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République tchèque

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Pour les Témoins de Jéhovah de la République tchèque, les liens qui unissent la communauté internationale des frères ont pris un sens tout particulier en 1998, année durant laquelle ont eu lieu dans le monde entier la série d’assemblées internationales “ La voie de Dieu mène à la vie ”.

Parmi les 42 763 assistants à l’assemblée de Pontiac, aux États-Unis, on comptait 345 représentants de la République tchèque. Les assistants à cette assemblée étaient venus d’au moins 44 pays d’Amérique, d’Europe, d’Afrique et d’Asie. En outre, 700 autres délégués de la République tchèque et 700 de Slovaquie étaient présents à l’assemblée de Nuremberg, une des cinq assemblées organisées simultanément en Allemagne et qui ont rassemblé 217 472 assistants.

Les délégués de la République tchèque ont été très touchés à leur arrivée dans ces villes par l’accueil chaleureux qui leur a été réservé, notamment par leurs frères chrétiens qui les ont logés alors qu’ils ne les avaient jamais rencontrés auparavant, ou encore quand, le premier jour de l’assemblée, des applaudissements enthousiastes ont accueilli tous les délégués venus d’autres pays que l’Allemagne. À Nuremberg, les Témoins venus de la République tchèque et de Slovaquie se sont salués avec beaucoup d’affection, s’embrassant et pleurant de joie, parce qu’ils avaient de nouveau la possibilité d’être ensemble. C’étaient là des moments inoubliables.

La même année, des milliers d’autres Témoins ont assisté à des assemblées identiques organisées en République tchèque. Ils ont non seulement bénéficié du même programme que dans les grandes assemblées, mais en plus ils ont eu la joie de recevoir l’édition tchèque de l’encyclopédie biblique en deux volumes Étude perspicace des Écritures, dont la traduction avait été récemment achevée.

C’étaient incontestablement des moments de bonheur dans l’histoire des Témoins de Jéhovah de la République tchèque. Mais la route avait été longue et difficile. Alors que tout avait commencé plus de 100 ans auparavant, leur situation n’aurait jamais pu prendre la tournure actuelle sans l’aide pleine d’amour de Jéhovah Dieu.

En 1891, lors d’un voyage en Europe, Charles Russell, président de la Société Watch Tower, s’est arrêté brièvement à Prague. Au cours des années qui ont suivi, les Témoins de Jéhovah ont connu des périodes de grand accroissement, mais aussi des temps difficiles, la persécution et le criblage. Leurs activités ont été totalement interdites pendant 46 ans, et même lorsqu’ils n’étaient pas interdits ils n’ont pas toujours été officiellement reconnus.

Les Témoins de Jéhovah des territoires tchèques ont vécu ce qu’a vécu le prophète Jérémie, à qui Jéhovah avait dit : “ À coup sûr ils combattront contre toi, mais ils ne l’emporteront pas sur toi, car ‘ je suis avec toi ’, c’est là ce que déclare Jéhovah, ‘ pour te délivrer ’. ” — Jér. 1:19.

La Tchéquie

Après des négociations politiques dans divers centres diplomatiques du monde, la république de Tchécoslovaquie est née en Europe centrale en octobre 1918. Elle a été dissoute pendant un temps durant la Seconde Guerre mondiale, mais est réapparue après plus de six ans de tyrannie nazie. Elle a également enduré plus de 40 ans de domination communiste. Puis, après 74 ans d’existence, cette entité politique a été dissoute. En 1993, ce qui avait constitué la partie orientale du pays est devenu la République slovaque. Quant à la partie occidentale, qui incluait la Bohême, la Moravie et une partie de la Silésie, elle est devenue la République tchèque, en abrégé la Tchéquie.

La République tchèque s’étend sur 500 kilomètres d’est en ouest et sur environ 250 kilomètres du nord au sud. Les régions nord et ouest sont constituées de belles montagnes boisées, et aussi de terres fertiles arrosées par de nombreuses rivières. Mais, comme dans la plupart des régions d’Europe centrale, la pollution de l’environnement pose de graves problèmes. La majorité des Tchèques vivent dans les villes.

Un bref rapport sur le développement des activités des Témoins de Jéhovah de 1912 à 1970 dans ce qui était la Tchécoslovaquie a été publié dans l’Annuaire 1972. Nous donnons ici d’autres détails, mais ce récit concerne plus particulièrement les régions qui constituent aujourd’hui la République tchèque.

Un héritage religieux

Prague, la capitale, est parfois appelée la ville aux cent clochers, mais ses nombreuses églises n’ont pas empêché la République tchèque de devenir ce qu’elle est aujourd’hui, un pays essentiellement athée. Cela n’a toutefois pas toujours été le cas.

En 863, à la demande du prince morave Rostislav, l’empereur byzantin Michel III envoya une mission religieuse en Moravie, mission constituée de Constantin (connu plus tard sous le nom de Cyrille) et de Méthode, deux ecclésiastiques de Thessalonique, en Grèce. Ils conduisirent des services religieux en slavon, la langue des Moraves, mais, en plus, Constantin mit au point un alphabet qui convenait à cette langue. Se servant de cet alphabet, il entreprit ensuite la traduction de parties de la Bible. Toutefois, les Moraves ne parvinrent à une claire intelligence de la Parole de Dieu que beaucoup plus tard.

Un message urgent à proclamer

En 1907, soit environ 16 ans après la brève visite de Charles Russell à Prague, un Étudiant de la Bible (comme on appelait alors les Témoins de Jéhovah) d’un certain âge a commencé à se rendre dans le nord de la Bohême une fois par mois pour y distribuer des écrits bibliques. Il s’agissait de frère Erler, qui venait de Dresde, en Allemagne. Il a donné le témoignage avec zèle à Liberec et dans d’autres villes, y restant deux ou trois jours chaque fois. Il distribuait le livre de frère Russell La bataille d’Harmaguédon et proclamait avec conviction que cette catastrophe mondiale surviendrait en 1914.

Vers 1912, quelques personnes enthousiastes semaient des graines de vérité biblique, formaient de petits groupes et baptisaient. Quand la guerre a éclaté en 1914, cela n’a pas surpris les Étudiants de la Bible, même si toutes leurs attentes n’ont pas été comblées cette année-​là.

Dans les premières années, les écrits distribués par les Étudiants de la Bible étaient en allemand, et dans la population germanophone certains en ont apprécié la valeur. Ainsi Charlotta Jankovcová, de Plzeň, se souvient que sa mère avait reçu plusieurs livres de frère Russell d’un Étudiant de la Bible de Dresde venu frapper à sa porte en 1925. Elles n’ont pas tardé à assister aux réunions. Elle raconte : “ On consacrait beaucoup de temps à l’étude individuelle et à la préparation des réunions. Chaque semaine, nous passions toute la journée du dimanche à prêcher. Nous étions des Étudiants de la Bible : nous étudiions La Tour de Garde, nous lisions des livres et nous avions aussi le Bulletin [aujourd’hui Le ministère du Royaume]. ”

Peu à peu des publications ont été traduites en tchèque. La brochure passionnante Des millions de personnes actuellement vivantes ne mourront jamais a été publiée en 1922, et trois proclamateurs se sont engagés dans le service à plein temps comme colporteurs pour la diffuser parmi les Tchèques. Une édition tchèque de 16 pages de La Tour de Garde a commencé à paraître au plus tard en 1923.

En 1923, Antonín Gleissner et sa femme, de la filiale de la Société Watch Tower à Magdebourg, ont été envoyés en Bohême pour y étendre la proclamation de la bonne nouvelle dans les territoires tchèques. La Société a ouvert à Most un dépôt de publications qu’elle a confié à frère Gleissner qui avait déjà dirigé des réunions dans cette ville en 1916.

En 1928, le bureau de la filiale de Magdebourg a commencé à accorder une plus grande attention à l’œuvre en Tchécoslovaquie. Il en est résulté une meilleure organisation des groupes, une plus grande efficacité dans la prédication et une meilleure coordination de l’activité des colporteurs. C’est ainsi que tous les groupes et tous les colporteurs (connus aujourd’hui sous le nom de pionniers) se sont vu confier un territoire bien déterminé où ils devaient prêcher. Cette année-​là, le rapport sur la Tchécoslovaquie faisait état de 25 petits groupes, soit 106 proclamateurs et 6 colporteurs. Ils avaient tous ensemble distribué 64 484 livres et brochures ainsi que quelque 25 000 périodiques, montrant ainsi à ceux que cela intéressait que le Royaume de Dieu est la seule solution aux problèmes de l’humanité.

L’année suivante, Otto Estelmann est arrivé d’Allemagne avec le passionnant “ Photo-Drame de la Création ”, qui a été projeté dans tout le pays. Le point culminant de cette campagne a été, vers la fin de 1933, la projection du “ Photo-Drame ” quatre jours de suite au Kapitol, le plus grand cinéma de Prague, que les frères avaient loué. Tant de personnes sont venues qu’il a fallu louer le cinéma deux autres soirs. Beaucoup de spectateurs ont laissé leur nom et leur adresse pour être invités à d’autres discours bibliques. Évidemment, la croissance de l’organisation devenant manifeste, il y a eu de l’opposition, mais, selon Jésus, c’était ce à quoi les disciples devaient s’attendre. — Jean 15:18-20.

Quelques-uns de ceux qui ont accepté la bonne nouvelle

C’est à cette époque que la bonne nouvelle a touché Bohumil Müller, un homme qui allait plus tard jouer un rôle important dans l’œuvre des Témoins de Jéhovah dans ce pays. En 1987, à la fin de sa course terrestre, il a pu se remémorer ses plus de 55 années de service fidèle, dont 14 passées dans les camps de concentration et les prisons pour avoir refusé de transiger avec sa foi.

En 1931, âgé de 16 ans, Bohumil apprenait le métier de linotypiste, et son frère Karel celui de relieur. Tomáš Müller, leur père, était un membre éminent de l’Unité des Frères, Église qui était très fière de ses traditions anciennes et de son histoire. Karel a reçu de son patron des tickets pour assister à la projection du “ Photo-Drame de la Création ”. Après la première projection, il est rentré à la maison tout excité. Il a raconté tout ce qu’il avait vu et entendu, et a donné à son père les deux livres en allemand qu’il s’était procurés. Le lendemain soir, il est revenu encore plus excité et a rapporté le livre Création en tchèque. Tout en faisant part de ses impressions, il a dit qu’après la séance il avait laissé son adresse pour être invité à d’autres discours bibliques.

Environ un mois plus tard, un dimanche soir, alors que la famille finissait son repas, la sonnette a retenti. Bohumil Müller a relaté plus tard : “ Mon père s’est levé pour aller répondre. Il a conversé un moment avec notre visiteur dans l’entrée, puis il est revenu dans la cuisine avec un air étonné. Ses premiers mots ont été : ‘ Je n’ai jamais vu une chose pareille. Pensez un peu, un homme qui se donne la peine de venir chez nous un dimanche pour nous inviter à un discours, un discours qui sera donné par les Étudiants de la Bible. Personne d’entre les Frères ne ferait cela ; nous sommes trop paresseux. ’ ” Quelque temps plus tard, les Müller se réunissaient régulièrement avec le petit groupe des Témoins de Jéhovah de l’époque.

Bohumil s’est voué à Jéhovah, mais il ne s’est fait baptiser que deux ans plus tard, alors qu’il servait déjà comme adjoint au surveillant de la congrégation (qu’on appelait alors directeur de service), dirigeait des réunions et servait au Béthel de la Société à Prague. Dans ces années-​là, tous les Témoins ne comprenaient pas parfaitement l’importance du baptême chrétien.

C’est à cette époque-​là que Libuše Štecherová, cousine de Bohumil, a connu la vérité. Elle s’est fait baptiser plus rapidement. Sœur Štecherová a raconté plus tard : “ Tomáš Müller, mon oncle, était très croyant. Un après-midi d’été, en 1932, il m’a parlé du nom de Dieu, Jéhovah, de l’avenir du monde et des excellentes réunions organisées par un groupe appelé Témoins de Jéhovah. À la fin de la conversation, il m’a donné le livre Délivrance de Joseph Rutherford. J’ai commencé à discerner qu’il y avait quelque chose que le Créateur désirait me voir comprendre. La toute première fois que j’ai assisté à la réunion de service, j’ai entendu parler d’une cérémonie de baptême qui devait avoir lieu à Prague, la deuxième dans cette ville. J’étais là à écouter, mais je n’avais aucune idée de ce qui allait se passer peu après. Sur le chemin du retour, mon oncle Müller m’a demandé : ‘ N’aimerais-​tu pas te faire baptiser aussi ? ’ ‘ Mais je ne connais rien ’, ai-​je objecté. ‘ Tu es comme un prosélyte, a-​t-​il ajouté. Tu connais la Bible. Il te suffit de discerner quelle époque nous vivons et la volonté de Dieu te concernant. ’ Je lui ai donc demandé de m’inscrire sur la liste pour le baptême, et j’ai été baptisée le 6 avril 1933. ” Elle a appris quelle était la volonté de Jéhovah la concernant et elle l’a servi fidèlement jusqu’à sa mort, en 1995.

À cette époque-​là, on ne dirigeait pas d’étude biblique avec les nouveaux. La formation pour la prédication consistait souvent à aller à une première porte avec un Témoin pour voir comment il s’y prenait, après quoi on était envoyé tout seul.

De nombreuses femmes ont appris la vérité durant ces années-​là. Pour nombre d’entre elles, le ministère chrétien est devenu la chose la plus importante dans leur vie et elles se dépensaient beaucoup. Elles emmenaient souvent leurs enfants, si bien que ceux-ci étaient des témoins privilégiés de la bénédiction de Jéhovah. Blanka Pýchová n’avait que dix ans quand elle a commencé à aller prêcher avec sa mère. Elle se souvient d’un incident : “ On avait envoyé ma mère et moi prêcher dans un certain village. Maman m’a dit de prêcher autour de la place, alors qu’elle se rendrait dans les maisons d’alentour. Quand je suis arrivée sur la place, je me suis aperçue avec horreur qu’elle était remplie d’oies. Je n’avais pas peur des animaux, sauf des oies. Elles m’ont crié après et, quand elles ont cherché à me pincer, je me suis protégée avec mon sac de livres. Ce n’était pas facile, aussi, désespérée, j’ai prié : ‘ Seigneur Jéhovah, je t’en prie, aide-​moi. ’ Soudain, les oies se sont enfuies, et à côté de moi est apparu un énorme saint-bernard. Je l’ai caressé et il m’a suivie de maison en maison. Les oies n’ont plus osé m’approcher. ” La mère de Blanka s’est assurée par la suite que sa fille avait bien compris que tout cela était une preuve de la sollicitude pleine d’amour de Jéhovah.

De nombreuses façons de toucher les gens

En 1932, dans cette partie de l’Europe, on a disposé d’un nouvel instrument pour le ministère : le périodique L’Âge d’Or (connu aujourd’hui sous le nom de Réveillez-vous !) en tchèque. Cette année-​là, on en a distribué 71 200 exemplaires. Après avoir lu L’Âge d’Or, de nombreuses personnes ont accepté d’autres publications qui traitaient davantage de la Bible.

Pour donner à tous la possibilité de bénéficier de la bonne nouvelle du Royaume de Dieu, on a fait venir des pionniers d’Allemagne. Comme ils vivaient modestement, ils pouvaient se consacrer à cette œuvre. Sur les 84 pionniers qui ont remis un rapport en 1932, 34 étaient venus d’Allemagne. Pour beaucoup d’entre eux cela signifiait apprendre une autre langue. Mais que pouvaient-​ils faire avant d’être capables de la maîtriser ? Oskar Hoffmann, un frère allemand qui a servi à Prague, a dit : “ Je ne connaissais pas la langue du pays, mais tous les jours j’allais voir les gens chez eux. Pour qu’ils comprennent la raison de ma visite, je leur demandais de lire une carte de témoignage sur laquelle était imprimé un bref sermon dans leur langue. C’est ainsi que des milliers d’écrits bibliques ont été distribués aux Tchèques. ”

En raison des lois spéciales promulguées par le gouvernement pour limiter l’entrée des étrangers dans le pays, en 1934 la plupart des pionniers ont dû le quitter, mais un excellent travail avait été accompli. Cette année-​là, les pionniers avaient donné le témoignage dans presque tous les territoires qui n’étaient pas attribués à un groupe.

L’année même où les pionniers étrangers ont dû quitter le pays, la Société a fourni aux Témoins de Tchécoslovaquie des discours bibliques enregistrés sur disques. Les frères ont fait preuve d’initiative. Ainsi, la congrégation de Prague a acheté une moto, une “ Indian 750 ”, avec un side-car sur lequel les frères ont fixé un amplificateur. Arrivés sur la place d’une ville ou dans un endroit dégagé d’un village, ils plaçaient l’amplificateur sur un grand trépied, passaient un enregistrement de musique et allaient de maison en maison voir les gens. Quand un certain nombre de personnes avaient été attirées par la musique, les frères passaient l’enregistrement d’un court sermon biblique. C’est ainsi que durant la seule matinée d’un dimanche ils pouvaient donner le témoignage à des centaines de personnes dans plusieurs villages.

Enregistrement légal

Dans les années 30, on a pris des dispositions pour donner une base légale aux activités des Témoins de Jéhovah de Tchécoslovaquie. Il s’agissait notamment de former des associations qui pouvaient détenir des titres de propriété, acquérir des publications et accomplir diverses tâches nécessaires.

On a organisé à Prague une réunion spéciale au cours de laquelle les participants ont accepté le projet de former deux associations dont ils ont approuvé les statuts. À la première, on a donné le nom de Watch Tower Bible and Tract Society (filiale tchécoslovaque). Elle avait pour attribution d’obtenir des publications, de prévoir les réunions et d’organiser la distribution des publications. On a appelé la deuxième Mezinárodní sdružení badatelů Bible, československá větev (Association internationale des Étudiants de la Bible, filiale tchécoslovaque), et son siège était à Prague. Les Témoins de Jéhovah de Tchécoslovaquie disposaient ainsi d’un instrument juridique pour diriger leurs activités. On a aussi ouvert trois bureaux de la filiale tchécoslovaque de l’Association internationale des Étudiants de la Bible, chacun d’eux s’occupant d’une partie différente du pays. L’œuvre dans les territoires tchèques était dirigée d’un bureau situé à Brno et dont Antonín Gleissner était le président. Ces associations ont facilité l’œuvre d’évangélisation en Tchécoslovaquie.

Trois ans plus tard, en 1933, la Société Watch Tower a ouvert une filiale à Prague où elle a entrepris l’impression de publications. Cela était nécessaire en raison des difficultés que les Témoins rencontraient en Allemagne à la suite de la prise du pouvoir par Hitler. Ils avaient été interdits, et les locaux de la filiale de Magdebourg confisqués. Edgar Merk, venu de Magdebourg, a été nommé serviteur de filiale à Prague, et Karel Kopetzky, de Prague, s’est vu confier la surveillance du Béthel et du bureau.

Mais tout ne se passait pas au mieux à Prague. À cause de leur orgueil et d’autres facteurs, des différends opposaient ces deux frères. En 1936, la filiale de Prague a été placée sous la surveillance du Bureau de la Société pour l’Europe centrale, en Suisse. Peu après, Karel Kopetzky et Josef Güttler, qui assumaient des responsabilités dans les associations déclarées de la Société en Tchécoslovaquie, ont démissionné. Ils ont été remplacés par Josef Bahner et Bohumil Müller. Le nouveau serviteur de filiale était Heinrich Dwenger, un serviteur de Jéhovah humble et fidèle qui avait déjà assumé diverses responsabilités théocratiques. Grâce à cette surveillance pleine d’amour, les congrégations ont continué à participer joyeusement à la prédication de la bonne nouvelle du Royaume, nouvelle dont avaient grandement besoin les gens du fait de l’instabilité croissante du monde.

Fortifiés par des rassemblements internationaux

Les Témoins de Jéhovah de Tchécoslovaquie, qui savaient que les Témoins d’autres pays tenaient des assemblées, désiraient vivement en organiser une dans leur pays.

Une grande réunion internationale, comme on l’a appelée, a été organisée à Prague du 14 au 16 mai 1932 au Théâtre des Variétés. C’était la première assemblée internationale de ce genre en Tchécoslovaquie. Le thème du discours public, “ L’Europe avant la destruction ”, était de circonstance. Les différents exposés ont été traduits en allemand, en hongrois, en russe, en slovaque et en tchèque. On a compté 1 500 assistants, et un puissant témoignage a été donné. Les assistants à ces journées d’assemblée ont prêché de maison en maison et distribué plus de 21 000 écrits bibliques.

En 1937, on a organisé un nouveau rassemblement international à Prague auquel ont assisté des centaines de Témoins venus de divers pays, dont l’Autriche, la Hongrie, la Pologne et l’Allemagne. “ Ce fut une magnifique assemblée ”, a dit plus tard frère Müller.

La prédication de la bonne nouvelle a continué à s’étendre dans toute la Tchécoslovaquie. Durant l’année 1937, les Témoins ont fait un bon usage de 7 amplificateurs et de 50 phonographes pour faire entendre des discours bibliques enregistrés. Ils ont rapporté 2 946 présentations publiques, avec un total de 31 279 assistants. Un rapport sur l’activité en Tchécoslovaquie cette année-​là disait : “ Dans tout le pays, l’œuvre consistant à prêcher la bonne nouvelle s’étend. Elle a été entendue par les habitants des grandes villes et des villages, et elle a même touché des endroits isolés et des fermes dans les montagnes. ”

La menace nazie

La Seconde Guerre mondiale approchait et les tensions augmentaient en Europe. Comment les Témoins de Jéhovah allaient-​ils réagir dans cette situation ? L’objection de conscience n’était pas encore très connue en Tchécoslovaquie. Aucune religion traditionnelle importante ne défendait les principes bibliques au point de garder sa neutralité chrétienne. Bohumil Müller a été dans ce pays la première personne emprisonnée en raison de sa neutralité chrétienne. Il a écrit : “ Je devais être incorporé pour le service militaire le 1er octobre 1937. Toutefois, ma conscience me disait que Dieu ne veut pas que ses serviteurs ‘ apprennent la guerre ’. (Is. 2:4.) Je comptais sur Jéhovah pour me donner la force et l’endurance nécessaires pour affronter les épreuves à venir. À cause de ma prise de position, à la fin de mars 1939 j’avais déjà comparu quatre fois devant un tribunal militaire, et chaque fois j’avais été condamné à plusieurs mois de prison. Me remémorant ces jours passés, je peux dire que je suis reconnaissant d’avoir enduré ces épreuves, car elles m’ont préparé en vue de temps plus difficiles encore. ”

La menace du nazisme s’accentuant, les serviteurs de Jéhovah ont eu à faire face à de plus en plus de difficultés. Aux abords de la frontière avec l’Allemagne, l’opposition s’est intensifiée. En août 1938, les réunions des Témoins de Jéhovah ont été interdites, si bien qu’ils ont dû commencer à se réunir par petits groupes. Libuše Štecherová a écrit : “ En 1938, les tensions politiques se sont accentuées et nous avons dû nous habituer à donner le témoignage dans des conditions nouvelles. Plus tard, pendant la guerre, il nous fallait bien connaître quelqu’un avant de lui parler de notre foi. ”

Cette même année, l’Allemagne a envahi la région des Sudètes, à l’intérieur des frontières de la Tchécoslovaquie. Pour éviter la guerre, la France et la Grande-Bretagne ont cédé aux exigences de Hitler, qui voulait rattacher cette région à l’Allemagne. Ses habitants se sont donc retrouvés sous la domination nazie.

Début de l’occupation allemande

Le 15 mars 1939, les troupes allemandes ont occupé la Bohême et la Moravie, et Hitler a formé un nouvel État, le protectorat de Bohême et de Moravie, avec un président et un gouvernement fantoche.

La Gestapo n’a pas tardé à entrer en action contre les Témoins de Jéhovah. Le 30 mars, ses agents ont perquisitionné au bureau de la Société Watch Tower, à Prague. Le 1er avril, Bohumil Müller a été libéré de la prison où il purgeait une peine en raison de sa neutralité chrétienne. Entre la prison et la gare, il a téléphoné à la filiale. Plus tard, il a raconté : “ J’ai dit que je viendrais le lendemain pour faire tout ce que je pourrais. Ce jour-​là, nous étions trois au Béthel. Il y avait beaucoup à faire. Une partie du matériel d’imprimerie était déjà prête à être expédiée aux Pays-Bas. Il fallait sans tarder emballer le reste. Frère Matejka et moi avons entrepris cette tâche, tandis que frère Kapinus vidait les bureaux et les locaux du Béthel. Dans le même temps, nous traduisions La Tour de Garde et Consolation (aujourd’hui Réveillez-vous !). Nous avons également emporté une grande quantité de livres et de brochures en tchèque auxquels la Gestapo ne s’était pas intéressée lors de sa perquisition en mars. La Gestapo est toutefois venue à la filiale plusieurs fois pendant que nous liquidions les affaires. ”

Peu après le début de l’occupation allemande, il est devenu évident que la prédication allait être difficile. Beaucoup de frères avaient quitté la Tchécoslovaquie. Frère Dwenger était parti en Suisse la veille de la venue de la Gestapo pour l’arrêter. Frère Müller se préparait lui aussi à partir. Il avait obtenu des autorités de l’État les autorisations indispensables, quand il a reçu une lettre de la filiale de Berne lui disant qu’il serait souhaitable qu’il reste là où il servait pour assurer la surveillance nécessaire et encourager les frères de Tchécoslovaquie. Frère Müller a accepté spontanément et, pour ne pas changer d’avis, il a déchiré son passeport.

Quarante-huit ans plus tard, il a déclaré : “ Si quelqu’un me demandait aujourd’hui si je n’ai jamais regretté d’être resté à Prague au printemps 1939, je répondrais catégoriquement ‘ non ’ ! Je ne l’ai jamais regretté. Par la suite, j’ai compris que c’était là que je devais être. C’est là que Jéhovah et son organisation m’avaient placé. Tous les coups et les souffrances cruelles que j’ai souvent endurés étaient de loin contrebalancés par la joie que j’éprouvais à voir année après année progresser l’œuvre autour de moi et croître la foule des adorateurs du Tout-Puissant. ”

En 1939, la Gestapo a commencé à arrêter des frères. Otto Buchta, une colonne spirituelle dans la congrégation de Brno, était de leur nombre. Il est mort dans le camp de concentration de Mauthausen. Frère Kapinus, qui avait auparavant servi à la filiale de Prague, ainsi que d’autres frères et sœurs de Moravie ont été arrêtés en automne 1940. Des Témoins de Jéhovah fidèles ont néanmoins continué de prêcher la Parole partout où ils le pouvaient.

Certains de ceux qui avaient servi Jéhovah en des temps plus favorables ont abandonné son culte et se sont alliés aux ennemis de son peuple. Karel Kopetzky avait été un frère très capable et zélé, mais quand frère Müller, qui avait collaboré avec lui, l’a rencontré en 1940, c’était un tout autre homme. Voici comment les choses se sont passées : Après avoir polycopié une publication, les frères en ont réparti les pages dans des enveloppes pour les poster. Frère Müller les a mises dans un sac et s’est rendu à bicyclette dans les différents bureaux de poste de Prague. Il mettait quelques enveloppes dans chacune des boîtes à lettres. Il a raconté : “ Quand je suis entré dans un des bureaux de poste, j’ai vu, attendant au guichet, un homme portant l’uniforme des SS. Je me suis arrêté et, avant que je décide de ce que j’allais faire, l’homme s’est retourné et nous nous sommes trouvés face à face. Nous nous sommes regardés un instant. À ma grande surprise, je me trouvais en face d’un ancien frère, Karel Kopetzky. Je me suis rapidement repris ; je me suis dirigé vers un des guichets pour y prendre un formulaire, je suis sorti du bureau et je suis parti à vive allure sur mon vélo. ”

L’année suivante, frère Müller, qui dirigeait alors l’œuvre dans le pays, a été arrêté et emmené au camp de concentration de Mauthausen.

Prédication dans le “ four de feu ardent ”

Au cours des années, on a beaucoup écrit sur les camps de concentration et sur les souffrances des frères qui y étaient détenus. Parmi eux, il y avait des Témoins de Tchéquie. Nous ne relaterons pas en détail leurs souffrances, mais plutôt comment ils étaient affermis spirituellement et comment ils fortifiaient les autres au milieu même de ce “ four de feu ardent ”. — Voir Daniel 3:20, 21.

À cette époque, le nom de Lidice, un village tchèque, était connu dans le monde entier. Les 9 et 10 juin 1942, sur l’ordre de Hitler, le village entier a été rasé en représailles à la mort d’un officier allemand. Le nom du village devait être effacé de la carte d’Europe. Božena Vodrážková, qui a survécu à cet événement tragique, a raconté plus tard : “ La Gestapo a rassemblé tout le village. Tous les hommes ont été fusillés, les enfants emmenés vers des destinations inconnues et les femmes déportées dans le camp de concentration de Ravensbrück. C’est là que j’ai rencontré les Témoins de notre Seigneur Jéhovah [...]. Un jour, une amie m’a dit : ‘ Božena, j’ai parlé avec des Étudiants de la Bible. Ils disent des choses extraordinaires. Cela ressemble à un conte de fées, mais ils affirment que ce que dit la Bible est vrai, que le Royaume de Dieu va venir et faire disparaître le mal. ’ Un peu plus tard, je les ai rencontrés. Ils m’ont donné le témoignage sur le Royaume de Dieu, et j’ai été très attirée par leur message. ” Effectivement, elle est devenue Témoin de Jéhovah.

De nombreux prisonniers ont été très impressionnés par la conduite des Témoins de Jéhovah dans les camps. Alois Miczek se souvient : “ Pendant la guerre, j’ai été arrêté en raison de mes activités communistes et déporté dans le camp de concentration de Mauthausen. Les Témoins de Jéhovah du camp arrivaient d’une manière ou d’une autre à se procurer La Tour de Garde et d’autres écrits dont ils se servaient pour instruire quelques autres prisonniers. Les SS étaient incapables de les en empêcher. En guise d’avertissement, ils ont donc décidé de fusiller un Témoin sur dix. Après avoir fait s’aligner tous les Témoins, ils en ont fait sortir des rangs un sur dix, sous la menace des armes. Mais, brusquement, comme si cela avait été prévu, les 90 % des frères restés dans les rangs ont fait demi-tour et se sont dirigés vers ceux qui avaient été désignés pour être fusillés. ‘ Si vous voulez en fusiller un sur dix, fusillez-​nous tous. ’ Tout le camp était frappé de stupeur, et les SS ont été si impressionnés qu’ils ont annulé l’exécution. J’ai assisté à l’événement. ” (Jean 15:13). Quel effet cela a-​t-​il eu sur lui ?

Sa fille, Marie Gogolková, répond : “ Ayant observé les Témoins de Jéhovah à Mauthausen, mon père a accepté la vérité. Baptisé immédiatement après la guerre, il a prêché avec zèle le Royaume de Dieu et a aidé de nombreuses personnes à connaître la vérité. ”

Oldřich Nesrovnal, de Brno, était lui aussi dans un camp de concentration. Pour quelle raison ? Ayant la guerre en aversion, il a essayé de passer la frontière pour entrer en Suisse. Lors de sa tentative, il a été capturé ; on l’a accusé d’espionnage et déporté au camp de Dachau. Il se souvient : “ Dans le train de prisonniers qui nous emmenait au camp, j’ai remarqué près de la fenêtre un garçon de 13 ans, silencieux, qui lisait. J’avais l’impression qu’il cherchait à dissimuler ce qu’il lisait. Je lui ai demandé ce que c’était. ‘ La Bible ’, m’a-​t-​il répondu. Il a ajouté qu’il ne voulait pas renoncer à sa foi en Dieu. Je n’ai pas compris, mais je suis resté près du garçon. Il s’appelait Gregor Wicinsky ; il venait de Pologne. Le lendemain, j’ai appris qu’il était Témoin de Jéhovah. Il avait refusé de signer une liste d’objets qu’il devait rendre. Comme elle était écrite en allemand, il avait eu peur de signer une déclaration par laquelle il aurait fait un compromis. On l’avait frappé, mais cela ne l’avait pas abattu [...].

“ J’ai écrit à ma mère et lui ai demandé une bible qui, fait extraordinaire, m’est parvenue. Je me suis mis à la lire régulièrement. Un homme d’Ostrava [en Moravie], qui m’observait, m’a demandé si je comprenais ce que je lisais. Je lui ai dit que je ne comprenais qu’à moitié. ‘ Aimeriez-​vous comprendre davantage ? ’ ‘ Oui ’, ai-​je répondu. ‘ Alors, venez me voir demain après 18 heures à tel endroit. ’ C’était la première fois que j’assistais à une réunion de Témoins de Jéhovah. Ils tenaient une réunion tous les jours après 18 heures, et trois le dimanche. Le Témoin qui la dirigeait ainsi que le sujet étaient choisis à l’avance. Mon ‘ instructeur ’ était le serviteur aux publications. C’était aussi le cordonnier du camp, et toutes les publications copiées à la main étaient cachées sous son tabouret de travail. Pendant un an et demi, je n’ai plus entendu parler de Gregor. Puis à la fin de 1944, alors que je suivais des yeux une foule de prisonniers qui revenaient de camps annexes, j’ai aperçu mon Gregor. Il semblait avoir grandi d’un demi-mètre, mais il était terriblement maigre. Après une période de quarantaine, il s’est joint à nous lors de nos réunions. Nous nous sommes salués avec chaleur, puis il m’a dit : ‘ J’ai prié le Seigneur Jéhovah de ne pas vous laisser seul ici. ’ Jéhovah avait exaucé sa prière. ”

Le Mémorial dans un camp de concentration

Les serviteurs de Jéhovah ont-​ils pu commémorer le Mémorial de la mort de Christ dans de telles conditions ? Absolument. Mais certains se sont parfois demandé comment ils y arriveraient. Božena Nováková a raconté : “ Le Mémorial approchant, j’étais horrifiée à l’idée de ne pas pouvoir prendre les emblèmes. Mais Jéhovah a fait ce qu’il fallait. Il connaissait mon désir, aussi le jour du Mémorial on m’a appelée dans un baraquement où se trouvaient déjà plusieurs sœurs de différentes nationalités. Le Mémorial, y compris le passage des emblèmes, s’est déroulé sans ennui. Actions de grâces, gloire et honneur à notre Dieu, Jéhovah, et à son Agneau ! ”

Mais comment s’était-​on procuré le pain sans levain et le vin ? Elle a ajouté : “ Il se trouvait qu’à Fürstenberg, une ville voisine, quelques Témoins de Jéhovah travaillaient dans une ferme d’État ; ce sont eux qui nous ont procuré les emblèmes. ”

Après cette bénédiction, sœur Nováková a vécu une expérience pénible, mais qui a fortifié sa foi. Elle a rapporté : “ Un jour, j’ai été appelée à la salle des douches. En réalité, quand les douches étaient ouvertes, ce n’était pas de l’eau qui sortait, mais du gaz. Les femmes ainsi empoisonnées, parfois encore vivantes, étaient jetées dans des fours crématoires. Je ne le savais pas jusqu’au moment où une gardienne m’a crié : ‘ Toi, la Bibelforscher [comme on appelait les Témoins de Jéhovah], tu vas être gazée. On va voir si ton Jéhovah te sauvera. ’ ” S’étant tournée, en pleurs, sœur Nováková a prié ainsi : “ Père Jéhovah, s’il te plaît, si je dois mourir, que ta volonté se fasse, mais je te prie en faveur de mes enfants. Je te les confie. ” Racontant la suite, elle a ajouté : “ Alors que j’étais en train de prier, la porte s’est ouverte et le médecin-chef est entré. Remarquant mon triangle violet, il a dit : ‘ Bibelforscher, que faites-​vous là ? Qui vous a envoyée ici ? ’ J’ai répondu que c’était la gardienne. Il a ajouté : ‘ Sortez d’ici. Votre place est là-bas ’, et il m’a montré la porte. Alors que je partais, j’ai entendu la gardienne dire : ‘ Maintenant, je crois que leur Jéhovah les protège. ’ ”

Le témoignage durant l’occupation nazie

Bien qu’on n’ait pas compilé de rapports durant cette période, la prédication de la bonne nouvelle s’est poursuivie en Tchécoslovaquie. Ružena Lívancová, de Kladno, a écrit : “ Maman nous avait appris à avoir foi en Dieu, non pas comme les prêtres nous l’enseignaient, mais en respectant les gens. En 1940, une sœur de Prague nous a donné le témoignage. J’ai alors commencé à apprendre à connaître Jéhovah, notre Dieu merveilleux et Père aimant. En 1943, ma mère, ma sœur et moi avons été baptisées. ”

Même à cette époque, et malgré les conditions résultant de la guerre, Jéhovah attirait “ ceux qui étaient dans la disposition qu’il faut pour la vie éternelle ”. (Actes 13:48.) František Šnajdr, de Prague, a raconté : “ Ma famille était catholique, mais nous n’allions jamais à l’église. J’étais machiniste et je menais une vie sans histoire. J’allais au café où je jouais aux cartes. Un homme, qui y venait aussi, prenait un verre de bière et donnait le témoignage à ceux qui étaient là. Ils se moquaient de lui, mais moi, tout en jouant aux cartes, je l’écoutais d’une oreille. Il parlait du chapitre 24 de Matthieu. J’aimais ce qu’il disait et je le lui ai dit. Il m’a donc invité chez lui. Quand je suis arrivé, une réunion était en cours. Il y avait sept personnes. J’ai demandé : ‘ Dites-​moi, quand le prêtre va-​t-​il venir ? ’ ” Mais aucun prêtre n’est venu. C’est Josef Valenta, assis juste à côté de František, qui présidait la réunion.

František a continué d’étudier la Bible et s’est fait baptiser en août 1942. L’année suivante, il a été arrêté par la Gestapo, mais Jéhovah a continué de lui apporter l’aide dont il avait besoin pour grandir spirituellement. František a expliqué : “ À Mauthausen, j’ai rencontré frère Martin Poetzinger. C’était un frère courageux et avisé. Il m’a fait une paire de pantoufles et m’a toujours procuré des publications. Nous avions des réunions régulières, clandestines évidemment, chaque dimanche juste sur la ‘ Platz ’ ”, l’endroit où avait lieu l’appel des prisonniers.

Jan Matuszný, lui aussi, en est venu à comprendre qu’il avait besoin d’une aide spirituelle. Il a écrit plus tard : “ Pendant la guerre, je travaillais dans une mine. Avec mes deux frères, je jouais dans un orchestre de mineurs. Je fumais et je buvais. J’étais dans un état si lamentable que mes mains tremblaient comme celles d’un vieillard. Un jour que j’avais bu et que je me sentais misérable, je me suis mis à prier Dieu à haute voix pour lui demander de m’aider d’une manière ou d’une autre à trouver la solution à mes problèmes. ”

Peu après, un Témoin qui rendait visite à la sœur de Jan a parlé longuement avec lui et lui a donné une bible ainsi que trois brochures. À leur lecture, Jan a été convaincu que ce qu’il apprenait était la vérité. Il a cessé de fumer, de boire et de jouer dans l’orchestre, et il a commencé à assister aux réunions. Il a été baptisé en 1943 dans un étang. Il a ajouté : “ Nous avons tenu des réunions pendant toute la guerre. On nous a appris ce que signifie le mot ‘ compromis ’ et qu’il vaut mieux mourir que trahir un frère. C’était un excellent fondement en vue des persécutions à venir ”, persécutions qui se sont produites même après la guerre.

Bon usage d’une période de paix relative

Une fois la guerre terminée, les serviteurs de Jéhovah ont connu de 1945 à 1949 une période de liberté et de paix relatives. C’était aussi une période de reconstruction durant laquelle les frères se sont engagés avec un zèle renouvelé dans l’œuvre de prédication confiée par Dieu. — Mat. 24:14.

Il fallait en premier lieu reprendre contact avec toutes les congrégations et les proclamateurs. Certains étaient morts ou étaient partis, et des milliers d’autres, de nationalité allemande, qui vivaient auparavant près de la frontière, étaient sur le point d’être déportés. Frère Müller, peut-être un des premiers frères à être rentrés chez eux, a fait de grands efforts pour rétablir la communication entre les congrégations. Il s’est également efforcé de prendre contact avec les filiales de la Société dans d’autres pays, mais sans succès au début. Puis, dans les premiers jours de juin, un télégramme est parvenu à Berne, en Suisse, d’où ont commencé à arriver des lettres qui reproduisaient plusieurs pages de La Tour de Garde en allemand. On s’est rapidement remis à la traduction et, en août 1945, les frères de Prague publiaient le premier numéro ronéotypé de l’après-guerre de La Tour de Garde en tchèque.

Beaucoup de gens se souvenaient que les Témoins prêchaient avant la guerre, et quelques-uns étaient disposés à les écouter. On a commencé à prévoir des discours bibliques publics, non plus enregistrés, mais prononcés par des orateurs capables. On comptait des centaines d’assistants. Le premier discours, intitulé “ La liberté dans le monde nouveau ”, a été donné le 11 novembre 1945, dans la grande salle du Marché financier de l’agriculture. Les quelque 600 assistants ont montré beaucoup d’enthousiasme. Au cours des trois années qui ont suivi, 1 885 discours de ce genre ont été prononcés en Tchécoslovaquie. Beaucoup de Témoins de Jéhovah disent aujourd’hui que ce sont ces discours qui les ont attirés à la vérité.

Citons, entre autres, Tibor Tomašovský, qui vit maintenant en Bohême. Au travail, un Témoin a rencontré Tibor à qui, dans la conversation, il a parlé de la Bible. Impressionné par la modestie du Témoin, Tibor l’a invité chez lui. Il a été invité à son tour à assister à une réunion. Tibor a raconté plus tard : “ Il est impossible de décrire ce que ma femme et moi avons vu et entendu à cette réunion. Je n’avais jamais entendu un discours aussi remarquable. Il a été donné par trois orateurs qui se sont exprimés l’un après l’autre. ‘ Ils doivent être très instruits ’, ai-​je dit à mon voisin. ‘ Non, ce sont de simples cultivateurs. ’ Ce que nous avons entendu était si merveilleux que nous ne désirions pas rentrer à la maison. La semaine suivante, au bureau, je n’arrivais pas à me concentrer sur mon travail et j’attendais avec impatience le dimanche. Nous n’avons plus manqué une seule réunion. ”

Les Témoins effectuaient leur ministère en divers lieux, dont les camps de travail où, après la guerre, se trouvaient des prisonniers de guerre et des Allemands qui allaient être déportés. Un rapport sur cette activité disait : “ Les frères obtiennent de bons résultats en rendant visite aux Allemands, essentiellement des nazis, dans les camps de travail. ” Leur situation, qui avait complètement changé, allait-​elle les rendre plus réceptifs à la vérité de la Bible ? Les Témoins de Jéhovah souhaitaient leur en donner la possibilité.

En novembre 1945 est arrivée la nomination officielle de frère Müller comme surveillant de la filiale. L’été suivant, les frères ont pu acheter un bâtiment de trois étages pour ainsi dire neuf à Suchdol, près de Prague. C’était un endroit tranquille pour le travail, et les frères du Béthel y étaient bien logés. Le pays a été divisé en circonscriptions qui comptaient chacune une vingtaine de congrégations, et on a commencé à organiser régulièrement des assemblées de circonscription. Cela s’est avéré une grande bénédiction. Lors de ces assemblées, on prévoyait une activité de prédication de maison en maison, et le discours public du dimanche après-midi donnait un excellent témoignage. L’École du ministère théocratique ayant commencé à fonctionner dans les congrégations, avec l’aide de Jéhovah davantage de frères se sont qualifiés pour donner des discours publics, et les proclamateurs sont devenus de meilleurs enseignants.

On a également organisé de plus grandes assemblées. En 1946, les discours “ Nations, réjouissez-​vous ! ” et “ Le Prince de la paix ”, donnés dans les locaux de Besední dum, un club de Brno, ont été écoutés par 1 700 assistants. Franz Zürcher s’était déplacé de Berne (Suisse) pour l’occasion. L’année suivante, on a organisé une autre grande assemblée à Brno, au programme de laquelle ont participé trois frères du siège mondial : Nathan Knorr, Milton Henschel et Hayden Covington. Le discours public, “ La joie pour tous les peuples ”, a été annoncé dans toute la ville par des affiches et des feuilles d’invitation. On a dénombré 2 300 assistants dont beaucoup ont donné leur adresse et exprimé leur désir d’être invités à d’autres réunions.

Au début de 1948, à la suite d’une crise gouvernementale, les communistes ont pris le pouvoir. Les Témoins de Jéhovah ont continué de prêcher la bonne nouvelle avec zèle et, cette année-​là, on a enregistré un accroissement de 25 % dans le nombre des proclamateurs du Royaume. En septembre, on a organisé une autre assemblée, cette fois à Prague. Le thème du discours public, “ Le Royaume de Dieu — un espoir pour tous les hommes ”, était d’actualité. Étant donné ce qui attendait les Témoins, le discours “ Demeurons intègres dans les épreuves ” était également des plus appropriés. Alors même que se déroulait l’assemblée, les ennemis du peuple de Jéhovah se préparaient à passer à l’attaque.

Le ciel s’assombrit de nouveau

Les frères avaient été libérés de prison depuis moins de quatre ans quand le climat a brusquement changé. Des nuages annonciateurs de tempête ont fait leur apparition lors de l’assemblée de circonscription de Karlovy Vary, dans l’ouest de la Bohême, en novembre 1948. L’assemblée n’a pas été interrompue, mais pendant le discours public de frère Müller, le dimanche après-midi 28 novembre, des agents de la Sécurité d’État ont occupé quelques sièges à l’arrière de la salle. Le même jour, alors que frère Müller était en train de dîner, Oldřich Skupina, le surveillant de la congrégation de Karlovy Vary, est venu le voir et, tout excité, lui a appris que des agents de la Sécurité d’État avaient fouillé le logement de plusieurs frères et confisqué leurs publications.

Frère Müller a téléphoné au Béthel de Prague, mais personne n’a répondu. À l’évidence, quelque chose de grave s’était passé là aussi. Il est retourné rapidement à Prague. Arrivé à proximité du Béthel, il a remarqué deux hommes qui, se faisant passer pour des ouvriers, surveillaient le Béthel. Au Béthel, il a rencontré un frère qui lui a raconté que plusieurs agents de la Sécurité d’État avaient fouillé tous les locaux et apposé les scellés sur le bureau. Il était là depuis moins de 45 minutes quand deux fonctionnaires du ministère de l’Intérieur sont arrivés et ont annoncé que le bâtiment était confisqué. Frère Müller a protesté en disant qu’une confiscation devait être précédée d’une décision de justice. Après le départ des deux hommes, il s’est arrangé pour emporter chez ses parents quelques-uns des dossiers que la Sécurité d’État n’avait pas trouvés. Mais quand il est revenu au Béthel, un agent l’attendait avec ordre de l’arrêter ainsi que les deux sœurs qui étaient avec lui. Les autres membres de la famille du Béthel avaient déjà été arrêtés.

Cette décision si rapide avait-​elle été prise par un tribunal ? Nullement. Des mois plus tard, alors que les frères étaient détenus, l’un d’eux, frère Kapinus, a reçu une lettre datée du 4 avril 1949, soit quatre mois après les faits, mentionnant la décision du ministère de l’Intérieur d’interdire les activités de la Société et de confisquer ses biens.

Cependant, en juillet, la Cour d’État a annulé les poursuites judiciaires contre les frères pour absence de preuves. Leur détention préventive a été levée, mais ils ne sont pas pour autant sortis libres des locaux de la Cour d’État. Deux fonctionnaires du ministère de l’Intérieur les ont arrêtés et informés que, par décision de la Commission politique communiste, ils étaient envoyés dans un camp de travail pour deux ans. Ce qui n’avait pu se faire par la voie légale se faisait par un décret arbitraire. Frère Müller a été emmené à Kladno, où il a travaillé dans une mine de charbon.

La vague d’arrestations qui a déferlé sur le pays a attiré beaucoup de difficultés aux Témoins de Jéhovah, mais ce que les responsables communistes espéraient ne s’est pas produit. Ils avaient dit à frère Müller, alors en prison : “ Coupez la tête et le corps mourra. ” Ils croyaient que frère Müller et d’autres frères responsables constituaient la “ tête ”, mais ils n’avaient pas compris que la véritable Tête de la congrégation chrétienne, c’est le Seigneur Jésus Christ dans le ciel. — Éph. 4:15, 16.

Le vrai culte se poursuit

Malgré les difficultés de ces jours sombres, la pratique du vrai culte n’a pas cessé. Les frères n’ont pas tardé à prendre des dispositions pour poursuivre l’œuvre consistant à rendre témoignage à Jésus, le Roi messianique. Josef Skohoutil, de Prague, explique : “ Quelques jours après le commencement de la persécution, j’ai reçu la visite de frère Gros, un surveillant de la ville. Il m’a donné les noms de dix proclamateurs et m’a demandé de m’occuper d’eux. ” Pendant un temps, les frères ont tenté de donner le témoignage de maison en maison, mais ils ont peu à peu appris d’autres méthodes pour accomplir l’œuvre.

De nombreux frères étaient en prison, mais ceux qui étaient libres ont continué à se réunir. Ils ne pouvaient le faire dans des salles publiques, mais des assemblées, avec un programme abrégé, avaient lieu dans de grands appartements. On organisait parfois de plus grandes assemblées dans les bois. La première a eu lieu en 1949, à Oldřichov, près de Nejdek. Un terrain en pente parsemé de rochers constituait un auditorium pour les quelque 200 assistants. Il y avait à proximité une grange abandonnée et un étang. En vue du baptême, les frères ont dressé une cloison dans la grange pour faire des vestiaires pour les hommes ainsi que pour les femmes. Ils ont nettoyé l’étang et construit un escalier de bois pour descendre dans l’eau. Trente-sept personnes ont été baptisées en cette occasion.

Comment se procurait-​on les publications bibliques pour l’étude ? Le récit de frère Vykouřil, de Teplice, est révélateur. Il dit : “ En 1950, nous n’étions plus que trois à Teplice. Nous recevions d’une sœur de Suisse, par la poste, un numéro de La Tour de Garde en français. Ce contact a été rompu temporairement puis rétabli quelque temps après. J’ai commencé à recevoir des lettres en langage symbolique. Dans ces lettres, on me demandait de trouver quelqu’un qui connaissait quelqu’un d’autre qui, à son tour, connaissait une autre personne, et ainsi le contact serait rétabli. Les frères responsables étant en prison, il nous fallait renouer des contacts pour organiser les choses. Nous avons agi ainsi sans avoir reçu d’affectation officielle. Chacun faisait ce qu’il fallait. Nous n’avons toutefois jamais cessé de recevoir La Tour de Garde. ”

C’était le début d’une des périodes les plus pénibles de l’histoire des Témoins de Jéhovah dans ce pays. C’est seulement grâce à Jéhovah que l’œuvre n’a pas cessé, mais qu’au contraire, malgré bien des épreuves, elle a continué de croître.

Un bref répit

Alors qu’ils ne s’y attendaient pas, au début de 1950, tous les Témoins de Jéhovah, les frères comme les sœurs, ont été libérés des camps de travail. Qu’allaient-​ils trouver ? Frère Müller a raconté : “ J’ai été agréablement surpris par la bonne organisation qui avait été mise en place en notre absence. ” L’esprit de Jéhovah avait incité de jeunes frères, dont Jan Sebín et Jaroslav Hála, à prendre la tête avec zèle. Le père de Jaroslav avait été arrêté en 1948 (il est mort plus tard en prison), mais Jaroslav est devenu un exemple et une source d’encouragement pour beaucoup de frères et de sœurs. Les frères ont constaté que le nombre des Témoins actifs dans tout le pays (l’ancienne Tchécoslovaquie) avait augmenté de 52 % en deux ans, passant de 1581 à 2 403. L’année suivante a vu un nouvel accroissement de 38 %.

Le livre “ Que Dieu soit reconnu pour vrai ! ”, publié en tchèque en six parties en 1951, a favorisé un accroissement supplémentaire. On l’utilisait dans les études bibliques à domicile. Il contenait ce dont les étudiants de la Bible avaient besoin pour prendre un bon départ dans leur vie au service de Jéhovah.

Toutefois, les responsables communistes ne considéraient pas les activités des Témoins de Jéhovah avec bienveillance. En 1952 a commencé une nouvelle et longue période de persécutions sévères pour les Témoins de Jéhovah.

De nouveau dans “ le four de feu ”

Le 4 février 1952, au petit matin, frère Müller a de nouveau été arrêté par la Sécurité d’État. Cette fois, on l’a conduit en prison les yeux bandés. Il a écrit plus tard : “ Au cours des 14 mois qui ont suivi, on ne m’a jamais permis de sortir de ma cellule du quartier d’isolement les yeux non bandés. À peu près tous les deux jours, l’officier qui procédait à mon interrogatoire m’emmenait dans son bureau. Là, j’ai subi de longs interrogatoires au cours desquels on voulait me faire avouer que j’étais coupable d’espionnage et de trahison. On a écrit puis détruit de nombreux rapports de police, et on en a refait d’autres. Les hommes qui m’interrogeaient ne cessaient de chercher de nouvelles méthodes pour pouvoir inclure dans leurs rapports ne serait-​ce qu’une vague présomption de culpabilité. J’ai toujours refusé de signer ces rapports. Quelque 16 ans plus tard, alors que j’avais été libéré, un fonctionnaire du ministère de l’Intérieur m’a dit que j’avais été inscrit sur la liste des individus à liquider. Le 27 mars 1953, on m’a conduit, les yeux bandés, devant un tribunal à Pankrác. Deux de mes compagnons et moi avons été soumis à de terribles pressions psychologiques. L’audience, qui a duré deux jours, était secrète. Les sièges prévus pour le public n’étaient occupés que par les fonctionnaires du ministère de l’Intérieur qui nous avaient interrogés. ”

On a appris plus tard que le 4 février 1952 la Sécurité d’État avait procédé à de nombreuses arrestations dans toute la Tchécoslovaquie : 109 Témoins de Jéhovah (104 frères et 5 sœurs).

Emílie Macíčková était l’une des sœurs arrêtées. Elle raconte : “ Le 4 février 1952, alors que mon mari était à l’hôpital, trois hommes et une femme de la Sécurité d’État sont venus chez nous à 3 heures 30 du matin. Ils m’ont arrêtée. Ils ont perquisitionné dans toute la maison et confisqué tout ce qu’ils ont trouvé. Ils m’ont emmenée au Service régional de la police à Ostrava. S’y trouvaient déjà de nombreux Témoins, qui avaient été arrêtés par dizaines. Ils nous ont enfermés dans des cellules aux murs récemment blanchis, mais qui étaient froides et d’une odeur repoussante ; ils nous ont donné de l’eau froide pour nous laver et ont fermé à clé les portes en fer. Chaque fois qu’ils nous emmenaient quelque part ils nous mettaient des lunettes noires. Ils ont introduit dans nos cellules des mouchards, mais nous ne leur parlions que du Royaume de Dieu. Ceux-ci chantaient même nos cantiques du Royaume et faisaient semblant de prier. Nos ennemis allaient très loin pour nous faire céder, mais Jéhovah nous a fortifiés. ”

Un procès scandaleux à Prague

C’était une époque où il y avait de très nombreux procès politiques en Tchécoslovaquie. Les peines étaient extrêmement sévères : de nombreuses années de prison ou la mort. C’est durant cette période, les 27 et 28 mars 1953, qu’a eu lieu le procès des Témoins de Jéhovah. Il y a eu deux parodies de procès à huis clos des principaux surveillants des Témoins de Jéhovah, le second un mois après le premier. Les condamnations ont été les suivantes : “ Müller et Fogel : 18 ans de prison ; Sebín, Gros et Hála : 15 ans ; Nahálka : 12 ans ; Novák : 8 ans ; et Porubský : 5 ans. Tous les accusés sont condamnés à la confiscation de leurs biens et à la perte de leurs droits civiques. ”

Le public ne savait de ces procès que ce qui paraissait dans les journaux. Qu’ont-​ils écrit ? On en a un exemple dans le compte rendu mensonger paru dans l’édition du 30 mars du quotidien communiste Rudé právo (La loi rouge) : “ Dans leur haine de la Tchécoslovaquie démocratique du peuple, les impérialistes américains ne négligent aucun moyen pour détourner les masses laborieuses de la voie du socialisme. [...] Le tribunal du district de Prague a jugé une des activités destructrices des impérialistes américains. [...] Les accusés sont des responsables importants de la secte religieuse dont les membres se nomment eux-​mêmes Témoins de Jéhovah. Cette organisation, dirigée de Brooklyn, aux États-Unis, et interdite dans notre pays depuis 1949 en raison de ses tendances destructrices, a introduit en Tchécoslovaquie des idéologies cosmopolites qui, sous le manteau du christianisme pur, visent à saper le moral des masses laborieuses, encouragent la haine de l’État et de ses lois, et préparent ses membres à une guerre à venir dans laquelle ils joueraient le rôle de la cinquième colonne. ”

Cette déformation des faits pour justifier les décisions du tribunal a établi un précédent qui a été imité dans tout le pays.

On trouve des brebis dans les prisons

Cependant, il était possible de donner le témoignage même dans les prisons. Il fallait être plein de ressources, et nos frères n’en manquaient pas. Dans les prisons, des hommes ont accueilli favorablement la vérité de la Bible. Citons, entre autres, František Janeček, de Čáslav. Il se rappelle : “ Pendant la guerre, j’avais fait partie de la résistance. En 1948, comme je n’admettais pas la nouvelle forme de violence et que je me suis opposé à l’injustice, j’ai été condamné à onze ans de prison. J’étais autorisé à avoir la Bible dans ma cellule et je l’enseignais à d’autres prisonniers en dehors des heures de travail. C’est pourquoi les frères pensaient que j’étais prêtre. Nous étions dans des baraquements différents, mais parfois nous étions désignés pour la garde de nuit, la garde incendie comme on disait, en dehors des baraquements. Une nuit que j’étais de garde, il faisait très froid et le ciel était étoilé. Un autre prisonnier, qui commençait lui aussi son tour de garde, est sorti du baraquement voisin. Je lui ai dit : ‘ Toi aussi, tu es ici au service de Pharaon ? ’ ‘ Et sais-​tu qui était Pharaon ? ’ m’a-​t-​il répondu. ‘ Oui, le monarque de l’Égypte. ’ ‘ Et sais-​tu ce qu’il préfigurait ? ’ ‘ Non. ’ ‘ Alors, viens ici et je te le dirai. ’ Nous avons marché ensemble pendant deux heures, et il m’a donné une bonne explication. J’ai progressé rapidement. Dieu a fait preuve d’amour envers moi et il a vu que je désirais connaître la vérité. ” František s’est joint aux Témoins de Jéhovah pour étudier la Bible et, peu après, il passait entre 70 et 80 heures chaque mois à servir Jéhovah.

Beaucoup de ceux qui ont appris la vérité en prison y ont été baptisés. Comment faisait-​on ? Ladislav Šmejkal, qui a connu la vérité alors qu’il était prisonnier politique, explique : “ Dans la mine où nous travaillions, nous avions accès aux colonnes de refroidissement des gros compresseurs. En juin 1956, avec quelques autres j’ai été baptisé dans le réservoir d’une de ces colonnes. Ce n’était pas facile, car il fallait faire cela pendant une pause très courte avant l’arrivée de l’équipe de l’après-midi. Nous avons pris avec nous des sous-vêtements, nous sommes allés vers la colonne, nous avons été baptisés, nous nous sommes rapidement changés et nous sommes retournés au travail. ” Ils étaient reconnaissants à Jéhovah d’avoir aidé ses serviteurs à trouver le moyen de symboliser l’offrande de leur personne en obéissance au commandement de Jésus Christ. — Mat. 28:19, 20.

Des “ saints ” dans les mines de charbon

L’interdiction qui frappait les Témoins de Jéhovah était appliquée de diverses façons et à des degrés variables. La situation n’était pas identique partout et tout le temps. Dans ces conditions, les frères s’efforçaient consciencieusement de préserver leur intégrité chrétienne, si bien que beaucoup d’entre eux ont été envoyés en prison.

Puis, en 1958, à la suite d’un décret du gouvernement, l’exemption du service militaire a été accordée aux hommes de moins de 30 ans qui travaillaient dans les mines de charbon. Plutôt que d’attendre d’être arrêtés et condamnés à la prison — pour être peut-être envoyés dans les mines —, des frères ont préservé un peu de leur liberté en se faisant embaucher dans les mines (Prov. 22:3). C’est ainsi que des “ saints ” ou des “ prêtres ”, comme les gens appelaient ces Témoins, travaillaient dans beaucoup de mines. Comme ils étaient nombreux dans certaines, ils ont formé des congrégations solides au sein desquelles les frères ont grandi vers la maturité spirituelle et sont devenus des ministres capables.

Eduard Sobička a travaillé pendant dix ans dans une mine à Kamenné Žehrovice, un village proche de Kladno. Il raconte : “ Pour autant que je m’en souvienne, il y a eu jusqu’à environ 30 frères en même temps dans la mine où je travaillais. Nous étions dans des équipes différentes et nous nous étions fixé pour règle de ne pas rester trop près les uns des autres au point de nous écarter des autres mineurs. Toutefois, les ‘ saints ’, comme on nous appelait couramment, attiraient beaucoup l’attention. Les mineurs se moquaient de nous et nous insultaient, mais dans le fond ils nous respectaient. ” Dans les mines, les frères saisissaient les occasions de donner le témoignage et, quand certains manifestaient de l’intérêt, ils leur prêtaient aussi les précieuses publications.

En vacances avec d’autres Témoins

C’étaient des temps difficiles, mais les vacances en groupes avaient leur place dans la vie des serviteurs de Jéhovah. Bien organisées, elles pouvaient non seulement revigorer physiquement, mais aussi bâtir spirituellement ceux qui y participaient. À une époque où les réunions ne comptaient que dix assistants au maximum, imaginez ce que pouvaient éprouver des Témoins de Jéhovah qui se retrouvaient peut-être une trentaine pendant une semaine ou deux !

Il était important de choisir avec sagesse ceux que l’on invitait. Les frères qui organisaient ces vacances veillaient à ne pas favoriser les jeunes au détriment des plus âgés, ou les frères au détriment des sœurs. Ils s’efforçaient d’inclure dans le groupe plusieurs frères spirituellement mûrs pour exercer la surveillance nécessaire.

Les frères se souciaient surtout de prévoir un programme spirituel bien équilibré. Le programme d’une journée pouvait être le suivant : Le matin, prière, texte du jour et lecture de la Bible. Certains après-midi, des réunions de plusieurs heures. Le soir, il y avait souvent une réunion spirituelle dont le programme était fixé à l’avance. Le reste de la journée était libre. Les amis pouvaient étudier, faire de la randonnée, nager, etc. À une randonnée, on associait généralement la prédication, mais là encore il fallait observer des règles non écrites. Imaginez un groupe de 20 randonneurs. Dans les villages, les bois ou les champs, ils rencontraient des gens. Dans ce cas, un frère ou une sœur se détachait du groupe et s’efforçait d’entamer une conversation, tandis que les autres poursuivaient leur chemin.

Ces vacances en groupes ont donné d’excellents résultats. Elles affermissaient la foi des vacanciers et contribuaient à la propagation de la bonne nouvelle. Ces vacances en groupes appartiennent à l’histoire moderne des Témoins de Jéhovah dans ce pays. Cependant, à aucun moment, les serviteurs de Jéhovah ne pouvaient se permettre d’abaisser leur garde spirituelle.

Une attaque sournoise

Satan le Diable, le “ père du mensonge ”, cherche à miner la confiance des frères en déformant les faits et en présentant les fidèles serviteurs de Dieu sous un faux jour (Jean 8:44). Il a recouru à cette ruse pour affaiblir l’Israël antique, pour dresser les Juifs du Ier siècle contre Christ et pour tenter de nuire à la congrégation chrétienne primitive (Nomb. 13:26–14:4 ; Jean 5:10-18 ; 3 Jean 9, 10). Certains individus servent la cause de Satan quand ils cherchent à s’élever. D’autres pensent peut-être que leur point de vue est le bon, mais ils expriment des opinions bien arrêtées alors qu’ils ne connaissent pas tous les faits. Satan peut utiliser ces deux méthodes, et c’est ce qu’il a fait dans ce pays.

À la fin des années 50, la situation était très difficile pour les frères de Tchécoslovaquie. Beaucoup étaient en prison, et les relations avec le siège mondial des Témoins de Jéhovah étaient rompues. Certains ont pris l’initiative de donner des directives non fondées sur les Écritures, mais qui reflétaient leur opinion personnelle (Tite 1:9 ; Jacq. 3:1). Devant les difficultés de l’époque, un certain nombre de frères ont adopté une attitude très catégorique sur des questions pour lesquelles ils ne connaissaient pas tous les faits (voir Proverbes 18:13, 17). Quelques-uns se sont mis à “ entraîner les disciples à leur suite ”. — Actes 20:30.

À propos de ce qui s’est passé à l’époque, frère Müller a écrit plus tard : “ Un jour de janvier 1956, dans la prison de Valdice, on m’a conduit dans un bureau où m’attendaient deux hommes. Affirmant appartenir au ministère de l’Intérieur, ils ont cherché à me persuader que nous devions ‘ atténuer ’ certains de nos enseignements religieux. Comme nous ne pouvions accepter, l’entretien a été très court. En 1957, deux autres fonctionnaires du ministère de l’Intérieur sont venus me voir. La discussion, qui a duré trois heures, a eu lieu dans un tout autre esprit. J’ai pu expliquer ouvertement le point de vue et la position des Témoins de Jéhovah sur plusieurs questions. Ils voulaient connaître notre position sur le service militaire, les transfusions de sang, les syndicats et un certain nombre d’autres points. À la fin, l’un d’eux m’a demandé : ‘ M. Müller, pensez-​vous que nous pouvons être amis ? ’ Je lui ai répondu : ‘ Des amis sont très proches les uns des autres et ont de nombreux centres d’intérêt communs. Nous autres Témoins de Jéhovah, nous croyons en Dieu, alors que vous, les communistes, vous êtes athées. Nous n’avons pas de base commune. Mais je pense que nous pouvons vivre en paix ensemble. ’ Le fonctionnaire a dit : ‘ Votre réponse me fait plaisir, car si elle avait été différente nous n’aurions pas pu vous faire confiance. ’ J’avais l’impression qu’il m’avait posé cette dernière question pour déterminer si, à l’avenir, nous pourrions avoir un dialogue constructif. Si oui, ce serait un pas vers une solution à notre situation. ”

Cette conversation a permis d’en avoir d’autres un peu plus ouvertes entre quelques frères et les autorités. Toutefois, en raison de l’atmosphère de l’époque, des Témoins, qui avaient eu connaissance de ces entretiens, pensaient que ces frères responsables avaient transigé avec les principes chrétiens. Nul doute que certains de ceux qui ont réagi ainsi étaient animés du désir sincère d’éviter tout compromis. Toutefois, quelques-uns, très catégoriques, ont exprimé ouvertement leur méfiance envers les frères qui avaient parlé avec les fonctionnaires. Mais leur méfiance était-​elle fondée ?

D’autres facteurs étaient à prendre en considération. Juraj Kaminský, qui sert Jéhovah fidèlement depuis plus de 50 ans, explique : “ Après que les frères responsables et de nombreux anciens ont été arrêtés, certains de ceux qui s’occupaient d’une congrégation ou d’une circonscription ont commencé à établir des règles de conduite pour les proclamateurs, dressant une liste de ce qui était autorisé et de ce qui ne l’était pas. ” Il aurait été préférable, à l’exemple de l’apôtre Paul, de “ favoriser l’obéissance de la foi ”. (Rom. 16:26.) Comme le vote était obligatoire, des Témoins se rendaient au bureau de vote, mais, par motif de conscience, ne mettaient pas dans l’urne un bulletin en faveur d’un candidat politique. D’autres estimaient que ces Témoins faisaient un compromis. Certains frères, et on pouvait le comprendre, en voulaient aux autorités en raison des mauvais traitements qu’elles infligeaient à leurs frères chrétiens. Frère Müller a fait ce commentaire : “ Cette situation me causait beaucoup de souci. C’est pourquoi, en automne 1957, j’ai écrit [depuis ma prison] une lettre dans le but d’aider les frères à redresser leurs pensées. ” Un paragraphe de cette lettre disait :

“ Autre chose encore me fait de la peine. [...] Je rappelle aux frères que nos réunions sont consacrées à l’étude des Écritures et à la formation des Témoins de Jéhovah pour qu’ils deviennent des ministres meilleurs et plus capables. Il ne convient pas de discuter de politique ni d’exprimer des opinions négatives sur l’État lors des réunions, peu importe le lieu où elles se tiennent et qu’il y ait beaucoup de monde ou seulement deux personnes. Frères, n’oubliez pas cela, et ne tolérez pas de telles discussions. Éprouvez-​vous du ressentiment envers le régime parce que moi-​même et d’autres frères sommes en prison ? Alors, en mon nom et en celui des autres frères, je vous en conjure, chassez de tels sentiments. Ne cédez pas à la colère ni à l’animosité, car nous avons présenté notre cas à Dieu ; faites de même. ” — Rom. 12:17–13:1.

Les frères et les sœurs fidèles ont été grandement encouragés par cette lettre. Jan Tesarz a dit : “ Nous avons reçu sa lettre, écrite en prison en 1957. Ce n’était nullement un compromis, mais le bon sens chrétien. ” Tout le monde n’était toutefois pas de cet avis. La lettre de frère Müller a suscité bien des controverses et des conjectures.

À l’écart de la congrégation

Après l’annonce d’une amnistie générale des prisonniers politiques en mai 1960, la plupart des Témoins de Jéhovah détenus ont été libérés. C’était merveilleux. Malgré les menaces, ils ont aussitôt recommencé à prêcher la bonne nouvelle. Beaucoup d’entre eux pensaient à l’exemple laissé par les apôtres de Jésus Christ quand, après avoir été libérés de prison, ils ont prié pour avoir la hardiesse de continuer à prêcher la Parole (Actes 4:23-31). Mais d’autres épreuves les attendaient.

Le doute et la méfiance s’étaient installés chez les frères. Quand une lettre de frère Müller a été envoyée aux frères pour clarifier les choses, certains, qui avaient émis de vives critiques, n’ont pas permis que cette lettre soit lue dans les congrégations. En 1959, il y avait en Tchécoslovaquie 2 105 Témoins actifs, mais plus de 1 000, affirmant toujours servir Jéhovah, ne le faisaient plus en union avec leurs anciens compagnons chrétiens. Ceux qui étaient à la tête de ces dissidents prétendaient même avoir l’approbation du siège mondial de Brooklyn et de Nathan Knorr, qui était alors président de la Société Watch Tower.

D’autres événements ajoutèrent aux soupçons que ces dissidents entretenaient envers leurs anciens compagnons. À cette époque-​là, les représentants du gouvernement en étaient généralement arrivés à comprendre que les Témoins de Jéhovah n’étaient pas des espions américains, comme on les en avait accusés. Ils savaient aussi qu’il avait été impossible d’arrêter leur activité ou de les persuader de transiger avec leur foi. Le gouvernement, un régime communiste totalitaire, a donc entrepris de dialoguer avec les Témoins. C’était un dialogue imposé. La Sécurité d’État désirait s’assurer que les sentiments religieux ne seraient pas utilisés contre le régime, mais plutôt, si possible, en sa faveur. Parfois, pour de tels entretiens, frère Müller, ou un des surveillants itinérants, était convoqué dans un commissariat de police pour y être interrogé. Ou bien cela ressemblait à une conversation amicale dans un café.

Ne connaissant pas tous les faits, certains observateurs ont pensé que les frères impliqués dans ces entretiens collaboraient avec la Sécurité d’État. Les noms de quelques-uns de ces frères ont même été inscrits sur une liste de prétendus collaborateurs et les frères ont été accusés d’avoir modifié des articles de publications pour accéder aux désirs de la Sécurité d’État.

Un encouragement affectueux à “ chercher Jéhovah ”

Frère Knorr se souciait beaucoup de l’œuvre du Seigneur et de ceux qui s’efforçaient de coopérer fidèlement avec l’organisation de Jéhovah. Le 7 décembre 1961, il a écrit une lettre aux frères de Tchécoslovaquie dans laquelle il attirait leur attention sur des passages de l’Écriture comme Mika 2:12 et Psaume 133:1. Il expliquait la position de la Société sur diverses questions et exprimait son soutien aux frères à qui on avait confié des responsabilités. En fait, il encourageait avec amour les frères à “ chercher Jéhovah ”, c’est-à-dire à discerner comment l’esprit de Jéhovah agissait pour accomplir sa parole et à coopérer dans l’unité avec les instruments dont Jéhovah se servait (Ze 8:21). Voici un paragraphe de sa lettre :

“ Mes chers frères, [...]. Les nouvelles qui me parviennent indiquent que la majorité des frères de Tchécoslovaquie préservent, de façon théocratique, leur unité chrétienne, mais qu’en raison des difficultés de communication un petit nombre d’entre eux ont permis au bavardage et aux rumeurs de jeter le doute dans leur esprit, si bien que quelques-uns ont cessé de coopérer ou de remettre leurs rapports d’activité. Cela ne peut qu’attirer des ennuis à ce petit nombre de frères et les rendre malheureux, ce qui est déjà le cas. Je vous écris donc pour vous informer que frères Adam Januška et Bohumil Müller, ainsi que les frères qui collaborent avec eux, sont bien les surveillants chrétiens responsables pour la Tchécoslovaquie, et je vous demande instamment de vous souvenir des paroles de Paul en Hébreux 13:1, 7, 17. Ces frères se soucient de vous et s’efforcent de vous aider tous à rester fidèles à Jéhovah Dieu. Collaborez donc humblement avec eux, et ils collaboreront avec vous, à la gloire de Jéhovah. ” Malheureusement, peu de temps après la réception de cette lettre, il a fallu exclure Adam Januška à cause de sa conduite non chrétienne.

Certains ont reçu avec gratitude la lettre de frère Knorr, mais tous ne se sont pas laissé redresser par les conseils qu’elle renfermait. En réalité, en 1962 les choses se sont aggravées. Une série d’articles parus dans La Tour de Garde ont expliqué les devoirs des chrétiens d’abord envers Dieu puis envers les autorités gouvernementales, les “ autorités supérieures ” dont il est question en Romains 13:1. Ils modifiaient notre compréhension de la question. Ceux qui s’étaient montrés méfiants et critiques ont répandu des rumeurs selon lesquelles ces articles avaient été en réalité écrits par frère Müller sous la direction du ministère de l’Intérieur. Que fallait-​il faire ? Au lieu de passer tout leur temps à essayer de convaincre ceux qui ne voulaient pas se laisser convaincre, les frères ont dirigé leur attention sur la prédication de la bonne nouvelle à ceux qui étaient affamés et assoiffés de justice.

Au cours des années suivantes, certains de ceux qui avaient abandonné l’organisation ont constaté les preuves que Jéhovah la bénissait et ont demandé à revenir. D’autres, cependant, sont restés en dehors de la congrégation jusqu’en 1989, année où le Collège central a envoyé une lettre pleine de bonté “ À tous ceux qui désirent adorer et servir Jéhovah dans l’unité ”. Cette lettre attirait l’attention sur des prophéties comme Zekaria 8:20, 21 et Isaïe 60:22, qui sont en train de s’accomplir. Elle mettait aussi l’accent sur les conseils et les principes qu’on trouve en Matthieu 24:45-47, 1 Corinthiens 10:21, 22 et Éphésiens 4:16. Puis cette lettre disait, entre autres choses :

“ Nous sommes tristes d’apprendre qu’aujourd’hui encore vous vous tenez à l’écart de l’organisation et des procédures théocratiques que suivent les serviteurs de Dieu dans toutes les autres parties de la terre. Nous vous écrivons pour vous encourager à démontrer votre désir de collaborer dans l’unité avec l’organisation visible de Jéhovah telle qu’elle est constituée dans le monde et telle qu’elle existe dans votre pays. Vous pouvez donner la preuve que c’est votre désir sincère en acceptant les frères que nous avons choisis. Ils sont prêts à faire le nécessaire pour vous lire cette lettre. Vous pouvez faire entièrement confiance à ces frères qui viennent à vous et qui, par cette lettre, se font connaître comme étant agréés par nous. Ils ont le privilège de vous inviter à revenir dans le seul troupeau afin de ne plus rester à l’écart. — Jean 10:16. ”

Cette action du Collège central a largement contribué à réparer ce qui restait des dégâts causés par l’attaque sournoise de Satan contre les congrégations à une époque où elles ne pouvaient communiquer librement avec le reste de l’organisation visible de Jéhovah.

Organisés et formés pour continuer à servir Dieu

Quand les Témoins ont été relâchés de prison en 1960, il y avait encore beaucoup à faire pour que s’effectue la prédication de la bonne nouvelle en Tchécoslovaquie. Pour cela, il allait être important d’avoir une bonne organisation et de recevoir une bonne formation. Le fait que cela a été possible malgré les conditions difficiles qui existaient alors a donné la preuve que Jéhovah accordait sa protection et sa bénédiction avec amour.

Un grand pas en avant dans l’organisation théocratique a été la mise en place de l’École du ministère du Royaume en 1961 pour fournir, à partir de la Bible, une formation spéciale aux surveillants itinérants et aux serviteurs de congrégation (qu’on appelle aujourd’hui surveillants-présidents). Karel Plzák, de Prague, qui était alors surveillant itinérant, se souvient de la première classe. Elle devait se réunir près de Karlovy Vary. Or, la Sécurité d’État a, elle aussi, eu connaissance du lieu. On a donc pris des dispositions à la dernière minute pour que les frères se réunissent dans une maison privée.

Beaucoup de jeunes frères ont compris à cette époque toute l’importance de servir Jéhovah. Certains ont atteint la maturité très rapidement et n’ont pas tardé à être invités à bénéficier de l’École du ministère du Royaume. L’un d’eux, Jaromír Leneček, était conducteur à l’étude de livre à 14 ans. À 16 ans, il a été nommé adjoint au surveillant de la congrégation et, à 20 ans, il a été invité à l’École du ministère du Royaume. Il est aujourd’hui membre du Comité de la filiale.

Un autre programme de formation, mis en place en 1961, a beaucoup contribué à améliorer la qualité de la prédication. On confiait à un proclamateur expérimenté le soin d’en former un autre, moins expérimenté. Ils se préparaient ensemble et participaient ensemble au ministère. Le but était de former suffisamment le proclamateur moins expérimenté pour qu’à son tour il en forme d’autres. À l’époque, on ne pouvait donner le témoignage que de manière informelle, mais cette formation a permis à beaucoup de devenir d’efficaces chanteurs de louanges à Jéhovah.

Sous un régime totalitaire, le courrier est très surveillé par le gouvernement. En Tchécoslovaquie, les surveillants itinérants étaient donc un important maillon dans la communication théocratique. Chaque visite du surveillant de circonscription était un événement très attendu. Eduard Sobička se souvient : “ Un surveillant itinérant devait avoir un emploi et, de ce fait, ne pouvait servir dans une congrégation qu’un week-end sur deux, du vendredi soir au dimanche soir, soit 5 jours par mois. C’est le nombre de jours que les surveillants de circonscription dans les pays libres passent dans une congrégation au cours d’une seule semaine. C’est pourquoi une circonscription ne comptait généralement que six congrégations. ” Grâce à ces frères, la communication avec les congrégations était maintenue, et celles-ci étaient à jour.

Quand on oubliait toute prudence

Parfois, lorsque l’œuvre prospérait, il était facile d’oublier que les Témoins de Jéhovah étaient toujours sous le coup de l’interdiction. Les surveillants encourageaient les frères à faire preuve de bon sens dans toutes leurs activités, mais certains ne se contentaient pas des méthodes utilisées ; ils voulaient des résultats plus rapides.

Un jour de 1963, dans un parc de Prague, deux frères ont rassemblé un groupe de personnes, puis l’un des deux est monté sur un banc et a commencé à prononcer un sermon. Il a traité d’agent du Diable un homme du groupe qui soulevait des objections. La police est arrivée et a demandé aux frères de décliner leur identité. Mais les choses n’en sont pas restées là. L’incident a déclenché une vaste opération de police. En l’espace de quelques jours, plus de 100 frères et sœurs de Prague ont été arrêtés. Il en est résulté deux choses : des procès et une leçon pour les frères. Six d’entre ceux qui avaient été arrêtés ont été poursuivis en justice et condamnés.

Cet incident n’a pas ralenti la prédication, mais a rappelé aux frères la nécessité de faire preuve de sagesse pratique (Prov. 3:21, 22). C’était particulièrement important à la fin des années 60, quand on a eu quelque espoir de voir l’interdiction levée.

La liberté de culte en vue

L’année 1968 a vu des changements inattendus. Des communistes dits réformateurs ont pris le pouvoir et ont commencé à travailler à la démocratisation du régime. Ces changements ont été bien accueillis par le peuple et on a parlé de “ socialisme à visage humain ”.

Comment les Témoins de Jéhovah ont-​ils réagi à ces changements ? Avec réserve. Tout en accueillant favorablement la libéralisation du système, espérant que l’interdiction serait peut-être levée, ils ont évité toute précipitation qu’ils auraient pu regretter par la suite. C’était une attitude sage (Prov. 2:10, 11 ; 9:10). Après huit mois de liberté relative, les armées de cinq pays du Pacte de Varsovie sont entrées en Tchécoslovaquie. Quelque 750 000 soldats et 6 000 chars ont mis fin au “ socialisme à visage humain ”. Le peuple était anéanti. Cependant, l’attitude neutre des Témoins de Jéhovah durant le “ Printemps de Prague ” les a beaucoup aidés dans les années suivantes, car les autorités gouvernementales ont dû reconnaître que les Témoins ne sont absolument pas une menace pour l’État.

Chose étonnante, après ces événements, les citoyens tchécoslovaques ont pu, pendant une courte période, circuler librement en Europe occidentale. Beaucoup de Témoins de Jéhovah en ont profité, notamment parce que cette année-​là était prévue l’assemblée internationale “ Paix sur la terre ”. Environ 300 frères et sœurs de toute la Tchécoslovaquie se sont rendus à Nuremberg, en Allemagne de l’Ouest, la ville d’assemblée la plus proche. Cette assemblée leur a insufflé une force spirituelle accrue. Mais peu après les frontières ont de nouveau été fermées.

Au début des années 70 a commencé une période de normalisation politique. Les hommes qui avaient suivi le mouvement réformateur de 1968 ont été systématiquement exclus de la vie politique et culturelle. Près de 30 000 personnes ont été touchées. Environ un quart des fonctionnaires de la Sécurité d’État, qui s’étaient joints à la réforme, ont perdu leur emploi. Certains ont dit que c’était le retour à l’âge des ténèbres.

Ce n’était pas comme dans les années 50, mais la Sécurité d’État surveillait de nouveau de très près les activités des Témoins de Jéhovah. Dans certains endroits du pays, des frères ont été emprisonnés. Cependant, les Témoins n’ont pas cessé de prêcher, mais ils se sont montrés plus prudents.

“ Le terme de six mille années d’existence humaine ”

En 1969, l’édition tchèque de La Tour de Garde a commencé à publier une série d’articles basés sur le livre La vie éternelle dans la liberté des fils de Dieu. Dans le chapitre 1, sous l’intertitre “ Le terme de six mille années d’existence humaine ”, il y avait une explication du Jubilé et de la chronologie biblique. Ces matières ont exercé une heureuse influence sur certains, mais elles ont aussi soulevé pas mal de questions et suscité des spéculations.

Le bureau pour la Tchécoslovaquie a envoyé à toutes les congrégations une lettre datée du 22 février 1972, qui expliquait longuement les raisons pour lesquelles il ne fallait pas faire des déclarations péremptoires sur la date à laquelle s’abattrait Har-Maguédôn. Elle indiquait qu’aucune publication de la Société n’avait déclaré qu’Har-Maguédôn viendrait telle ou telle année. La lettre concluait : “ Les Témoins de Jéhovah du monde entier connaissent bien ces faits, et personne ne devrait ajouter des idées personnelles sur ce qui se passera avant ou durant l’année 1975. Rien dans les Écritures ne permet d’avancer de telles affirmations qui pourraient avoir un effet négatif sur la prédication. Efforcez-​vous donc d’‘ avoir tous même langage, pour qu’il n’y ait pas de divisions parmi vous, mais que vous soyez bien unis dans la même pensée et dans la même opinion ’. (1 Cor. 1:10.) En effet, quant à ce jour-​là et à cette heure-​là, personne ne les connaît. — Mat. 24:36. ”

Ce qui est arrivé

En février 1975, plusieurs frères ont été arrêtés à la suite d’une opération de police. Au cours de l’année, d’autres arrestations ont suivi dans différentes parties du pays. Stanislav Šimek, de Brno, qui avait déjà été emprisonné plusieurs fois, raconte : “ Le 30 septembre 1975, j’ai été arrêté et mon appartement ainsi que mon lieu de travail ont été fouillés. La police a confisqué cinq sacs de publications. J’ai appris plus tard que quelque 200 agents de la Sécurité d’État avaient pris part à cette opération. Ils avaient perquisitionné dans 40 foyers et confisqué une demi-tonne d’écrits. Nous avons été condamnés à 13 ou 14 mois de prison. ”

Ces perquisitions étaient très gênantes. Dans les appartements des surveillants il y avait souvent les rapports des congrégations, qui étaient difficiles à cacher. Mais plus d’une fois Jéhovah a aveuglé ceux qui désiraient causer du tort à ses serviteurs. Frère Mařák, de Plzeň, se souvient : “ J’étais alors surveillant au service. Dans un buffet aux portes vitrées il y avait une grande enveloppe qui contenait des rapports d’activité, des offrandes et la liste de tous les surveillants et assistants ministériels. Quand les hommes qui perquisitionnaient se sont approchés du buffet, ma femme m’a regardé et s’est mise à prier silencieusement Jéhovah pour lui demander son aide. Les hommes ont regardé à travers la vitre en direction de la grande enveloppe grise, mais c’était comme s’ils avaient été aveuglés ; ils ne l’ont pas vue. Nous avons remercié Jéhovah du fond du cœur pour sa protection. ”

Les actions de l’État envers les frères avaient parfois un côté comique. Michal Fazekaš, baptisé en 1936 et emprisonné à plusieurs reprises, a raconté : “ En 1975, on m’a de nouveau condamné, mais cette fois-​là j’ai bénéficié d’une mise à l’épreuve. Fait intéressant, la même année, le trentième anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale, on a augmenté ma pension pour me récompenser d’avoir ‘ participé à l’affaiblissement des armées du Reich allemand ’ parce que j’avais été envoyé dans un camp de concentration en raison de ma neutralité chrétienne. ”

La carte des territoires des congrégations

Le 1er février 1976, un comité de cinq membres a été nommé pour s’occuper des activités des Témoins de Jéhovah en Tchécoslovaquie. Il comprenait Ondřej Kadlec, Michal Moskal, Bohumil Müller (coordinateur), Anton Murín et Eduard Sobička.

Un peu plus tard dans la même année, Ondřej Kadlec a visité à titre privé les bureaux de la filiale des Témoins de Jéhovah en Finlande. Au Bureau du service, il a remarqué une carte de la Finlande sur laquelle étaient délimités les districts, les circonscriptions et les territoires des congrégations. De retour en Tchécoslovaquie, lors d’une réunion du comité, il a proposé de faire la même chose pour la Tchécoslovaquie. Frère Müller a fait remarquer assez fermement qu’une telle carte risquait d’éveiller des soupçons chez les autorités et de nous attirer de graves ennuis. Frère Kadlec raconte : “ Je n’avais absolument pas l’intention de revenir sur cette question, mais, deux mois plus tard, c’est frère Müller qui l’a soulevée de nouveau. ” Il était devenu évident qu’une telle carte était nécessaire. Les congrégations n’ont pas tardé à être mises à contribution.

Mais comment allait-​on diviser le territoire de la Tchécoslovaquie entre 220 congrégations réparties dans 8 districts et 35 circonscriptions ? La tâche fut confiée à Jaroslav Boudný, de Prague. Celui-ci explique : “ Il y avait beaucoup de place pour l’initiative personnelle. Travailler avec frère Müller, qui était très minutieux, était extraordinaire. Plein d’enthousiasme, et en priant beaucoup, je me suis complètement investi dans cette tâche. Il fallait relier des milliers de points pour dessiner les limites des territoires des congrégations. ”

La prédication dans d’autres territoires

Une fois que les congrégations ont reçu leurs attributions de territoire, celles qui pouvaient s’occuper de territoires non attribués ont été invitées à le faire. Il était touchant de voir de nombreuses congrégations disposées à assumer cette tâche supplémentaire, notamment celles de la région d’Ostrava, en Moravie. Dans certains cas, les frères devaient faire jusqu’à 200 kilomètres pour atteindre ces territoires.

Comment s’organisaient-​ils ? Ils partaient le samedi matin pour tout le week-end et ne rentraient que le dimanche soir. Les voitures étaient toujours pleines, et les frères supportaient eux-​mêmes les frais. Des proclamateurs faisaient de tels voyages un week-end sur deux.

On les encourageait à se conduire comme des touristes, à laisser leurs voitures en dehors des villages, à parcourir ceux-ci dans une seule et même direction, à entamer des conversations amicales pour arriver petit à petit à donner le témoignage, mais, s’ils discernaient une certaine opposition, à revenir au sujet de conversation initial et à y mettre fin aimablement. Sur dix ans, on n’a déploré que quelques rares difficultés.

Dans d’autres territoires encore, on a envoyé, pour des périodes limitées, des pionniers qui avaient été recommandés par les anciens. Comme dans le passé, ces pionniers y demeuraient une semaine ou plus. Parmi les premiers pionniers de Prague, il y avait deux sœurs, Marie Bambasová et Karla Pavlíčková, qui servaient ensemble depuis près de 30 ans. Karla se souvient : “ Marie a pris sa retraite en 1975. Deux jours après nous nous rendions en Moravie pour y effectuer le service de pionnier. C’était une période de persécutions. Notre service pouvait donc être dangereux, surtout là où nous étions, près de la frontière autrichienne. Une sœur de l’endroit nous a recommandé : ‘ N’emportez pas de publications. Si quelqu’un vous arrête, dites-​lui que vous faites un petit voyage, quittez l’endroit et ne revenez pas chez moi. Je vous enverrai vos affaires plus tard. ’ Mais Jéhovah nous a bénies. Notre première expérience dans cette forme de service a été merveilleuse. Chaque année, nous sommes allées ainsi effectuer le service de pionnier, et nous avons toujours été affectées dans des endroits différents. ”

Ces voyages pour accomplir le service de pionnier emmenaient parfois les frères beaucoup plus loin. “ Frère, il y a un grand besoin en Bulgarie. Tu parles le russe et tu serais capable d’effectuer cette tâche. ” C’est ce qu’un frère de Prague s’est entendu dire à la fin des années 70. Sa femme et lui ont été volontaires pour se rendre régulièrement en Bulgarie, parfois deux fois par an, ce qu’ils ont fait pendant 13 ans.

N’y avait-​il pas assez de travail chez eux pour que des proclamateurs tchèques aillent en Bulgarie, où les conditions étaient plus difficiles ? Il y avait beaucoup à faire en Tchécoslovaquie, mais ils désiraient vivement apporter leur aide là où elle était nécessaire.

Le frère de Prague qui a participé à cette activité fait ce commentaire sur la prédication en Bulgarie à cette époque : “ Les Bulgares sont très hospitaliers. Cela nous a permis d’être très proches d’eux. Avec le temps, nous en sommes venus à bien les comprendre. Ils faisaient connaître la vérité essentiellement aux membres de leurs familles. Pour beaucoup d’entre eux, il ne leur serait jamais venu à l’esprit qu’ils pouvaient aborder les gens dans la rue. Un jour que j’avais été désigné pour diriger le Mémorial à Sofia, j’ai profité de la présence de nombreux proclamateurs. En rapportant des faits et en faisant des démonstrations, nous leur avons montré comment donner le témoignage avec davantage de ‘ sécurité ’. Il était important de ne pas dire : ‘ J’étudie la Bible ’, mais plutôt d’entamer une discussion sur un sujet neutre pour en arriver petit à petit à la Bible. Nous pouvions dire : ‘ J’ai entendu dire que la Bible déclare... ’ Les proclamateurs ont accepté avec joie cette nouvelle méthode, et le message concernant Dieu a commencé de se répandre au-delà du cercle des proches. ”

L’activité zélée indispose les fonctionnaires

Les frères veillaient à être prudents, mais tout effort accru pour prêcher la bonne nouvelle était vite remarqué par nos persécuteurs. La congrégation de Nejdek, près de Karlovy Vary, était l’une de celles qui attiraient l’attention des fonctionnaires et de la police. Juraj Kaminský, qui a été surveillant itinérant pendant de nombreuses années, raconte : “ À un certain moment, ils ont même cru sérieusement que l’œuvre dans tout le pays était dirigée de Nejdek. Les dignitaires communistes organisaient souvent des conférences pour discuter de la façon dont ils pouvaient empêcher nos activités. Une fois, des spécialistes sont venus de Prague à une conférence organisée dans un hôtel de Karlovy Vary. Parmi les assistants, environ 200, il y avait deux membres du gouvernement, des représentants de plusieurs ministères et des policiers.

“ L’orateur avait, sur le pupitre, le livre Vérité. Il a décrit en détail l’organisation des Témoins de Jéhovah, expliquant que nous étions des organisateurs très sérieux et capables. Arrivé au point culminant de ses propos flatteurs sur les Témoins de Jéhovah, il a ajouté : ‘ Il nous faut faire mieux pour les empêcher d’échapper à notre contrôle. ’ ”

Persécutés pour avoir honoré Jésus Christ

Il était impossible de cacher à la police communiste la date du Mémorial de la mort de Christ. Božena Pětníková, qui vivait à Prague, nous rappelle ce qui s’est passé une fois : “ À cette époque-​là, comme il y avait peu de frères dans les congrégations, on demandait aux sœurs de diriger les réunions dans des foyers. Nous étions habituellement 10 assistants au maximum. En 1975, notre groupe s’est réuni pour le Mémorial en un endroit où aucune réunion n’avait jamais eu lieu. Au bout de 40 minutes, nous avons été dérangés par la sonnette et de furieux coups dans la porte. Comme le vacarme continuait, la maîtresse de maison est allée ouvrir la porte. Trois hommes sont entrés, deux en uniforme de la police et un autre en civil. ‘ Eh bien, Madame Pětníková, nous ne pensions pas vous trouver là, s’est exclamé l’homme en civil. Que faites-​vous donc ici ? ’ ‘ Nous célébrons le mémorial de Jésus Christ, ai-​je répondu calmement. Asseyez-​vous, je vous prie, et permettez-​nous de terminer la célébration. ’ Évidemment, ils ont refusé. Ils nous ont réclamé nos cartes d’identité, puis ils ont demandé à chacun, à tour de rôle, pourquoi il se trouvait là. Quand ça a été au tour d’une sœur âgée d’être interrogée, j’ai eu un peu peur de ce qu’elle allait répondre. Mais sa réponse nous a tous encouragés. Elle a dit : ‘ Je suis Témoin de Jéhovah, et j’honore Jéhovah. ’ ‘ Soyez heureuse d’être si âgée ’, a répondu le policier, surpris par son courage. Ils nous ont ensuite obligés à quitter les lieux et, au poste de police, ils m’ont fait signer un procès-verbal selon lequel je dirigeais le Mémorial. ”

Douze ans plus tard, en 1987, en certains endroits de Bohême, la Sécurité d’État a arrêté de nombreux frères au moment du Mémorial. Ils cherchaient surtout à savoir où avait eu lieu le Mémorial et qui avait présidé la célébration. En un certain endroit, à la fin du Mémorial, la police a relevé l’identité de tous les assistants et a arrêté un frère pour l’interroger. Ailleurs, on a inculpé trois sœurs au motif qu’elles avaient rendu visite à une femme et “ étudié des publications d’une secte religieuse interdite portant le nom de Témoins de Jéhovah ”.

Une autre sœur, Miluše Pavlová, a été condamnée à une peine de prison à Pardubice, non pas parce qu’on l’avait surprise à faire certaines choses, mais sur la base de soupçons. La raison officielle de sa condamnation était la suivante : “ L’expertise a démontré que l’accusée avait diffusé et recopié des publications interdites. La cour d’appel confirme le premier jugement, ajoutant : ‘ Elle a été condamnée à titre dissuasif, pour elle et pour les autres. ’ ”

Distribution de la nourriture spirituelle

La distribution des publications pour l’étude de la Bible s’est faite avec beaucoup de précautions durant la période communiste. Les Témoins en général ne savaient pas comment elles étaient traduites, imprimées et distribuées. Les traducteurs, les correcteurs ainsi que ceux qui participaient à leur impression et à leur reliure n’étaient pas connus.

Un frère ou une sœur qui avait dactylographié un article de La Tour de Garde qu’il venait de traduire en tchèque le remettait à un correcteur et ne le revoyait qu’au moment où on l’utilisait lors d’une réunion dans la congrégation. Tout était traduit de cette manière, y compris les livres et les brochures. La qualité de la traduction était néanmoins relativement bonne. Réveillez-vous ! n’était pas traduit en tchèque à cette époque-​là.

Même les collèges d’anciens ignoraient qu’un membre de leur congrégation participait à la traduction des publications. Si, à cause d’un surcroît de travail, il arrivait qu’un traducteur ou un correcteur participe peu à la prédication, les anciens, pensant qu’il était peut-être en train de se refroidir spirituellement, s’efforçaient de l’aider. Mais les traducteurs et les correcteurs ne révélaient pas ce qu’ils faisaient.

C’est dans ces conditions difficiles qu’un remarquable projet a été entrepris : la traduction en tchèque des Saintes Écritures — Traduction du monde nouveau. Entre 1982 et 1986, elles ont également été imprimées et reliées en cinq volumes en Tchécoslovaquie même, et chaque famille de Témoins en a reçu une série. On a procédé de même pour produire la Traduction du monde nouveau en slovaque, mais celle-ci n’a été achevée que plus tard.

L’impression des publications

Dans les années 50, les frères qui n’étaient pas emprisonnés ont fait beaucoup d’efforts pour s’assurer que leurs frères et sœurs chrétiens soient nourris spirituellement. Pendant un temps, après le décret d’interdiction et l’arrestation des frères responsables, il n’y avait souvent qu’un seul exemplaire de La Tour de Garde pour plusieurs congrégations. La situation s’étant peu à peu améliorée, par la suite on a disposé d’un exemplaire par congrégation, puis d’un exemplaire par famille. N’ayant pas de machines à écrire, les proclamateurs prenaient des notes à la main.

Juraj Kaminský, de la congrégation de Nejdek, explique à quelle situation caractéristique les frères devaient faire face : “ Quand les frères ont enfin pu acheter une machine à écrire, c’était une vieille machine. L’homme qui la leur a vendue l’a sortie devant eux d’un trou creusé dans le sol. Plus tard, ils ont réussi à acheter des machines neuves ainsi qu’un équipement permettant d’agrandir les photographies. ”

Différents frères ont participé à la reproduction des publications. De nombreuses sœurs, dont certaines âgées de plus de 70 ans, ont appris la dactylographie. Les frères ont même réussi à faire pénétrer des publications dans les prisons. En 1958, ils ont commencé à faire des reproductions photographiques miniaturisées de La Tour de Garde. Ils en dissimulaient jusqu’à trois exemplaires dans un morceau de savon ou dans un tube de dentifrice qu’ils envoyaient aux frères en prison. Ceux-ci en faisaient des copies à la main et détruisaient les originaux.

En 1972, Herbert Adamy a été invité à apporter son aide à la reproduction des publications. Son rôle consistait à coordonner la production des publications pour toute la Tchécoslovaquie. Il se rappelle : “ Au début, les publications étaient reproduites à la main dans les congrégations par des centaines de proclamateurs. À la fin — juste avant la chute du régime communiste —, nous disposions de plusieurs ateliers d’imprimerie clandestins, modernes et bien équipés, en mesure de produire plusieurs fois la quantité de publications nécessaire à cette époque-​là. ”

Parlant du temps où ils utilisaient leur première machine à ronéotyper, frère Adamy dit : “ Environ quatre fois par an, tout l’atelier d’imprimerie devait être déplacé dans un autre endroit déterminé d’avance qu’on ne pouvait pas découvrir facilement. Au cours d’une seule ‘ opération ’, l’équipe a imprimé, relié et expédié environ 12 000 livres. Une opération durait à peu près une semaine. Les participants se levaient à 4 heures du matin et allaient souvent se coucher après minuit. Quand une opération était terminée, je transportais les paquets de publications à la gare la plus proche pour les donner à un courrier, qui les emportait parfois jusqu’à 600 kilomètres de là. ”

Par la suite, les frères ont commencé à fabriquer secrètement leurs propres machines à ronéotyper dans les centres de production qu’ils avaient édifiés eux-​mêmes. Au total, ils en ont fabriqué 160, dont quelques-unes ont été envoyées aux frères de Roumanie.

Dans les années 80, les frères de Tchécoslovaquie ont commencé à utiliser l’impression offset, ce qui a beaucoup amélioré la qualité de leur travail. À cet effet, ils ont fabriqué leurs propres presses offset. Au bout d’un an et demi, ils en avaient assemblé 11 avec un système électronique d’alimentation en papier. Une presse pouvait produire 11 000 impressions de qualité à l’heure.

Descente de police dans deux ateliers d’imprimerie à Prague

Vers la fin de 1986, la Sécurité d’État a réussi à localiser deux ateliers d’imprimerie qu’elle a fait fermer. Après une descente de police dans l’un de ces ateliers, un rapport interne a été publié dans un bulletin du ministère de l’Intérieur, dont une copie a été transmise aux Témoins par un agent de police complaisant. Il y avait d’abord la propagande habituelle qui visait à établir un lien entre les Témoins et des mouvements politiques étrangers. Ensuite, le rapport fournissait des détails sur l’opération de police et mentionnait les condamnations infligées aux Témoins. Il faisait cette conclusion étonnante : “ Les Jéhovistes se conduisent extrêmement bien envers les gens de l’extérieur. Ils sont travailleurs et prêts à offrir leur aide, mais ça s’arrête là. Ils ne veulent pas s’investir dans les Brigades du travail socialistes et autres choses semblables. On ne connaît aucun cas de Jéhoviste qui volerait, fumerait, boirait ou se droguerait. [...] Aucun d’eux n’a jamais été poursuivi pour un délit touchant la morale ou les droits de propriété. Les membres de la secte s’efforcent de dire la vérité. Ils ne donnent jamais les noms des autres, mais les appellent ‘ frère ’ ou ‘ sœur ’. Ils ne parlent que d’eux-​mêmes et, si on leur demande de fournir des renseignements précis, ils gardent le silence, non seulement quand ils sont accusés, mais aussi quand ils sont appelés à témoigner. ”

Il va sans dire que la fermeture d’un ou deux ateliers d’imprimerie n’a pas arrêté la prédication du Royaume de Dieu. L’année 1987 a vu un nouvel accroissement. On a enregistré un maximum de 9 870 proclamateurs en Tchécoslovaquie. En moyenne, 699 d’entre eux avaient participé au service de pionnier auxiliaire ou permanent.

L’enregistrement officiel était-​il possible ?

En 1972, quand il a été décidé que désormais dans le monde entier les activités de chaque congrégation seraient dirigées par un collège d’anciens, cette disposition est également entrée en vigueur en Tchécoslovaquie. En 1976, un comité de cinq membres a été désigné pour s’occuper des activités des Témoins de Jéhovah dans le pays.

Toutefois, les Témoins de Jéhovah n’étaient pas enregistrés officiellement. Ils n’avaient non plus ni association reconnue officiellement pour s’occuper des transactions nécessaires ni bureau d’où superviser leur œuvre en Tchécoslovaquie. On a donc acheté en mars 1979 un bâtiment inachevé de deux étages à Prague au nom de deux Témoins. Des équipes de 10 à 12 bénévoles ont travaillé à tour de rôle pendant une semaine dans le bâtiment. Ils venaient d’aussi loin parfois que l’autre extrémité de la Slovaquie. Au bout de six mois, les logements pouvaient être occupés, et un an plus tard la partie devant servir de bureau était prête. Ce bâtiment a offert des locaux convenables pour la filiale jusqu’au printemps 1994.

À la fin des années 70, on pensait pouvoir entreprendre des démarches en vue d’un enregistrement officiel. Le 1er juin 1979, on a donc adressé une lettre au Secrétariat des affaires religieuses auprès du Présidium de la République socialiste tchèque. Cette lettre disait : “ Nous sollicitons une audience en faveur d’un groupe religieux connu sous le nom de Témoins de Jéhovah. Nous voudrions vous informer du désir de certaines personnes assumant des responsabilités au sein de l’organisation des Témoins de Jéhovah d’examiner avec vous les modifications à apporter aux relations entre ce groupe religieux et l’actuel code de lois de la République socialiste tchécoslovaque. ”

La réponse est arrivée presqu’un an après, et des entretiens ont eu lieu le 22 avril 1980. Après cela, on a transmis au ministère de l’Intérieur une demande d’enregistrement de la Watch Tower Bible and Tract Society. Outre la charte de l’association, cette demande renfermait 13 déclarations bien réfléchies. La cinquième disait :

“ Si les Témoins de Jéhovah étaient reconnus par l’État, les congrégations dans leur totalité tiendraient leurs réunions dans des lieux prévus à cet effet. Elles n’auraient pas à se diviser en petits groupes. Les réunions seraient dirigées par des hommes remplissant les conditions requises, ce qui permettrait à la Société Watch Tower de mieux superviser ses congrégations. Les autorités de l’État seraient elles-​mêmes mieux informées sur les activités des congrégations des Témoins de Jéhovah. Des représentants de l’État pourraient, quand ils le souhaiteraient, assister aux réunions publiques et constater que celles-ci ne sont pas néfastes, mais bénéfiques. ”

Nous n’avons jamais reçu de réponse.

De longs interrogatoires par la Sécurité d’État

L’ambiance qui prévalait en 1985 trahissait l’inquiétude du régime politique. Il était très sensible à tout ce qui menaçait sa stabilité. Il en est résulté des interrogatoires plus fréquents de nos frères. Il y en a eu beaucoup à Prague. Un grand nombre de frères ont reçu de la police ce qu’elle appelait un avertissement, mais qui signifiait leur mise à l’épreuve permanente.

Cette année-​là, les congrégations ont reçu du bureau des Témoins de Jéhovah à Prague cinq lettres qui les encourageaient avec bonté, mais aussi avec fermeté, à suivre le principe exprimé en Philippiens 4:5 : “ Que votre nature raisonnable soit connue de tous les hommes. ”

Intéressantes suggestions de la Sécurité d’État

Puis, au début de 1988, la Sécurité d’État a proposé que les frères responsables de l’œuvre dans le pays fassent en sorte qu’un représentant du siège mondial de la Société vienne en Tchécoslovaquie pour une entrevue non officielle avec des fonctionnaires du ministère fédéral de l’Intérieur. L’ordre du jour prévoirait l’examen de “ certains aspects de nos relations [...] en vue d’éventuels entretiens ultérieurs avec des représentants officiels de l’État ”. C’était là un changement certain.

Avant la fin des préparatifs pour cette entrevue, il y a eu l’assemblée de district “ La justice divine ” à Vienne, en Autriche. Un groupe relativement important de Témoins de Tchécoslovaquie y ont assisté, ce dont les autorités étaient parfaitement au courant.

Pendant ce temps, les préparatifs de cette entrevue entre des membres du siège mondial et des dignitaires du ministère de l’Intérieur progressaient régulièrement. Elle a finalement eu lieu le 20 décembre 1988, au matin, dans une salle de conférences du Forum Hotel à Prague. La Société était représentée par Milton Henschel et Theodore Jaracz, du Collège central, et Willi Pohl, de la filiale d’Allemagne. Les frères du Collège central ne s’attendaient pas à des résultats spectaculaires. Ils savaient qu’il faudrait du temps et de la patience. Quoi qu’il en soit, c’était un grand pas en avant. Cette réunion a sans aucun doute été un facteur déterminant pour ce qui s’est passé l’année suivante.

De grandes assemblées internationales étaient prévues dans trois villes de Pologne, et les Témoins de Jéhovah de Tchécoslovaquie désiraient y assister. On a discuté de la question avec des agents de la Sécurité d’État. Quel enthousiasme quand on a appris que 10 000 Témoins tchécoslovaques seraient autorisés à se rendre en Pologne ! Cela représentait plus de la moitié des Témoins de Jéhovah de Tchécoslovaquie à cette époque. Certains ont été effrayés quand le ministère de l’Intérieur a exigé une liste de tous ceux qui s’y rendraient, mais ceux qui ont fait le voyage ont été affermis au-delà de toute espérance par le programme de l’assemblée “ La piété ”, par l’enthousiasme des assistants et par l’hospitalité extraordinaire que leur ont offerte les Témoins polonais.

Ils restent concentrés sur l’œuvre confiée par Dieu

Un peu plus tard cette même année, le 17 novembre 1989, les étudiants de Prague se sont brusquement soulevés. Le régime communiste a réagi avec une force brutale et a envoyé des unités spéciales de la police disperser les manifestants sur la Národní třída (l’Avenue nationale) de Prague. Cette intervention a provoqué une manifestation spontanée et pacifique contre le gouvernement communiste, manifestation qu’on a appelée plus tard la Révolution de velours. L’excitation étant à son comble, les Témoins de Jéhovah ont dû se montrer très prudents, d’autant qu’il n’était pas facile de garder sa position de neutralité.

Le 22 novembre 1989, notre bureau de Prague a envoyé une lettre à toutes les congrégations de Tchécoslovaquie, qui disait entre autres choses : “ Il est bien que les frères concentrent leur attention sur leur œuvre d’évangélisation, ne permettant à rien de les en détourner. [...] Nous apprécions beaucoup l’excellente activité et la prudence de nos chers frères et sœurs. Leur ministère et ses résultats attestent que dans ce pays aussi Jéhovah est avec ses Témoins. Nous y sommes très attachés et nous prions Jéhovah pour demeurer dans sa faveur. Nous vous assurons de tout notre amour et vous adressons nos salutations fraternelles. ” Au cours de l’année de service qui s’était achevée peu de temps avant, on avait enregistré un maximum de 11 394 proclamateurs en Tchécoslovaquie, un nouvel et bel accroissement.

La Tchécoslovaquie ayant eu un nouveau gouvernement vers la fin de 1989, le comité du pays a immédiatement recherché les moyens de faire reconnaître officiellement les Témoins de Jéhovah. Plusieurs membres du comité ont eu une entrevue avec des membres du Présidium. Le document, obtenu à cette occasion et signé par un haut responsable, était très important ; il disait :

“ Nous fondant sur la déclaration du comité préparatoire de l’Église des Témoins de Jéhovah, nous prenons note que le 1er janvier 1990 l’Église reprendra ses activités qui avaient été interrompues par le régime fasciste en 1939 et de nouveau interdites le 4 avril 1949. ” Ce document constituait un premier pas vers l’enregistrement officiel.

Le long chemin vers l’enregistrement

Bien que le gouvernement ait pris acte de la reprise des activités de “ l’Église des Témoins de Jéhovah ”, il a fallu presque quatre autres années d’efforts persévérants avant que la Société ne soit officiellement enregistrée en République tchèque.

Le 12 janvier 1990, on a déposé la demande d’enregistrement officielle de l’Association religieuse des Témoins de Jéhovah au ministère de la Culture de la République tchèque. Toute la procédure a été suivie en collaboration étroite avec le Collège central, le service juridique du siège mondial et des avocats du pays. Les 1er et 2 mars, frère Henschel est venu à Prague. Accompagné des frères Murín et Sobička, il s’est rendu au bureau du Premier ministre et au ministère de la Culture. Ces deux visites avaient pour but d’appuyer notre demande pour un enregistrement rapide. On n’a toutefois obtenu aucun résultat tangible, car les nouvelles lois sur l’enregistrement n’existaient toujours pas. Après cela, nous avons essayé beaucoup de choses, y compris des pétitions et des demandes d’entretien avec le Premier ministre.

Le 19 mars 1992, le parlement a adopté une loi sur les nouvelles religions et les nouvelles associations religieuses. Selon cette loi, le processus d’enregistrement ne serait mis en route que si la demande d’une association religieuse était accompagnée de 10 000 signatures de membres adultes. (Les religions dites traditionnelles, dont les activités s’étaient poursuivies légalement durant le régime communiste, étaient enregistrées automatiquement.) Les Témoins de Jéhovah ont donc été informés qu’ils devaient renouveler leur demande en fournissant les informations exigées. Puis, le 1er janvier 1993, durant les étapes préliminaires en vue de l’enregistrement, un nouveau changement s’est produit quand la Tchécoslovaquie a été scindée en deux pays : la République tchèque et la République slovaque. Mais finalement, le 1er septembre 1993, l’Agence de presse tchèque a reçu l’information suivante :

“ Aujourd’hui, 1er septembre 1993, à 10 heures 30, les représentants de l’Association religieuse des Témoins de Jéhovah ont reçu les documents entérinant l’enregistrement de l’association au ministère de la Culture de la République tchèque. Les représentants des Témoins de Jéhovah ont remercié les fonctionnaires du ministère et les ont informés qu’ils ne demanderaient aucun soutien financier pour des avantages personnels ni aucune aide financière directe de l’État. L’enregistrement prend effet ce jour. ”

Cet événement important a été rapporté dans la presse. Dans certains journaux, il ne s’agissait que d’une brève annonce, alors que dans d’autres la nouvelle était soulignée par des titres comme “ Les Jéhovistes ont obtenu ce qu’ils attendaient ” ou “ Les Témoins de Jéhovah : une religion reconnue ”. Cela signifiait-​il la fin des persécutions des Témoins de Jéhovah en République tchèque ? Nullement.

En l’espace de quelques jours, une campagne impitoyable a été déclenchée contre les Témoins par le moyen des médias. Comme on pouvait s’y attendre, ce sont les journaux religieux qui ont ouvert le plus leurs pages aux attaques contre les Témoins de Jéhovah. Dans des articles pleins de préjugés, qui reproduisaient les questions posées aux Témoins lors de la procédure d’enregistrement, les journalistes faisaient des commentaires tendancieux sur les réponses données par les Témoins. D’un côté, on accusait les porte-parole de la Société de tromperie quand ils disaient que les Témoins n’étaient pas obligés de croire ou de pratiquer certaines choses, et de l’autre on prétendait que les réponses trahissaient les principes de l’organisation.

Cette campagne hostile a marqué le début d’une nouvelle période, qui ne serait pas caractérisée par de pénibles emprisonnements, mais qui verrait les Témoins de Jéhovah tournés en ridicule. Tout Témoin de Jéhovah allait devoir faire face à des attaques d’un autre genre qui viseraient sa foi et sa fidélité à Jéhovah Dieu et à son organisation.

Des actes de foi

Les Témoins de Jéhovah n’ont pas attendu leur enregistrement officiel pour commencer à tenir des réunions publiques, et même de grandes assemblées, en Tchécoslovaquie. Ils avaient informé les autorités qu’ils reprendraient leur activité publique en janvier 1990. Ce mois-​là, on a organisé un programme spécial pour toutes les congrégations. Son thème, “ Les bienfaits de l’obéissance aux commandements divins ”, était tout à fait approprié. Il s’agissait en quelque sorte d’une assemblée de circonscription de deux heures. Le nombre des assistants n’était pas très important, mais on a loué des salles. Dans chacune d’elles se sont réunies une ou deux congrégations. Après ces réunions, on a tenu des assemblées de circonscription plus importantes au printemps suivant.

Tout s’étant bien passé, on a pris des dispositions pour organiser en été une assemblée de district — une assemblée nationale de quatre jours — à Prague. On a loué le stade Evžen Rošický, et deux membres du Collège central, frères Henschel et Jaracz, ont participé au programme. L’assistance maximum a été de 23 876 personnes, dont 1 824 se sont fait baptiser. L’assemblée a été un succès total pour le culte pur. L’ambiance ressemblait beaucoup à celle des assemblées de Pologne de l’année précédente, mais celle-là avait lieu chez nous, et en tchèque et en slovaque. L’émotion très forte suscitée par l’événement se voyait dans les sourires radieux et les larmes qui exprimaient une reconnaissance sincère.

Pendant 40 ans, dans toute la Tchécoslovaquie, les mots “ Témoins de Jéhovah ” n’avaient été que murmurés en public. Des rumeurs incroyables avaient circulé au sujet de ce groupe qu’on qualifiait souvent de “ secte illégale ”. Désormais, tout le monde, y compris les journalistes, pouvait observer de plus près les Témoins. D’une façon générale, les articles de journaux sur l’assemblée ont été favorables. Ils reflétaient l’étonnement pour ce que les Témoins avaient fait dans le stade avant l’assemblée. Pendant deux mois, 9 500 volontaires avaient passé 58 000 heures à le nettoyer de fond en comble, à réparer les sièges et les égouts, et à le blanchir entièrement. Un journaliste du quotidien Večerní Praha (Le Soir de Prague) a été émerveillé par les visages souriants, par l’harmonie entre des gens venus de toutes les régions de Tchécoslovaquie et d’autres pays, et par leur langage correct.

Un autre événement important a eu lieu cette année-​là : l’inauguration le 30 août 1990 de la Salle du Royaume de Bechyně, la première du pays.

Tout cela nous a amenés à un autre événement véritablement prodigieux.

Une assemblée inoubliable

Des dispositions ont été prises pour qu’une assemblée internationale des Témoins de Jéhovah ait lieu à Prague du 9 au 11 août 1991. La première chose à faire était de louer un stade. Quel stade ? Le stade Spartakiad de Prague, un des plus grands du monde. Comme les Témoins de Jéhovah n’étaient pas encore enregistrés officiellement en Tchécoslovaquie, le stade dans son ensemble a été loué à titre privé par Anton Murín, alors coordinateur du comité du pays. C’était un acte courageux qui reflétait une confiance solide en Jéhovah, et Jéhovah l’a béni.

Le service du logement, qui allait avoir un travail énorme, a été confié à Lubomír Müller. Les frères du Collège central connaissaient l’importance de disposer de logements de qualité. Aussi frères Henschel et Jaracz ont-​ils entrepris une tournée d’inspection des hôtels proposés dans toute la ville de Prague. Ils ont visité les chambres d’hôtel et ont même testé les lits. Ils ont dit qu’il n’était pas question d’accepter des hôtels qui ne disposaient que de toilettes et de salles de bains communes sur le palier. Pourquoi ? Frère Henschel a expliqué : “ Dans des circonstances courantes, ce serait suffisant, car les occupants des chambres vont et viennent à des heures différentes. Par contre, tous les assistants à l’assemblée partent et reviennent généralement à la même heure. Vous imaginez la scène devant les toilettes. Nous ne pouvons faire cela à nos frères. ” L’intérêt que des membres du Collège central portaient à chaque futur assistant était une leçon pratique pour les organisateurs de l’assemblée.

À cette assemblée internationale “ Amis de la liberté divine ”, on a enregistré le chiffre maximum de 74 587 assistants. Parmi eux, 29 119 étaient de Tchécoslovaquie, 26 716 venaient d’Allemagne et 12 895 de Pologne. Les 5 857 autres assistants venaient de 36 pays. Quel événement extraordinaire que le baptême de 2 337 nouveaux disciples, dont 1 760 de Tchécoslovaquie, 480 d’Allemagne et 97 de Pologne !

L’événement marquant de cette assemblée a incontestablement eu lieu le samedi 10 août. Les assistants de la section tchécoslovaque se sont tous levés spontanément et se sont mis à applaudir pendant 10 minutes. Les visages resplendissaient de bonheur. Quelle en était la raison ? À la fin d’un de ses discours, Albert Schroeder, membre du Collège central, a d’abord présenté un nouveau livre en anglais, ce qui était plutôt une déception, mais, à la grande surprise des assistants, il a ensuite annoncé la parution d’une nouvelle édition en un seul volume des Saintes Écritures — Traduction du monde nouveau en tchèque et en slovaque. Des larmes de joie ont coulé sur le visage de beaucoup d’assistants.

Cette assemblée a laissé une profonde impression dans le cœur des assistants. Mais qu’en a dit la presse ? Comme toujours, certains articles étaient influencés par les préjugés, et d’autres étaient bons. Le lundi 12 août, on pouvait lire dans le Venkov, deník českého a moravskoslezského venkova (La campagne, un quotidien de la campagne de Tchécoslovaquie et de Moravie-Silésie), sous le titre “ Strahov archicomble ” :

“ De vendredi à dimanche, une assemblée internationale des Témoins de Jéhovah a réuni à Prague 75 000 personnes venues de toutes les régions d’Europe, d’Amérique et du Japon. Les Témoins de Jéhovah déploient leur activité en Tchécoslovaquie depuis 1912. Les Témoins présents se sont distingués par leur prévenance et leur discipline. L’assemblée elle-​même était bien organisée et bien préparée. Bien qu’il ait commencé à pleuvoir au moment du baptême, le samedi, tous les assistants sont restés à leur place pour accueillir les nouveaux membres par de longs applaudissements. ”

Mais il allait falloir attendre encore deux ans avant d’obtenir l’enregistrement de l’association.

Une période d’accroissement

Alors que le processus d’enregistrement légal traînait en longueur, les besoins de l’organisation théocratique augmentaient du fait de l’accroissement de l’activité dans le pays. Depuis 1980, les frères utilisaient un bâtiment de deux étages à Prague qui abritait le bureau national et des logements en nombre limité. Quand, en 1990, on a commencé à diriger l’œuvre plus ouvertement, on a réaménagé ce bâtiment. On a supprimé les logements, et tout l’immeuble a été converti en bureaux. Mais quel genre de bureaux ? Les plus grandes pièces ont été divisées en plusieurs bureaux au moyen de cloisons en bois. Mais ces bureaux servaient aussi de chambres aux volontaires, qui avaient ainsi leur lit juste à côté de leur table de travail. On avait besoin de davantage de place.

Au printemps 1993, un immeuble neuf de dix niveaux, situé à Prague, a été donné à la Société qui devait l’utiliser pour promouvoir l’enseignement de la Bible. Des volontaires venus de tous les coins de Tchécoslovaquie ont participé à l’aménagement de cet immeuble, qui a été inauguré les 28 et 29 mai 1994. On a invité à ce programme d’inauguration des dizaines de Témoins de Jéhovah qui, pendant des années, étaient restés fidèles à Jéhovah sous le régime communiste. Albert Schroeder, du Collège central, a participé au programme, auquel ont également assisté des frères venus d’Allemagne, d’Autriche, du Danemark, des États-Unis, de Grande-Bretagne, d’Italie, des Pays-Bas, de Pologne, de Slovaquie, de Suisse et d’Ukraine.

Quand, en 1993, la Tchécoslovaquie a été scindée en deux pays distincts, l’œuvre a continué d’y être dirigée par un seul et même comité sous la direction de la filiale d’Autriche. Mais en raison des changements survenus dans les deux pays, l’année suivante un comité a été établi dans chacun d’eux. Puis, le 1er septembre 1995, une filiale a été ouverte en République tchèque. Jan Glückselig, Ondřej Kadlec, Jaromír Leneček, Lubomír Müller et Eduard Sobička ont été nommés par le Collège central pour former le Comité de la filiale. Plus tard, Lubomír Müller a été affecté à un service spécial en Russie, et Petr Žitník a été nommé membre du Comité de la filiale de la République tchèque.

Des Salles du Royaume construites “ selon la méthode rapide ”

Les congrégations des Témoins de Jéhovah avaient besoin de lieux de réunion, mais il n’est pas facile de trouver des lieux convenables en République tchèque. En raison, en partie, de la propagande mensongère faite, dans le passé et aujourd’hui, contre les Témoins de Jéhovah, un grand nombre de propriétaires de salles refusent de les leur louer. Beaucoup de congrégations cherchent donc à construire une salle ou à rénover un bâtiment existant. La méthode de construction rapide s’est révélée la plus pratique. C’est ainsi que le 20 novembre 1993 on a inauguré à Sezimovo Ústí la première Salle du Royaume construite selon cette méthode en République tchèque. Elle est utilisée par les deux congrégations de cette ville.

Le nombre des Salles du Royaume n’a cessé de croître depuis. En mai 1999, les 242 congrégations du pays utilisaient 84 Salles du Royaume appartenant aux Témoins de Jéhovah. Les frères et sœurs de République tchèque sont tout à fait conscients que sans l’aide financière qui leur est venue de leurs compagnons chrétiens d’autres pays ils n’auraient pas pu construire tant de belles Salles du Royaume. La générosité de la communauté chrétienne internationale a profondément touché les frères tchèques. Ils désirent sincèrement exprimer leur gratitude à leurs frères des autres pays ainsi qu’à Jéhovah, qui a fait naître un tel esprit dans le cœur de ses serviteurs et qui a produit une si belle organisation. — 2 Cor. 8:13-15.

Les pièges cachés de la liberté

L’euphorie qui a suivi la chute du communisme en 1989 est passée depuis longtemps, et de nombreux et nouveaux problèmes ont surgi. D’un côté, il y a des possibilités, autrefois inconnues, d’acquérir des biens par son travail, mais de l’autre on observe l’insécurité sur les plans économique et social, une croissance rapide de la criminalité, l’inflation et d’autres facteurs qui nuisent aux relations humaines. L’élévation du niveau de vie favorise le matérialisme, l’esprit de compétition et l’envie. De nombreux citadins possèdent une maison à la campagne où ils aiment passer du temps. De plus en plus de gens choisissent de passer des vacances coûteuses à l’étranger. La démocratie toute nouvelle permet de critiquer librement tout et à tout moment, et de promouvoir des styles de vie immoraux, autant de choses impensables sous le régime communiste. Les gens n’y étant pas préparés, ces conditions nouvelles les ont surpris, et certains d’entre eux n’y ont pas résisté.

Cet esprit a également influencé des Témoins de Jéhovah. Un certain nombre d’entre eux ont cessé de servir Jéhovah parce qu’ils se sont laissé engloutir par le matérialisme ou les distractions excessives, parce qu’ils ont abandonné les principes élevés régissant le mariage ou encore parce qu’ils se sont mis à tout critiquer, y compris les dispositions théocratiques de Jéhovah. D’autres, qui ont choisi de rester dans l’organisation, cherchent à amener les congrégations à suivre leurs pensées personnelles. Cela a évidemment créé des tensions jusqu’au moment où des surveillants, qui se sont montrés fermes, ont remédié à la situation.

Les habitants de la République tchèque qui s’efforcent aujourd’hui de servir Dieu se rendent compte qu’ils vivent dans une société athée qui adhère à la théorie de l’évolution et pour laquelle la pratique d’une religion est une tradition puérile ou une excentricité philosophique. Des médias agressifs ne cessent d’attaquer les Témoins de Jéhovah. Ce sont pour la foi autant d’épreuves tout aussi mordantes que celles subies dans le creuset des prisons nazies et communistes ou à cause des machinations de ceux qui les utilisaient, mais la grande majorité des Témoins de Jéhovah résistent à ces épreuves avec une foi ferme.

Malgré l’attitude de beaucoup envers les questions religieuses, la Cour constitutionnelle tchèque a prononcé au printemps 1999 un jugement très important. Un article du journal tchèque Lidové Noviny (Le Quotidien du peuple) du 11 mars 1999 annonçait : “ Le bon sens vient de Brno. ” C’est la ville où siège la Cour constitutionnelle, qui venait de décréter qu’aucun objecteur de conscience ne pouvait être jugé deux fois pour son refus du service militaire. Cela a soulagé bon nombre de Témoins de Jéhovah. Cette décision a été largement saluée comme une contribution des Témoins de Jéhovah au système judiciaire tchèque.

Motivés par l’amour

Les Témoins de Jéhovah de République tchèque continuent de prêcher la bonne nouvelle du Royaume de Dieu à leurs semblables. Ils désirent en aider beaucoup d’autres à connaître Jéhovah, le Dieu d’amour, et à reconnaître la valeur des merveilleuses dispositions qu’il a prises en faveur de ceux qui exercent la foi. Pour y arriver, ils doivent souvent surmonter les préjugés des gens, nés des calomnies souvent répétées selon lesquelles les Témoins de Jéhovah seraient “ une secte dangereuse ”. Il leur faut parfois aussi affronter le mépris pour la religion en général, résultat de plusieurs dizaines d’années de régime athée. Y parviennent-​ils ?

On notera qu’en 1999, quand les 16 054 Témoins de Jéhovah répartis dans 242 congrégations se sont réunis pour commémorer la mort de Jésus Christ, des milliers d’autres personnes se sont associées à eux. Au total, on a enregistré 31 435 assistants.

Les Témoins de Jéhovah désirent aider chacune de ces personnes à courir avec endurance la course chrétienne. Tout en prêchant à leurs semblables, ils s’aident les uns les autres à rester solides dans la foi. Ils savent bien que lorsqu’il a parlé des événements de notre époque, Jésus a dit : “ Par votre endurance, vous acquerrez vos âmes. ” (Luc 21:19). Quant à l’apôtre Pierre, divinement inspiré, il a écrit : “ La fin de toutes choses s’est approchée. Soyez donc sains d’esprit et soyez vigilants en vue des prières. Avant tout, ayez les uns pour les autres un amour intense. ” (1 Pierre 4:7, 8). C’est cet amour qui continue de pousser les Témoins de Jéhovah à communiquer à autrui les précieuses vérités de la Bible et à s’encourager mutuellement dans une unité chrétienne inébranlable.

[Entrefilet, page 165]

“ ‘ Non ! ’ Je ne l’ai jamais regretté. Par la suite, j’ai compris que c’était là que je devais être. ”

[Entrefilet, page 168]

“ ‘ Si vous voulez en fusiller un sur dix, fusillez-​nous tous. ’ Tout le camp était frappé de stupeur. ”

[Entrefilet, page 184]

‘ On se moquait d’eux, on les insultait, mais dans le fond on les respectait. ’

[Entrefilet, page 187]

“ Nullement un compromis, mais le bon sens chrétien. ”

[Carte, page 150]

(Voir la publication)

ALLEMAGNE

POLOGNE

SLOVAQUIE

AUTRICHE

RÉPUBLIQUE TCHÈQUE

BOHÊME

Prague

Lidice

Kladno

Karlovy Vary

Most

Teplice

Liberec

MORAVIE

Brno

SILÉSIE

[Illustrations pleine page, page 148]

[Illustration, page 153]

Frère Erler, de Dresde.

[Illustrations, page 155]

Otto Estelmann a projeté le “ Photo-Drame de la Création ” dans tout le pays.

[Illustration, page 157]

Bohumil Müller.

[Illustration, page 167]

Božena Vodrážková a appris la vérité dans un camp de concentration.

[Illustrations, page 169]

František Šnajdr et Alois Miczek, tous deux détenus dans le camp de concentration de Mauthausen.

[Illustration, page 173]

Après la Seconde Guerre mondiale, les discours publics ont attiré de nombreux assistants.

[Illustrations, page 175]

La famille du Béthel et les bureaux de la filiale après la Seconde Guerre mondiale.

[Illustration, page 178]

Une réunion dans les bois en 1949.

[Illustration, page 185]

Les vacances en groupes ont contribué à l’affermissement spirituel.

[Illustration, page 194]

Jaromír Leneček, membre du Comité de la filiale, zélé dans le service depuis sa jeunesse.

[Illustrations, page 207]

Milton Henschel et Theodore Jaracz, ainsi que d’autres frères, ont contribué à l’enregistrement officiel de l’œuvre.

[Illustration, page 210]

Délégués tchèques à l’une des assemblées de 1989 en Pologne.

[Illustrations, page 216]

Un événement extraordinaire : l’assemblée internationale de Prague en 1991.

[Illustration, page 218]

L’équipe des traducteurs tchèques.

[Illustration, page 223]

Le bâtiment de la filiale à Prague.

[Illustration, page 223]

Ci-dessous : le Comité de la filiale (de gauche à droite) : Jan Glückselig, Jaromír Leneček, Ondřej Kadlec, Petr Žitník et Eduard Sobička.