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Hawaii

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Annuaire 1991 — Rapport

LE 12 juillet 1776, le navire Resolution prenait la mer pour partir à la recherche du légendaire passage du Nord-Ouest — un raccourci entre l’Europe et l’Asie. À la barre se tenait un homme de haute taille, bel homme de surcroît, fils d’un ouvrier agricole écossais. Dans son regard se lisait toute sa soif de découvrir; c’était le capitaine James Cook.

Il était loin de se douter que le voyage qu’il entreprenait là, son troisième périple autour du monde, serait aussi pour lui le dernier. Après avoir à nouveau visité la Nouvelle-Zélande, il cingla vers les Tonga, au nord-est, avant de rejoindre Tahiti. Quittant Tahiti, Cook s’engagea dans les eaux du Pacifique Nord où ne s’étaient aventurés jusque-​là que peu d’explorateurs. Et c’est là qu’il allait faire une découverte de taille — un groupe d’îles qu’il appela du nom d’îles Sandwich, en l’honneur de son ami, le Premier Lord de l’Amirauté.

Lorsque Cook et son équipage débarquèrent en 1778, ils étaient les premiers Européens à fouler le sable de ces îles. Ils eurent la surprise d’être reçus avec les honneurs par des autochtones issus d’une aristocratie polynésienne très structurée. Pourtant, un an plus tard, Cook allait perdre la vie lors d’un accrochage avec les insulaires. Aujourd’hui, ce chapelet d’îles volcaniques en est venu à être à la croisée des routes du Pacifique.

Situé à la limite nord de la zone des tropiques, cet archipel magnifique, fort de 132 îles, récifs et bancs de sable, s’étend au milieu du Pacifique sur une distance de 2 451 kilomètres, sur un axe sud-est à nord-ouest. Les sept îles les plus peuplées de ce groupe sont Niihau, Kauai, Oahu, Molokai, Lanai, Maui et Hawaii (appelée aussi la Grande Île).

Que ce soit en musique, par les poèmes, dans des tableaux ou au travers de films, maintes fois la beauté saisissante de ces îles a été louée; depuis les eaux qui dévalent en cascades jusqu’aux cimes enneigées des massifs volcaniques. Pour sûr, le simple nom d’Hawaii éveille dans l’esprit de beaucoup de gens des images de palmiers se balançant au gré des brises tropicales, de plages d’ivoire que vient effleurer l’océan. Vraiment, de quoi nous rappeler combien l’homme aspire à vivre dans un cadre paradisiaque! Pourtant, la vraie beauté d’Hawaii est le fait de “choses désirables” d’un autre ordre, à savoir les serviteurs de Jéhovah. Oui, ce peuple doux, comparable à des brebis, habite, lui, dans un paradis spirituel (Aggée 2:7). Considérons ensemble leur histoire.

Rites effroyables du passé

Les premiers habitants de la Polynésie vivaient sous la coupe de la religion païenne qui régnait sans partage, la prêtrise étant très redoutée et les rois élevés au rang de dieux. Une personne qui se risquait à braver un tabou religieux le payait bien souvent de sa vie. Néanmoins, on notera avec intérêt qu’il était possible de chercher asile dans des villes de refuge. Durant des siècles, la religion est restée très influente à Hawaii, en raison de l’adoration de multiples dieux et des sacrifices humains qui s’y pratiquaient.

C’est dans cette atmosphère que débarquèrent les premiers missionnaires protestants en provenance de la côte est des États-Unis, cela dans les années 1820. Choqués par le mode de vie et les rites religieux des autochtones, ces premiers missionnaires allaient introduire de grands changements dans les îles. L’un des premiers fut de mettre par écrit la gracieuse langue hawaïenne. Bientôt, la Bible et d’autres manuels étaient imprimés. Des efforts ont également été fournis en vue d’assurer à la population une éducation à l’occidentale. En peu de temps le protestantisme allait devenir la religion de fait, éclipsant ainsi l’ancienne prêtrise païenne. En 1827, les premiers missionnaires catholiques arrivaient à Hawaii. Puis, au cours du temps, des travailleurs immigrés chinois et japonais apportèrent avec eux leurs croyances asiatiques. C’est ainsi que vers la fin du XIXsiècle, la cohabitation du protestantisme, du catholicisme, du bouddhisme, du taoïsme et du shintoïsme sera caractéristique de la vie religieuse des Hawaïens.

Un modèle de coopération ethnique

Le brassage de multiples nationalités au cours de cette période a marqué les Hawaïens autant dans leurs traits physiques que dans leur culture. Les Hawaïens d’autrefois étaient de grands et solides individus d’ascendance polynésienne; de forte ossature, avec une peau ambrée, de grands yeux bruns et des cheveux épais, châtains ou noirs. Après l’arrivée du capitaine James Cook dans les dernières années du XVIIIsiècle, Hawaii a connu des vagues successives d’immigrants provenant de Chine, du Japon, d’Okinawa, de Corée, des Philippines, des îles portugaises de Madère et des Açores, de Porto Rico, d’Espagne, de Scandinavie et d’Allemagne. Ceux-ci aspiraient tous à une vie meilleure et vinrent travailler sous contrat dans les immenses plantations de canne à sucre. Ce mélange ethnique s’est intensifié au cours du XXsiècle à la suite de l’afflux de ressortissants des Samoa et d’autres îles du Pacifique. Notons cependant qu’après 1930 la plupart arriveront des autres États de l’Union.

Au fil des années, ce croisement d’humains, riche de couleurs, a conduit à d’heureux mélanges de populations. Près de 40 % des nouveaux mariages sont mixtes, ce qui explique cet amalgame cosmopolite qui fascine plus d’un visiteur. Pourtant, malgré leurs origines diverses, les habitants d’Hawaii sont en général d’un naturel agréable et amicaux. Cela, allié à un cadre tropical et à un temps d’ordinaire ensoleillé, a fait d’Hawaii un endroit rêvé pour passer des vacances. C’est du milieu de cette population, en somme fort sympathique, que les Témoins de Jéhovah allaient, en ce temps de la fin, tirer une magnifique moisson.

Visite du président

En 1912, le navire à vapeur Shinyo Maru pénétrait dans le port d’Honolulu en haletant au milieu des eaux houleuses, et venait se mettre à quai. À son bord se trouvait Charles Russell, le premier président de la Société Watch Tower, qui avait embarqué pour un périple autour du monde.

Après avoir visité l’école Kamehameha et l’institut du Pacifique central, il fit part de ses observations dans l’édition anglaise de La Tour de Garde du 15 avril 1912: “Nous nous sommes enquis de l’instruction [religieuse] chrétienne qui est dispensée, et nous sommes vu répondre que si l’on se risquait à l’introduire, cela ferait perdre des élèves, perturbant ainsi le fonctionnement des établissements. (...) Nous pensons que l’œuvre qui est effectuée à Hawaii est favorable du point de vue humanitaire; par contre, pour ce qui est de la christianisation, c’est un échec total. Pour autant que nous ayons pu l’observer, la foi dans le sang rédempteur du Christ, en sa résurrection et dans son royaume à venir n’a jamais été enseignée.”

Les premières graines sont semées

En 1915, Walter Bundy, un frère pèlerin (comme on appelait à l’époque les ministres itinérants), proposa à Ellis Wilburn Fox de les accompagner, sa femme et lui, dans leur voyage pour Hawaii. Il offrit même de lui régler le prix de son billet. Frère Fox accepta l’invitation et quitta son emploi de chef opérateur dans un cinéma de Vancouver, au Canada. Frère Bundy et sa femme, ainsi que frère Fox, firent en bateau à vapeur le déplacement qui allait les emmener de Vancouver à Honolulu. Là, ils entreprendraient de semer les premières graines de vérité parmi les habitants d’Hawaii. Dans leurs bagages, ils emportaient une petite presse manuelle destinée à imprimer des feuilles d’invitation pour les discours que les deux frères envisageaient de prononcer. Frère Fox pensait ne rester que quelques semaines à Honolulu, après quoi il retrouverait son travail bien payé à Vancouver. Il n’imaginait sans doute pas que ces quelques semaines se transformeraient en sept années.

Le premier dimanche du mois de février 1915 avait lieu la première réunion des Étudiants de la Bible (le nom des Témoins de Jéhovah à l’époque) dans une chambre d’hôtel, à l’angle des rues Fort et Beretania à Honolulu. Cinq personnes y assistaient: les Bundy, Ellis Fox, et un homme bien disposé avec sa femme.

Sur le bateau, un ou deux jours avant leur arrivée, les trois amis avaient convenu que le premier qui trouverait un emploi pourvoirait aux besoins des deux autres. Frère Bundy, qui était pianiste, fut rapidement embauché dans un commerce spécialisé dans la musique.

À propos de leurs débuts, Ellis se souvient: “Nous nous préparions en vue d’un discours public chaque dimanche. Walter se chargeait d’écrire le texte de l’annonce pour le dimanche suivant, tandis que de mon côté je m’occupais de la composition et de l’impression des tracts dont j’essayais de distribuer le plus grand nombre possible dans Honolulu dans le courant de la semaine. Ce frère semblait ne jamais être à court d’idées pour les discours publics.”

Percevant l’appréhension d’Ellis de prendre la parole en public, Walter l’emmenait dans le parc, où ils s’attelaient à améliorer ses connaissances en grammaire ainsi que son élocution. Comme Ellis le racontera plus tard, “avec une grande patience, il a essayé de déteindre un peu sur moi”.

À l’œuvre avec le premier groupe

Cet indispensable entraînement allait se révéler d’une valeur inestimable, puisque fin 1915 frère Russell rappelait Walter Bundy sur le continent américain en vue d’une nouvelle affectation. Ellis Fox restait le seul et unique ancien du petit groupe de personnes qui s’étaient nouvellement intéressées à la vérité à Honolulu. C’est à ce moment-​là qu’il commença à réaliser qu’il ne retrouverait pas de sitôt sa situation bien rémunérée au Canada. Mais il était enthousiasmé par la vérité et avait le point de vue juste pour rester à Honolulu, en plaçant les intérêts du Royaume avant les avantages d’ordre matériel.

Ellis fit également preuve de modestie dans sa façon de s’acquitter de ses responsabilités, alors que l’œuvre en était encore à ses débuts. L’étude des Figures du Tabernacle était ardue. Reconnaissant son manque d’expérience, il posait à la vue de tous du papier et un crayon, annonçant que toute question restée sans réponse serait notée, et qu’ainsi chacun aurait l’occasion de faire des recherches au cours de la semaine. Mais comme l’on pouvait s’en douter, c’est à frère Fox que revenait le plus gros des recherches, et il avait fort à faire pour dégager les réponses exactes.

Un chauffeur de taxi donne le témoignage

Un morceau de craie et un taxi; curieuse panoplie pour répandre le message du Royaume — en tout cas pas pour Ellis Fox. Alors qu’il était chauffeur de taxi, frère Fox donnait le témoignage à ses collègues. Se servant de craie pour écrire sur le trottoir, il illustrait les promesses de Jéhovah et expliquait des points de chronologie biblique, comme par exemple la durée des temps des Gentils. Cela amenait de nombreuses questions et des discussions animées.

Un autre chauffeur, James Harrub, se réjouissait beaucoup à propos de ces vérités bibliques, et il voulut obtenir davantage de documentation. Après avoir dévoré le livre “La Nouvelle Création” et d’autres volumes de la série des Études des Écritures, il était convaincu que le message qu’ils contenaient était sans l’ombre d’un doute la vérité venant de la Parole inspirée de Dieu.

En 1918, Ellis dirigeait une étude biblique régulière avec James et sa femme, Dora. L’intérêt de Dora, qui était épiscopalienne, avait été éveillé par une coupure de journal qu’Ellis avait remise à son mari. On y faisait le compte rendu du débat qui avait opposé un certain “révérend” Troy au deuxième président de la Société Watch Tower, Joseph Rutherford. Durant cette discussion, frère Rutherford avait démontré que les doctrines de la Trinité, de l’enfer de feu et de l’immortalité de l’âme sont contraires aux Écritures. Stimulée par cet entrefilet, elle se lança dans plus de 50 années d’étude consciencieuse et de mise en pratique des Écritures.

Les premiers disciples sont baptisés

Lorsque James Harrub exprima le désir de se faire baptiser, frère Fox obtint la permission d’utiliser une vieille église désaffectée qui comprenait un baptistère fermé par une trappe. Seulement, la cuve métallique fuyait comme une passoire. Après avoir fait de leur mieux pour colmater les trous à l’aide d’un fer à souder, ils se rendirent compte que le seul moyen d’avoir assez d’eau dans la cuve était de laisser le robinet ouvert à fond. Frère Fox raconte: “Je venais de terminer le discours du baptême et j’étais descendu dans l’eau attendant que James sorte du vestiaire. Et là, j’ai eu une surprise de taille. Cette charmante petite Dora Harrub, avec son regard vif, qui se baisse pour pouvoir me chuchoter discrètement à l’oreille, et qui me demande: ‘Ellis, est-​ce que je peux aussi me faire baptiser?’ ‘Bien sûr, vous le pouvez! Allez donc là pour vous changer.’ Quel moment exaltant, tant pour son mari que pour moi!” Ainsi, les deux premiers disciples chrétiens d’Hawaii furent baptisés le 19 novembre 1919.

Le lieu de réunion du groupe des Étudiants de la Bible fut transféré de l’hôtel Leonard, où logeait Ellis, au foyer de la famille Harrub, dans Spreckles Street, à Honolulu. Neuf personnes assistaient régulièrement le vendredi à la “réunion de prières, de louanges et de témoignages”, ainsi qu’à l’étude de La Tour de Garde du dimanche.

Un franc-maçon devient Témoin

Pendant la Première Guerre mondiale, frère Fox était directeur d’un commerce local. Un dimanche matin, il reçut à son domicile un coup de téléphone de David Solomon. M. Solomon, qui gérait un garage dans un poste militaire de l’endroit, demandait des fournitures et voulait savoir si Ellis était disposé à ouvrir son magasin pour honorer cette commande. Ellis y consentit.

Frère Fox se souvient: “Alors qu’il me conduisait au magasin, il fit la remarque que je devais être franc-maçon pour m’être montré aussi arrangeant. Lorsqu’il apprit que j’étais un ministre chrétien rattaché au groupe local des Étudiants de la Bible, il me demanda: ‘Vous arrive-​t-​il de prononcer des discours en dehors de votre église?’ ‘Oui, répondis-​je, si on me le demande.’ Il m’informa alors qu’il était le maître de la loge maçonnique de Fort Schofield et m’invita à venir m’y exprimer. Naturellement, je ne lui ai pas précisé que je n’avais encore jamais donné de discours public. Je me suis préparé en utilisant une carte similaire à celle qui faisait office de frontispice du tome 1 des Études des Écritures. La préparation et le développement de ce premier discours public allaient me fournir une occasion de mettre en pratique ce que j’avais appris auprès de Walter Bundy.”

Par la suite, David Solomon se mit à fréquenter régulièrement les réunions du petit groupe d’Étudiants de la Bible. En dépit d’une opposition opiniâtre, il se retira ensuite de l’Ordre maçonnique et fut baptisé par frère Fox.

À l’école du dimanche

Frère Fox cherchait sans cesse à innover et faisait preuve de beaucoup d’initiative, étant toujours à l’affût d’occasions de répandre la vérité. Par exemple, avec une hardiesse remarquable, il ne craignait pas d’aller dans les églises et les écoles du dimanche. Il profitait du déroulement du service pour soulever des questions de doctrine et se ménageait ainsi une possibilité de donner le témoignage aux autres assistants, dans l’église même.

Un dimanche, il entra dans une église où, en l’absence du ministre régulier, un certain M. Elder dirigeait une leçon basée sur Matthieu chapitre 24. Frère Fox se mit à poser des questions et à donner des commentaires bibliques à propos des matières discutées. M. Elder fut si impressionné que, devant toute l’assistance, il demanda à frère Fox s’il ne voulait pas changer de place avec lui. Cette école du dimanche devint donc le théâtre de passionnantes discussions jusqu’au retour du ministre attitré, qui s’empressa de mettre fin à cet arrangement. M. Elder quitta les rangs de l’Église et mit à la disposition du groupe des Étudiants de la Bible son magasin en ville. Ceux-ci pouvaient donc s’y retrouver un soir par semaine pour y tenir une étude de la Bible.

En 1922, les circonstances ont obligé frère Fox à quitter les îles Hawaii et à aller s’installer en Californie. Mais lorsqu’il confia l’œuvre à frère James Harrub et aux autres frères qui restaient, il avait acquis la certitude que l’activité de prédication reposait désormais sur des bases étroites, certes, mais solides.

De l’Italie à Hawaii

C’est en 1923 que la Société envoya un frère d’Italie, frère Rosselli, effectuer un voyage autour du monde afin de promouvoir l’utilisation de La Harpe de Dieu, un livre conçu pour ceux qui faisaient leurs débuts dans l’étude de la Bible. Hawaii était l’une de ses étapes. Frère Rosselli était un homme très énergique, plein de zèle pour la vérité, et il se rendit sur toutes les îles d’une certaine importance, muni du livre Harpe. Il n’hésita pas à visiter l’île de Niihau qui était propriété privée, et dont l’accès était habituellement interdit.

Frère Rosselli fortifia également le petit groupe des frères d’Hawaii en leur relatant des faits encourageants qu’il avait vécus durant ses déplacements. Il donna entre autres le témoignage à Amy Ing, alors qu’elle était à l’ouvrage dans le magasin de son père, à Honolulu. Il lui laissa un jeu des Études des Écritures qu’elle allait garder précieusement pendant des années. Elle épousa Harry Lu, et tous deux devinrent de fervents défenseurs de la vérité concernant le Royaume.

Il était bouddhiste

Kameichi Hanaoka et Albert Kinoshita étaient du nombre de ceux qui assistaient aux réunions d’étude de la Bible tenues au domicile des Harrub. Les graines ténues de vérité qui s’étaient trouvées semées dans leur cœur ont fait de ces hommes de grands arbres de foi. Ces deux frères d’expression japonaise ont participé à la mise en place de la première étude en japonais, qui fut organisée en 1924. Tous deux restèrent dans le service du Royaume pour le restant de leur vie. Après la Seconde Guerre mondiale, frère Hanaoka contribuera au développement de l’œuvre au Japon, où il sera encore dans le service à plein temps une vingtaine d’années, jusqu’à sa mort en 1971.

Originaire d’Okinawa, James Nako était un bouddhiste convaincu, tout comme l’était d’ailleurs le reste de sa famille. Un jour, alors qu’il était occupé à fureter dans une librairie, son attention fut attirée par une Bible. Il se mit à la parcourir sans vraiment y comprendre grand-chose. Ce fut pourtant suffisant pour l’amener à quitter le bouddhisme et à se joindre à l’Église congrégationaliste de Makiki.

James raconta par la suite: “Je lus qu’un sujet serait développé en langue japonaise dans les locaux de la YMCA, à Honolulu, sur le thème ‘Des millions de personnes actuellement vivantes ne mourront jamais’. Cela différait tellement de ce que j’avais pu entendre jusque-​là que je décidai de m’y rendre. L’annonce nous conseillait d’apporter nos Bibles, et c’est ce que je fis. Je fus très impressionné par l’orateur, qui répondait à toutes les questions à l’aide de la Bible. J’ai donc rempli une petite feuille de papier pour indiquer que je désirais étudier la Bible.” C’est ainsi qu’il s’associa au groupe des Étudiants de la Bible qui, en 1926, comptait 12 personnes. James Nako progressa rapidement et fut baptisé en juillet 1927.

Voici comment frère Nako décrit l’activité de témoignage telle qu’elle était déployée à Honolulu en 1927: “Je possédais une vieille Ford T en piteux état, qu’il fallait démarrer à la manivelle. D’ordinaire, je remplissais le coffre avec un stock de numéros de L’Âge d’Or et de La Tour de Garde en japonais. Les périodiques étaient traduits au Japon de l’anglais en japonais et nous étaient expédiés par bateau en contrepartie du seul montant du fret. Nous les laissions gratuitement, en demandant aux personnes si elles désiraient étudier la Bible. Je me souviens que frère Hanaoka et moi, nous recevions près d’un millier de périodiques à distribuer par mois.”

Des “vauriens” de garçons

Le dimanche, James était cuisinier, ce qui lui interdisait de prendre part à la prédication. Il s’installa donc à son propre compte. Il s’avéra néanmoins que cela lui prenait beaucoup de temps, et il devint inactif sur le plan spirituel.

Il n’empêche qu’il se souciait toujours du bien-être spirituel de sa famille. Ainsi demanda-​t-​il à l’un des frères, James Watson, d’étudier la Bible avec sa famille, et celui-ci s’en acquitta fidèlement et patiemment.

“Quand venait l’heure de l’étude, se souvient frère Nako, mes deux vauriens de garçons, Richard et Tommy, passaient par la fenêtre de la chambre à coucher et allaient se cacher dehors. Ma fille aînée, Adeline, et moi étions alors obligés de ratisser le quartier, et généralement nous les retrouvions dans un parc, en bas de la rue.” Adeline sert à présent dans l’œuvre missionnaire au Japon, de même que les deux “vauriens” de garçons et leurs femmes.

Leur père allait-​il jamais participer de nouveau à l’activité de témoignage en faveur du Royaume? Oui, et il entreprit souvent le service de pionnier auxiliaire jusqu’à sa mort en 1972. Alice, sa veuve, prend souvent part au service de pionnier auxiliaire à Honolulu.

Mais revenons à l’époque où leurs proches, de religion bouddhique, commencèrent à leur susciter de l’opposition. Le mode de vie chrétien qu’avaient adopté les Nako tranchait radicalement avec ce qui avait cours parmi les natifs d’Okinawa, adeptes du culte des ancêtres. Leur entourage ne pouvait ainsi comprendre pourquoi ils se refusaient à brûler de l’encens lors de funérailles ou d’autres cérémonies en faveur des morts. On leur demandait souvent: “Pourquoi croyez-​vous cela?” et, avant que ne soit construite la Salle du Royaume à Honolulu en 1935, on les tournait en dérision en leur demandant: “Où est donc votre église?” James Nako et sa femme ont cependant contribué à amener nombre d’entre leurs proches à la vérité.

“Un feu brûlant dans mes os”

Joseph Dos Santos, de souche portugaise, avait été élevé à Hawaii dans un foyer catholique. Dès l’âge de 12 ans, il avait perdu sa confiance en l’Église. Après avoir suivi les cours de l’école supérieure de chiropractie de Berkeley, il s’installa en 1927 à Inglewood, en Californie. Il recherchait sincèrement la vérité et consacrait tout son temps libre à écouter les émissions religieuses à la radio et à visiter différentes églises. Toutefois, cela ne lui procurait aucune satisfaction, lui laissant plutôt un sentiment de vide.

Cette impression disparut lorsqu’en 1929 sa logeuse lui prêta un exemplaire de L’Âge d’Or traitant de l’Inquisition. Voici ce qu’il en dit: “Ce que j’ai lu dans ce périodique m’a amené à revoir ma conception de la vie. Le vide commençait à être comblé. Un Étudiant de la Bible de la localité a eu vent de mon intérêt et m’a fourni davantage de publications. Avant peu, je ne doutais plus d’avoir trouvé la vérité.”

Dans le courant de l’année, il retournait à Hawaii pour y exercer la chiropractie, et il continuait à se repaître des vérités bibliques exposées dans les ouvrages de la Société. “Tout comme dans le cas de Jérémie, se souvient-​il, la vérité contenue dans la Bible était devenue pareille à un feu brûlant dans mes os et je ne pouvais rester en place.” (Jér. 20:9). Quoiqu’isolé et donc privé de contact avec les autres Étudiants de la Bible de l’endroit, il prit l’initiative d’aller rendre visite à ses voisins du canton d’Aiea, dans l’île d’Oahu. Il s’empressa de mettre sur pied un groupe d’étude biblique avec une poignée de travailleurs immigrés venant des Philippines, et en 1931 l’assistance atteignait déjà 22 personnes. Comme il n’existait aucune publication dans leur langue, frère Dos Santos lisait des passages dans sa Bible anglaise et les faisait ensuite lire aux assistants dans leurs propres Bibles en philippin.

Cette activité énergique ne passa pas inaperçue aux yeux du clergé. Il ne fallut pas longtemps pour que le prêtre catholique d’Aiea fasse courir le bruit que frère Dos Santos était pupule (prononcez poupouleï, ce qui signifie “fou” en hawaïen). C’est de là qu’allait naître le sobriquet de Pupule Joe sous lequel celui-ci serait connu dans la région.

Un jour qu’il était en visite chez un ami, il fut très surpris à la vue du livre Prophétie. Auparavant, en effet, il pensait en toute bonne foi être le seul à Hawaii à posséder des livres venant des Étudiants de la Bible. Il pressa son ami de lui dire par quel moyen il avait obtenu le livre. Quelle agréable surprise ce fut pour lui d’entendre parler de James Watson et des cinq autres Étudiants de la Bible qui étaient actifs dans les îles!

Une décision importante est prise

“Pour moi était maintenant arrivée l’heure de prendre une décision, raconte frère Dos Santos, car je comprenais qu’il me fallait faire un choix. Soit poursuivre ma carrière de chiropracteur, qui pouvait procurer un soulagement passager à des personnes souffrantes, soit me consacrer à l’œuvre consistant à faire des disciples, avec à la clé des bienfaits éternels pour l’homme.” Confiant dans les paroles de Jésus à propos de la douceur du joug chrétien, il s’en remit à Jéhovah dans la prière (Mat. 11:29, 30). Il se hâta d’informer David Solomon (le surveillant du dépôt de publications de la Société à Honolulu) de sa décision de se consacrer à l’œuvre de prédication et de son désir d’aller prêcher dans les îles extérieures, laissant ainsi aux six autres Étudiants de la Bible le soin de s’occuper d’Honolulu. Quand bien même personne n’avait encore annoncé la bonne nouvelle en dehors de l’île d’Oahu, frère Solomon avait la conviction que ce jeune homme était bien déterminé. Il aménagea donc un véhicule qui lui servirait de logement dans son activité de colporteur. C’est donc en 1929 que commença la carrière de prédicateur à plein temps de Joseph Dos Santos. Celui-ci fit par la suite cette remarque: “Pour planter les graines de la vérité, j’ai arpenté pendant trois ans et demi le chapelet des îles d’Hawaii avec mon véhicule de marque Dodge et je n’ai pas eu une seule fois un pneu à plat!”

En raison de l’étendue du territoire, et parce qu’il était seul, c’est tout particulièrement par la diffusion de publications qu’il répandait le message. Voici ce qu’il écrit pour dépeindre son activité: “L’œuvre du Royaume allant bon train en ce temps-​là, les Étudiants de la Bible utilisaient de grandes sacoches ou des valises pour transporter leurs munitions spirituelles. Les gens étaient aimables et jamais personne ne nous insultait ni ne nous claquait la porte au nez. C’était un vrai régal! Les gens étaient heureux de nous voir et nous remettaient bien vite un dollar en échange de quatre livres, ce qui était l’offre courante. J’étais alors jeune et robuste et je pouvais marcher pendant des kilomètres sur des sentiers escarpés ou gravir des montagnes en traînant mes deux valises remplies de publications. J’ai connu bien des moments merveilleux. En certains endroits, les routes étaient si raboteuses et si rocailleuses que je ne pouvais les emprunter ni avec mon véhicule, ni même en marchant normalement. C’était particulièrement vrai dans le district de Kohala, sur la Grande Île. Parfois, j’étais littéralement obligé de grimper pour atteindre les maisons. J’ai aussi pu laisser une quantité assez importante de nourriture spirituelle pour les malades de la léproserie de l’île de Molokai.”

Il s’en tenait à un programme rigoureux, prêchant six jours par semaine et totalisant en moyenne 230 heures de service par mois. En trois ans et demi d’activité solitaire dans les îles d’Hawaii, il remit entre les mains du public 46 000 auxiliaires bibliques.

Lorsqu’il revint à Honolulu en 1933, frère Dos Santos avisa frère Solomon de son désir de propager la bonne nouvelle par toute la terre. La tournure des événements voulut néanmoins qu’il n’aille pas plus loin que les Philippines, où il séjourna près de 17 ans. Au cours de cette période, il dut résister à une violente opposition, dont trois années d’emprisonnement cruel assignées par les forces d’occupation japonaises durant la Seconde Guerre mondiale.

En 1949, frère Dos Santos revint à Hawaii avec sa famille. Là, il poursuivit avec sa femme le service de pionnier jusqu’en 1983, où il acheva sa course terrestre à l’âge de 88 ans. Sa détermination et son ardent zèle missionnaire ont eu un impact considérable sur l’œuvre du Royaume aussi bien à Hawaii qu’aux Philippines.

Filiale et première “Salle du Royaume”

Après avoir travaillé plus de huit ans au Béthel de Brooklyn, Don et Mabel Haslett furent nommés à Honolulu au printemps de 1934, afin d’aider la poignée de frères qui s’y activaient à mener à bonne fin leur mission de prêcher. En un rien de temps, une nouvelle filiale de la Société Watch Tower était ouverte. Frère Haslett en fut nommé surveillant. L’année suivante, Joseph Rutherford, le président de la Société Watch Tower, visitait les îles, et il approuva l’acquisition d’un terrain à l’angle de Pensacola Street et de Kinau Street, à Honolulu. C’est là que seraient installés les nouveaux locaux de la filiale. Il prononça également le discours du Mémorial, célébré dans une maison louée de Young Street qui avait servi pour les réunions. Au total, 25 personnes étaient présentes.

Pressentant de bonnes perspectives d’accroissement, frère Rutherford prit aussi des dispositions pour que les proclamateurs locaux édifient une salle de réunion attenante au nouveau bâtiment de la filiale. James Harrub s’approcha de lui et lui demanda: “Quel nom vas-​tu donner à ce lieu, une fois qu’il sera achevé?” La réponse de frère Rutherford fut la suivante: “Que dirais-​tu de ‘Salle du Royaume’, puisque c’est la bonne nouvelle du Royaume que nous prêchons?” C’est ainsi qu’est née en 1935 l’expression qui allait servir à désigner les dizaines de milliers de lieux de réunion des Témoins de Jéhovah partout dans le monde. Cette petite maison de culte située au 1 228 Pensacola Street, qui depuis lors a été agrandie et rénovée à trois reprises, détient l’insigne honneur d’être la première à avoir porté le nom de Salle du Royaume.

“Ma santé s’améliorait”

C’est en janvier 1933 que James et Dora Harrub purent enfin concrétiser leur vieux rêve de rejoindre les rangs des pionniers. Durant leur première année de service, ils demeurèrent à Honolulu, en attendant que soit fabriquée la caravane qui leur servirait de maison mobile. Lorsqu’elle fut terminée, ils partirent pour Maui et parcoururent l’île en l’espace de six mois, diffusant des publications et utilisant le phonographe pour présenter des sujets bibliques aux gens. L’étape suivante fut la Grande Île d’Hawaii, où ils passèrent une année entière dans le territoire, sans obtenir, du reste, beaucoup de résultats.

Ils se déplacèrent dans l’île de Kauai en 1936, et s’établirent sur la côte est, près de Kapaa. James aimait tant les gens de cette contrée qu’il écrivit à la Société pour demander sa nomination permanente à Kauai. La Société accéda à sa requête.

Lorsque James et Dora firent leurs débuts dans le service de pionnier, ils étaient tous deux de santé précaire, comme s’en souvient Dora: “Ma santé s’améliorait tandis que j’étais pionnier et je n’ai pas eu à m’en inquiéter.” Grâce à l’aide de Jéhovah, ils allaient connaître, leur vie durant, d’abondantes bénédictions, se réjouissant dans le service à plein temps. L’esprit d’abnégation et la foi inébranlable de cet homme et de cette femme allaient leur valoir le profond respect et l’amour des habitants de Kauai, dont beaucoup gardent d’eux un souvenir empreint d’affection. Après la mort de James, en 1954, Dora vendit leur maison et, ce qui reflète bien sa personnalité, avec cet argent elle finança la construction d’une Salle du Royaume à Kapaa. Elle était toujours dans le service de pionnier permanent lorsqu’elle mourut en août 1984, à l’âge de 94 ans. Elle et son mari avaient la magnifique espérance de recevoir leur récompense dans les cieux.

Une voiture à haut-parleur répand le message

Dans l’intervalle, quelques frères australiens avaient aidé, en 1935, les Haslett à acheter une automobile, une Plymouth, qui fut équipée d’un matériel de sonorisation complet. Un haut-parleur monté sur le pavillon de la voiture diffusait un discours public en anglais, en japonais, en iloko ou en tagal pendant que la voiture sillonnait les rues. Au cours de cette année-​là, plus de 17 000 personnes ont entendu parler du nom de Jéhovah grâce à ce matériel. À la fin de chaque discours, le voisinage était visité de maison en maison et le message était diffusé sous forme d’imprimés.

Cette méthode de prédication arrivait à point nommé, puisque des opposants, irrités par la visite de frère Rutherford en 1935, firent pression sur la station de radio locale pour obtenir la suppression des retransmissions des discours de frère Rutherford. Toutefois, on a pu atteindre un auditoire plus large par le moyen de la voiture à haut-parleur que par la radio auparavant.

Un pionnier s’établit à Hawaii

Eddie Medalio arriva à Honolulu en 1936 pour étayer le petit groupe de proclamateurs. Après son baptême en 1932 à Los Angeles, en Californie, il avait écrit au siège mondial de la Société, à Brooklyn, pour faire part de son intention de se rendre à ses propres frais aux Philippines, afin de prêcher à plein temps à ses concitoyens de Manille. Mais la Société lui conseilla de partir plutôt pour Hawaii et de prendre part au service de pionnier aux côtés des Haslett. Il pourrait ainsi prendre contact avec les nombreux Philippins qui s’y trouvaient.

Eddie était un ancien combattant de la Première Guerre mondiale. Il avait droit à une prime de la Marine américaine, somme avec laquelle il paya son billet de bateau pour Honolulu. Quelle joie pour Don et Mabel de recevoir de l’aide! Ils accueillirent cordialement Eddie et le firent loger dans les locaux de la filiale. Eddie épousa par la suite Eulalie, et la famille fut envoyée à Hilo, où Eddie fut nommé surveillant de la petite congrégation. Durant leur activité de pionniers, les Medalio allaient visiter bon nombre de villes isolées ainsi que les communautés ethniques (ou camps), dans lesquelles étaient regroupés les ouvriers des plantations de canne à sucre.

Eddie avait sa devise de pionnier: “Confie-​toi en Jéhovah de tout ton cœur.” (Prov. 3:5). Chaque jour, il repensait à ces mots et en parlait aux autres. Il ne manquait pas non plus de les citer quand il exhortait les jeunes qui venaient chercher conseil auprès de lui. Sa vie démontra qu’il tirait réellement un soutien de ces paroles inspirées. Il était d’un zèle inépuisable, ayant grand goût pour la vie et le culte de Jéhovah. Eddie avait su gagner auprès des autres un respect mêlé d’estime en raison de son humeur plaisante et de son attitude positive, et cela malgré les problèmes auxquels il faisait face personnellement. Il s’esclaffait souvent, et son irrésistible rire haché était tout à fait caractéristique. Beaucoup de jeunes ont pu apprécier l’intérêt profond et sincère qu’il leur portait, et ils l’appelaient affectueusement Grand-papa.

Frère Medalio fut pionnier permanent jusqu’au 3 janvier 1990, où il mourut des suites d’une pneumonie. Il était âgé de 93 ans et avait servi Jéhovah de toute son âme durant 58 ans. Il avait gardé jusqu’au bout sa vivacité d’esprit et restait fermement attaché à Jéhovah. Sur le dernier rapport d’activité, qu’il remit deux jours avant sa mort, il avait écrit: “Mon esprit est ardent, mais ma chair s’affaiblit. Je continue d’implorer l’aide de Jéhovah.”

Les Témoins d’Hawaii ont vraiment retiré des bénédictions de la compagnie de tels frères oints du Christ, dont beaucoup ont appliqué toute leur énergie au service de Jéhovah, étant en première ligne dans l’œuvre du Royaume. Après une existence consacrée à un tel service, il peut être dit à leur sujet: “Heureux les morts qui meurent en union avec le Seigneur à partir de maintenant. Oui, dit l’esprit, qu’ils se reposent de leurs travaux, car les choses qu’ils ont faites les accompagnent.” — Rév. 14:13.

Naissance d’une seconde congrégation

En 1939, le nombre des proclamateurs était passé à 30, chiffre remarquable en regard des 18 de l’année précédente. Une seconde congrégation fut fondée, à Hilo.

L’activité de témoignage s’intensifia avec l’organisation de marches publicitaires, durant lesquelles des proclamateurs portaient des pancartes pour annoncer les discours enregistrés qui pourraient être entendus à Hilo et à Honolulu. Le programme d’édification spirituelle dont se délectait le peuple de Jéhovah comprenait également la retransmission par ondes courtes des allocutions de frère Rutherford qui étaient captées aussi bien à la Salle du Royaume d’Honolulu que dans les îles extérieures. Comme bien peu de personnes avaient pris position pour Jéhovah dans les îles, c’était un puissant encouragement que d’entendre le message de la vérité se propager sur une échelle aussi étendue.

L’attaque de Pearl Harbor

À propos du 7 décembre 1941, Mabel Haslett raconte: “Nous nous dirigions en voiture vers Pearl City, juste au delà de Pearl Harbor, en vue d’une journée de témoignage quand, sur la route de Pearl Harbor, nous avons été refoulés par la police et par d’épaisses volutes de fumée. C’était la guerre!” Les forces armées japonaises avaient déclenché leur offensive aérienne sur Pearl Harbor, ce qui allait mettre hors de combat la flotte américaine stationnée là. Mabel poursuit: “Quelques jours après le 7 décembre, on frappe à la porte. Quatre hommes armés de revolvers emmènent Don au quartier général de l’armée, afin de l’interroger. La loi martiale est alors en vigueur. Aux quatre officiers, qui tour à tour le harcèlent de questions, Don répond à l’aide des Écritures. L’un d’eux, furieux, lui ayant dit: ‘Laissez donc votre Bible en dehors de cette discussion!’, Don lui répond: ‘C’est impossible, c’est ma défense.’ Finalement, l’officier responsable se lève, apparemment satisfait, et bien après l’heure de l’extinction des feux, Don est ramené à la maison. Après ces événements, l’œuvre progresse malgré les petites attaques auxquelles l’ennemi nous soumet de temps en temps.”

La Seconde Guerre mondiale allait entraîner le rationnement du carburant, le black-out en soirée, le couvre-feu et des difficultés pour le transport maritime. Mais en dépit de ces problèmes, le petit groupe de proclamateurs et de pionniers qui étaient disséminés dans les îles restait à l’œuvre dans l’activité de prédication. D’ailleurs, voici ce que James et Dora Harrub écrivirent à la filiale en 1942: “Avant Pearl Harbor, beaucoup prenaient des publications, mais la plupart se refusaient à croire qu’un jour Hawaii pourrait également être le théâtre de troubles graves. Cela a bien changé maintenant, et on nous pose souvent des questions à propos du futur immédiat, etc. Quand ils sont informés que les publications de la WATCH TOWER répondent à leurs questions, ils sont heureux de les acquérir.”

Molokai et 20 kilos à traîner

Après le bombardement de Pearl Harbor, et alors qu’il venait tout juste de connaître la vérité à Honolulu, Harold Gale reçut sa première affectation en tant que pionnier. Il raconte: “On m’a attribué l’île de Molokai, où je n’avais jamais mis les pieds auparavant. Tout seul avec juste une valise, je n’avais même pas une idée de l’endroit où je pourrais passer ma première nuit. Mais, grâce à l’aide de Jéhovah, j’ai eu la possibilité de loger chez l’un des Hawaïens les plus en vue de l’île. Il prit par la suite des dispositions pour que je puisse louer une maison située sur un peu moins d’un demi-hectare de terrain, où se trouvaient aussi 16 cocotiers. Et je ne payais que 7 dollars de loyer par mois. C’était juste en face de la plage, et à environ huit kilomètres au sud de la ville portuaire de Kaunakakai.”

Ne disposant d’aucun moyen de transport, frère Gale devait parcourir jusqu’à 30 kilomètres à pied dans la journée, traînant avec lui 20 kilos de matériel, comprenant une valise de livres, brochures et périodiques en six langues, ainsi qu’un phonographe avec 11 disques en autant de langues. Souvent, les Philippins demandaient à acheter les disques, quand ce n’était pas le phonographe. Plus tard, un Témoin d’Oahu fit parvenir à frère Gale une bicyclette, ce qui lui permit alors de parcourir quelque 60 kilomètres par jour. Norman Chock, un Témoin chinois, vint l’épauler dans l’activité de pionnier, ramenant sa voiture, une Willys sedan. L’essence était rationnée à 38 litres par mois en raison de la guerre; pourtant, ils parcoururent l’île de long en large. En l’espace de trois mois, ils dirigeaient 18 études bibliques.

Au nord de l’île se situe la léproserie de Kalaupapa, dont l’accès n’est possible qu’en bateau ou en avion, à moins de franchir un à-pic de 600 mètres. Frère Gale se rappelle: “Portant deux valises de livres, j’ai descendu le sentier abrupt et j’ai ainsi pu laisser 65 exemplaires du livre Enfants au responsable, M. Anderson, qui promit de les transmettre aux malades, car je ne pouvais les rencontrer personnellement.”

Sur la Grande Île d’Hawaii

Parmi ceux qui acceptèrent la vérité durant les années troubles de la guerre figuraient Shinichi et Masako Tohara. Frère Tohara était déjà entré en possession d’une publication en 1935, et en 1938 il avait vu les Témoins parcourir les rues de Hilo, en portant des panneaux publicitaires. Ralph Garoutte entreprit par la suite d’étudier la Bible avec lui. Au bout d’un mois d’étude à peine, Shinichi se mit à donner le témoignage à ses amis pendant l’heure du repas sur son lieu de travail, à la distillerie de saké (alcool de riz) de Hilo.

Il raconte sa première tentative dans le témoignage de maison en maison: “Un matin de mars 1942, j’ai préparé une sacoche, la bourrant de publications. J’étais déterminé à aller prêcher en compagnie de mon fils Loy. Je suis allé à la première maison et j’ai frappé à la porte, mais mon cœur, lui, frappait bien plus fort. Je ne me souviens pas de ce que j’ai bien pu raconter en cette première occasion. Toujours est-​il que je n’ai pas eu le courage d’aller jusqu’à la maison suivante, et je suis donc rentré chez moi.” Après avoir reçu l’aide de témoins plus expérimentés, il se débarrassa rapidement de son appréhension. Au cours du mois qui s’ensuivit, il prit une semaine de congé pour s’associer aux pionniers qui étaient à l’œuvre dans les territoires éloignés de Waimea et Kohala. Il était au comble de la joie! Le 19 avril 1942, lui et sa femme furent baptisés dans la baie de Hilo, dans les eaux calmes du Pacifique.

Se remémorant la parabole du marchand itinérant qui s’en était allé vendre promptement tout ce qu’il possédait pour pouvoir acheter la perle de grande valeur, à peine un mois après leur baptême ils vendirent leurs meubles et construisirent une caravane. En juin, ils reçurent leur première affectation de pionniers; ils étaient envoyés à Pahala, un canton rural de la région volcanique de la Grande Île d’Hawaii. Après s’être occupés de cette région reculée, ils furent déplacés vers le canton de Kona, où ils empruntèrent de nombreux sentiers de montagne pour rencontrer les humbles planteurs de café.

“César nous interdit de construire”

L’assistance aux réunions devenant toujours plus nombreuse, la Salle du Royaume en vint à être pleine à craquer. Comme il apparaissait qu’un lieu de réunion plus grand devenait nécessaire, il sembla approprié d’agrandir ce bâtiment, le premier au monde à être appelé “Salle du Royaume”. Mais en 1943, les matériaux de construction étaient denrées rares, et Hawaii se trouvait sous le régime de la loi martiale. Cela amena le gouvernement militaire à interdire cette extension.

Mabel Haslett se souvient: “Un jour, en arrivant à la maison, je trouve Don assis, en train de réfléchir, une lettre à la main. C’est l’autorisation de frère Knorr, le nouveau président de la Société, pour la construction d’une nouvelle Salle du Royaume derrière le bâtiment de la filiale, sur le terrain de la Société. Don dit: ‘César nous interdit de construire, mais l’organisation de Jéhovah nous dit qu’il faut construire. Eh bien, nous allons lui obéir.’”

Affermis par l’esprit de Jéhovah, les frères surmontèrent les obstacles, travaillant jour et nuit, allant récupérer du sable dans les baies et des pierres dans les montagnes. On acheta à un prix modique des rails d’acier réformés à la compagnie ferroviaire d’Oahu et on récupéra à la décharge des chutes de bois qui servirent pour le coffrage du béton.

Les sœurs fournirent également avec courage un dur travail pour débarrasser les rails de leur couche de rouille et les peindre. Un ami de Harry Lu prêta un poste à souder fonctionnant à l’essence, ce qui permit, en dépit du rationnement de l’essence, de souder les rails d’acier pour en faire des fermes.

L’un des volontaires, Harold Gale, se souvient: “Nous avons demandé à un entrepreneur ce qu’aurait coûté l’opération si elle avait été exécutée par une entreprise et combien de temps aurait duré le chantier. Il déclara que cela aurait sans doute atteint les 17 000 dollars et qu’il y en aurait eu pour un an et demi de travaux. À la fin du chantier, nous avons estimé les dépenses à 700 dollars, y compris les repas pour les 65 volontaires, et le travail avait été mené à bien dans un délai de trois mois.”

Les premiers missionnaires arrivent

Le groupe des Témoins connaissait une condition spirituelle prospère au sortir de la Seconde Guerre mondiale. En 1946, on enregistra un maximum de 129 proclamateurs, soit plus du double du chiffre qu’on avait connu lors de l’attaque de Pearl Harbor, près de cinq ans auparavant. Cette année-​là, 38 personnes se sont fait baptiser.

L’un des temps forts de cette période d’après-guerre fut la visite de Nathan Knorr et de Milton Henschel, du siège mondial de la Société à New York. Au cours de cette visite, on laissa entendre que des missionnaires formés à l’École de Galaad seraient envoyés à Hawaii, afin de donner un nouvel essor à l’œuvre.

À leur arrivée, le 27 septembre 1947, Martha Hess et Ruth Ulrich, diplômées de la septième classe de Galaad, eurent droit à l’accueil traditionnel hawaïen. Des danseuses se balançaient au son mélodieux des airs hawaïens, joués par l’ensemble royal d’Hawaii. Les frères et sœurs étaient si heureux de pouvoir accueillir ces missionnaires qu’ils les couvrirent de guirlandes de fleurs.

L’œuvre consciencieuse et désintéressée de ces deux missionnaires allait être d’une odeur agréable pour les gens d’Hawaii, alors que les missionnaires de la chrétienté leur avaient laissé un arrière-goût amer. Martha se souvient du constat désabusé d’un comédien hawaïen: “Les premiers missionnaires arrivaient dans les îles, vous donnaient une Bible et vous disaient de regarder vers le grand Dieu qui est dans le ciel. Et pendant que vous aviez le nez en l’air, ils en profitaient pour vous subtiliser toutes vos terres.”

Quand ces deux diplômées de Galaad sont arrivées, il y avait 129 proclamateurs qui se répartissaient entre les trois congrégations d’Oahu (Honolulu, Maili et Waimea), les deux de la Grande Île d’Hawaii (Hilo et Kona) et les groupes plus restreints se trouvant sur Kauai, Maui et Molokai.

Pendant dix ans et demi, les deux missionnaires ont déployé une activité zélée à Hawaii, aidant nombre de personnes à marcher sur le chemin de la vie. Leur excellent exemple et leur enthousiasme pour la prédication ont fait naître l’esprit pionnier chez de nombreux jeunes. En 1957, Martha et Ruth ont été nommées au Japon, où ensemble elles ont poursuivi leur activité missionnaire jusqu’à ce jour.

En 1947, après la crise survenue au Japon, frère Knorr envoya une lettre posant la question: “Qui d’entre les frères hawaïens serait disposé à aller au Japon?” Jerry et Yoshi Toma, Shinichi et Masako Tohara, ainsi qu’Elsie Tanigawa, tous Hawaïens d’origine japonaise, se portèrent volontaires. Écrivant à frère Knorr, Don demanda: “Et pourquoi pas les Haslett?” Les deux furent donc adjoints au groupe. Ce groupe passa de sept à neuf lorsque les deux filles des Tohara, qui les avaient suivis à l’École de Galaad, puis au Japon, devinrent à leur tour missionnaires une fois adultes. Tous sont encore aujourd’hui dans l’activité missionnaire, à part les Haslett, chrétiens oints de l’esprit, qui ont achevé leur course terrestre.

Un esprit pionnier authentique

L’œuvre étant bien organisée sur Oahu, la possibilité s’offrait maintenant d’accorder une attention particulière aux îles avoisinantes, qui n’avaient pas encore été visitées. Il s’agissait dès lors de faire preuve de bonne volonté et de zèle pour porter la bonne nouvelle dans ces îles isolées. Toutefois, dans les années 50, le service de pionnier demandait de s’accommoder de situations bien pénibles.

John Ikehara s’installa à Kona, sur la Grande Île d’Hawaii, le 1er avril 1955, en vue de soutenir le petit groupe qui s’y trouvait. Ne réussissant pas à décrocher un emploi à temps partiel, il vivait principalement de légumes et de fruits qu’il faisait pousser dans le jardin de la Salle du Royaume. Voici le souvenir qu’il garde de son étude avec un Philippin, qui habitait dans l’une des plantations de café: “Mes yeux devenaient tout irrités par la fumée de la lampe à pétrole. Il donnait ses réponses en anglais et lisait les paragraphes en iloko.” John attendait vraiment avec impatience le moment de l’étude, et cela à plus d’un titre. Il explique: “Chaque semaine, avant l’étude, l’homme insistait pour que d’abord nous mangions.” Voilà qui était une aubaine, puisque John trouvait ainsi un complément en protéines à son régime végétarien.

Les difficultés qu’il rencontra à Kona furent une excellente formation qui lui servit plus tard, quand il fut nommé comme missionnaire au Japon, où il fut actif jusqu’à sa mort. Loin de se plaindre, John écrira un jour: “Je remercie Jéhovah pour les nombreuses bénédictions qu’il a déversées sur moi et sur des milliers d’autres. Je suis très reconnaissant à la Société de son soutien et de sa grande patience à mon égard.”

En automne 1954, Keith Stebbins, le surveillant de la filiale, demanda à Nathaniel Miller, un missionnaire du Japon qui se trouvait à Hawaii en raison de l’état de santé de sa femme, s’il accepterait d’être nommé pionnier spécial à Kekaha, sur l’île de Kauai.

Bien que sans voiture, pourtant très utile dans ce territoire rural, Nat Miller et sa femme, Allene, consentirent à partir sur-le-champ. L’état de santé d’Allene l’empêchant d’atteindre l’objectif en heures des pionniers spéciaux, il fallait que les deux s’en sortent avec la seule allocation de Nat, soit 30 dollars par mois.

Le problème de transport fut résolu lorsque Harry Lu donna aux Miller une Dodge 1933. Les roulements broutaient, ce qui limitait la vitesse à 40 kilomètres à l’heure, mais elle ne les a jamais plantés là. Il est vrai que parfois il leur fallait 30 minutes ou presque pour la faire démarrer.

Ne disposant que de peu d’argent pour acheter de l’essence, ils concentraient leur attention sur les alentours de la Salle du Royaume, dans les villes de Kekaha et de Waimea. Environ un an plus tard, après qu’Allene est devenue pionnier spécial, ils commencèrent à prêcher à Hanapepe, Port Allen et Koloa. Ils emballaient le déjeuner et le dîner, et partaient pour la journée, prêchant et dirigeant des études jusqu’à dix heures du soir. Bientôt, la congrégation comptait deux fois plus de personnes et une nouvelle congrégation fut créée dans la ville voisine de Koloa.

Des centaines de délégués sont hébergés

Les Témoins d’Hawaii furent au comble de la joie lorsqu’ils apprirent qu’ils allaient pouvoir héberger des centaines de délégués qui participaient au voyage autour du monde organisé par la Société dans le cadre des assemblées “La bonne nouvelle éternelle” de 1963. Il avait été prévu qu’une assemblée se tiendrait au Waikiki Shell, un amphithéâtre attenant à la célèbre plage de Waikiki.

Il était merveilleux de pouvoir profiter de la chaleureuse compagnie de si nombreux visiteurs. Plus de 6 000 personnes étaient présentes pour écouter le discours clé de frère Knorr, discours en outre retransmis en direct à la télévision dans tout l’archipel. La population ne pouvait manquer de constater que les Témoins de Jéhovah sont vraiment un peuple international. Les délégués étaient aussi ravis par le décor dans lequel avait lieu l’assemblée. Le Waikiki Shell se trouvant au pied du fameux Diamond Head, les assistants apprécièrent la douceur des alizés.

Un nouveau surveillant de filiale

Après avoir suivi à l’École de Galaad une formation spécialement destinée aux surveillants de filiale, Keith Stebbins reçut en 1964, avec sa femme, une nouvelle affectation qui les amènerait en République dominicaine. Au fil de ses 11 années d’activité à Hawaii, il avait observé comment Jéhovah avait béni l’œuvre en la gratifiant d’un remarquable accroissement. Le nombre des proclamateurs avait plus que doublé, grimpant de 770 à 2 064, alors que celui des congrégations avait triplé, passant de 12 à 37. Le sens aigu de l’organisation de frère Stebbins avait permis de consolider les structures de l’œuvre à Hawaii et avait créé un terrain propice à une future expansion.

À l’assemblée de district “Le fruit de l’esprit”, à Hilo, en 1964, frère Knorr annonça que Robert Kawasaki était nommé surveillant de filiale. Frère Kawasaki, né à Hawaii où il a grandi, servait comme surveillant de district depuis 1961, année où il a été diplômé de l’École de Galaad.

Quelque chose ne va pas

Durant l’année 1965, les membres de la filiale restèrent perplexes et soucieux en constatant, à la lumière des rapports d’activité des trois premiers mois de l’année de service, la diminution régulière du nombre des proclamateurs. Cela était des plus inhabituel, puisqu’à Hawaii on s’était toujours réjoui de connaître un accroissement constant.

Sur les directives de frère Knorr, une réunion spéciale fut tenue en présence de certains surveillants de district et de circonscription. Neuf heures de discussion approfondie, avec le recours régulier à la prière, ont permis de dégager clairement deux des causes de ce recul: le matérialisme et une spiritualité chancelante.

À cette époque, l’économie hawaïenne connaissait un essor considérable en raison du tourisme, et l’industrie du bâtiment une prospérité sans précédent. Tout cela eut pour conséquence la montée en flèche du coût de la vie. Certains Témoins ont cédé à l’attrait d’un deuxième emploi, et des chrétiennes ont pris un travail profane à temps complet. Beaucoup de jeunes préféraient s’investir dans un travail profane plutôt que d’entreprendre le service de pionnier. Même certains Témoins qui assumaient des responsabilités dans les congrégations en sont venus à se laisser accaparer par le souci de gagner de l’argent.

Néanmoins, le manque de spiritualité parmi les proclamateurs était un problème encore plus inquiétant et plus profondément enraciné. Certains ne prenaient pas le temps de lire chaque jour la Bible, pas plus, d’ailleurs, que celui d’examiner le texte du jour tiré des Écritures. Les parents n’étudiaient pas non plus la Bible avec leurs enfants.

Frère Knorr fit parvenir du siège mondial un conseil approprié: “Nous devons prodiguer tous les avertissements d’ordre spirituel possibles, afin d’édifier la SPIRITUALITÉ des congrégations. Quand des personnes sont fortes sur le plan spirituel, elles participent régulièrement à la prédication. La prédication fortifie également notre spiritualité. Une personne ne peut toutefois pas prendre part avec énergie à la prédication si elle ne se nourrit pas de choses spirituelles.”

On met l’accent sur la spiritualité au quotidien

En tenant compte de ces instructions très opportunes, il fut décidé que par le moyen des surveillants itinérants on mettrait fortement l’accent sur la spiritualité au quotidien. La lecture quotidienne de la Bible, l’étude régulière en famille et l’examen du texte du jour seraient soigneusement mis en valeur dans les congrégations. Une campagne de diffusion de l’Annuaire (qui contenait alors les textes du jour) fut entreprise avec succès, ce qui permit à chaque proclamateur et à chaque personne qui étudiait la Bible de disposer de son exemplaire personnel.

Il fut aussi prévu de tenir les assemblées de district annuelles sur chacune des îles principales d’Hawaii. De cette manière, les Témoins à travers tout l’État pourraient assister facilement à l’assemblée et n’auraient pas à se rendre à Honolulu en avion, ce qui coûtait très cher.

Les différents moyens mis en œuvre pour souligner le caractère vital de la spiritualité dans la vie des serviteurs de Jéhovah ont commencé à porter du fruit. L’accroissement du nombre des proclamateurs était de 4 % en 1966, alors que de 1967 à 1969 il a été de 10 % chaque année. Cela prouve que la prompte mise en pratique des instructions venant de l’organisation de Jéhovah nous vaut à coup sûr sa bénédiction.

Une condition spirituelle qui s’améliore incite au zèle chrétien. Cela devint de plus en plus visible parmi les jeunes. Beaucoup commencèrent à aspirer à des privilèges de service accrus. En 1968, dix pionniers zélés furent invités à l’École de Galaad, au Béthel de Brooklyn, après quoi ils furent nommés missionnaires en Micronésie.

L’œuvre s’étend en Micronésie

Peu avant la visite de zone de frère Knorr, en avril 1968, une importante compagnie aérienne annonçait dans les colonnes du Honolulu Star Bulletin l’ouverture de lignes entre Hawaii, la Micronésie et Guam. Comme les îles Marshall (à l’extrémité est de la Micronésie) venaient récemment d’être placées sous la surveillance de la filiale d’Hawaii, les membres du bureau de la filiale s’empressèrent de montrer l’article à frère Knorr. Voici comment frère Kawasaki décrit la scène: “Je pouvais voir ses yeux s’illuminer à mesure qu’il se représentait les possibilités qu’offrait cette nouvelle liaison aérienne d’étendre l’œuvre dans les sept districts de Micronésie et de Guam.” Après un moment de silence et de réflexion, frère Knorr se tourna vers frère Kawasaki et lui dit: “Frère [Nathaniel] Miller pourrait s’occuper de ces îles en tant que surveillant de circonscription, et toi tu pourrais en faire de même, à tour de rôle.”

La Micronésie compte 2 000 îles — 97 d’entre elles sont habitées — dispersées sur une surface océanique de 7 800 000 kilomètres carrés, à l’ouest d’Hawaii. Chaque district possède sa propre langue. Cependant, comme le Japon avait occupé la majeure partie de la zone après que la Société des Nations eut placé celle-ci sous mandat japonais après la Première Guerre mondiale, pendant près de 25 ans le japonais a été enseigné dans les écoles. Beaucoup dans la région en vinrent à le parler couramment. Frère Miller ayant étudié le japonais alors qu’il était missionnaire au Japon, il était tout à fait apte à voyager dans ces îles.

Les dispositions prises par frère Knorr allaient finalement aboutir au rattachement de Guam et des autres territoires de Micronésie à la filiale d’Hawaii, le 1er janvier 1969. La filiale n’étant pas très éloignée de ces îles, il devint manifeste qu’elle serait bien placée pour rester en contact étroit avec les quelques proclamateurs de ces territoires isolés et pour leur apporter son aide. Alors que frère Miller parcourait la région en qualité de surveillant de circonscription, frère Kawasaki visitait une fois l’an les neuf maisons de missionnaires. Quand des missionnaires furent nommés surveillants de circonscription, tous deux continuèrent néanmoins à visiter chaque année les maisons de missionnaires; ils étaient par ailleurs surveillants de district pour Guam et la Micronésie. Ainsi s’ouvrait une page de l’histoire de la filiale d’Hawaii caractérisée par une activité intense et gratifiée d’excellents résultats spirituels.

En route vers de nouveaux territoires

On décida d’envoyer dans les maisons de missionnaires de Micronésie des pionniers venant d’Hawaii. Frère Knorr avait émis l’idée que la plupart d’entre eux pourraient sans grande difficulté se faire au mode de vie de ces îles et s’intégrer à la population locale. Ce fut une décision de grande portée, puisqu’elle allait fournir à de nombreux jeunes éléments d’Hawaii une occasion unique de servir en tant que missionnaires dans des territoires presque vierges.

Bien que la perspective de devenir missionnaire en Micronésie fût attrayante, cela ne pourrait certainement pas se faire sans efforts. Durant la Seconde Guerre mondiale, le plus gros des combats entre le Japon et les Alliés s’était précisément déroulé dans ces îles. Des endroits comme l’atoll Kwajalein, les îles Truk, Saipan, Guam et Peleliu avaient été le théâtre de terribles batailles. La dévastation était de grande ampleur dans le secteur, et la remise en état lente. N’existaient que quelques routes pavées, dont la chaussée se transformait, selon le temps, en piste poussiéreuse ou en horrible bourbier. La distribution de l’électricité était sporadique, voire inexistante. L’absence d’égouts et d’eau potable engendrait bien souvent des troubles dus à des parasites intestinaux. Et puis il fallait compter avec l’implacable chaleur tropicale et l’humidité, qui étaient beaucoup plus marquées et intenses qu’à Hawaii.

C’est dans de telles conditions que les missionnaires, pour la plupart des pionniers venant d’Hawaii, jetèrent les bases de l’œuvre. Ils devaient patauger dans des torrents, se déplacer en embarcations et se frayer un chemin à travers d’épaisses forêts pour pouvoir atteindre les maisons des gens. Les souliers n’étaient pas indiqués dans ces terrains détrempés et boueux. La plupart des missionnaires se sont donc mis à porter des sandales en caoutchouc pour aller prêcher.

Les insulaires de Micronésie apparaissaient de disposition douce et amicale. Leur respect pour la Bible rendait la prédication très agréable parmi eux.

S’il avait pu y avoir un quelconque doute sur le soutien que Jéhovah accorderait à cette disposition, à savoir confier la Micronésie aux soins de la filiale d’Hawaii, le rapport d’activité d’août 1970 allait permettre de trancher. Guam faisait état d’un accroissement de 88,6 % du nombre des proclamateurs, les îles Marshall d’un accroissement de 25 %, Pohnpei et Saipan respectivement de 82,4 % et de 114,3 % d’accroissement. Les missionnaires ont également obtenu de bons résultats après avoir commencé à prêcher à Belau (ou Palau), à Yap, et dans les îles Truk.

La remarquable attitude des jeunes

Dans les années 60 et 70, un solide esprit pionnier se répandit parmi les jeunes d’Hawaii. En 1971, on estimait qu’après avoir obtenu un diplôme de l’enseignement secondaire, 95 % des jeunes s’engageaient dans le service à plein temps. Beaucoup furent par la suite envoyés en Micronésie comme missionnaires et permirent d’intensifier la proclamation du message du Royaume dans ces îles éloignées. Des dizaines de jeunes hommes en bonne santé ont eu la joie d’aller travailler au Béthel de Brooklyn et à la Ferme de la Société Watchtower.

Ce zèle était stimulé par la vaillante équipe des surveillants itinérants, dont l’enthousiasme était communicatif. Bon nombre des anciens dans les congrégations se montraient très actifs, fournissant ainsi un excellent exemple, et manifestaient un état d’esprit positif en présentant aux jeunes le service de pionnier comme étant une carrière d’avenir. Les pionniers bénéficiaient d’une manière générale du soutien des parents et de la congrégation. Il n’était donc pas étonnant de voir de si nombreux jeunes gens s’épanouir sur le plan spirituel.

Le typhon Pamela — À quelque chose malheur est bon

Le 13 mai 1976, Pamela, un typhon extrêmement dévastateur, s’abattait sur Guam. Ses vents soutenus à plus de 230 kilomètres à l’heure en ont fait l’un des plus violents typhons à avoir jamais touché l’île. Quatre-vingt pour cent des bâtiments de l’île ont été endommagés, une bonne moitié d’entre eux de façon irrémédiable. La Salle du Royaume et la maison de missionnaires contiguë furent totalement détruites. Par bonheur, parmi les missionnaires et les proclamateurs, aucun ne perdit la vie.

La nécessité de reconstruire au lendemain de ce désastre a incité les membres du bureau de la filiale d’Hawaii à revoir la manière dont l’œuvre était administrée à Guam et en Micronésie. Après avoir examiné la question dans la prière, ils arrivèrent à la conclusion qu’une filiale implantée à Guam serait vraisemblablement mieux à même de diriger l’œuvre en Micronésie. À ces fins, des recommandations et des plans pour les bureaux d’une nouvelle filiale furent soumis à l’approbation du Collège central, qui donna son agrément. La nouvelle filiale s’occuperait de l’œuvre de proclamation du Royaume à Guam et dans tous les districts insulaires de Micronésie. On conçut donc une construction moderne comprenant six chambres, un bureau, une grande Salle du Royaume de 400 places et des installations permettant quelques petits travaux d’imprimerie. Cette entreprise était de grande envergure, et elle ne fut pas menée à bien aussi aisément que prévu.

Construction de la filiale de Guam — dans la chaleur et l’humidité

On fit l’acquisition d’une première parcelle de terrain, adéquate et bien située. Les travaux commencèrent en janvier 1978. Des Témoins d’Hawaii et de l’ensemble des États-Unis vinrent offrir leur aide dans des domaines comme la charpente, la plomberie, la peinture, l’architecture, l’électricité et le génie civil. Nombre de volontaires de cette équipe possédaient de remarquables compétences dans le domaine du bâtiment. Le travail prit un bon départ.

Néanmoins, les difficultés propres à des travaux de construction dans la chaleur et l’humidité harassantes qui règnent à Guam, ainsi que la vie en cercle restreint, eurent des conséquences regrettables. Les besoins du chantier entraînaient souvent des négligences dans l’assistance aux réunions et la participation à la prédication, et cela sur des périodes prolongées.

Dans le but de limiter les sources de tensions, la filiale d’Hawaii conseilla d’accorder plus d’importance et d’attention à la spiritualité de ceux qui participaient à ce projet. L’état d’esprit général s’en ressentit de façon remarquable. Les volontaires consentirent de louables sacrifices afin de poursuivre le travail. Ils travaillaient ensemble, souvent sous un soleil de plomb, et faisaient montre d’une bonne volonté exemplaire en se dépensant sans réserve. Jéhovah Dieu a béni leur fidélité et leur endurance en leur donnant d’achever les magnifiques installations de la nouvelle filiale, aménagée de façon splendide dans un cadre tropical, à l’écart des zones urbaines. Le 20 avril 1980, au cours de sa visite de zone à Guam, frère Milton Henschel, membre du Collège central, dédia au culte pur de Jéhovah le nouveau bâtiment.

Le 1er mai 1980, la filiale de Guam devenait opérationnelle, assurant une direction efficace de l’œuvre dans les îles de Micronésie et à Guam. Nathaniel Miller, du Comité de filiale d’Hawaii, qui avait beaucoup voyagé dans ces districts insulaires lorsque ceux-ci dépendaient de la filiale d’Hawaii, fut nommé coordinateur du Comité de la nouvelle filiale de Guam. Hideo Sumida et Arthur White, qui étaient aussi précédemment membres du Comité de filiale d’Hawaii, quittèrent Hawaii et vinrent compléter le Comité de filiale de Guam.

Pendant 11 ans, la filiale d’Hawaii s’était occupée des îles de Micronésie et de Guam. Quel privilège d’avoir pu collaborer avec les missionnaires et les proclamateurs locaux qui, avec courage, ont inauguré l’œuvre du Royaume dans ces îles éparpillées, plantant et arrosant les graines de vérité dans le cœur des humbles insulaires!

Seconde vague d’immigrants

Durant les années 80, Jéhovah a béni Hawaii par un accroissement conséquent et régulier. En octobre 1983, le chiffre maximum des proclamateurs franchissait pour la première fois de l’histoire d’Hawaii la barre des 5 000, avec 5 019 Témoins actifs dans la prédication, répartis dans 60 congrégations.

Au cours des dernières années, attirée par une relative prospérité matérielle, une seconde vague d’immigrants en provenance d’autres îles du Pacifique a déferlé sur Hawaii. Ceux-ci ont naturellement apporté dans leurs bagages leur culture et leur langue natales. Afin de pouvoir recevoir les nombreuses personnes comparables à des brebis qui s’y trouvaient, il a fallu former davantage de congrégations d’expression étrangère. À intervalles rapprochés, on a fondé des congrégations pour les personnes parlant le japonais, le coréen, le samoan, l’espagnol et l’iloko. Les Témoins de ces congrégations sont bien organisés et se montrent diligents dans l’exercice de leurs responsabilités chrétiennes.

Une filiale trop petite

La progression du nombre des proclamateurs supposait une demande accrue de publications et de plus en plus de congrégations dont le bureau de la filiale aurait à s’occuper. Le petit entrepôt jouxtant le bureau était de plus en plus encombré. Le bureau lui aussi se remplissait à mesure que l’on augmentait le personnel pour traiter la masse toujours plus impressionnante de courrier.

Le bureau de Pensacola Street, qui avait servi les intérêts du peuple de Jéhovah à Hawaii pendant plus de 50 ans, était devenu tout bonnement trop petit. Comme il était placé dans une zone à forte densité de population, au centre de la ville d’Honolulu, son agrandissement n’aurait guère été possible. Pour ces raisons, des recherches furent entreprises en vue de trouver un emplacement approprié pour une nouvelle filiale plus spacieuse.

En 1985, un agent immobilier envoyait au bureau de la filiale un prospectus proposant un terrain à vendre de près d’un demi-hectare, comportant un bâtiment de 2 300 mètres carrés, à savoir un ancien supermarché. L’emplacement était intéressant, à proximité de l’aéroport et du centre-ville d’Honolulu. Bien qu’un autre acquéreur éventuel eût pris une option sur la propriété, avec l’accord du Collège central les membres du Comité de filiale sont entrés en contact avec l’agent pour faire une proposition. De façon inattendue, celui qui s’était intéressé en premier à l’affaire se désista. Le propriétaire du terrain se montra bien disposé vis-à-vis des Témoins de Jéhovah, ce qui fournissait une autre preuve de l’action de la main de Jéhovah dans cette affaire. En quelques mois seulement, la transaction était ratifiée, et en novembre 1985 l’acte notarié était remis à la Société.

Faire d’un ancien supermarché un bureau, un entrepôt, des logements et deux Salles du Royaume posait un passionnant défi. Les Témoins d’Hawaii ne s’étaient encore jamais attaqués à un projet de construction d’une telle ampleur. On forma un comité de construction, on prépara les plans, et divers services techniques furent mis en place. On savait pouvoir compter sur l’empressement des Témoins locaux à mettre à contribution leurs compétences et à fournir la main-d’œuvre, toutes nécessaires pour mener à terme la tâche. Mais naturellement, on était bien conscient que la clé de la réussite d’une telle entreprise n’était autre que celle qu’évoque avec justesse le psalmiste en Psaume 127:1: “Si Jéhovah lui-​même ne bâtit la maison, c’est inutilement que ses bâtisseurs y ont travaillé dur.”

“Vraiment comme au temple de Salomon!”

Afin que chacun puisse prendre connaissance des plans de la filiale, des réunions spéciales se sont tenues à partir de février 1987, en sept endroits différents de l’État. Plus de 5 000 personnes se retrouvèrent au Waikiki Shell. Les membres du comité de construction firent part de l’avancement du projet et exposèrent les grandes lignes du calendrier des travaux, dont le démarrage était prévu pour le 1er mars 1987.

Les travaux furent entrepris avec beaucoup d’ardeur. C’est littéralement par milliers qu’hommes et femmes d’Oahu et des autres îles arrangèrent leurs affaires afin d’y participer. Certains venaient sur le chantier en fin de semaine, d’autres pour de plus longues périodes. Bien des Témoins d’Oahu ont généreusement ouvert leur foyer aux travailleurs venus des îles voisines. Au plus fort des travaux, quelque 150 volontaires étaient présents les jours de semaine, et entre 200 et 300 en fin de semaine.

Quoique le travail pût paraître ardu et les heures parfois bien longues, il régnait un climat de joie et de bonne volonté. L’accent était mis sur la spiritualité. Le texte du jour était examiné quotidiennement et La Tour de Garde étudiée chaque semaine. Des discours bibliques étaient présentés régulièrement, en présence de toute l’équipe.

Grâce à la coopération de divers hommes de métier et de dizaines de volontaires prompts à collaborer, les travaux avancèrent sans incident notoire. Un des volontaires fit ce commentaire: “Cela se passe vraiment comme au temple de Salomon!” Il y avait quand même une certaine différence entre le temple de Salomon et le nouveau bâtiment de la filiale. Le temple de Salomon était en partie recouvert d’or et l’édifice avait été “préfabriqué”, de sorte que sa construction n’engendrait que peu de bruit sur le site. Les locaux de la filiale ont été bâtis avec du ciment, du bois, de l’acier, et au milieu de beaucoup de bruit. Pourtant, il y avait bien une similitude: le même esprit qui avait animé les bâtisseurs du temple aux jours de Salomon était aussi celui qui poussait à l’action les volontaires d’Hawaii. Les très attrayantes installations de la filiale sont nées d’un supermarché délabré, laissé à l’abandon. Cela tenait du miracle!

Les travaux de construction prenaient beaucoup de temps. Cinq maximums dans le nombre des proclamateurs furent néanmoins atteints en 1986. À la fin de cette année de service, deux nouvelles congrégations étaient formées. En 1987, on enregistrait trois chiffres de pointe en proclamateurs, et trois autres congrégations voyaient le jour. En juillet 1987, la construction était achevée. Le mois suivant, les activités de la filiale étaient transférées à la nouvelle adresse.

La pluie tombe — le moral est au beau fixe

Le 3 avril 1988 au petit matin, il pleuvait à Honolulu, mais il n’y avait pas là de quoi altérer le moral des 5 870 assistants réunis au Neal Blaisdell Center pour suivre le programme d’inauguration de la filiale. Les 2 838 autres auditeurs qui s’étaient assemblés sur les îles de Maui et de Kauai, ainsi que sur la Grande Île d’Hawaii, pouvaient écouter, grâce à une liaison téléphonique, le programme de la journée retransmis depuis Honolulu. Le coordinateur du Comité de filiale retraça l’historique et les progrès de l’œuvre du Royaume à Hawaii. Les proclamateurs qui étaient actifs dans les îles depuis plus de 38 ans étaient assis au premier rang, et ils approuvèrent de tout cœur l’orateur lorsqu’il affirma que Jéhovah avait abondamment béni Son peuple à Hawaii.

Une projection de diapositives de 30 minutes fut présentée simultanément dans les divers lieux d’assemblée, illustrant les différentes étapes de la métamorphose de l’ancien supermarché en nouveaux locaux pour la filiale. Les quatre membres du Collège central qui s’étaient déplacés pour la circonstance prirent tour à tour la parole devant ce large auditoire. Dans un vibrant discours, Daniel Sydlik parla de la justice de Jéhovah comme étant aussi immuable et constante que les montagnes (Ps. 36:6). Se basant sur la pensée du Psaume 144:15b, Lyman Swingle prodigua à l’auditoire l’encouragement suivant: “Faites le compte des bénédictions reçues.” Lloyd Barry établit le parallèle entre la réjouissance qui accompagnait la fête des Huttes et celle que connaissent aux temps modernes les vrais adorateurs, qui célèbrent la grande récolte qu’effectue Jéhovah (Lév. 23:40). Lors de son discours d’inauguration, Milton Henschel déclara ce qui suit: “Notre Dieu est un Dieu qui a un dessein, et il rend manifeste sa suprématie au travers de ses actions. L’inauguration des installations de cette nouvelle filiale s’inscrit dans le dessein de Jéhovah. Nous désirons bien discerner la façon dont ce nouveau bâtiment sera utilisé en rapport avec la volonté de Jéhovah.”

Alors que cette journée particulière touchait à sa fin, et que les foules étaient unies pour le chant du cantique et la prière finale, leurs sentiments étaient semblables à ceux des Israélites après l’inauguration du temple de Salomon. Ils “s’en allèrent dans leurs foyers, se réjouissant et se sentant le cœur joyeux pour tout le bien que Jéhovah avait réalisé”. (1 Rois 8:66.) Ce fut un magnifique événement d’ordre spirituel, une étape décisive dans les 70 ans de l’histoire du peuple de Jéhovah à Hawaii.

Comme prévu, la construction des nouveaux locaux de la filiale amena à envisager sérieusement la rénovation des Salles du Royaume vieillissantes ou la possibilité d’en construire de nouvelles pour les congrégations florissantes. En mai 1986, la première Salle du Royaume construite selon le procédé de construction rapide voyait le jour à Kekaha, sur l’île de Kauai. Depuis lors, au niveau de tout l’État, six nouvelles Salles du Royaume ont été construites, et deux autres entièrement rénovées. Les anciens bâtiments de la filiale et la Salle du Royaume de Pensacola Street ont de même bénéficié d’une remise à neuf, alors que six projets de construction de Salles du Royaume sont en cours.

Un excellent exemple pour tous

Les assemblées de district “La justice divine” de 1988 ont revêtu un éclat tout particulier en raison de la présence de 63 missionnaires qui avaient pu rentrer chez eux pour un court séjour à Hawaii. À l’assemblée d’Honolulu, l’émotion fut à son comble le samedi quand tout ce groupe de missionnaires monta sur l’estrade lors du discours “Comment être un missionnaire efficace”. Tous ceux qui étaient présents dans la salle avaient le cœur battant, et des larmes de joie leur montaient aux yeux. Les assistants ne purent se contenir, et le programme fut suivi par une longue et puissante salve d’applaudissements.

Cet événement particulier rappelait de façon puissante que de nombreux Témoins d’Hawaii se sont efforcés d’atteindre de plus grands privilèges de service. Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, 164 missionnaires ont été envoyés d’Hawaii vers le Japon, Taiwan, Okinawa, la Corée, les Samoa ainsi que dans des pays d’Amérique du Sud et d’Afrique. Du reste, la majorité d’entre eux avaient été détachés dans les îles de Micronésie. À l’heure actuelle, 77 d’entre eux sont toujours à l’œuvre en qualité de missionnaires, surveillants itinérants, pionniers spéciaux ou permanents.

Pour d’autres, c’est le travail au Béthel qui a constitué l’objectif, particulièrement pour les jeunes frères en bonne condition physique. Le premier parmi eux a été invité à venir au Béthel de Brooklyn au début des années 60. Depuis ce temps-​là, ils ont été 127 à goûter à la joie de ce service à plein temps. À présent, 25 d’entre eux travaillent au Béthel de Brooklyn et à la Ferme de la Société Watchtower, 13 autres sont membres de la famille du Béthel d’Hawaii.

L’intérêt exceptionnel que suscite le service à plein temps, notamment chez les jeunes, peut être imputé au bel exemple qu’ont légué, par leur zèle, les premiers missionnaires, suivis en cela par des anciens dynamiques et les surveillants itinérants. De même, le soutien des parents restés à Hawaii a été un heureux encouragement pour leurs enfants, partis se dépenser par delà les mers, en tant que missionnaires ou volontaires au Béthel. Cela a permis à beaucoup d’entre eux de persévérer dans leur œuvre, plutôt que de succomber au mal du pays et au découragement. Ainsi, ils récoltent les avantages à long terme qui reviennent à ceux qui tiennent ferme leurs privilèges de service.

Situation de l’œuvre aujourd’hui

En août 1990, un maximum historique de 6 194 proclamateurs était atteint, soit la proportion remarquable d’un proclamateur du Royaume pour 180 habitants (en se basant sur le chiffre de la population pour 1989). Les 72 congrégations parcourent fréquemment leurs territoires, en moyenne toutes les quatre à six semaines. Dans le même ordre d’idées, en août, on atteignait le chiffre record de 608 pionniers permanents. Nous noterons au passage que, parmi eux, beaucoup sont adolescents ou ont une vingtaine d’années.

La diversité riche de couleurs des habitants, de races et de cultures très variées, peut faire de la prédication une aventure fascinante. Par exemple, il n’est pas rare de rencontrer des Caucasiens, des Japonais, des Chinois, des Philippins et des Hawaïens, qui pourront se déclarer catholiques, protestants, bouddhistes ou mormons. Et tout cela dans la même rue! Bien que l’indifférence au message du Royaume semble s’accentuer, les personnes comparables à des brebis continuent d’affluer à la montagne de Jéhovah, comme l’indique une assistance de 15 245 personnes au Mémorial en avril 1990.

Ainsi que cela se vérifie dans d’autres régions du globe, le peuple de Jéhovah n’est pas à l’abri des difficultés et des assauts de notre principal Adversaire, le Diable. Bien que les emplois soient légion en raison du tourisme et de la présence d’investisseurs étrangers, les habitants doivent faire face à un coût de la vie exceptionnellement élevé. Pour ne pas se laisser submerger par de telles pressions économiques, qui obligent bien souvent mari et femme à entreprendre un travail profane pour pouvoir joindre les deux bouts, le peuple de Dieu s’évertue à maintenir une excellente condition spirituelle. L’usage illicite de stupéfiants se répand de plus en plus dans certains quartiers et recueille sa tragique moisson. D’où la nécessité pour les jeunes de ne pas se laisser abuser par le leurre insidieux de la drogue. D’autre part, le climat d’Hawaii, doux et ensoleillé à longueur d’année, invitant plutôt au jeu et à l’amusement, les activités récréatives ainsi que la recherche des plaisirs peuvent fortement distraire l’esprit des chrétiens. Inutile de dire que, dans ces conditions, il faut être constamment sur ses gardes pour ne pas se laisser piéger par les artifices de Satan.

Les habitants d’Hawaii se démarquent cependant par leur comportement calme, leur amabilité et leur hospitalité, ce qui se retrouve d’ailleurs dans bon nombre de sociétés insulaires. Peut-être faut-​il y voir un effet des brassages successifs des peuples et des cultures, à moins que cela ne soit à porter au crédit de l’inlassable soleil, ou bien du temps délicieux qui y règne. Le peuple de Jéhovah a, pour sa part, considérablement développé ces qualités attrayantes en cultivant le fruit de l’esprit.

Les Témoins de Jéhovah d’Hawaii demeurent actifs et zélés, leur vie étant axée sur les activités spirituelles. Tout au long de l’histoire moderne d’Hawaii, ils ont soutenu l’organisation de Jéhovah avec fidélité et d’un cœur entier.

Il est indéniable que tout ce que l’on peut attendre d’un paradis tropical se retrouve pour une grande part dans les îles Hawaii. Mais la véritable, l’exquise beauté d’Hawaii est celle qui prévaut dans le paradis spirituel qui existe parmi les 6 000 esclaves fidèles de Jéhovah, qui chérissent leur service pour lui et y trouvent leurs délices. Combien ils lui sont reconnaissants d’avoir veillé à ce que ‘la montagne de la maison de Jéhovah se soit trouvée solidement établie’, même dans les régions lointaines et exotiques que sont les îles Hawaii! — És. 2:2.

[Graphiques, page 115]

(Voir la publication)

Hawaii 8 000

1950 320

1960 1 589

1970 3 340

1980 4 494

1990 6 194

Max. proclamateurs

1 000

1950 30

1960 80

1970 447

1980 591

1990 938

Moy. pionniers

[Encadré/Carte, page 66]

(Voir la publication)

ÎLES HAWAII

HAWAII

Hilo

Kailua-Kona

Pahala

LANAI

MAUI

MOLOKAI

Kalaupapa

Kaunakakai

OAHU

Aiea

Pearl Harbor

Honolulu

KAUAI

Kekaha

Kapaa

Hanapepe

Koloa

NIIHAU

Océan Pacifique

[Encadré]

ÎLES HAWAII

Capitale: Honolulu

Langue officielle: anglais

Religion principale: néant (croyances diverses)

Population: 1 112 100

Filiale: Honolulu

[Illustration, page 71]

Des plages d’ivoire et de paisibles criques embellissent les îles d’Hawaii.

[Illustration, page 72]

Ellis Fox commença l’œuvre de prédication en 1915 avec les Bundy.

[Illustration, page 73]

Dora Harrub et son mari James furent les premiers à se faire baptiser, en 1919.

[Illustration, page 79]

Joseph Dos Santos devint pionnier en 1929. Pourquoi fut-​il surnommé “Pupule Joe”?

[Illustration, page 83]

Don et Mabel Haslett. Don devint le premier surveillant de la filiale d’Hawaii en 1934.

[Illustration, page 84]

C’est à Honolulu, dans Pensacola Street, que fut construit, en 1935, le premier lieu de réunion appelé Salle du Royaume.

[Illustration, page 85]

Des voitures à haut-parleur retransmettent des messages bibliques. Celle-ci fut expédiée d’Honolulu vers les îles extérieures en 1937.

[Illustration, page 88]

Des voitures à haut-parleur sillonnaient les rues, annonçant et faisant entendre des discours enregistrés.

[Illustration, page 94]

Don Haslett, Nathan Knorr, Mabel Haslett et Milton Henschel. La visite de frère Knorr à Honolulu en 1947 allait entraîner l’envoi de missionnaires à Hawaii.

[Illustration, page 95]

Les deux premiers missionnaires arrivent à Honolulu le 27 septembre 1947. Martha Hess, au premier rang, quatrième en partant de la gauche, et Ruth Ulrich, à l’arrière, deuxième en partant de la gauche. Les deux poursuivent actuellement leur activité au Japon.

[Illustrations, page 96]

Le Waikiki Shell, où s’est tenue l’assemblée “La bonne nouvelle éternelle”, en 1963. De nombreuses personnes ont été baptisées à la plage de Waikiki.

[Illustration, page 101]

Nathaniel et Allene Miller arrivèrent à Hawaii en 1954 et y œuvrèrent jusqu’en 1980, année où ils furent envoyés à Guam *.

[Note de l’illustration]

^ § 258 Allene Miller mourut fidèle en novembre 1989.

[Illustration, page 105]

Les locaux de la filiale de Guam ont été inaugurés le 20 avril 1980. Cette filiale dirige l’activité de prédication effectuée dans les 2 000 îles de Micronésie.

[Illustration, page 107]

La filiale et la Salle du Royaume, situées dans Pensacola Street, ont servi les intérêts du Royaume jusqu’en août 1987, pendant donc près de 50 ans.

[Illustrations, page 108]

D’un ancien supermarché on a fait un bureau, un entrepôt, des logements et deux Salles du Royaume, inaugurés le 3 avril 1988.

[Illustration, page 109]

Les membres du Comité de filiale en compagnie de leurs femmes (de gauche à droite): Robert et Hatsuko Kawasaki, Frans et Endeline van Vliet, Gary et Carol Wong.