naha. L’œuvre ne cessa de progresser, si bien qu’au cours de l’année de service 1965, 234 proclamateurs furent actifs dans le champ, y compris 37 pionniers en moyenne. Okinawa était trop éloignée du Japon pour que celui-ci continuât de diriger l’œuvre dans cette île ; aussi, à partir du 1er janvier 1966, une filiale séparée fut créée à Okinawa. La famille Tohara quitta le Japon pour Okinawa, Shinichi Tohara étant nommé surveillant de la filiale.

LE NOMBRE DES MAISONS DE MISSIONNAIRES AUGMENTE AU JAPON — KYOTO

Avec l’arrivée de sept autres missionnaires en avril 1952, une nouvelle maison de missionnaires fut ouverte à Kyoto, près de l’Université “chrétienne” Doshisha. Cette maison a servi efficacement les intérêts du Royaume pendant cinq ans et demi. Au début, il n’y avait que quatre proclamateurs à Kyoto. Comme les missionnaires n’avaient pas étudié le japonais à Galaad, ils durent l’apprendre par eux-​mêmes. Avec courage, ils se mettaient tous ensemble au travail chaque jour, avant et après le service du champ.

Kyoto, gardienne des traditions japonaises, s’enorgueillit de centaines de temples, de bouddhas et de déesses de la miséricorde. Rien d’étonnant à ce que certains habitants âgés aient manifesté une vive hostilité à l’égard de ces “étrangers”. La patience du missionnaire était mise à l’épreuve quand, tandis qu’il rendait témoignage à un jeune homme qui écoutait attentivement, la grand-mère on le grand-père survenait et le chassait d’un geste, sans même lui adresser la parole.

Cependant, ceux qui acceptaient d’étudier se montraient hospitaliers à l’égard des missionnaires, leur offrant des friandises locales. Un missionnaire, récemment arrivé, remarqua que lorsqu’il remerciait courtoisement son hôte pour ses excellentes friandises, celui-ci continuait de lui en donner. Puisqu’il ne savait pas comment refuser poliment en japonais, il était obligé de manger ce qu’on lui offrait. Inutile de préciser que ce problème fut soulevé lors de l’étude de la langue en commun. Au début, les missionnaires trouvaient étrange de s’asseoir sur le sol pour les études bibliques et les réunions, mais ils constatèrent que c’était une bonne façon de garder les pieds au chaud pendant l’hiver. Dès leur arrivée, les missionnaires organisèrent les réunions dans leur maison ; celles-ci se faisaient en japonais, bien que le missionnaire présidant l’étude ne connaissait pas cette langue. Entre autres difficultés du début, il dut apprendre à interrompre le lecteur de La Tour de Garde à la fin de chaque paragraphe. Quand le nombre des assistants augmenta, les réunions eurent lieu non plus à la maison des missionnaires, mais dans une salle à l’étage située au-dessus du marché local, et plus tard dans un endroit plus approprié. Elisabeth Taylor, l’une des premières sœurs missionnaires de Kyoto, qui sert maintenant à Tokyo, se souvient d’avoir étudié avec une personne qui fréquentait l’église, et qui est venue à une réunion par curiosité. Depuis lors, elle n’en a pas manqué une seule. Quelle joie pour sœur Taylor de la voir devenir proclamateur, puis pionnier ! Elle a également aidé toute sa famille — son mari et ses trois enfants, à devenir témoins ; deux de ses filles sont maintenant pionniers spéciaux.

Peu de temps avant que les missionnaires ne quittent Kyoto pour d’autres territoires, l’un d’eux, Shozo Mima, étudia avec un ancien soldat de l’armée impériale. À cette époque, il était cloué au lit et n’avait jamais entendu parler de la Bible. Maintenant, il est au mieux de sa forme physique et spirituelle, et il persévère dans le service de pionnier ordinaire depuis plus de douze ans. Sa femme est également pionnier ordinaire, et lui est surveillant de ville à Kyoto. Dans cette région, où les missionnaires ont commencé à exercer leur activité alors qu’il n’y avait que quatre proclamateurs locaux (dont trois sont maintenant pionniers ordinaires), il y a aujourd’hui huit congrégations, qui totalisaient 452 proclamateurs en juillet 1972, dont 80 pionniers.

EXPANSION AU NORD — SENDAI

En octobre 1952, Don et Mabel Haslett se rendirent à Sendai pour y ouvrir la première maison de missionnaires dans une ville de moins d’un million d’habitants, mais qui en compte quand même plus de 500 000. Quand la maison de missionnaires d’Osaka fut fermée, Shinichi Tohara et sa famille s’installèrent également à Sendai, et ces anciens Hawaiiens s’acclimatèrent aux hivers plus froids du nord. Par la suite, des sœurs missionnaires originaires d’Hawaii et du Canada les rejoignirent. La maison de missionnaires de Sendai a servi efficacement pendant six ans et demi.

L’une des missionnaires canadiennes, Margaret Pastor, se souvient d’être arrivée à Sendai juste à temps pour assister à une assemblée. Ses compagnes et elle ne connaissaient pas cinq mots de japonais, mais quelqu’un leur avait imprimé de petits insignes annonçant l’assemblée et portant le nom et la congrégation du délégué. Elles ne comprenaient pas ce qui était écrit sur leurs insignes, mais les proclamateurs de Sendai, eux, comprenaient ; aussi, leur expliquaient-​ils par gestes que leurs insignes portaient le nom de la même congrégation. C’est ainsi que les missionnaires firent connaissance avec leur nouvelle congrégation.

Quand les missionnaires quittèrent Sendai, les proclamateurs locaux étaient suffisamment nombreux pour suivre l’intérêt suscité dans les études. Aujourd’hui, dans le territoire visité à l’origine par les missionnaires de Sendai, il y a trois congrégations.

LE PRÉSIDENT DE LA SOCIÉTÉ WATCH TOWER VISITE DE NOUVEAU LE JAPON

Accompagné de Don Adams, frère Knorr visita pour la deuxième fois le Japon du 21 au 27 avril 1956. Bien qu’il arrivât à une heure dix du matin, une vingtaine de missionnaires étaient venus l’accueillir à l’aéroport. On en profita pour organiser une assemblée du 21 au 23 avril, qui se tint dans la belle salle Nakano-Ku Kokaido, située dans la partie ouest de Tokyo. Ce territoire était pratiquement vierge, aussi un excellent témoignage fut-​il rendu au moyen de 200 000 feuilles d’invitation, de 2 500 affiches et de 20 000 exemplaires d’un numéro spécial de Réveillez-vous ! en japonais (ce périodique ayant reçu un très bon accueil depuis sa parution en janvier 1956), sans oublier la recherche de chambres de maison en maison. Les journaux nous firent également une excellente publicité, annonçant l’assemblée et la visite de frère Knorr.

Le samedi après-midi 21 avril, 425 personnes écoutèrent avec joie le discours de frère Knorr intitulé “Les chrétiens doivent être heureux”. Bien que la majorité des 567 proclamateurs du Japon fût présente, les assistants semblaient perdus dans cette grande salle. Quelle joie de voir 964 personnes écouter attentivement le discours public “Quand tous les hommes seront unis sous l’autorité du Créateur” ! Onze ans plus tard, en avril 1967, une seule des quatorze circonscriptions tint son assemblée dans cette même salle et réunit une assistance de 814 personnes au discours public. L’œuvre ne s’est-​elle pas merveilleusement développée au Japon ?

Le séjour de frère Knorr fut marqué par la visite qu’il effectua à la suite d’un témoignage qu’il avait rendu à 19 000 kilomètres de là, alors qu’il volait au-dessus de l’Atlantique. Dans l’avion, frère Knorr était assis à côté de Monsieur Ohama, président de l’Université Waseda de Tokyo qui compte 25 000 étudiants. Quand frère Knorr lui parla de l’œuvre accomplie par les témoins de Jéhovah, le président Ohama l’invita à s’adresser aux professeurs et aux élèves de l’Université Waseda, lors de son prochain séjour à Tokyo. Des dispositions furent donc prises, et le mercredi après-midi 25 avril, avec l’aide d’un interprète, frère Knorr prononça un discours devant un auditoire attentif de 386 professeurs et élèves, réunis dans la salle de conférence de l’université. Par la suite, les professeurs reçurent frère Knorr et son groupe pour le thé, et lui posèrent de nombreuses questions, prouvant par là que son discours les avait beaucoup frappés.

Il aurait fallu une multitude de proclamateurs du Royaume pour que Tokyo, la plus grande ville du monde, avec une population de plus de 11 475 000 habitants, soit entièrement visitée. Lors du passage de frère Knorr en 1956, il n’y avait que 111 proclamateurs dans la ville, y compris seize missionnaires et pionniers, répartis dans trois congrégations. Comment ce vaste territoire pourrait-​il recevoir un témoignage complet ?

UNE PLUS GRANDE EXPANSION À TOKYO

En 1954, Don Haslett avait ouvert une nouvelle maison de missionnaires près de la gare d’Iidabashi, dans le quartier Chiyoda-Ku de Tokyo. Les missionnaires récemment arrivés et envoyés dans ce quartier rencontrèrent les problèmes linguistiques habituels. Il n’y avait personne pour les enseigner et aucun proclamateur japonais n’habitait dans cette partie de la ville. C’est seulement grâce à l’aide de l’esprit de Jéhovah qu’ils purent commencer des études en dépit de leur japonais hésitant, et certaines de ces personnes se mirent à assister aux réunions tenues dans la maison de missionnaires. Par la suite, ces missionnaires fondèrent la dix-septième congrégation du Japon. Rien que dans la ville de Tokyo, il y a maintenant trente-trois congrégations.

En 1954, Don et Mabel Haslett commencèrent à déployer leur activité à partir de cette maison, et ceci jusqu’à la mort de frère Haslett, survenue le 20 février 1966. Il s’occupa personnellement de la construction de la première Salle du Royaume édifiée au Japon, en dehors de celles du Béthel et des maisons de missionnaires. Il s’agit de la Salle du Royaume de Shinjuku, à Tokyo, qu’utilise également la congrégation d’Ichigaya (Tokyo), et qui vient d’être agrandie en raison de l’accroissement. D’autres congrégations ont suivi cet exemple, et de belles Salles du Royaume ont été construites dans la région de Tokyo, notamment à Shibuya, à Kugahara, à Mitaka, à Kamata, à Okusawa, à Omori, à Katsushika et à Asagaya.

L’une des premières sœurs missionnaires de la maison de Chiyoda, Adeline Nako, rapporte que les missionnaires eurent à surmonter le problème du culte des ancêtres, qui occupe une très grande place dans la vie des Japonais. Un jour, elle rencontra une femme qui croyait pouvoir apaiser les dieux ancestraux en mortifiant sa chair ; aussi se levait-​elle chaque matin à quatre ou cinq heures, même en plein cœur de l’hiver, pour se verser des seaux d’eau froide sur le corps. Après la mort de son beau-père, tous les matins elle offrait du riz et du thé devant son autel, avant même de servir son mari et ses enfants ; cela provoqua d’ailleurs une division dans la famille. Mais en étudiant avec sœur Nako, elle apprit qu’elle devait servir les vivants et non les morts. Elle détruisit donc l’autel, et la famille fut unie grâce à la Bible. Le mari est maintenant surveillant-président ; sa femme et lui ont souvent été pionniers temporaires. Leur fille a été pionnier spécial pendant dix ans et depuis son mariage, elle accompagne son mari dans l’activité de la circonscription.

Lillian Samson, la compagne d’Adeline, nous parle d’une étude biblique qu’elle conduisait dans un magasin où Takashi Abe, un jeune homme de vingt ans, faisait des livraisons. Intrigué, il se renseigna au sujet de cette étude. Bientôt, il étudiait à son tour, et fit de remarquables progrès. Il prit un travail moins bien rémunéré afin de pouvoir assister aux réunions, ce qui lui valut d’être désavoué par sa famille. Mais un frère qui avait remarqué son intégrité lui offrit un travail à mi-temps, ce qui lui permit d’être pionnier. Depuis lors, il n’a jamais regardé en arrière ; aujourd’hui, après douze ans d’expérience dans le service, il sert comme surveillant de district, en compagnie de sa femme.

Beaucoup de ceux qui ont connu la vérité par l’entremise des Haslett et des autres missionnaires de la maison de Chiyoda sont devenus pionniers. Par la suite, certains ont servi au Béthel de Tokyo. La première congrégation établie dans ce territoire a été scindée à plusieurs reprises, si bien qu’aujourd’hui, dans le territoire visité à l’origine par les missionnaires de Chiyoda, il y a neuf congrégations.

À la suite de la visite de frère Knorr et de l’assemblée très réussie de Nakano, Tokyo, le président prit des dispositions en vue de l’achat d’une nouvelle maison dans cette région. Le 1er octobre 1956, deux missionnaires résolus, Jerry et Yoshi Toma, s’installèrent dans la maison de Nakano, et six jours plus tard, huit nouveaux missionnaires les rejoignaient. En attendant l’arrivée de leurs meubles, ils durent se contenter de simples planches et de matelas. Bientôt, ils étaient tous très occupés dans le service du champ, la présence des Toma étant pour eux une source d’encouragement. Dans quelque territoire que ce fût, l’arrivée de ce couple semblait être le signal d’une grande expansion. Il n’en alla pas autrement à Nakano. Une fois la maison aménagée, un petit groupe seulement s’y réunit, tandis que les autres missionnaires avaient une heure de trajet pour se rendre aux réunions, dans la congrégation de Shibuya, à Tokyo. Mais en l’espace de seize ans, quinze congrégations comptant plus de 890 proclamateurs, ont été formées à partir de ce petit groupe.

Quatre ans après la visite de frère Knorr, Milton Henschel visita la filiale du Japon en qualité de surveillant de zone, et une assemblée très réussie eut lieu du 7 au 10 avril 1960, à Setagaya Kuminkaikan, dans un autre quartier de Tokyo qui n’avait pratiquement pas été visité. L’assistance au discours public s’éleva à 1 717 personnes. Ce même dimanche soir, frère Henschel prononça le discours de la Commémoration devant 1 397 personnes. Pour la première fois, un très grand témoignage avait été rendu dans le quartier de Setagaya, ce qui provoqua une augmentation du nombre des nouvelles visites. La Société acheta une autre maison à Setagaya, et jusqu’à ce jour, les six missionnaires qui l’habitent exercent leur activité dans ce territoire.

EXPANSION DANS D’AUTRES RÉGIONS DU JAPON

De 1949 à 1957, on s’était essentiellement efforcé d’établir l’œuvre du Royaume dans les grandes villes de Honshu, principale île du Japon. Mais le message devait être prêché dans d’autres régions. En 1957, la Société vendit les grandes maisons de Yokohama et de Kyoto, et les missionnaires furent répartis dans des maisons plus petites, situées dans d’autres villes. La même année, la Société loua de nouvelles maisons à Hiroshima (dans le Honshu occidental), à Sapporo (capitale de l’île septentrionale d’Hokkaido), à Fukuoka, à Kumamoto, à Kagoshima et à Sasebo (toutes ces villes se trouvant dans l’île méridionale de Kyushu). À cette époque-​là, soixante-deux missionnaires servaient au Japon, soit dans les douze maisons de missionnaires, soit dans l’activité de circonscription et de district ou au Béthel de Tokyo.

Comment le message du Royaume serait-​il accepté à Hiroshima, ville rendue tristement célèbre par l’explosion de la première bombe atomique ? Quand les missionnaires commencèrent à y prêcher en janvier 1957, il y avait déjà un petit groupe de six proclamateurs, représentant le fruit de l’activité déployée pendant six mois par des pionniers spéciaux qui avaient précédé les missionnaires dans ce territoire. Tous les six sont toujours aussi zélés et actifs. L’un d’eux peut même décrire de façon saisissante la dévastation causée par la bombe atomique.

Mais les victimes de l’explosion de la bombe n’auraient-​elles pas des préjugés contre le message présenté par des missionnaires étrangers ? L’une de ces missionnaires, Audrey Hyde, qui servit à Hiroshima pendant six ans et dix mois, se souvient de n’avoir rencontré durant cette période que quelques personnes qui l’éconduisaient d’un simple geste de la main — la façon japonaise de dire : “Allez-​vous-​en !” Les missionnaires habitaient d’ailleurs une maison typiquement japonaise telle que les gens de la classe moyenne les construisaient avant la guerre. Bien qu’elle se trouvât suffisamment éloignée du lieu de l’explosion, ce qui lui évita de prendre feu, sous l’effet du choc, la maison s’était penchée de côté.

À cette époque-​là, les commodités modernes, telles que les toilettes avec chasse d’eau, étaient pratiquement inconnues à Hiroshima. Des tombereaux, qui remplaçaient les égouts et répandaient une odeur caractéristique, passaient dans les rues. Des hommes transportaient la “marchandise” de la maison au tombereau, dans de grands seaux en bois, suspendus aux deux extrémités d’une tige de bambou posée sur l’épaule. On les appelait les “porteurs de miel”. Une des premières personnes qui étudia avec les missionnaires était un “porteur de miel”. C’était un homme coléreux, qui avait la réputation d’être buveur, batailleur et joueur. C’est en s’opposant violemment à ce que sa femme étudie, qu’il s’intéressa au message. Très vite, de grands changements s’opérèrent dans sa vie, et il étonna ses amis quand il abandonna ses anciennes habitudes. Par la suite, il revêtit la personnalité chrétienne, et il est maintenant l’un des surveillants d’une congrégation de témoins de Jéhovah.

À Hiroshima, il n’est pas difficile de trouver des oreilles attentives lorsqu’on parle de l’ordre nouveau paisible. Partout dans la ville, on trouve le mot “paix”. La nouvelle route, large de 100 mètres, qui traverse Hiroshima d’un bout à l’autre est appelée Route de la paix. Le musée de la bombe atomique est situé dans le Parc de la paix et tout près se trouve le nouveau Pont de la paix. Chaque année, le 6 août, jour anniversaire de la “bombe”, des agitateurs militant pour la “paix” viennent à Hiroshima du monde entier, mais ils n’accomplissent rien, en raison de leurs désaccords et de leur désunion. Les missionnaires se servaient souvent de cet exemple pour prouver que les efforts de l’homme en vue d’apporter la paix sont vains. Ils ont maintenant quitté Hiroshima pour d’autres champs fertiles, mais ils ont laissé derrière eux trois congrégations prospères.

Après avoir vendu la maison de missionnaires de Yokohama, la Société en acheta une autre à Sapporo, située au nord, dans l’île glaciale d’Hokkaido. Cette maison a été le centre de l’activité missionnaire de septembre 1957 à mars 1971, où elle fut vendue. Trois couples de missionnaires furent les premiers à s’y installer. L’un d’eux, Douglas Beavor, rapporte que la prédication dans cette région en hiver était pour eux quelque chose de nouveau. La neige s’amoncelait dans les ruelles étroites, et pour tout arranger, les gens faisaient tomber celle qui s’était accumulée sur leur toit fragile, qui risquait de s’effondrer. Quand les missionnaires empruntaient ces ruelles, il arrivait souvent que le chemin soit au niveau du toit des maisons sans étage. Pour entrer dans une demeure, il fallait descendre des marches verglacées taillées dans la neige gelée. Ce n’est qu’après de nombreuses chutes qu’ils apprirent à garder leur équilibre dans de telles conditions. Mais les gens étaient aimables et les invitaient à entrer chez eux. Ils se souviennent d’avoir conduit de nombreuses études autour d’un fourneau à charbon qui ronflait.

Un jour qu’il neigeait, frère Beavor frappa à la porte d’une petite maison ne comprenant qu’une seule pièce. Un petit homme âgé se présenta à la porte. Il était veuf et vivait seul. Son travail consistait à soigner les gens au moyen de l’acupuncture et du moxa. Les affaires n’étaient pas brillantes et il passait le plus clair de son temps à attendre des clients. Il accepta d’étudier, et dès le début, qu’il neigeât abondamment on qu’il fît très froid, il ne manquait aucune réunion. Il était timide et effacé, mais il fit d’excellents progrès. Frère Beavor se rappelle sa première allocution d’élève à l’École du ministère théocratique. Ses notes tremblaient comme des feuilles au vent, et les assistants pouvaient voir son visage ruisseler de sueur. Il réussit néanmoins à présenter son sujet. Par la suite, il entreprit le service de pionnier ordinaire et devint surveillant aux études bibliques. Bien que souvent absent de chez lui en raison du service du champ, il constata que de plus en plus de gens venaient le consulter pour suivre le traitement hari (aiguille).

En septembre 1959, une assemblée de circonscription fut organisée pour la première fois à Hokkaido. Les sessions se tenaient dans la maison d’une sœur, et la maison de missionnaires, située non loin de là, était utilisée pour la cafétéria. On loua une salle pour la réunion publique, et tous se réjouirent de voir une assistance de 75 personnes. À l’assemblée de circonscription de mai 1971, tenue dans la ville isolée d’Obihiro, au centre d’Hokkaido, 761 personnes assistèrent au discours public. Deux circonscriptions ont récemment été formées à Hokkaido. De la congrégation de Sapporo, où se trouvait la maison de missionnaires, sont sorties trois autres congrégations.

Parlons maintenant de l’île Kyushu, au sud. Bien que les habitants de cette région soient profondément attachés au bouddhisme et aux lois anciennes régissant la famille, les quatre premiers missionnaires envoyés à Fukuoka eurent surtout à surmonter l’opposition suscitée par les Églises se disant chrétiennes.

Un meurtrier condamné et emprisonné à Fukuoka écrivit à la Société, qui prit des dispositions pour que les missionnaires lui rendent visite. Frère Iszlaub étudia avec lui ; un si grand changement se produisit dans la conduite du prisonnier, que le directeur de la prison ne tarda pas à permettre que l’étude se tienne dans une pièce attenante à son bureau, où il n’était pas nécessaire de parler à travers un grillage. Cet homme fut ensuite baptisé dans la prison. Il apprit l’écriture braille afin de pouvoir préparer des brochures en japonais pour les aveugles. Il participa également à l’œuvre du Royaume en écrivant des lettres aux personnes bien disposées et aux proclamateurs qui avaient besoin d’encouragement. Frère Nakata étudia sérieusement et s’affermit spirituellement en vue du jour où il devrait payer pour son crime en donnant “vie pour vie”.

Ce jour survint le 10 juin 1959. À la demande du condamné, le directeur de la prison fit venir frère Iszlaub sur les lieux de l’exécution. Frère Nakata le salua chaleureusement et lui dit : “Aujourd’hui, j’ai pleinement confiance en Jéhovah ainsi que dans le sacrifice rédempteur et l’espérance de la résurrection. De ma vie, je ne me suis jamais senti aussi fort.” En fait, frère Iszlaub avait l’impression que des deux, c’était lui le plus faible. Ils chantèrent ensemble un cantique du Royaume, puis ils lurent la Bible et prièrent une dernière fois, rendant ainsi un excellent témoignage aux douze fonctionnaires présents. Après avoir demandé de transmettre son amour à l’organisation de Jéhovah et aux frères de la terre entière, le condamné fut emmené au gibet. Son visage rayonnait de reconnaissance envers Jéhovah qui lui avait donné l’espérance de connaître le nouvel ordre de choses, grâce à la résurrection.

En 1957, les missionnaires se rendirent à Kagoshima, la ville la plus méridionale du Japon. L’un d’eux, Tom Dick, raconte qu’à leur arrivée non seulement les quelques proclamateurs locaux les accueillirent chaleureusement, mais le volcan Sakurajima entra en éruption, leur souhaitant la bienvenue à sa manière. Au Japon, ce sont toujours les femmes qui font les courses. Aussi, les frères missionnaires, qui étaient tous très grands, ne manquaient pas de se faire remarquer quand ils faisaient la queue au marché, d’autant plus que les commerçants comprenaient difficilement leur japonais rudimentaire.

Comme les étrangers étaient très peu nombreux dans cette région, beaucoup d’enfants suivaient les missionnaires de porte en porte. Un jour, une sœur missionnaire, qui était blonde et grande, compta plus de cent enfants à sa suite ; certains la devançaient pour dire aux habitants de la maison suivante qu’ils pourraient prendre deux périodiques, si l’abonnement ne les intéressait pas. Après plus de trois ans d’activité intensive, qui eut pour résultat de porter le nombre des proclamateurs de la congrégation de cinq à vingt, les missionnaires quittèrent Kagoshima ; ce jour-​là, le volcan entra de nouveau en éruption, comme s’il voulait leur dire adieu.

DES ASSEMBLÉES REMARQUABLES TENUES À KYOTO

Le peuple de Jéhovah a tenu de nombreuses assemblées joyeuses dans la ville pittoresque de Kyoto, riche en souvenirs historiques. L’une des premières eut lieu au Minsei Kaikan, du 29 juillet au 1er août 1954; cette seule et unique assemblée de district pour tout le Japon réunit 536 personnes au discours public.

Le vice-président de la Société, Fred W. Franz, visita plusieurs fois le Japon ; la première de ses visites eut lieu au début de 1957. Du 22 au 24 janvier, en plein cœur de l’hiver, les frères japonais se rassemblèrent au Okazaki Kokaido de Kyoto. À chaque session le nombre des assistants augmentait, si bien que 605 personnes étaient présentes au discours public présenté le dimanche soir par le vice-président. Dans la soirée du 30 janvier, frère Franz donna un autre discours aux 446 frères japonais réunis au Shibuya-Ku Kokaido de Tokyo. Les proclamateurs japonais apprécièrent-​ils cette visite spéciale ? De janvier à août, le nombre des proclamateurs actifs dans le champ passa de 645 à 843, ce qui représentait, pour l’année de service 1957, un accroissement sans précédent de 54 pour cent.

L’assemblée “La bonne nouvelle éternelle” tenue à Kyoto, du 21 au 25 août 1963, marqua un autre tournant dans l’expansion de l’œuvre du Royaume au Japon. Kyoto, dont la population dépasse 1 400 000 habitants, compte 1 500 temples et 3 500 sanctuaires. Elle a la réputation d’être l’un des centres culturels du Japon ; c’est d’ailleurs pour cette raison qu’elle ne fut pas bombardée pendant la Seconde Guerre mondiale. Bien que Kyoto soit une ville moderne comprenant de larges rues et des boulevards, elle a néanmoins conservé l’atmosphère du Japon d’antan, avec ses maisons étranges et ses jardins magnifiquement dessinés. C’était une ville idéale pour tenir un congrès réunissant des délégués venus du monde entier. Les visiteurs furent étonnés de voir qu’un grand nombre de croyances et de cérémonies de la chrétienté se retrouvent dans le bouddhisme — telles que la croyance en un enfer de feu ou lieu de supplice, les prières psalmodiées dans une langue incompréhensible, l’utilisation du rosaire, de l’eau bénite, des cierges et le culte des “saints” couronnés d’une auréole. Manifestement, toutes les religions proviennent d’une seule et même source — l’antique Babylone !

À l’époque où se tint cette assemblée, le Japon comptait au maximum 2 884 proclamateurs. Cependant, le premier jour de l’assemblée, 2 221 personnes étaient rassemblées au Kyoto Kaikan, très bel hôtel de ville moderne. Durant les deux premiers jours de l’assemblée, les discours de frère Knorr et de frère Ronald Bible, interprétés en japonais, soulevèrent l’enthousiasme de l’assistance. Le samedi matin, 292 personnes, chiffre jamais atteint jusque-​là, furent baptisées dans la rivière Hozu, les pentes boisées de l’Arashiyama (“montagne de l’orage”) formant une agréable toile de fond. Point culminant de l’assemblée, 3 534 personnes assistèrent au discours public présenté par le surveillant de filiale. Ce chiffre était supérieur au double du maximum atteint lors de la précédente assemblée, organisée à l’occasion de la visite de frère Henschel, exactement quarante mois plus tôt. Mais un plus grand accroissement était encore à venir !

EXPANSION DANS UN PLUS GRAND NOMBRE DE VILLES

Au cours des années 1963-​1969, on accomplit un travail de ‘construction et de plantation’, en vue d’amener les nouveaux à la maturité et d’envoyer des pionniers spéciaux ouvrir de nouveaux territoires. Dans l’intervalle séparant l’assemblée internationale de Kyoto de celle qui eut lieu six ans plus tard, le maximum de proclamateurs passa de 2 884 à 7 889, et le nombre de pionniers de 379 à 1 573. De toute évidence, si l’on voulait que le Japon reçoive un témoignage complet avant que n’éclate la “grande tribulation”, il fallait davantage de pionniers. On mit donc très fortement l’accent sur ce privilège de service. Les frères répondirent à l’appel avec enthousiasme. Tandis que le nombre de pionniers augmentait, l’effectif de soixante-dix à quatre-vingts missionnaires, dont beaucoup étaient au Japon depuis environ vingt ans, demeurait comme un fondement et une ancre pour l’œuvre. Grâce à ces premiers groupes de missionnaires, une organisation zélée et théocratique a été formée. L’activité missionnaire s’était toujours limitée à une dizaine de villes à la fois ; en revanche, les pionniers ordinaires et spéciaux locaux ont ouvert un grand nombre de territoires nouveaux. Ainsi, de 1964 à 1969, le nombre des congrégations passa de 105 à 206. Aujourd’hui, dans la plupart des grandes villes de plus d’un million d’habitants, il y a environ huit congrégations ; la ville de Tokyo à elle seule en compte trente-trois.

À Matsuyama, il est impensable que deux personnes se rencontrent, tombent amoureuses l’une de l’autre et se marient. Les mariages sont arrangés par des “entremetteurs” professionnels, qui vivent confortablement de leurs revenus. Tous les voisins des missionnaires étaient intrigués du fait que les deux jeunes sœurs du groupe, âgées de vingt-cinq ans, n’étaient pas encore mariées. Ils ne se contentaient pas d’exprimer leur étonnement, mais ils se démenaient pour nos sœurs, leur présentant des prétendants et même des membres de leurs familles. Quand les missionnaires leur expliquèrent qu’elles préféraient choisir elles-​mêmes leur conjoint, cela fut pris en considération ; on leur conseilla alors d’aller dans une grande ville, de préférence Tokyo, où elles pourraient contracter mariage de cette façon.

La présence des quatre missionnaires fut un témoignage pour toute l’île de Shikoku. Environ un an après leur arrivée, ils assistèrent à une assemblée de circonscription, de l’autre côté de l’île. Un commerçant, chez qui ils avaient acheté des fruits, leur demanda : “Est-​ce vous les quatre étrangers de Matsuyama, ceux qui font de la bicyclette ?” Ces bicyclettes semblaient être connues de tous les habitants de l’île ; par la suite, les missionnaires en comprirent la raison.

À la fin de la Seconde Guerre mondiale, lorsque les habitants revinrent à Matsuyama après s’être cachés dans les montagnes, ils n’avaient rien. Leurs vêtements étaient en lambeaux. Ils se nourrissaient d’herbes et d’oiseaux qu’ils pouvaient attraper. C’est aussi à ce moment-​là que les missionnaires étrangers de la chrétienté revinrent. Ils possédaient de grandes voitures, vivaient dans le luxe et pourtant, ils quémandaient de l’argent pour construire des églises. Quel contraste avec les missionnaires de la Watch Tower qui parcouraient le pays à l’aide de bonnes vieilles bicyclettes ! Grâce à cela, les préjugés tombèrent et les missionnaires furent acceptés. Dans l’île de Shikoku, dont les habitants ne tarissaient pas d’éloges sur les missionnaires, il y a maintenant 310 proclamateurs répartis dans onze congrégations ; au moins 25 pour cent d’entre eux remettent chaque mois un rapport de pionnier.

En juillet 1969, dix missionnaires de la quarante-septième classe de Galaad, à qui un frère natif du Japon avait enseigné la langue nipponne, arrivèrent au Japon. Avec l’aide des missionnaires plus anciens, ils étendirent l’œuvre dans d’autres villes. Citons, entre autres, Okayama, aux portes de la mer Intérieure, où plusieurs groupes de pionniers spéciaux prêchèrent pendant quinze ans avant qu’une congrégation ne soit finalement établie. Lorsque les missionnaires arrivèrent, cette congrégation comptait vingt-trois proclamateurs et six pionniers spéciaux ; le mari d’une des nouvelles sœurs leur avait construit une Salle du Royaume.

Les gens d’Okayama ont la réputation d’être habiles en affaires, mais ils ont peu d’amis. Ils sont renfermés et brusques. Ils se méfient des gens qu’ils ne connaissent pas et particulièrement des étrangers, qui sont très peu nombreux dans la ville. Aussi les missionnaires décidèrent-​ils de saluer tous ceux qu’ils rencontraient dans le territoire, et de leur sourire jusqu’à ce qu’ils répondent à leur tour par un sourire. En l’espace de quelques semaines, ils étaient parvenus à entretenir des rapports très amicaux avec leurs voisins. La “campagne du sourire” renversa les préjugés et obligea les gens à apprendre à connaître les missionnaires. En conséquence, ils étudient maintenant avec leur voisin immédiat et sa femme.

En dehors de la question de la langue, ces missionnaires constatèrent que l’un des principaux problèmes est que les Japonais n’ont aucune conception d’un Dieu tout-puissant. Il faut d’abord les convaincre que Dieu est une personne. De plus, comme ils sont bons élèves, il leur est facile de tromper le missionnaire en lui donnant l’impression qu’ils croient ce qu’il leur enseigne, alors qu’il n’en est rien. C’est là une tâche très ardue pour les nouveaux missionnaires, mais ils ont été grandement aidés par les arguments fournis dans les articles de La Tour de Garde préparés pour les enfants, ainsi que d’autres articles du périodique qui expliquent la personnalité de Dieu et ses rapports avec l’homme. L’excellent accroissement enregistré à Okayama témoigne de l’activité zélée des missionnaires et des autres pionniers de cette ville.

En juin 1967, la Société ouvrit une nouvelle maison de missionnaires à Nagasaki, à l’ouest de Kyushu. Cette ville est connue dans le monde entier pour avoir été la cible de la seconde bombe atomique, et au Japon, on la considère comme un bastion du catholicisme. Nagasaki est située au pied de magnifiques montagnes qui entourent un port naturel.

La rivalité qui existe entre les catholiques et les bouddhistes à Nagasaki rend la prédication différente par rapport aux autres villes du Japon. Les missionnaires entendent souvent des objections telles que : ‘Je suis catholique. (...) Nous avons notre Église et nos publications. (...) Allez chez les bouddhistes qui ne connaissent encore rien de tout cela.’ Le message les laisse indifférents et ils semblent ignorer les bouleversements que subissent les Églises dans les autres parties du monde. En revanche, les bouddhistes identifient parfois les témoins aux catholiques ou à quelque autre groupe religieux à la recherche d’adeptes, aussi ne veulent-​ils pas s’engager.

Bien que les pionniers spéciaux aient accompli un excellent travail depuis 1957, en formant une congrégation dans chacune des deux parties de Nagasaki, de nombreuses années se sont écoulées sans qu’il y ait d’accroissement. Quand les missionnaires arrivèrent, il y avait cinquante-huit proclamateurs et cinq pionniers ordinaires actifs dans la ville. Trois d’entre eux furent rattachés à l’une des congrégations et deux à l’autre. Sous leur impulsion, la fréquentation des réunions s’améliora rapidement, si bien qu’au cours des derniers mois, 130 personnes ont assisté aux réunions. Non seulement des pionniers spéciaux sont sortis des congrégations de Nagasaki, mais celles-ci ont progressé durant les trois dernières années et comptent maintenant quatre-vingt-dix-sept proclamateurs dont vingt pionniers, selon le rapport de juillet 1972. Les missionnaires et leurs compagnons se réjouissent de cet accroissement.

Quand le surveillant de circonscription visita pour la première fois l’île de Kyushu, en 1951, il ne rencontra qu’une Américaine isolée à Beppu et une famille bien disposée à Kagoshima. Mais grâce à l’activité missionnaire déployée dans cinq villes de Kyushu, l’œuvre du Royaume s’est développée dans cette île, où deux circonscriptions ont réuni une assistance de 1 529 personnes aux assemblées tenues en 1971. Depuis lors, des pionniers ont été envoyés dans un plus grand nombre de villes isolées, et au cours de l’année 1972, on a formé une troisième circonscription à Kyushu.

L’ASSEMBLÉE “PAIX SUR LA TERRE” DE 1969 — RÉSULTATS OBTENUS

À l’occasion de la deuxième série d’assemblées organisées autour du monde, nous nous sommes réunis du 14 au 19 octobre 1969 dans le vélodrome Korakuen de Tokyo. C’était notre première grande assemblée en plein air. Sur la verte pelouse, une maison japonaise au toit de chaume servait d’estrade, et le thème de l’assemblée était composé de milliers de fleurs. Le mont Fudji servait de toile de fond. Une immense cafétéria avait été installée à l’abri des stands. Des sœurs habillées de kimonos étaient assises sur le bord de la pelouse et chantaient des cantiques du Royaume en s’accompagnant au koto (harpe japonaise), ce qui ajoutait au charme de l’assemblée.

Environ un millier de personnes, y compris les frères d’Okinawa, étaient venues d’autres pays. Les congressistes étaient enthousiastes à l’idée d’entendre les discours des frères représentant le collège central de la Société. Frère Suiter prononça le discours de bienvenue, frère Franz présenta trois des discours principaux et frère Knorr en donna également trois, y compris la conférence publique. À cette occasion, frère Knorr parla devant une foule de 12 614 personnes. Vous souvenez-​vous que six ans auparavant, lors de l’assemblée de Kyoto, il s’était adressé à un auditoire de 2 479 personnes seulement ? Le nombre des baptêmes à cette assemblée fut également un record — 798 — et le nombre total des baptisés pendant l’année de service 1969-​1970 s’est élevé à 2 245, ce qui représentait un nouveau maximum.

Moins de deux ans plus tard, et bien qu’il n’y eût plus de visiteurs venus d’outre-mer, 16 508 personnes étaient rassemblées dans le même stade à l’occasion de l’assemblée “Le nom divin”, et il y eut 879 baptêmes. Cela a porté le nombre total des baptisés pour l’année à 2 088. En juillet et en août 1972, quatre assemblées de district ayant pour thème “Le gouvernement divin” se sont tenues en divers points du Japon, et ont réuni 21 921 personnes ; il y a eu 931 baptêmes. Le nombre total des baptisés pour 1972 a été de 2 569, chiffre jamais atteint, et c’est la troisième année consécutive où nous enregistrons plus de 2 000 baptêmes. Au cours des trois dernières années, il y a donc eu 6 902 baptisés au Japon, soit plus de 48 pour cent du nombre total de proclamateurs dans le pays !

Qu’est-​ce que l’avenir tient en réserve ? Au cours de l’été de 1973, les témoins de Jéhovah organiseront de nouveau une assemblée internationale au Japon. Bien qu’il soit trop tôt pour l’annoncer de façon définitive, nous pensons pouvoir disposer d’un excellent emplacement dans la région d’Osaka ; l’assemblée pourrait donc se tenir en plein air et il y aurait de la place pour 30 000 personnes. Quelle que soit la volonté de Jéhovah à cet égard, nous nous attendons à ce que cette assemblée soit réussie, et nous serons heureux de recevoir les nombreux frères venus d’outre-mer.

EXPANSION DE LA FILIALE

Pendant quatorze ans, de janvier 1949 à septembre 1962, la maison en bois de style japonais, située au 5-5-8 Mita, Minato-ku, à Tokyo, a abrité le siège de la filiale du Japon. Toutefois, l’expansion rapide de l’œuvre a entraîné une plus grande diffusion de publications et de périodiques, et une augmentation du nombre des abonnements. Le tableau ci-dessous vous donnera une idée des excellents résultats obtenus :

Placements : Livres Périodiques Nouveaux abonnements

Année de service 1950 2 026 2 626 51

Année de service 1955 4 050 105 671 3 399

Année de service 1960 15 605 538 088 7 444

Année de service 1965 53 937 1 575 597 32 193

Année de service 1972 797 423 5 907 404 123 567

Rien qu’au mois de septembre 1971, 114 133 livres ont été placés dans le champ par les proclamateurs, ce qui constitue un nouveau record.

Avec le temps, la maison japonaise de deux étages construite en matériaux légers s’est avérée trop petite pour l’œuvre. Aussi, frère Knorr a-​t-​il permis de remplacer cette vieille maison par une nouvelle construction moderne. Les travaux ont duré exactement six mois, et en octobre 1963 le nouveau bâtiment en béton armé comprenant cinq étages était prêt à accueillir les dix membres du Béthel et six missionnaires. Depuis lors, l’accroissement s’est poursuivi. Lorsque se tenait l’École du ministère du Royaume, les élèves dormaient sur des nattes en paille appelées tatami ; on logeait ainsi jusqu’à cinquante personnes dans la maison.

Frère Haslett a beaucoup travaillé à la préparation des plans du nouveau bâtiment de la filiale de Tokyo. En vérité, les deux premiers missionnaires envoyés au Japon ont donné un excellent exemple de zèle à tous ceux qui les ont connus. Don et Mabel Haslett se sont fait baptiser le 2 décembre 1916 à Brooklyn, aux États-Unis. Ils se sont entièrement consacrés à l’expansion des intérêts du Royaume. En 1947, alors qu’ils avaient déjà plus de cinquante ans, ils se sont arrachés volontairement du “paradis” tropical d’Hawaii, sont partis à l’École de Galaad, et ont donné un bon départ à l’œuvre dans un pays ravagé par la guerre, la pauvreté et la famine. Un merveilleux “paradis” spirituel les attendait au Japon. Ils ont fait œuvre de pionniers. Don Haslett est mort d’une crise cardiaque le 20 février 1966. Les six frères qui portaient son cercueil lors de son enterrement étaient tous des jeunes gens avec qui il avait étudié personnellement, et qui avaient entrepris le service de pionnier pour devenir par la suite membres du Béthel. Mabel Haslett continue son activité missionnaire à l’extérieur de la filiale de Tokyo. À l’âge de soixante-dix-sept ans, elle remet chaque mois un rapport de presque cent heures de service, amenant des nouveaux à la connaissance de la vérité.

L’expansion continue. L’œuvre commencée par les missionnaires étrangers a été prise en main par une grande armée de pionniers originaires du pays. Presque chaque mois, il y a un nouveau maximum de pionniers ordinaires, et certains mois plus de cent proclamateurs rejoignent les rangs des pionniers. Le tableau suivant donne une idée de l’extension des différentes formes du service de pionnier ; il indique les chiffres de pointe enregistrés en avril de chaque année mentionnée :

Missionnaires Surv. de

(actifs à Pionniers circ. Pionniers Pionniers Total

plein temps) spéciaux et leurs ordinaires temporaires des

Années femmes pionniers

1952 51 - 1 4 - 56

1957 59 43 2 25 - 129

1962 42 157 15 39 71 324

1967 43 362 29 157 377 968

1972 53 453 47 1 896 1 009 3 458

Un chiffre de pointe de 3 515 pionniers a été atteint en mai 1972, ce qui fait que plus d’un proclamateur sur quatre était dans le service à plein temps. Beaucoup de ces pionniers répondent actuellement à l’appel d’aller prêcher dans des villes de 30 000 à 50 000 habitants qui n’ont jamais reçu le message. D’autre part, les proclamateurs de congrégation ont vraiment l’esprit pionnier, comme l’indiquent leurs moyennes en juillet 1972:16,7 heures, 8,4 nouvelles visites, plus de 1,1 étude biblique et 14,7 périodiques. Pourtant, ce mois-​là, ils étaient occupés à préparer les assemblées de district ou à y assister. Jéhovah bénit ce zèle. Alors qu’il n’y avait que 106 congrégations lorsque l’actuelle filiale de Tokyo commença à fonctionner en octobre 1963, maintenant les témoins de Jéhovah prêchent dans 538 villes et villages du Japon, et d’après les nouvelles dispositions, presque tous ces groupes de frères deviendront des congrégations. La filiale a donc environ cinq fois plus de travail qu’il y a neuf ans. Avec amabilité, frère Knorr, président de la Société, prévoit de faire de la filiale japonaise un établissement bien plus important que tout ce que nous avions osé imaginer !

LE NOUVEAU PROJET DE NUMAZU

Pendant l’assemblée internationale “Paix sur la terre”, tenue en octobre 1969, frère Knorr annonça que la Société allait acheter un terrain à Numazu, situé à cent vingt kilomètres au sud-ouest de Tokyo. Il y avait neuf maisons de style japonais sur ce terrain d’environ un demi-hectare. À partir d’avril 1970, un groupe de quatre missionnaires, le service d’expédition de la Société et l’École du ministère du Royaume ont occupé ces maisons. Quatre cents frères ont été formés à cette école. Numazu, située entre le mont Fudji et la côte, qui est très belle, est un véritable paradis pour ce qui est d’annoncer la bonne nouvelle du Royaume. Lorsque les missionnaires sont arrivés dans la congrégation proche de Fudji, tous les services étaient assurés par des sœurs. Il y avait alors une moyenne de sept proclamateurs actifs dans le champ chaque mois, mais à présent il y en a trente-sept, y compris huit frères baptisés.

Lorsque frère Knorr a visité le Japon en juillet 1971, il a annoncé un nouveau projet important pour le terrain de Numazu. Il a dressé les plans d’une imprimerie à deux étages et d’un Béthel comportant quatre étages. Vers la fin de 1971, toutes les maisons, sauf celle à un étage abritant les missionnaires, étaient démolies. La construction des nouveaux bâtiments a commencé en janvier 1972. Par des prêts et des dons, les frères japonais ont fait preuve d’une grande générosité, si bien qu’il a été possible de financer cette grande entreprise sans l’apport de fonds provenant de l’étranger. Grâce à un arrangement avec l’entreprise de construction, l’installation de l’électricité, la peinture, le carrelage et la pose des tapis ont été effectués par des frères. Eustace Kite, un missionnaire canadien, a supervisé avec habileté tous ces travaux.

À la même époque, des fabricants de presses à Kawasaki et à Osaka ont commencé à construire trois rotatives de quarante tonnes ainsi que d’autres machines pour l’imprimerie. Une des rotatives était destinée à notre filiale de Numazu, et les deux autres aux filiales d’Australie et des Philippines. Au début de juin, la construction des bâtiments était si bien avancée que la rotative et d’autres machines pouvaient être installées au rez-de-chaussée et au premier étage de l’imprimerie de Numazu. Frère Milan Miller, membre du personnel de l’imprimerie de la Société à Brooklyn est venu pour superviser l’installation des machines. Lorsque frère Miller a vu l’imprimerie de Numazu pour la première fois, il n’a trouvé qu’un seul mot à dire : “Prodigieux !” Après avoir mesuré la salle, il a dit qu’au besoin on pourrait mettre huit rotatives au rez-de-chaussée de l’imprimerie. Pour l’instant, nous sommes très heureux d’imprimer des périodiques sur une seule rotative installée dans un coin de cette salle des presses. Cette rotative fonctionne déjà très bien, produisant jusqu’à 21 000 périodiques à l’heure. La première publication produite par cette presse était une brochure de seize pages, imprimée en couleurs, contenant principalement le discours public de l’assemblée de district de 1972. Quelle surprise heureuse pour les frères, lorsqu’ils ont reçu cette brochure à la fin de l’assemblée !

Le 15 août 1972, l’entreprise de construction a remis à la Société les clés de l’imprimerie et du Béthel. La peinture et d’autres travaux de finition occuperont les frères pendant un ou deux mois encore, mais seize des chambres sont déjà aménagées et habitées au deuxième étage du Béthel. Il y a trente-deux autres chambres aux troisième et quatrième étages, tandis qu’une grande bibliothèque, la salle à manger et la cuisine se trouvent au premier étage. Les bureaux, la buanderie, la chaufferie et une très belle Salle du Royaume sont au rez-de-chaussée. Trois containers remplis de cartons sont déjà arrivés de Brooklyn, mais cet envoi n’occupe qu’un tout petit coin de l’immense entrepôt de la nouvelle imprimerie. Un grand monte-charge et un chariot élévateur à fourche, avec moteur électrique, facilite la manutention des charges lourdes à l’intérieur de l’imprimerie. L’atelier de menuiserie travaille actuellement à plein rendement pour fabriquer les meubles du Béthel et de l’imprimerie.

Le moteur et le treuil du monte-charge sont abrités dans une tour de garde construite sur le toit du bâtiment. Du haut de cette tour, on découvre une vue magnifique non seulement de l’édifice, mais encore de la pinède le long du littoral et du beau paysage dominé par le mont Fudji. Les œuvres de Jéhovah sont vraiment belles. Nous apprécions également l’œuvre accomplie par la classe de l’“esclave fidèle et avisé”, ainsi que les sages directives que le collège central transmet depuis le siège de l’organisation de Jéhovah sur la terre. La nourriture spirituelle dispensée aux réunions des congrégations et dans le champ augmente sans cesse en qualité et en quantité. Tous les frères se réjouissent de faire partie de cette organisation merveilleuse qui soutient si fidèlement le nom incomparable de notre Dieu Jéhovah. À mesure que le nombre des proclamateurs grossit partout et que de plus en plus de personnes affluent vers les réunions et les assemblées, nous nous souvenons de frère Knorr à l’assemblée de Tokyo tenue en avril 1951, lorsqu’il a dit qu’il attendait le jour où il y aurait tellement de ministres japonais, qu’il aurait du mal à trouver un missionnaire parmi eux. En vérité, “le petit est devenu un millier”. — És. 60:22NW.

VILLES OÙ LES MISSIONNAIRES ONT PRÊCHÉ

Nombre Ministres Nombre de

maximum du Royaume pionniers

Période de (actifs en (en

Villes Population d’activité missionnaires juillet juillet

1972) 1972)

Tokyo 11 476 860 Filiale de Mita 12 613 123

depuis 1/49

Chiyoda 8 550 104

depuis 5/54

Nakano 10 899 157

depuis 10/56

Setagaya 6 174 28

depuis 7/60

Kobe 1 304 405 depuis 11/49 18 730 76

Nagoya 2 050 412 10/50-8/60 12 608 71

Osaka 2 908 507 3/51-2/53 8 746 132

Yokohama 2 325 848 4/51-9/57 14 646 135

Kyoto 1 438 634 4/52-11/57 7 452 80

Sendai 556 475 10/52-9/59 6 131 27

Hiroshima 575 539 1/57-10/63 4 247 50

Sapporo 1 026 706 9/57-3/71 6 277 41

Fukuoka 1 049 942 depuis 9/57 6 246 37

Kumamoto 453 627 12/57-9/63 4 66 12

Kagoshima 418 621 12/57-5/61 4 80 20

Sasebo 261 567 12/57-3/59 5 41 7

Hakodate 239 291 9/59-8/61 4 58 13

Matsuyama 329 683 11/66-11/69 4 53 13

Okayama 473 480 depuis 5/69 6 64 14

Nagasaki 423 019 depuis 6/69 5 97 20

Numazu 195 484 depuis 4/70 6 76 18

Niigata 389 019 depuis 9/71 6 64 12

Kochi 245 428 depuis 5/72 6 33 14

TOTAUX 28 142 547 6 951 1 204

Proclamateurs ailleurs au Japon 7 210 1 771

Ainsi, les missionnaires ont travaillé parmi plus du quart de la population du Japon, qui s’élève à 105 281 070 habitants.

[Illustration, page 254]

L’imprimerie et le Béthel de Numazu