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Les Philippines

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Cocotiers, végétation tropicale luxuriante, plages de sable blanc, mers opale : voilà l’essentiel des Philippines. On a surnommé cet archipel de quelque 7 100 îles la “ perle des mers d’Orient ”. Les Philippins ajoutent à son attrait : ils constituent un peuple gai et d’une grande profondeur de sentiments, qui aime danser et chanter. Si un jour vous visitez ce pays, vous n’oublierez probablement jamais l’hospitalité exceptionnelle manifestée par ses affables et charmants habitants.

Pour beaucoup, néanmoins, les Philippines évoquent une tout autre réalité, celle des catastrophes naturelles. Peut-être vous rappelez-​vous l’éruption du mont Pinatubo, dont les lahars ont englouti des villes entières ; ou encore la plus grande catastrophe maritime en temps de paix, celle du ferry Doña Paz, qui a fait plusieurs milliers de victimes en entrant en collision avec un pétrolier. Pour tout dire, selon le Centre belge de recherche sur l’épidémiologie des désastres, les Philippines constituent le pays le plus exposé aux catastrophes naturelles. Typhons, inondations, tremblements de terre et éruptions volcaniques sont fréquents. Ajoutez à cela les conditions de vie précaires de la majorité de la population et vous aurez le tableau complet d’un beau pays qui n’échappe pas aux difficultés.

Dans toutes les Philippines, les Témoins de Jéhovah font connaître avec zèle la vérité biblique aux 78 millions d’insulaires, ce qui n’est pas une mince affaire. Outre la menace des catastrophes naturelles, ils se heurtent à la difficulté de toucher les gens vivant sur les nombreuses petites îles ou perdus dans les montagnes et dans la jungle. Cependant, la prédication est menée à bien. Les serviteurs de Jéhovah manifestent une détermination extraordinaire en toutes circonstances. Aussi Jéhovah a-​t-​il béni leur œuvre consistant à faire des disciples.

À certains égards, les Témoins des Philippines ressemblent aux Israélites de l’Antiquité qui désiraient rétablir le vrai culte à Jérusalem, et qui avaient puisé de l’encouragement dans ces paroles de Nehémia : “ La joie de Jéhovah est votre forteresse. ” (Neh. 8:10). En dépit des obstacles qu’ils ont rencontrés, les Israélites ont continué avec joie à promouvoir le culte de Jéhovah. Comme les Israélites du temps de Nehémia, les Témoins de Jéhovah philippins sont instruits dans la Parole de Dieu. Eux aussi font de la joie de Jéhovah leur forteresse.

Les premières lueurs de la vérité

Les Philippines ont ceci de particulier qu’elles sont le seul pays asiatique majoritairement catholique. À l’origine, les Philippins pratiquaient leurs religions indigènes, mais trois siècles de domination espagnole leur ont imposé le catholicisme, qui demeure la religion principale, même si un demi-siècle d’administration américaine a mis la population en contact avec d’autres formes de culte. Ainsi, 80 % de la population professe la foi catholique.

En 1912, Charles Russell, figure marquante parmi les Étudiants de la Bible (comme on appelait alors les Témoins de Jéhovah), s’est arrêté à Manille au cours d’une tournée mondiale de conférences. Le 14 janvier, il a présenté un discours sur le thème “ Où sont les morts ? ” au Grand Opéra de Manille. Des publications ont été distribuées aux assistants.

D’autres graines de vérité biblique ont été semées au début des années 20 lorsqu’un deuxième représentant des Étudiants de la Bible est arrivé, le Canadien William Tinney, qui a organisé une classe d’étude biblique. Bien qu’il ait dû rentrer au Canada pour des raisons de santé, les Philippins intéressés par le cours ont continué à y assister. Les publications qui arrivaient par la poste ont permis d’entretenir l’intérêt des gens pour la vérité. Telle a été la situation jusqu’au début des années 30. En 1933, le message de la vérité était radiodiffusé depuis la station philippine KZRM.

La même année, Joseph Dos Santos a quitté Hawaii pour une tournée mondiale de prédication. Sa première escale a été les Philippines, mais il n’est jamais allé plus loin. On lui a confié la responsabilité d’y organiser l’œuvre de prédication du Royaume et d’y établir une filiale, laquelle a ouvert ses portes le 1er juin 1934. Frère Dos Santos, aidé de quelques autochtones disposés à servir Jéhovah, s’est investi dans la prédication et la distribution de publications. Malgré l’opposition, le nombre de proclamateurs dans le pays était de 121 en 1938, dont 47 pionniers.

Même si l’anglais était enseigné par les Américains, les frères ont constaté que les gens assimilaient mieux l’étude de la Bible dans les langues indigènes. Cela posait un problème, car dans tout l’archipel on parlait près de 90 langues et dialectes. Toutefois, les Témoins ont fait le nécessaire pour traduire les publications dans quelques-unes des langues principales. En 1939, la filiale signalait : “ Nous réalisons actuellement des enregistrements [de discours bibliques] en tagalog, et nous espérons ainsi utiliser les haut-parleurs et le phonographe à la gloire du Seigneur. ” Elle faisait également savoir que le livre Richesses était en cours de traduction en tagalog. Deux ans après, on achevait de traduire diverses brochures dans quatre autres langues importantes, ce qui ouvrait l’accès au message du Royaume à la plupart des Philippins.

Parmi ceux qui ont répondu favorablement au message de la vérité dans ces années-​là, citons Florentino Quintos, un enseignant. La première fois qu’il a entendu parler des Témoins de Jéhovah, c’était par un homme qui avait assisté personnellement au discours de frère Russell à Manille en 1912. En 1936, Florentino avait obtenu de la part d’un Témoin 16 livres aux couvertures de couleurs vives qui expliquaient la Bible. Mais il était accaparé par son travail et, pendant un certain temps, ces livres aux couleurs de l’arc-en-ciel ont trôné, inutiles, sur une étagère. Puis la guerre a éclaté, avec l’invasion des Japonais. De nombreuses activités de la vie quotidienne ont été suspendues. Désormais, Florentino avait le temps de lire, ce qu’il a fait. En peu de temps, il a fini les livres Richesses, Ennemis et Salut. Il a dû interrompre sa lecture pour fuir les Japonais, mais les graines de vérité avaient germé dans son cœur.

Un accroissement rapide malgré la guerre

La Seconde Guerre mondiale a placé les serviteurs de Jéhovah de tout l’archipel devant de nouvelles difficultés. Au début de la guerre, les proclamateurs étaient 373, une poignée, mais ils ont démontré un zèle et une faculté d’adaptation remarquables dans leurs efforts pour favoriser le culte pur.

Des frères de Manille ont déménagé dans des villes plus petites et ont continué d’y prêcher. La guerre rendait impossible l’importation de publications bibliques, mais ils ont pu distribuer celles qui avaient été entreposées dans des foyers avant la guerre. Une fois ces réserves épuisées, ils prêtaient les livres.

Salvador Liwag, qui avait quitté l’enseignement pour être proclamateur à plein temps de la bonne nouvelle, se trouvait à Mindanao quand la guerre a éclaté. Il s’est réfugié avec d’autres frères dans les montagnes et dans la jungle, où ils ont poursuivi leurs activités théocratiques. Ils devaient être extrêmement prudents dans leurs mouvements parce qu’ils ne voulaient pas être enrôlés par les Japonais pour travailler dans leurs garnisons. Dans le même temps, des résistants soupçonnaient souvent les frères d’être des espions japonais.

Chose étonnante, les frères ont parfois pu tenir de petites assemblées pendant l’occupation japonaise. Ainsi, ils en ont organisé une, de circonscription, à Manille, à laquelle beaucoup ont assisté, et une autre à Lingayen, qui s’est déroulée sans encombre, car les habitants, quoique surpris de voir des inconnus arriver en camion, n’ont pas bronché.

Avec la bénédiction de Jéhovah, le nombre des Témoins s’est multiplié. De 373 au début de la guerre, les adorateurs de Jéhovah étaient plus de 2 000 à peine quatre ans plus tard.

Revenons à frère Dos Santos, qui s’était vu confier la direction de la prédication aux Philippines. En janvier 1942, il a été interné dans un camp japonais à Manille. Il n’en a pas moins gardé son zèle. “ J’annonçais la bonne nouvelle au maximum de gens dans le camp. ” La vie dans le camp était dure et beaucoup mouraient de faim. À son arrivée, frère Dos Santos pesait 61 kilos ; en sortant, il n’en faisait plus que 36.

Après avoir libéré les prisonniers en 1945, les Américains ont proposé à frère Dos Santos de le rapatrier à Hawaii, mais il a refusé. Pourquoi ? Il trouvait sa joie dans l’œuvre du Royaume et il voulait tout faire pour en favoriser les progrès aux Philippines. De plus, son remplaçant n’était pas encore arrivé. “ J’étais déterminé à rester jusqu’à ce qu’il vienne ! ”, a-​t-​il raconté plus tard. Hilarion Amores a dit de lui : “ Il se dépensait beaucoup et prenait à cœur les besoins spirituels des frères. ”

L’arrivée des premiers missionnaires

Même sans formation particulière, les frères philippins ont fait de leur mieux avant et pendant la guerre. Peu après celle-ci, cependant, ils ont reçu du renfort. Earl Stewart, Victor White et Lorenzo Alpiche, diplômés de Guiléad, sont arrivés le 14 juin 1947. La relève de frère Dos Santos était enfin là. En 1949, il est rentré à Hawaii avec sa femme et ses enfants.

Frère Stewart a été nommé serviteur de filiale. La plupart des autres missionnaires de ces débuts ont été envoyés dans différentes régions du pays. Victor Amores, un Philippin qui, lui aussi, a suivi la formation de Guiléad, nous livre ses impressions sur les bienfaits de la présence des Guiléadites dans le pays : “ Ils ont grandement facilité l’organisation de l’œuvre. À leur contact, les frères ont beaucoup appris. Des progrès ont suivi. Avant 1975, nous avions presque atteint les 77 000 proclamateurs, contre 2 600 seulement en 1946. ” Après ces trois premiers frères, plusieurs autres missionnaires sont venus, dont les Brown et les Willett qui ont été affectés à Cebu, et les Anderson, à Davao. Il y avait également les Steele, les Smith, ainsi que les frères Hachtel et Bruun. En 1951 est arrivé Neal Callaway. Par la suite, il a épousé une sœur philippine, Nenita, et ils se sont dépensés dans presque tout l’archipel jusqu’à la mort de Neal en 1985. Les Anglais Denton Hopkinson et Raymond Leach sont arrivés aux Philippines en 1954 et ils y sont toujours actifs, plus de 48 ans après.

Les Guiléadites étrangers n’ont pas été les seuls à contribuer à l’organisation et à l’expansion de la prédication du Royaume aux Philippines. Dans les années 50, des frères philippins aussi ont été invités à cette école, et presque tous ont été réaffectés dans leur pays d’origine. Les trois premiers ont été Salvador Liwag, Adolfo Dionisio et Macario Baswel. Victor Amores, mentionné plus haut, a mis sa formation à profit dans le service itinérant et au Béthel. Il a ensuite élevé une famille, puis a repris le service à plein temps. Il a été surveillant itinérant puis pionnier spécial dans la province de Laguna, aux côtés de sa femme Lolita, jusqu’au seuil de ses 80 ans.

Les années 70

L’œuvre progressant rapidement, le nombre de proclamateurs a continué d’augmenter jusqu’à dépasser les 77 000 en 1975. Globalement, les adorateurs de Jéhovah sont restés spirituellement forts et ont continué de servir avec fidélité. Un certain nombre pourtant ont arrêté en voyant que le système de choses n’avait pas pris fin en 1975. En 1979, les proclamateurs n’étaient plus que 59 000. Cornelio Cañete, surveillant de circonscription vers le milieu des années 70, relate : “ Certains se sont fait baptiser pour 1975 et sont restés quelques années dans la vérité. Après cette date, ils l’ont quittée. ”

Néanmoins, la grande majorité avait simplement besoin d’encouragements pour garder le bon point de vue sur le service chrétien. La filiale a donc pris des dispositions pour que des discours spéciaux soient donnés. En conséquence, non seulement les Témoins actifs ont été encouragés, mais certains qui étaient inactifs se sont remis à louer Jéhovah. Les frères ont compris qu’ils ne servaient pas Jéhovah avec une date en vue, mais pour l’éternité. Depuis cette diminution provisoire, le nombre de proclamateurs du Royaume a considérablement augmenté. Ceux qui n’ont pas laissé la déception occulter la bonté de Jéhovah ont réellement été bénis !

Accès aux territoires reculés des montagnes

Les milliers d’îles qui constituent les Philippines sont réparties sur plus de 1 850 kilomètres de pleine mer, du nord au sud, et sur 1 000 kilomètres, d’est en ouest. Certaines sont inhabitées, et beaucoup ont un relief très tourmenté de montagnes escarpées. Pour arriver à joindre tous les habitants, il faut vraiment le vouloir !

La région de Kalinga-Apayao en est un exemple frappant. Parmi les montagnes déchiquetées de la Cordillère centrale, dans le nord de Luçon, la population est divisée en tribus et villages, lesquels possèdent leur propre dialecte et leurs coutumes. Bien que les chasseurs de têtes aient disparu au XXsiècle, il existe encore entre les villages de l’hostilité qui suscite luttes et tueries. Geronimo Lastima raconte : “ Autrefois, il était difficile d’envoyer des pionniers spéciaux dans ces territoires. Les autochtones les pourchassaient dans l’intention de les tuer. ”

La solution consistait à envoyer des sœurs. Geronimo explique : “ Ils ne poursuivaient pas les femmes. La coutume veut que l’on ne fasse aucun mal aux femmes. ” Les sœurs enseignaient avec succès la vérité aux indigènes, qui à leur tour se faisaient baptiser et devenaient pionniers. Ils comprenaient la culture de leurs concitoyens et savaient donc comment leur donner le témoignage efficacement. En conséquence, des “ chasseurs ” ... de personnes cherchant la vérité se sont dispersés dans toutes les montagnes. Dans les années 70, il n’y avait que quelques Témoins dans tout Kalinga-Apayao ; aujourd’hui, on y trouve deux circonscriptions.

Pareillement, les montagnes d’Ifugao, province voisine, ne comptaient pas un seul Témoin au début des années 50. On a envoyé trois pionniers permanents prêcher aux gens qui vivaient dans les rizières en terrasses plusieurs fois centenaires. Avec le temps, ces personnes ont commencé à accepter la vérité. Aujourd’hui, on compte à Ifugao 315 proclamateurs, répartis dans 18 congrégations.

Dans les montagnes d’Abra, situées à l’extrême nord, la difficulté consiste à atteindre les villages qui ne comptent encore aucun Témoin. Un surveillant de circonscription qui avait à cœur d’annoncer la bonne nouvelle dans les coins les plus reculés a invité 34 proclamateurs à prêcher avec lui près de Tineg (Actes 1:8). Ne disposant d’aucun transport public, ils ont parcouru les montagnes à pied pendant sept jours pour atteindre 10 villages, en tout 250 maisons.

“ C’était périlleux de longer les corniches en transportant toutes nos provisions, relate le surveillant de circonscription. Nous avons passé quatre nuits sur six à la belle étoile, parfois près d’une rivière. ” Certains villages n’avaient pas reçu de Témoins depuis de longues années. Un villageois a dit aux frères : “ Il y a 27 ans, les Témoins de Jéhovah ont parlé à mon père. Il nous a dit que les Témoins détenaient la vérité. ” Au total, le groupe a distribué 60 livres, 186 périodiques, 50 brochures et 287 tracts, et expliqué de nombreuses fois comment se déroulait une étude biblique.

La prédication dans d’autres territoires éloignés

Palauan est une grande île des Philippines. Longue et étroite, elle s’étire sur 430 kilomètres. Préservée du tohu-bohu des îles les plus peuplées, Palauan abrite dans ses forêts plusieurs tribus et de nombreux villages reculés, y compris des campements de nomades. Raymond Leach, un missionnaire disposé à accepter n’importe quelle affectation, y a été envoyé en tant que surveillant de circonscription. Les Témoins étaient peu nombreux, et les distances à parcourir, considérables. Il raconte : “ On m’y a affecté entre 1955 et 1958, à l’époque où Palauan ne comptait que 14 proclamateurs. Il m’a fallu cinq semaines pour leur rendre visite. ”

De grands progrès ont été réalisés depuis, même si la région demeure difficile. Febe Lota, aujourd’hui la quarantaine passée, a débuté en tant que pionnière spéciale à Palauan en 1984. Tandis qu’elle prêchait à Dumaran, voici ce qui s’est passé : “ Nous pensions être arrivées à la dernière maison. Difficile d’imaginer qu’il y en avait une autre, et pourtant si ! ” Derrière, au milieu des palmiers, vivait un couple qui s’occupait d’une plantation de cocotiers. Et de plus, il s’intéressait à la Bible !

“ Si ça n’avait pas été pour Jéhovah, je n’y serais jamais retournée ”, avoue Febe. Pour parvenir à leur habitation, elle et sa compagne devaient marcher une journée entière à travers les cocoteraies, le long d’une côte où alternaient sable et rochers. À marée haute, l’eau leur arrivait aux genoux. Étant donné la distance, elles ont décidé d’y aller une fois par mois et d’y passer plusieurs jours. Il fallait pour cela qu’elles emportent de la nourriture, des livres, des périodiques et des vêtements de rechange. “ C’était un réel sacrifice pour nous d’être exposées à la chaleur du soleil ainsi qu’aux piqûres et aux morsures d’insectes. À l’arrivée, nous ruisselions de transpiration. ” Mais leurs efforts ont été récompensés lorsqu’elles ont vu le couple progresser très rapidement dans son étude biblique.

Le mari et sa femme ont été obligés d’abandonner la cocoteraie lorsque le gérant, de religion baptiste, a découvert qu’ils étudiaient avec les Témoins. Quelque temps plus tard, Febe a eu l’agréable surprise de revoir la femme à l’assemblée de district. Non seulement elle était baptisée, mais, rapporte Febe, “ elle était avec nous à la réunion pour les pionniers ”. Quelle joie pour elle de voir que son dur travail avait porté du fruit !

Sur la grande île de Mindanao, dans le sud des Philippines, de nombreuses régions sont difficilement accessibles. C’est là que se sont dépensés Nathan Ceballos, surveillant itinérant, et sa femme. Lorsqu’ils n’étaient pas en visite, ils s’efforçaient de prêcher dans des territoires isolés. Ils invitaient d’autres frères et sœurs à les accompagner. Une fois, ils sont partis sur 19 motos pour atteindre de nombreux villages. Ils ont dû emprunter des routes cahoteuses et boueuses et traverser des fleuves et des rivières, la plupart sans pont. Les habitants de ces régions, bien que peu fortunés, leur offraient des balais souples fabriqués à la main en remerciement pour les publications. Imaginez le spectacle : les frères rentraient chez eux avec des cargaisons de balais sur leurs motos ! Nathan raconte : “ En arrivant, nous étions tous exténués et sales, mais très contents, sachant que ce que nous avions fait était la volonté de Jéhovah. ”

La prédication sous toutes ses formes

Ces dernières années, l’organisation de Jéhovah a incité les proclamateurs du Royaume à profiter de chaque occasion pour donner le témoignage. Cela vaut particulièrement dans les régions plus peuplées du pays. Les grandes villes, telles que Davao, Cebu et le Grand Manille, ressemblent à beaucoup d’autres villes du monde, avec leur kyrielle de sociétés, de bureaux, d’immeubles résidentiels et de propriétés privées. Qu’a-​t-​on fait pour prendre contact avec les gens qui s’y trouvent ?

Makati se situe dans la circonscription que desservait encore récemment Marlon Navarro. Marlon, jeune diplômé de l’École de formation ministérielle, a travaillé d’arrache-pied à l’organisation de la prédication dans le quartier d’affaires de Makati, attribué à trois congrégations. Des frères et sœurs, dont de nombreux pionniers, ont été choisis et formés pour prêcher efficacement dans ce secteur. Ils dirigent des études bibliques dans les centres commerciaux et dans les parcs du quartier, et quelques-uns de ces étudiants de la Bible assistent aux réunions.

Cory Santos et son fils Jeffrey sont pionniers. Ils donnent souvent le témoignage dans la rue le matin, parfois à partir de 6 heures. À cette heure-​là, ils rencontrent des ouvriers qui rentrent chez eux après avoir travaillé de nuit en usine. Ils ont même commencé des études bibliques dans la rue. Parmi ceux qui ont été touchés de cette façon, quelques-uns ont progressé jusqu’au baptême.

À l’extérieur des villes également, des proclamateurs guettent l’occasion de donner le témoignage. Norma Balmaceda, pionnière spéciale depuis plus de 28 ans, a abordé une femme qui attendait un moyen de transport et lui a demandé où elle allait.

“ Dans la province de Quirino, a répondu la dame.

— Vous êtes de là-bas ?

— Non, mais mon mari a l’intention de s’y installer parce que la vie est trop dure ici, à Ifugao. ”

Norma a ainsi pu communiquer la bonne nouvelle au sujet du Royaume, le gouvernement qui résoudra les problèmes de l’humanité. Puis les deux femmes se sont quittées. Des années plus tard, à une assemblée de circonscription, une femme a abordé Norma : c’était la dame d’Ifugao ! Elle était maintenant baptisée, et ses deux filles ainsi que son mari étudiaient la Bible.

Au siège national des Témoins de Jéhovah, à Quezon City, les frères sont prêts à donner le témoignage en toutes circonstances. Ainsi, Felix Salango est connu pour son zèle dans la prédication. Tout en étant Béthélite, il est souvent pionnier auxiliaire. Durant l’année 2000, alors qu’un nouveau bâtiment résidentiel était en cours de construction, Felix s’est intéressé aux ouvriers qui avaient été embauchés pour faire le gros œuvre. Il a demandé au chef de chantier la permission de parler à ses hommes. Il raconte : “ Après le déjeuner, je suis allé sur le chantier, où le chef de chantier avait rassemblé plus de 100 ouvriers. Je les ai renseignés sur l’œuvre des Témoins de Jéhovah puis je leur ai expliqué que la connaissance était indispensable pour survivre à la grande tribulation. J’avais apporté un carton de brochures et un autre rempli de nombreux exemplaires du livre Connaissance. Je leur ai dit que s’ils étaient intéressés par une étude de la Parole de Dieu, ils pouvaient recevoir une de ces publications. ” Felix a également précisé comment l’œuvre des Témoins de Jéhovah était soutenue financièrement dans le monde entier, puis il a mis les publications et une enveloppe près d’un cocotier. Beaucoup d’ouvriers ont pris un livre ou une brochure, et bon nombre d’entre eux ont déposé une offrande dans l’enveloppe.

Certains voulaient étudier la Bible, et notamment le chef de chantier. Felix a pris des dispositions pour étudier avec lui à l’aide de la brochure Ce que Dieu attend de nous les lundis, mercredis et vendredis à l’heure du déjeuner. Le chef de chantier lui a dit : “ Ce que j’apprends ici, je vais l’expliquer à ma femme et à mes amis. ” Deux autres techniciens du chantier voulaient aussi étudier, ainsi qu’un agent de sécurité et deux secrétaires. Vraiment, on s’attire la bénédiction de Jéhovah en donnant le témoignage en toute occasion.

L’arrivée de nouveaux missionnaires

Au fil du temps, 69 missionnaires étrangers ont apporté leur contribution à la prédication du Royaume aux Philippines. Ils l’ont fait de mille et une façons. Au début, Denton Hopkinson et Raymond Leach, mentionnés précédemment, ont été affectés dans le territoire pour y servir, d’abord comme missionnaires, puis comme surveillants itinérants. Plus tard, ils ont été nommés au siège national.

Dans les années 70, un certain nombre de Guiléadites sont venus apporter leur concours à l’impression des publications qui débutait dans le pays. Citons parmi eux Robert Pevy et sa femme Patricia, qui avaient auparavant servi en Angleterre et en Irlande. Robert a aidé à l’ouverture d’un bureau de rédaction aux Philippines. Tout le monde a été triste de les voir partir pour le siège mondial, à Brooklyn (New York), en 1981.

Dean et Karen Jacek sont arrivés des États-Unis en 1980. Après un bref apprentissage du tagalog à Laguna, ils ont été affectés à la filiale. Une formation supplémentaire en 1983 les a équipés pour qu’ils puissent aider les frères locaux et ceux d’autres îles à se familiariser avec le système informatique développé par les Témoins de Jéhovah, qui s’est avéré un outil très utile pour la publication d’ouvrages bibliques dans les langues locales.

Les Néerlandais Hubertus, surnommé Bert, et Jeanine Hoefnagels sont arrivés en 1988. Le Béthel était sur le point de réaliser un important projet de construction. Étant donné que le couple avait de l’expérience sur les chantiers, Bert notamment comme conducteur d’engins, on lui a demandé de travailler au projet. Bert a piloté les engins et formé des volontaires. “ Dès le début, j’ai formé les frères locaux à conduire des camions, une pelle mécanique, un bulldozer, une tractopelle et une grue. À la fin, nous avions un groupe de 20 à 25 conducteurs d’engins. ”

Par la suite, quatre autres diplômés de Guiléad les ont rejoints : les Allemands Peter et Beate Vehlen ainsi que les Américains Gary et Teresa Jeane Melton. Les Vehlen aussi avaient de l’expérience dans la construction de bâtiments pour les filiales ; quant aux Melton, ils avaient passé cinq ans au Béthel des États-Unis. Ainsi, tous ont pu participer à la construction du Béthel.

Des années auparavant, en 1963, la dernière maison de missionnaires avait fermé ses portes, car des pionniers philippins capables étaient en mesure de s’occuper de l’œuvre. Cependant, en 1991, le Collège central a décidé d’envoyer six missionnaires dans le territoire. Bien qu’étant habitués à servir au Béthel, ces missionnaires avaient également reçu une formation qui pouvait être précieuse dans la prédication. C’était le cas de Jeanine Hoefnagels, devenue pionnière spéciale à 18 ans. Elle pouvait maintenant mettre son expérience et son caractère enjoué au service des frères et sœurs et des nouveaux. Son mari, Bert, cite un autre avantage lié à cette décision : “ Le fait que des missionnaires participent à la prédication aide les gens à mesurer la portée mondiale de notre œuvre. ” Pendant ce temps, les autres missionnaires ont continué de s’occuper des tâches administratives et diverses au siège national.

Les Philippines n’ont pas seulement reçu des missionnaires. Elles en ont aussi envoyé.

Des missionnaires philippins

Alors que les Philippines accueillaient toujours de nouveaux missionnaires, des pionniers du pays ont commencé à être envoyés à l’étranger pour participer eux-​mêmes à l’œuvre missionnaire. Quoiqu’ils n’aient pas reçu la même formation que les Guiléadites dans le domaine de l’organisation, il y avait beaucoup d’excellents pionniers. Depuis la Seconde Guerre mondiale, l’œuvre consistant à faire des disciples s’était bien plus développée dans les Philippines que dans les pays voisins. C’est pourquoi, à partir de 1964, des pionniers philippins expérimentés ont été invités à entreprendre le service missionnaire partout en Asie et dans les îles du Pacifique. Parmi eux, il y avait quelques couples, mais la plupart étaient des célibataires qui avaient passé au moins dix ans dans le ministère à plein temps. Courant 2002, 149 avaient été envoyés dans 19 pays, et 74 sont toujours dans leur territoire. En attendant d’obtenir leurs papiers, de futurs missionnaires passent du temps au Béthel où ils sont formés et où ils acquièrent une expérience qui les aidera dans leur affectation. Comment ces missionnaires ont-​ils contribué à la prédication au fil des ans ? Quelles difficultés et quelles joies ont-​ils connues ?

Rose Cagungao (aujourd’hui Engler) et Clara de la Cruz (aujourd’hui Elauria) ont été les premières à partir. Leur destination ? La Thaïlande. Environ un an plus tard, Angelita Gavino les a rejointes. Bien sûr, comme les autres missionnaires, elles ont eu du mal à apprendre la langue. Voici les impressions d’Angelita sur l’apprentissage du thaï : “ Les premières semaines, j’étais frustrée, parce que les écritures dans les livres ressemblaient à des vers de terre, et lors des réunions, nous pouvions à peine communiquer avec les autres à cause de la barrière de la langue. ” Mais elles ont surmonté ce problème et continuent à utiliser cette langue pour aider leur prochain.

Après cette première vague, un flux constant de pionniers volontaires ont été envoyés en différents endroits. Porferio et Evangeline Jumuad ont été affectés en Corée en 1972. Ils ont bien appris la langue et, après deux ans et demi dans le champ missionnaire, ont été invités à œuvrer dans la circonscription.

En 1970, Salvacion Regala (aujourd’hui Aye) a été l’une des neuf sœurs philippines qui sont arrivées à Hong-Kong pour y être missionnaires. Son premier obstacle a été d’apprendre le cantonais. Cette langue possède neuf tons. En changeant le ton d’un mot, on change son sens. Salvacion se revoit aux prises avec ces tons, comme ce jour où elle a dit à une étudiante de la Bible qu’elle avait dû déménager “ à cause d’un fantôme ” au lieu de dire “ à cause du loyer élevé ”. Mais elle a fini par maîtriser la langue. Elle a aidé plus de 20 personnes à connaître le message de la vérité contenu dans la Bible. À présent, elle rencontre de nombreux Indonésiens, employés à Hong-Kong comme gens de maison, raison pour laquelle elle s’efforce d’apprendre l’indonésien.

Rodolfo Asong, un frère sympathique et déterminé, a dû faire face à des conditions complètement différentes lorsqu’il est arrivé en 1979 dans son territoire, la Papouasie-Nouvelle-Guinée. Il s’est lancé dans l’apprentissage de la langue et a progressé si rapidement que, peu après son arrivée dans le pays, il a été nommé surveillant itinérant. Toutefois, rendre visite aux congrégations de Papouasie-Nouvelle-Guinée n’avait rien à voir avec le fait de visiter celles des Philippines. “ J’ai appris à pagayer debout un petit canoë d’une place en bois, comme le font les autochtones. ”

Au sujet des assemblées, il raconte : “ En raison des longues distances et du coût élevé des transports, nous organisions beaucoup de petites assemblées. Celle de Larimea, un village, est la plus petite à laquelle j’aie assisté. Il y avait au total dix personnes. ” Une autre fois, il a été nommé surveillant de l’assemblée tenue dans le village d’Agi. “ On m’a aussi confié la présidence de l’assemblée, les services de la sonorisation et des repas, la direction du drame et j’ai joué le roi David. ” Il s’est réellement dépensé dans ce territoire et, plus tard, il est parti missionnaire dans les îles Salomon.

En 1982, Arturo Villasin, un frère de Luçon déterminé à s’adapter, a été envoyé aux îles Salomon. Nommé surveillant de circonscription, il a constaté que la situation était très différente de celle des Philippines. De nombreuses îles n’étaient accessibles qu’avec un petit avion. “ Un jour, notre avion a dû atterrir en catastrophe, raconte-​t-​il, mais nous avons tous survécu. Une autre fois, la visibilité était si mauvaise que nous avons failli heurter le flanc d’une montagne. ” En ce qui concerne la visite de certaines congrégations, il a expliqué un jour : “ Nous traversons la forêt humide, arpentons des collines boueuses et escarpées pour atteindre des congrégations situées en pleine brousse, là où les gens pratiquent le culte des ancêtres. ” En 2001, Arturo est mort subitement de maladie, mais on se souviendra longtemps de lui comme d’un missionnaire fidèle.

Des récits comme ceux-là, de frères et sœurs philippins missionnaires en Asie et dans le Pacifique, ne manquent pas. Les difficultés n’ont pas empêché ces serviteurs de Jéhovah fidèles et dévoués de participer largement à la prédication dans ces pays.

Joyeux d’aider autrui à faire de Jéhovah sa forteresse

La joie découle de la bénédiction de Jéhovah (Prov. 10:22). Adelieda Caletena, affectée à Taïwan en 1974, déclare : “ Je suis vraiment très heureuse et je remercie Jéhovah de bénir notre œuvre ici et de m’avoir donné la possibilité d’y prendre part. ”

Paul et Marina Tabunigao, actuellement dans les îles Marshall, confient : “ Nous avons aidé 72 personnes à servir Jéhovah. Cela nous réjouit de voir que beaucoup d’entre ces nouveaux disciples sont aujourd’hui anciens, assistants ministériels, pionniers spéciaux, pionniers permanents et proclamateurs zélés. ”

Lydia Pamplona, active en Papouasie-Nouvelle-Guinée depuis 1980, a aidé 84 personnes à se vouer à Dieu et à se faire baptiser. Dernièrement, elle a signalé qu’elle étudie la Bible à domicile avec 16 personnes, dont la plupart assistent maintenant aux réunions. Ses impressions résument sans nul doute celles de nombreux missionnaires : “ Je remercie Jéhovah pour le ministère qu’il m’a confié. Puisse-​t-​il continuer à le bénir, pour sa gloire. ”

Ces missionnaires philippins sont très appréciés par les filiales qui s’occupent des pays dans lesquels ils servent. Voici ce qu’a écrit celle de Thaïlande : “ Les missionnaires des Philippines font un bon travail. Ce sont des exemples de fidélité, au vu de leurs nombreuses années passées en Thaïlande. Ils restent attachés à l’œuvre malgré leur âge avancé. Ils aiment la Thaïlande et les Thaïlandais ; ils se considèrent comme chez eux. Merci beaucoup de nous avoir envoyé ces excellents missionnaires. ”

L’École du ministère du Royaume équipe les anciens

Alors qu’elle s’occupait du départ des premiers pionniers philippins, l’organisation de Jéhovah a aussi fait le nécessaire pour offrir une formation à un nombre croissant de frères capables qui assumaient des responsabilités dans leurs congrégations. L’École du ministère du Royaume a été l’un des principaux moyens de donner cette formation.

Les premières classes, qui ont débuté en 1961, duraient un mois. Jack Redford, qui avait été instructeur à Guiléad et qui plus tard partirait missionnaire au Viêt Nam, a été désigné pour donner ce cours aux Philippines. La première école a eu lieu au Béthel et a été tenue en anglais.

Bien que l’anglais ne soit pas un problème pour certains, les autres langues et dialectes des Philippines devaient toujours être pris en compte. De nombreux anciens profiteraient mieux du cours dans leur langue. C’est pourquoi, à partir du milieu des années 60, le cours a été donné en plusieurs langues. Cornelio Cañete se souvient d’avoir enseigné dans toutes les Visayas et à Mindanao. Il dit, amusé : “ J’enseignais en trois langues : en cebuano, en hiligaynon et en samar-leyte. ”

Au fil du temps, des modifications ont été apportées au cours, notamment en ce qui concerne sa durée. Récemment, il s’est déroulé sur un week-end : un jour et demi pour les anciens et un jour pour les assistants ministériels. Toutefois, le présenter en une huitaine de langues est toujours un véritable défi à relever. Des anciens parlant ces langues sont envoyés par le Béthel pour former les surveillants itinérants. À leur tour, ces derniers dirigent l’école pour les anciens et les assistants ministériels. La dernière école tenue a profité à 13 000 anciens et à 8 000 assistants ministériels.

De l’aide pour les pionniers

Plus tard, ce sont les pionniers qui ont reçu une formation complémentaire. Les premiers cours de l’École des pionniers ont été organisés en 1978. Tous les pionniers du moment, y compris les pionniers spéciaux, y ont été invités. Depuis lors, ce cours s’est tenu chaque année, sauf en 1979 et en 1981.

Les serviteurs à plein temps ont retiré de grands bienfaits de ce cours, mais beaucoup ont eu des difficultés à y assister : certains ont dû consentir des sacrifices financiers, et d’autres ont été confrontés à des problèmes de transport.

Les élèves du cours tenu à Santiago ont dû faire face à une situation inattendue. Rodolfo de Vera, le surveillant de circonscription, a rapporté : “ Le 19 octobre 1989, Santiago, dans la province d’Isabela, a été frappée de façon imprévisible par un ‘ supertyphon ’, avec des vents soufflant jusqu’à 205 kilomètres à l’heure. Ce matin-​là, quand la classe a débuté à la Salle du Royaume, il n’y avait que quelques averses et un vent léger ; nous avons donc continué le cours. Puis les vents se sont intensifiés et le bâtiment a commencé à trembler. Peu après, le toit s’est envolé. Nous voulions partir, mais nous nous sommes rendu compte que c’était plus dangereux dehors, avec tous les objets qui volaient. ” La salle a commencé à s’effondrer, mais tous les frères en sont sortis sains et saufs. Ils attribuent leur survie à Jéhovah certes, mais aussi à une suggestion donnée dans Réveillez-vous ! qui incitait, dans ce genre de situation, à se réfugier sous une table ou sous un bureau. “ Nous nous sommes abrités sous les tables, a expliqué frère de Vera. Une fois le typhon passé, nous étions couverts de branches et de morceaux de toiture métallique, mais tous ceux d’entre nous qui étaient restés à l’intérieur, sous les tables, en sont sortis indemnes. ”

Chaque année, les cours ont lieu en sept langues. Jusqu’à l’année de service 2002, on a organisé 2 787 cours qui ont rassemblé 46 650 pionniers au total. Quel excellent moyen pour les pionniers d’élargir leurs compétences et de continuer à ‘ briller comme des foyers de lumière dans le monde ’ en se reposant entièrement sur Jéhovah ! — Phil. 2:15.

Les débuts de l’impression offset

Le travail réalisé en prédication et dans les congrégations serait beaucoup plus difficile sans l’aide des précieuses publications bibliques actuellement disponibles. Pendant longtemps, Brooklyn a assumé l’impression pour les Philippines. Mais dans les années 70, une imprimerie a été construite sur les terrains du Béthel, à Quezon City. Une presse typographique semblable à celles de Brooklyn a été installée, ce qui a permis à la filiale d’imprimer tous les périodiques sur place.

Dans la même décennie, il est devenu manifeste dans l’industrie de l’imprimerie que l’impression typographique avec son système de composition chaude était en train de disparaître au profit de l’impression offset. Les instructions reçues du siège mondial indiquaient que nous nous acheminions progressivement vers un changement identique.

En 1980, la filiale a acheté une photocomposeuse. La filiale sud-africaine, qui avait acquis le même type d’équipement, a partagé son expérience avec les Philippines. Ce système de photocomposition informatisé fonctionnait de pair avec une petite presse offset à feuilles, achetée à peu près en même temps.

Sur une petite échelle, cet équipement a permis aux frères d’apprendre les techniques de l’impression offset. David Namoca, qui possédait déjà une grande expérience de la linotype pour l’impression typographique, s’est familiarisé avec la photocomposeuse. D’autres frères ont appris à préparer les plaques offset et à imprimer sur la nouvelle presse. Ainsi, fin 1980, le Béthel utilisait déjà l’impression offset pour certaines éditions du Ministère du Royaume et pour les périodiques dans des langues à faible tirage.

Avec le passage à l’impression offset, les frères ont commencé à utiliser l’informatique comme aide à la traduction et à la composition. Petit à petit, ils ont gagné en expérience et en assurance. En temps opportun, ces méthodes leur ont permis d’imprimer mieux et davantage. D’ailleurs, en 1982, leur désir de progresser était tel qu’ils ont imprimé les Nouvelles du Royaume n31, un tract en couleur, sur la presse offset une couleur. Le papier passait dans la presse six fois : quatre pour la partie couleur et deux pour le reste. C’était un travail colossal et la qualité laissait parfois à désirer ; mais tout le monde était ravi de voir les Nouvelles du Royaume sortir, en couleur, de nos propres machines.

Cette disposition a donné la première impulsion, mais comment allait-​on basculer définitivement vers la photocomposition informatisée et vers l’impression offset ? L’organisation de Jéhovah avait un projet, dont les Philippines allaient bientôt bénéficier.

L’organisation de Jéhovah fournit le MEPS

Le Collège central a autorisé la production d’un système de photocomposition informatisée répondant aux besoins spécifiques de la diffusion de la bonne nouvelle dans une multitude de langues. Ce système électronique de photocomposition multilingue (MEPS) a été développé à Brooklyn. Bien que le matériel exploité depuis un moment par la filiale ait introduit l’informatique et l’impression offset sur une petite échelle, le MEPS allait permettre une avancée dans ce domaine, tant aux Philippines que dans les autres filiales du monde.

Deux couples philippins ont été invités à Wallkill, dans l’État de New York. Les frères ont été formés à la maintenance de l’unité centrale du MEPS et à l’application des programmes MEPS aux travaux précédant l’impression. Un troisième couple, Florizel Nuico et sa femme, a séjourné à Brooklyn, et frère Nuico a appris à faire fonctionner des presses offset M.A.N. C’était exactement ce dont le Béthel des Philippines avait besoin pour passer définitivement à l’impression offset et à l’informatisation des travaux préalables.

En 1983, une presse offset M.A.N. est arrivée aux Philippines. Elle a été montée avec l’aide de Lionel Dingle, de la filiale d’Australie. Frère Nuico a enseigné aux frères locaux ce qu’il avait appris à Brooklyn. Fin 1983, les premiers périodiques sortaient de la presse. Toutefois, le système n’était pas encore tout à fait au point ; c’est pourquoi les périodiques étaient produits en combinant la composition chaude et l’impression offset.

Il n’a pas fallu attendre longtemps pour que le système soit opérationnel. Le premier ordinateur MEPS est arrivé à la fin de l’année 1983, et les deux frères qui avaient été formés à Wallkill se sont mis à enseigner à d’autres le fonctionnement et la maintenance du système. Sous peu, la production était en cours. Des dizaines de Béthélites ont appris à utiliser le système pour la traduction, la saisie de texte, la composition et la photocomposition, ainsi qu’à réparer les machines. Le grand nombre de langues parlées aux Philippines rend la formation difficile. Par exemple, La Tour de Garde est préparée en sept langues, sans compter l’anglais. Le MEPS était donc l’outil adéquat pour cette tâche.

La qualité des publications produites s’est sensiblement améliorée. À propos des frères qui imprimaient, Cesar Castellano, de l’imprimerie, déclare : “ La plupart de nos frères sont agriculteurs. Certains n’avaient aucune compétence technique. C’est impressionnant de voir comment Jéhovah, à l’aide de son esprit, les rend aptes à de nombreuses tâches, telles que l’impression. ” Grâce à la formation reçue par les frères, les proclamateurs avaient des publications de plus en plus attrayantes. Mais, plus important encore, ces avancées technologiques dans les méthodes d’impression ont eu des répercussions d’ordre spirituel.

Une nourriture spirituelle simultanée

Lorsque les périodiques pour les Philippines étaient imprimés à Brooklyn, il y avait au minimum six mois d’écart entre une édition en anglais et son équivalent dans les langues philippines. Même si la traduction était faite sur place, les allers-retours des manuscrits et des épreuves, puis l’expédition des périodiques, prenaient un certain temps. Ce temps a été réduit lorsque l’impression a été transférée aux Philippines dans les années 70, mais le contenu des périodiques avait toujours six mois de retard sur l’anglais. Beaucoup de frères philippins se disaient : “ Si seulement nous avions les périodiques dans notre langue en même temps que l’anglais ! ” Pendant des années, ce ne fut qu’un rêve.

Toutefois, avec l’apparition du MEPS et des nouvelles méthodes de production, le rêve est devenu réalité. Le Collège central a pris conscience que, si la même matière était étudiée simultanément, cela aurait un puissant effet unificateur sur l’ensemble du peuple de Jéhovah. C’est l’objectif qui a été poursuivi, si bien qu’en janvier 1986 La Tour de Garde était disponible en quatre langues locales en même temps que l’anglais : en cebuano, en hiligaynon, en iloko et en tagalog. D’autres langues ont suivi peu après. Et quelle surprise de recevoir aux assemblées de district de 1988 le livre La Révélation : le grand dénouement est proche ! dans trois langues du pays, et en même temps que l’édition anglaise ! Les frères étaient joyeux, non seulement d’avoir des publications d’une qualité supérieure à proposer aux personnes sympathisantes, mais aussi de bénéficier du même programme de nourriture spirituelle que la majorité de leurs frères dans le monde.

Ces progrès dans l’impression de nos publications ont été réalisés à une époque de troubles dans certaines régions du pays. Les publications allaient montrer à tous l’importance de faire de Jéhovah sa forteresse.

Rencontres entre l’armée et les rebelles

Dans les années 80, des groupes de rebelles, dont certains étaient affiliés au mouvement communiste, ont intensifié leurs actions dans de nombreuses régions du pays. Les affrontements opposant les troupes gouvernementales et les forces rebelles se sont multipliés. Ces conflits ont souvent mis à l’épreuve la confiance des frères en Jéhovah.

Dans une région où il y avait une congrégation de 62 proclamateurs, en se réveillant un matin, les frères ont vu les rebelles et l’armée se ranger pour la bataille. Les maisons des frères étaient juste entre les deux camps. Un ancien est allé voir les forces rebelles, et un autre les soldats du gouvernement. Tous deux leur ont demandé de ne pas s’affronter là en raison du nombre de civils qui seraient touchés. Leur requête a été rejetée. Dans l’impossibilité de fuir, les frères se sont réunis à la Salle du Royaume. Un ancien a prononcé au nom de tous une prière longue et suffisamment forte pour être entendue de l’extérieur par les troupes gouvernementales. Quand ils ont rouvert les yeux, les frères ont constaté que les deux camps étaient partis sans se battre. Ils ont été persuadés que Jéhovah les avait protégés.

Dionisio Carpentero est surveillant de circonscription depuis plus de 16 ans, avec sa femme. Il se rappelle encore ce qui s’est passé lors de leur première année dans ce service, à Negros Oriental, province située au centre-sud des Philippines. “ Nous rendions visite à la congrégation de Linantuyan. Nous étions contents que, ce mercredi, 40 proclamateurs se soient joints à nous pour prêcher. Mais nous n’avions pas conscience que les rebelles surveillaient tous nos faits et gestes. Ils avaient leur repaire à proximité de la Salle du Royaume. À 16 heures, quatre d’entre eux ont pénétré là où nous logions pour nous interroger. Un ancien a expliqué que j’étais surveillant de circonscription et que je venais voir leur congrégation tous les six mois. ”

Apparemment, les hommes n’ont pas cru son explication. Ils ont soupçonné Dionisio d’être un militaire et ont demandé à l’ancien de le faire sortir pour qu’ils puissent l’exécuter. L’ancien a répondu qu’ils devraient d’abord le tuer, lui. Alors ils sont partis.

“ Les chiens ont aboyé toute la nuit, poursuit Dionisio, signe de la présence des rebelles. Nous avons imploré l’aide de Jéhovah quatre fois cette nuit-​là. Puis, alors que c’était la saison sèche, il a plu à verse. Les hommes qui attendaient pour nous exécuter sont partis. ”

Après la réunion du dimanche, Dionisio a informé les anciens que sa femme et lui partaient pour se rendre dans une autre congrégation. Mais pour ce faire, ils devaient passer devant la cachette des rebelles. “ L’un des rebelles regardait par la fenêtre, raconte Dionisio. Nous lui avons même dit que nous partions. À 20 heures, cependant, des rebelles sont venus nous chercher à la Salle du Royaume. L’ancien leur a dit que nous étions déjà partis et que nous étions même passés devant leur repaire. Aussi étrange que cela puisse paraître, ils ne nous avaient pas vus. Cela nous a appris à mettre notre confiance en Jéhovah et à affronter les difficultés avec courage. ” Dionisio continue joyeusement son service, aux côtés de sa femme.

Ces conflits entravent parfois la prédication. Si on se trouve en de tels endroits au mauvais moment, on peut être pris dans des feux croisés. Toutefois, il est arrivé que certaines factions informent les frères de conflits imminents. Dans ce cas, les frères vont prêcher dans un endroit plus calme jusqu’à la fin des combats. Malgré tout, l’œuvre de témoignage au sujet du Royaume suit son cours et les frères ont appris à se reposer sur Jéhovah.

Mise à l’épreuve de la neutralité chrétienne

De ses disciples, Jésus a dit : “ Ils ne font pas partie du monde, comme moi je ne fais pas partie du monde. ” (Jean 17:14). Comme partout dans le monde, les Témoins de Jéhovah des Philippines se tiennent à l’écart de la politique et des conflits armés. Ils ‘ ne prennent pas l’épée ’ ; au contraire, ils ont déposé les armes et poursuivent la voie de la paix enseignée par Jéhovah (Mat. 26:52 ; Is. 2:4). Cette position de neutralité étant bien connue aux Philippines, des personnes de toutes tendances politiques reconnaissent que les Témoins de Jéhovah ne représentent aucun danger pour eux. Mais, par moments, les serviteurs de Jéhovah ont dû expliquer clairement quelle était leur position à propos de certains sujets, ce qui les a protégés.

Wilfredo Arellano, surveillant itinérant, a connu au cours de ses voyages toutes sortes de territoires, certains paisibles, d’autres moins. En 1988, il a rendu visite à une congrégation située au centre-sud du pays, où les frères avaient subi des pressions de la part des opposants au gouvernement pour qu’ils les suivent dans leur rébellion. Les frères avaient refusé catégoriquement.

“ Pendant ma visite, raconte Wilfredo, des troupes gouvernementales s’activaient sur le territoire de la congrégation. Elles voulaient constituer les résidents en milice pour combattre les insurgés. Lors d’une réunion avec des représentants du gouvernement, les frères ont eu l’occasion d’expliquer pourquoi ils ne voulaient faire partie ni des insurgés ni de la milice. Alors que certains habitants de la localité nous étaient hostiles, les porte-parole du gouvernement nous ont respectés. ”

Wilfredo rapporte la suite des événements : “ En rentrant chez lui, à la ferme, après la réunion, un frère est tombé sur un groupe d’hommes fortement armés avec deux prisonniers les yeux bandés. Ils lui ont demandé s’il avait assisté à la réunion du gouvernement. Le frère a acquiescé, disant la vérité. Les hommes armés ont voulu savoir s’il s’était engagé dans la milice, à quoi il a répondu par la négative, puis il leur a expliqué sa position de neutralité. Ils l’ont alors laissé rentrer chez lui. Quelques minutes plus tard, il a entendu deux coups de feu : les prisonniers venaient d’être exécutés. ”

Dans les années 70 et au début des années 80, la loi philippine a rendu le vote obligatoire pour tous les citoyens. Les contrevenants étaient emprisonnés. Le peuple de Jéhovah allait devoir Lui démontrer sa fidélité. À l’image de leurs frères chrétiens du monde entier, les serviteurs de Jéhovah des Philippines ont maintenu leur neutralité politique en ‘ ne faisant pas partie du monde ’. — Jean 17:16.

Après un changement de gouvernement en 1986, la constitution du pays a été révisée, et on a supprimé le vote obligatoire. Cela a facilité les choses pour les frères. Toutefois, beaucoup ont rencontré d’autres épreuves, particulièrement dans le cadre de la scolarité.

‘ Ils n’apprennent plus la guerre ’

Irene Garcia a grandi à Pampanga, province du centre de Luçon. Elle a dû affronter une situation que beaucoup de jeunes connaissent encore. Dans les établissements d’enseignement secondaire, l’entraînement militaire est obligatoire. Les élèves Témoins de Jéhovah, quant à eux, estiment en leur âme et conscience qu’ils ne peuvent participer à un programme qui leur enseigne à faire la guerre. D’abord, Irene a prié Jéhovah de l’aider. Puis, gardant présent à l’esprit l’exemple des trois jeunes Hébreux de l’époque du prophète Daniel, elle s’est adressée directement au commandant dirigeant l’entraînement militaire et a demandé à en être exemptée (Dan., chap. 3). Bien que ne comprenant pas pleinement sa position, il l’a remerciée pour son explication. Il l’a toutefois prévenue que son abstention lui vaudrait une mauvaise note. “ Ce n’est pas grave, a-​t-​elle répondu. Je ferai de mon mieux dans les autres matières. ” À la place, on lui a donné du travail à faire. “ Cela a permis à d’autres enfants de Témoins d’obtenir facilement leur exemption. Et ça ne m’a pas empêchée d’être dans les dix premiers. ”

Tous les commandants chargés de l’entraînement n’ont pas accordé l’exemption. Certains ont voulu empêcher des élèves d’obtenir leur diplôme. Malgré cela, l’attachement aux principes de Jéhovah a enseigné à des milliers de jeunes une leçon importante : en prenant fermement position pour le Royaume et en conservant sa neutralité dans les affaires du monde, on s’attire la protection et la bénédiction de Jéhovah. — Prov. 29:25.

Des assemblées toujours plus nombreuses

Considérons à présent les rassemblements spirituels du peuple de Jéhovah. Ce sont toujours des moments joyeux. En raison du nombre peu élevé de Témoins dans le pays avant la Seconde Guerre mondiale, il a fallu attendre l’après-guerre pour organiser de grands rassemblements. Néanmoins, déjà avant on faisait des efforts pour encourager les frères et sœurs de cette façon. D’ailleurs, l’Annuaire 1941 indique qu’une assemblée a eu lieu à Manille, en mars 1940.

Vous souvenez-​vous que Joseph Dos Santos avait été emprisonné par les Japonais ? Il a finalement été libéré par les forces américaines au début de 1945. Il s’est intéressé de près au bien-être spirituel des frères et sœurs, dont beaucoup étaient nouveaux dans l’organisation. Des dispositions ont été prises pour qu’ils apprennent à enseigner efficacement les vérités tirées des Écritures au moyen d’études bibliques à domicile. L’assemblée nationale tenue fin 1945 à Lingayen, dans la province de Pangasinan, a poursuivi ce but. Environ 4 000 personnes y ont assisté, reflet du grand intérêt manifesté à l’époque. Quel joyeux événement, maintenant que la guerre était finie !

Depuis, l’assistance aux assemblées a connu une progression constante, au même rythme que le nombre de proclamateurs. Quelque 17 ans plus tard, les 4 000 sont devenus 39 652. Puis les assemblées ont eu lieu, non plus en un seul endroit, mais en sept différents. Encore 15 ans, (nous sommes alors en 1977), et le nombre des assistants à l’assemblée de district dépassait les 100 000. On tenait alors 20 assemblées dans tout le pays. Huit ans plus tard, ce nombre franchit les 200 000 et, en 1997, les 300 000. Pour l’année 2002, 63 assemblées ont été organisées, un record. Comme les voyages à travers les îles peuvent être éprouvants et parfois coûteux, les assemblées se déroulent en plusieurs endroits : les frères assistent plus facilement à ces assemblées mieux réparties dans le pays. En conséquence, ils sont plus nombreux à tirer profit de ces festins spirituels.

Jéhovah bénit les efforts pour assister aux rassemblements

Il n’a pas toujours été facile d’assister aux assemblées de circonscription et de district. En 1947, dans le nord du pays, des frères ont remonté l’Abra sur deux radeaux pour se rendre à l’assemblée de circonscription de Vigan, sur la côte. À l’embouchure du fleuve, ils ont démonté les radeaux et ont vendu le bois pour acheter des tickets de bus en vue du trajet du retour, dans les montagnes. Ils avaient emporté de gros sacs de riz, un vieux brûleur, du bois, des nattes pour dormir, et emmené leurs enfants et leurs chaleureux sourires qui s’élargissaient à mesure que l’assemblée se déroulait. Avec du riz, du bois pour le feu, un vieux brûleur et une natte pour dormir, tous leurs besoins matériels étaient satisfaits.

En 1983, un groupe de la congrégation de Caburan, dans la province méridionale de Davao del Sur, a marché trois jours dans la montagne. À l’arrivée, un terminal de bateaux à moteur, d’où les frères ont embarqué pour un voyage d’encore une journée jusqu’à la ville de l’assemblée. Pour eux, la joyeuse compagnie des autres assistants à l’assemblée de district “ Unis grâce au Royaume ” valait bien tous ces efforts et toutes ces dépenses.

En 1989, des parents accompagnés de leurs deux enfants, âgés de deux et quatre ans, ont parcouru environ 70 kilomètres à pied depuis El Nido, dans le Palauan, pour assister à l’assemblée de circonscription. Il leur a fallu deux jours pour traverser la jungle, où les chemins tracés sont rares. Tout en marchant, ils devaient arracher les sangsues qui leur collaient à la peau. Pour couronner le tout, il a plu sans discontinuer les deux jours. Ils ont dû traverser de nombreuses criques et rivières, sans ponts. Malgré ces obstacles, ils sont arrivés sains et saufs. Combien ils ont apprécié la compagnie de leurs frères et sœurs !

Dans d’autres régions, les familles aux ressources limitées peinent pour économiser de quoi assister aux assemblées. Ramon Rodriguez a connu ce problème en 1984. Il vit avec sa famille sur l’île de Polillo, au large de la côte est de Luçon. Ramon est pêcheur. À une semaine seulement de l’assemblée, sa famille, composée de sept membres, avait juste assez d’argent pour que l’un d’entre eux y assiste. Ils ont prié Jéhovah à ce sujet, puis Ramon est allé pêcher avec son fils de 12 ans. Ils ont ramé au large et jeté leurs filets, mais sans succès. Au bout d’un certain temps, le fils a insisté pour qu’ils essaient de nouveau, plus près de chez eux. C’est ce qu’ils ont fait. “ À notre grande surprise, lorsqu’on a ramené le filet, il y avait tellement de poissons qu’on en a rempli le bateau ”, raconte Ramon. Ils en avaient attrapé plus de 500 kilos ! La vente du poisson a rapporté plus que ce qui était indispensable pour permettre à toute la famille Rodriguez de se rendre à l’assemblée.

Le lendemain soir, d’autres frères voulant aller à l’assemblée ont jeté leurs filets au même endroit et ont encore pêché 100 kilos de poissons. Ramon ajoute : “ Des pêcheurs, qui n’étaient pas Témoins et qui sont allés jeter leurs filets en même temps, se sont étonnés de ne pas attraper le moindre poisson. Ils ont fait cette remarque : ‘ Leur Dieu les bénit parce qu’ils vont à l’assemblée. ’ ” À maintes reprises, des familles de Témoins philippins ont appris qu’en accordant la priorité aux choses spirituelles et en agissant en harmonie avec ses prières, on récolte de la joie et la bénédiction de Jéhovah.

Des assemblées inoubliables

Dans le monde entier, le peuple de Jéhovah garde d’excellents souvenirs des assemblées. Les frères des Philippines ne font pas exception. Bien que tous les programmes soient appréciés, certains revêtent une signification particulière et laissent une impression durable dans le cœur et dans l’esprit. Parfois, ce sont des assemblées internationales, ou peut-être des assemblées pour lesquelles certains missionnaires rentrent dans leur pays d’origine et racontent des anecdotes personnelles à l’auditoire.

Comme mentionné plus haut, quelques frères et sœurs philippins sont missionnaires dans d’autres pays d’Asie et dans des îles. Grâce à leurs offrandes volontaires, les Témoins du monde entier ont aidé à plusieurs reprises les missionnaires à rentrer chez eux pour assister à des assemblées. Des frères philippins ont, eux aussi, bénéficié de cette disposition pleine d’amour. En 1983, en 1988, en 1993 et en 1998, ils ont été des dizaines à revenir aux Philippines pour être présents aux assemblées aux côtés de leur famille et de leurs amis. Des rapports de 1988 indiquent que 54 missionnaires actifs dans 12 pays ont fait le voyage. À l’époque, les 54 avaient passé en moyenne 24 ans dans le service à plein temps. Tout le monde s’est réjoui de les entendre, durant le programme, relater des faits vécus.

D’autres se souviennent des assemblées de district en raison d’événements particuliers qui leur ont été associés ou de la détermination des frères à persévérer malgré certaines entraves. Par exemple, juste avant l’assemblée de district de 1986 “ La paix divine ” à Surigao, sur l’île de Mindanao, un typhon a frappé la ville, avec des vents de 150 kilomètres à l’heure, endommageant sérieusement le toit du stade. Le courant a été coupé dans toute la ville et n’a été rétabli qu’après l’assemblée. On allait chercher de l’eau à six kilomètres. Cela n’a pas empêché les Témoins de se réunir. Les frères ont récupéré ce qui restait de l’estrade et l’ont installée dans un gymnase près du stade. Ils ont loué un groupe électrogène afin d’alimenter des lampes électriques, la sonorisation et un réfrigérateur pour la cafétéria. On attendait 5 000 assistants, il en est venu 9 932 ! Ce n’étaient certainement pas de ces chrétiens qui attendent les beaux jours pour se réunir !

Les assemblées internationales marquent particulièrement les mémoires. Le Collège central en a organisé à Manille, en 1991 et en 1993. Les délégués ont fait forte impression sur la ville. Quel formidable échange d’encouragements pour les frères et sœurs philippins, dont la plupart n’ont pas les moyens de voyager et de découvrir d’autres pays (Rom. 1:12) ! Les délégués venus de l’étranger ont été impressionnés par l’hospitalité sincère et pleine de gentillesse de leurs frères philippins. Un couple américain a écrit : “ Un grand merci pour votre accueil chaleureux. Vous nous avez reçus à bras ouverts et avec tant d’amour ! ”

En 1993, trois stades ont été utilisés à Manille. Ils étaient reliés par téléphone chaque fois qu’un membre du Collège central donnait un discours. Quelle émotion parmi les délégués lorsqu’on a annoncé la parution, en tagalog, des Écritures grecques chrétiennes — Traduction du monde nouveau ! Une jeune sœur déclare : “ J’étais au comble de la joie. Depuis le temps que je rêvais d’avoir la Traduction du monde nouveau en tagalog, quelle surprise de la recevoir ! ”

En 1998, les rôles ont été inversés. Pour la première fois depuis 1958, les Philippines ont été invitées à envoyer des délégués dans d’autres pays. Ainsi, 107 d’entre eux se sont rendus à une assemblée sur la côte ouest des États-Unis. En septembre, 35 autres ont eu le privilège d’assister à une assemblée internationale en Corée. De tels rassemblements ont considérablement favorisé la formation et l’unité du peuple de Jéhovah et aidé tous ses Témoins à faire de Jéhovah leur forteresse.

Considérons à présent l’œuvre de prédication. Comment a-​t-​elle été accomplie dans un pays où tant de langues se côtoient ?

La bonne nouvelle en de nombreuses langues

Comme cela a été dit, il est en général plus facile d’apprendre la vérité biblique dans sa langue maternelle. Mais la diversité des langues parlées aux Philippines pose problème. Néanmoins, les Témoins de Jéhovah s’efforcent de répondre aux besoins des personnes en leur donnant le témoignage et en préparant des publications bibliques en différentes langues.

Habituellement, ce sont les locuteurs d’une certaine langue qui donnent le témoignage au groupe linguistique concerné. Dans certains cas cependant, lorsque peu de Témoins connaissent une langue, des proclamateurs et des pionniers zélés s’efforcent de l’apprendre. Ils imitent ainsi l’apôtre Paul qui est devenu “ toutes choses pour des gens de toutes sortes ”. — 1 Cor. 9:22.

Bien que les Philippines soient, compte tenu de leur population nombreuse, le quatrième pays du monde à parler l’anglais en tant que langue officielle, la plupart des habitants recourent à leur langue maternelle pour communiquer. Tous ne lisent pas bien l’anglais, d’où le besoin de publications dans plusieurs langues philippines. Au fil des ans, les Témoins de Jéhovah ont traduit les publications bibliques au moins en 17 d’entre elles. Dans certaines langues, seules une ou deux brochures sont disponibles ; c’est le cas du tausug, parlé par les peuples méridionaux musulmans, et de l’ibanag, utilisé par une petite ethnie proche de l’extrême nord du pays. Dans l’ensemble, la population comprend et parle l’une des sept langues principales. C’est dans celles-là que La Tour de Garde est traduite et imprimée et, de ce fait, que les programmes spirituels des réunions ou des assemblées sont essentiellement présentés.

Ces dernières années, le gouvernement a encouragé l’utilisation du pilipino, fondamentalement identique au tagalog. En l’espace d’une génération, les effets de cette politique se sont fait sentir. Le pilipino oral et écrit a gagné du terrain, tandis que les autres langues sont restées stationnaires ou bien ont reculé. Le tirage de La Tour de Garde a suivi cette évolution. En 1980, chaque édition en tagalog était imprimée à 29 667 exemplaires. En 2000, ce chiffre avait quadruplé, atteignant 125 100. Dans l’intervalle, le tirage en anglais avait peu évolué et seule une augmentation modeste était enregistrée dans les autres langues philippines.

La famille du Béthel soutient la prédication

Quelque 380 ministres à plein temps servent au siège des Témoins de Jéhovah à Quezon City (qui fait partie de l’agglomération appelée Metro Manila, ou Grand Manille). Une équipe de 69 personnes traduit et corrige les publications dans les langues locales. Récemment, une partie de l’équipe a achevé la Traduction du monde nouveau des Écritures hébraïques en trois langues : en cebuano, en iloko et en tagalog. Depuis la publication, en 1993, des Écritures grecques chrétiennes, les frères étaient impatients d’obtenir l’intégralité de la Traduction du monde nouveau. Quelle joie pour eux de recevoir l’édition en tagalog lors d’une assemblée de district fin 2000 ! Les éditions en cebuano et en iloko n’ont pas tardé à suivre. Aujourd’hui, des centaines de milliers de personnes dans le territoire tirent profit de cette traduction claire, exacte et harmonieuse des Saintes Écritures.

Les membres de la famille du Béthel ont des origines différentes et parlent à eux tous 28 langues et dialectes. Ainsi, beaucoup sont tout à fait qualifiés pour traduire les publications bibliques. Toutefois, la traduction n’est qu’une partie du travail effectué au Béthel.

Les Béthélites s’acquittent de diverses tâches liées au soutien de l’œuvre primordiale de prédication. Certains s’activent à l’impression des périodiques et des autres publications bibliques, à leur livraison aux différents dépôts de Luçon, ou à diverses tâches propres au Béthel telles que l’entretien du matériel, la cuisine et le ménage. D’autres sont affectés au Bureau du service, où ils reçoivent et envoient des courriers en de nombreuses langues pour aider les congrégations, les surveillants itinérants et les pionniers. Imaginez la correspondance que cela représente pour les 3 500 congrégations de l’archipel !

Depuis l’ouverture, en 1934, du siège national des Témoins de Jéhovah jusqu’au milieu des années 70, le Béthel a été confié à la direction d’un serviteur, ou surveillant, de filiale. Après le retour de Joseph Dos Santos à Hawaii, Earl Stewart, missionnaire canadien, a assumé cette responsabilité pendant 13 ans. Ensuite, deux autres frères lui ont succédé pour de courtes périodes. Puis, en 1966, Denton Hopkinson, arrivé en 1954, a été nommé surveillant de filiale. Il a servi diligemment à cette fonction pendant environ dix ans, jusqu’à ce que l’organisation de Jéhovah juge bon d’appliquer une nouvelle disposition pour la surveillance des filiales au niveau mondial.

Conformément aux instructions transmises à toutes les filiales à travers le monde, on est passé de la direction d’un seul homme à celle d’un comité de filiale en 1976. Ce groupe d’hommes compétents travaillant sous la direction du Collège central aurait la responsabilité de prendre des décisions relatives à l’activité au Béthel et à l’extérieur du Béthel. Initialement, le Comité de filiale des Philippines était composé de cinq membres. Plus tard, étant donné que la plupart étaient des missionnaires venus de l’étranger, on a estimé sage d’augmenter le nombre des frères philippins formant ce comité. Pendant un temps, le comité a donc été constitué de sept frères.

On a vite perçu les avantages de cette réorganisation. Denton Hopkinson, aujourd’hui coordinateur du Comité de la filiale, fait cette observation : “ On s’aperçoit avec le recul que c’était une décision sage et opportune. La somme de travail et la taille de l’organisation étaient trop importantes pour un seul homme. À présent, le poids des responsabilités est mieux réparti. ”

Proverbes 15:22 déclare : “ Dans la multitude des conseillers il y a réalisation. ” Solliciter l’avis d’autrui permet l’accès à un véritable puits de sagesse. Le Comité de la filiale des Philippines applique ce principe. Depuis que frère Hopkinson a été nommé coordinateur de la filiale, la famille du Béthel a, au sens propre, décuplé, et la quantité de travail aussi. Le comité se compose aujourd’hui de cinq serviteurs de Jéhovah fidèles depuis longtemps. Ils ont passé en moyenne plus de 50 ans dans le service à plein temps. Leur grande expérience a sans aucun doute été utile à l’expansion dynamique de l’œuvre dans toutes les îles, sous la direction de Jéhovah. Pour le Comité de la filiale et pour l’ensemble de la famille du Béthel, soutenir cette œuvre est un grand privilège.

Ils transmettent la vérité à “ toutes sortes d’hommes ”

La prédication est vraiment en harmonie avec la volonté de Dieu, qui veut que “ toutes sortes d’hommes soient sauvés et parviennent à une connaissance exacte de la vérité ”. (1 Tim. 2:4.) Quelles “ sortes ” de personnes les prédicateurs zélés des Philippines ont-​ils aidées ?

Marlon était du genre à s’attirer constamment des ennuis. Il était connu dans son village comme un homme aux vices innombrables : il fumait, s’enivrait, se droguait et fréquentait de mauvais sujets. Quand les Témoins se sont présentés chez sa mère, celle-ci s’est intéressée au message du Royaume. Des pionniers empruntaient des routes poussiéreuses et boueuses pour venir étudier avec elle. Au début, Marlon ne souhaitait pas se joindre à l’étude, il ne faisait que passer occasionnellement. Mais les frères qui étudiaient avec sa mère se sont intéressés à lui. Avec le temps, non seulement il a commencé à étudier, mais il s’est coupé les cheveux, longs jusqu’à la taille, pour assister à sa première réunion à la Salle du Royaume. Il a progressé rapidement. Son entourage s’étonnait des grands changements qu’il opérait dans son mode de vie. Aujourd’hui, Marlon est ministre à plein temps. Qu’est-​ce qui l’a incité à accepter la vérité biblique ? Il dit que la persévérance des pionniers qui étudiaient avec sa mère l’a convaincu qu’ils détenaient la vérité.

Certaines personnes ne semblent pas disposées à accepter la bonne nouvelle. Cependant, loin de préjuger de leur réaction, les prédicateurs de la bonne nouvelle leur donnent la possibilité d’entendre leur message. Sur la petite île de Marinduque, une pionnière spéciale a donné le témoignage aux occupants d’une maison. Avant de partir, elle a demandé au maître de maison si quelqu’un d’autre vivait là. Il lui a répondu qu’il y avait des locataires à l’étage et il a ajouté : “ Ne vous donnez pas la peine d’y aller ; l’homme est violent et s’emporte facilement. ” Mais la pionnière a estimé que cet homme devait avoir la possibilité, lui aussi, d’entendre le message du Royaume, et elle est montée frapper à la porte. On aurait dit de l’homme qui a ouvert qu’il l’attendait. Souriante, elle lui a proposé une étude biblique gratuite à domicile. À sa grande surprise, ce dernier, Carlos, a accepté avec plaisir. Sa femme et lui se sont mis à étudier.

Quand la pionnière est revenue, Carlos lui a confié que sa femme et lui avaient de graves problèmes et qu’ils avaient même tenté de se suicider. Lors de la première visite de la sœur aux habitants du rez-de-chaussée, Carlos avait collé son oreille au plancher pour écouter et il avait entendu les propos de l’un d’eux visant à la dissuader de monter. Il avait alors prié pour que la pionnière ne tienne pas compte de cette recommandation et monte quand même : peut-être allaient-​ils enfin trouver la paix de l’esprit qu’ils avaient tant cherchée. L’étude de la Bible leur a bel et bien apporté cette paix. Ils se sont fait baptiser tous les deux, et la femme de Carlos est maintenant pionnière permanente.

Un autre homme, Victor, connaissait les enseignements bouddhistes et catholiques. Comme il se demandait pourquoi il existe tant de religions dans le monde, il s’est mis à chercher personnellement la vérité. Après avoir examiné l’islam, l’hindouisme, le shintoïsme, le confucianisme, la théorie de l’évolution et d’autres philosophies, il s’est rendu compte que rien ne le satisfaisait. Au cours de ses recherches, il s’est aperçu que seule la Bible contenait des prophéties exactes. Il a donc axé ses investigations sur ce livre. En examinant les Écritures, sa compagne, Maribel, et lui en sont eux-​mêmes arrivés à la conclusion que la Trinité, l’enfer de feu et le purgatoire étaient des enseignements erronés. Mais en dépit de cela, il y avait toujours un manque à combler.

Peu après son mariage avec Maribel, Victor a conversé avec un Témoin et a appris qu’il fallait utiliser le nom de Dieu. Après avoir vérifié cela dans sa Bible, il a tout de suite commencé à mentionner le nom de Jéhovah dans ses prières. Rapidement, il a assisté aux réunions et progressé spirituellement. Maribel et lui se sont fait baptiser en mai 1989, et Victor contribue aujourd’hui à fortifier des congrégations en qualité de surveillant itinérant.

Les pionniers aident des personnes qui se trouvent dans toutes sortes de situations. Primitiva Lacasandile, pionnière spéciale dans le sud de Luçon, a commencé une étude biblique avec un couple de villageois qui avaient deux enfants et vivaient dans la pauvreté. Un jour, en arrivant pour diriger l’étude, Primitiva a été horrifiée de voir l’aîné des enfants enfermé dans un sac accroché au mur de la maison et en train de pleurer. Primitiva raconte : “ La mère brandissait un couteau et s’apprêtait à tuer l’enfant. Je l’en ai empêchée et lui ai demandé pourquoi elle voulait faire cela. Elle m’a expliqué que c’était en raison de la misère dans laquelle elle vivait. ” Primitiva lui a donné des conseils bibliques en rapport avec leur problème, ce qui a sauvé la vie de l’enfant. La famille a poursuivi son étude de la Bible et a commencé à assister aux réunions, même si elle devait pour cela faire huit kilomètres à pied. Le couple a progressé et s’est fait baptiser. Aujourd’hui, le mari est ancien dans la congrégation. “ L’enfant qui a failli être tué est aujourd’hui pionnier permanent, précise Primitiva. Vraiment, l’œuvre que Jéhovah a confiée à ses serviteurs sauve des vies dès aujourd’hui et en vue de l’avenir. ”

La prédication dans les territoires peu parcourus

Les prédicateurs du Royaume étant rares dans de nombreuses régions encore, des pionniers et des proclamateurs se sont portés volontaires pour s’y rendre. Ainsi, Pascual et Maria Tatoy, pionniers permanents, sont partis avec Angelito Balboa, pionnier spécial, sur l’île de Coron, dans l’ouest de l’archipel. Pour subvenir à leurs besoins, Pascual allait pêcher avec un frère et Maria préparait du riz, qu’elle vendait.

Lors de sa visite, le surveillant de circonscription a signalé que des proclamateurs seraient bienvenus sur une autre île, Culion, qui abritait une léproserie et qui ne comptait, à l’époque, que quatre proclamateurs. Il a invité les Tatoy à s’y rendre, ce qu’ils ont accepté de faire. Jéhovah a béni leurs efforts, si bien que les quatre proclamateurs de Culion sont devenus par la suite deux congrégations.

Dans les années 70, beaucoup de boat people qui avaient fui le Viêt Nam ont débarqué aux Philippines, où il y a eu des camps de réfugiés pendant environ 20 ans. Un camp important se situait à Palauan. Des frères philippins se sont portés volontaires pour communiquer la vérité à ces personnes. Un frère d’expression vietnamienne a quitté les États-Unis pour venir les aider. Certains réfugiés ont accepté la vérité dans le camp. D’autres ont appris à connaître le nom de Jéhovah, ainsi que Ses Témoins, avant de s’installer ailleurs.

Des pionniers spéciaux prêchent dans des régions reculées des Philippines, et ils emmènent souvent des proclamateurs et des pionniers. “ En général, nous partons le lundi avec nos sacs remplis de publications, nos vêtements et de la nourriture, suffisamment pour tenir jusqu’au samedi matin, explique Norma Balmaceda, qui œuvre dans les montagnes d’Ifugao. Le samedi après-midi, nous rentrons pour les réunions de la congrégation. ”

Des congrégations organisent de véritables expéditions de prédication, surtout lorsqu’il fait beau. Il leur faut plusieurs jours, voire une semaine, pour se rendre dans l’arrière-pays. Nicanor Evangelista, aujourd’hui Béthélite, se souvient d’avoir prêché dans ces territoires : “ À la campagne, la coutume philippine veut que, lorsque les gens manifestent de l’intérêt, ils nous disent : ‘ Vous pouvez dormir ici, avec nous. Vous pouvez cuisiner ici. ’ Parfois les pionniers étudiaient la Bible avec les personnes jusqu’à une heure avancée de la nuit, parce qu’ils dormaient sur place. ”

Les Aëtas apprennent la vérité

Dans leurs efforts pour donner le témoignage à toutes sortes de personnes, les serviteurs de Jéhovah sont entrés en contact avec les Aëtas, aussi appelés Négritos. Les Aëtas seraient les premiers habitants des Philippines. Il est parfois difficile de les rencontrer, d’autant plus qu’ils sont relativement peu nombreux. En effet, beaucoup sont des nomades qui vivent dans les forêts montagneuses et qui se nourrissent du produit de leur chasse et de la cueillette de fruits et de légumes sauvages. Leur petite taille, inférieure à 1,50 mètre, leur peau foncée et leurs cheveux frisés les rapprochent des Pygmées d’Afrique. Certains se sont intégrés à la société alors que d’autres se sont installés de façon plus permanente près des zones populeuses. Un grand nombre d’entre eux vivaient dans les montagnes entourant le Pinatubo, mais ils se sont déplacés à l’époque de sa violente éruption.

Un autre groupe d’Aëtas se trouve sur l’île de Panay, au centre du pays. Lodibico Eno et sa famille sont des Aëtas de cette région. L’application des principes bibliques a considérablement changé Lodibico. Il raconte : “ Avant, j’avais de nombreux vices : je mâchais du bétel, je fumais, je buvais et je jouais. J’étais aussi très violent. Ma famille était malheureuse. Si je n’avais pas abandonné toutes ces mauvaises habitudes, j’aurais probablement déjà perdu la vie. Aujourd’hui, mon corps est sain. Mes dents ne sont plus rougeâtres, mais blanches. Je suis ancien dans la congrégation. Toutes ces bénédictions, je les ai reçues de Jéhovah Dieu. ” À l’instar de cette famille aëta, même des gens issus de tribus peu nombreuses connaissent la liberté que l’on obtient en suivant les voies de Jéhovah. — Jean 8:32.

Des prisonniers reçoivent la liberté

Des personnes d’un autre genre ont reçu de l’aide : les prisonniers. Depuis les années 50, les Témoins de Jéhovah font un effort particulier pour rendre visite à ceux qui se trouvent derrière les barreaux. Ainsi, beaucoup de détenus ont pu accepter la voie de la vérité.

Alors qu’il était tout jeune, Sofronio Haincadto a été arrêté et condamné à six ans de détention pour rébellion contre le gouvernement. Incarcéré à la prison de New Bilibid (Luçon), il a remarqué qu’un prisonnier n’assistait pas aux offices autorisés aux détenus. Il a appris que cet homme était devenu Témoin de Jéhovah, ce qui a donné lieu à des discussions bibliques presque quotidiennes. “ J’ai acquis la conviction que la cause pour laquelle je me battais ne pouvait pas vraiment améliorer la société ”, explique Sofronio. Ce dernier a compris que seul le Royaume de Dieu peut apporter les changements souhaités. Avec l’aide des frères d’une congrégation voisine, Sofronio a fait des progrès spirituels et s’est fait baptiser en prison, dans un réservoir d’eau pour les plantes.

Sa peine purgée, il est devenu pionnier permanent, puis pionnier spécial. Durant son ministère à plein temps, il a aidé 15 personnes à embrasser la vérité. Après son mariage, il a eu six enfants. Trois sont actuellement ministres à plein temps, dont un surveillant de circonscription. En 1995, deux de ses fils ont assisté à l’École de formation ministérielle. La vérité a apporté la liberté authentique à Sofronio, à sa famille et à ceux qu’il a aidés.

Des pionniers spéciaux prêchent aux prisonniers de la colonie pénitentiaire de Iwahig (Palauan) et ils ont même reçu l’autorisation de construire une petite Salle du Royaume dans l’enceinte de la prison. Un détenu, inculpé pour incendie criminel, pour vol et pour le meurtre de plusieurs personnes, s’est mis à étudier. Quand on l’a aidé à appliquer ce qu’il avait appris dans le livre Vous pouvez vivre éternellement sur une terre qui deviendra un paradis, sa vie a changé du tout au tout !

Après plus de 23 ans d’emprisonnement, cet homme a été informé de sa libération imminente. Il a exprimé aux membres de sa famille son souhait de les revoir après tant d’années. Mais ceux-ci avaient tellement honte et peur de lui qu’ils lui ont envoyé ce mot : “ S’il te plaît, ne reviens pas. ” Ils ignoraient les changements considérables que la Parole de Dieu l’avait incité à opérer dans sa vie. Quelle n’a pas été leur surprise en voyant revenir chez lui un chrétien calme et pacifique !

Aux Philippines, la plus grande prison pour femmes se situe à Mandaluyong, dans le Grand Manille. Des années durant, les Témoins de Jéhovah n’ont eu qu’un accès limité à cet établissement. Mais les choses ont changé lorsqu’une femme qui avait déjà étudié la Bible y a été transférée. Les autorités lui ont dit qu’elle devait intégrer l’un des groupes religieux présents, mais elle a refusé, expliquant qu’elle ne voulait adorer Dieu qu’avec les Témoins de Jéhovah. Les autorités pénitentiaires y ont consenti et ont permis aux Témoins d’effectuer dans la prison des visites hebdomadaires. Depuis, plusieurs détenues ont été baptisées. De plus, une congrégation voisine dirige régulièrement l’étude de La Tour de Garde et d’autres réunions, et les prisonnières qui s’intéressent à la vérité peuvent en tirer profit.

Le message de la Bible apporte aux prisonniers une liberté toute particulière. Eux aussi sont précieux pour Jéhovah, et Son peuple se fait un plaisir de les aider.

La persévérance des serviteurs de longue date

Un proverbe biblique déclare : “ Les cheveux gris sont une couronne de beauté quand ils se trouvent dans la voie de la justice. ” (Prov. 16:31). Oui, comme il est beau de voir ceux qui ont fait de la joie de Jéhovah leur forteresse depuis de nombreuses années !

Avant la Seconde Guerre mondiale, l’organisation théocratique était peu développée aux Philippines. Rares sont ceux dont le service remonte aussi loin dans le temps. C’est pourquoi le cas de Leodegario Barlaan, serviteur à plein temps depuis 1938, est très encourageant. Pendant la guerre, ses compagnons et lui ont été maltraités par les Japonais, mais ils n’ont pas cessé de prêcher pour autant. Après la guerre, il a poursuivi son activité à plein temps avec sa femme, Natividad. Par la suite, on leur a proposé le service itinérant. Plus tard, ils ont été pionniers spéciaux infirmes dans la province de Pangasinan. Natividad est morte en 2000, mais Leodegario persévère dans ce territoire. Tout le monde est encouragé par sa détermination à continuer de faire ce qu’il a toujours fait : prêcher.

L’œuvre de témoignage s’est étendue rapidement après la Seconde Guerre mondiale. Nombre de ceux qui ont appris la vérité biblique à l’époque sont toujours actifs aujourd’hui. Ainsi, pendant la guerre, Pacifico Pantas a lu des publications bibliques qui appartenaient à des voisins Témoins. “ J’ai commencé à assister aux réunions, relate-​t-​il. Puis j’ai rempli une demande pour être pionnier ordinaire [aujourd’hui, permanent], mais je n’étais pas encore baptisé. On m’a demandé de me faire baptiser, ce que j’ai fait. ” C’était en 1946. Son service de pionnier l’a conduit dans différentes régions du pays. Pacifico a également goûté d’autres privilèges. “ J’ai été invité à la 16classe de Guiléad et j’ai pu assister à l’assemblée internationale de New York, en 1950. Après avoir reçu mon diplôme, j’ai été surveillant de circonscription dans le Minnesota et dans le Dakota du Nord (États-Unis), avant de retourner aux Philippines pour être surveillant de district au sud de la Pasig, de Manille jusqu’à Mindanao. ”

Dans les années qui ont suivi, frère Pantas s’est vu confier plusieurs affectations au Béthel et dans le service itinérant. Puis, en 1963, il s’est marié. Lorsque sa femme et lui ont eu des enfants, ils ont dû s’installer afin de les élever. Ils ont continué de servir Jéhovah en famille, et leurs trois enfants ont suivi leur exemple. Aujourd’hui, ils sont anciens ; l’un d’eux est diplômé de l’École de formation ministérielle, et un autre Béthélite. Même dans ses vieux jours, frère Pantas demeure un élément moteur de sa congrégation.

Des salles convenables pour adorer Jéhovah

Ce n’est que depuis peu que les serviteurs de Jéhovah des Philippines possèdent des Salles du Royaume pour leur culte. Pendant des années, ils se sont réunis principalement dans des foyers. Certes, même au Ier siècle, les chrétiens se rassemblaient chez des particuliers (Rom. 16:5). Mais, devant l’accroissement des congrégations à l’époque moderne, il est devenu souhaitable de trouver des lieux pouvant accueillir davantage de personnes dans de bonnes conditions.

Voici le témoignage de David Ledbetter : “ C’était très difficile pour beaucoup en raison du manque de moyens. Même dans une agglomération comme le Grand Manille, une seule congrégation était propriétaire du terrain sur lequel était construite la Salle du Royaume. Partout ailleurs, les congrégations étaient propriétaires des salles, mais pas des terrains. ” Cette situation était due aux faibles salaires que touchaient les frères et sœurs.

En conséquence, ils s’arrangeaient comme ils le pouvaient. Ils offraient volontiers tout ce qu’ils avaient. Par exemple, Denton Hopkinson se souvient que, pendant une quarantaine d’années, Santos Capistrano, un frère de Manille, a mis à la disposition de la congrégation le premier étage de sa maison pour servir de Salle du Royaume. “ Après le décès de sa femme, ses enfants ont habité le rez-de-chaussée. La salle occupait une bonne partie de l’étage, et Santos avait simplement une petite chambre, avec une cuisine attenante. Cela pouvait sembler gênant pour lui, mais il était heureux ainsi. Voilà quel était l’état d’esprit des frères. ”

Par la suite, les congrégations ont pu acquérir des terrains sur lesquels elles ont construit leurs Salles du Royaume. Dans les années 80, la valeur du peso ayant augmenté, une hausse modeste des salaires a facilité les emprunts. Ainsi, quelques congrégations ont pu obtenir des prêts.

Puis le Collège central a pris une disposition pleine de sollicitude. Aux États-Unis et au Canada, il a annoncé la création d’un Fonds pour Salles du Royaume et, peu après, les Philippines ont bénéficié des offrandes destinées à la construction de lieux de réunion. Cette mesure a permis “ qu’il y ait égalisation ” et que des prêts soient accordés (2 Cor. 8:14, 15). Sa mise en place a été progressive et sa réussite a encouragé un nombre croissant de frères à faire le nécessaire afin d’avoir eux aussi une Salle du Royaume.

Quel changement cela a apporté ! En ce qui concerne les prêts pour les salles, le Béthel signale : “ En tout, il y a eu plus de 1 200 chantiers. Nul doute que l’effet a été considérable sur l’ensemble du pays. ” Au début une bonne partie des fonds venait de l’étranger, mais les frères philippins ont pu par la suite soutenir eux-​mêmes leur programme. À ce sujet, le Béthel rapporte : “ Depuis plusieurs années maintenant, le financement des projets provient entièrement des remboursements de prêts et des offrandes effectuées par les frères et sœurs du pays. Une preuve que, même dans les régions pauvres, il peut être avantageux de mettre les ressources en commun. ”

À présent, sur les 3 500 congrégations du pays, certaines possèdent déjà une Salle du Royaume, mais d’autres ont encore besoin d’un lieu de culte. Cependant, environ 500 d’entre elles comprennent moins de 15 proclamateurs et ne peuvent rembourser un prêt éventuel. C’est pourquoi on a récemment encouragé les congrégations à fusionner afin de remédier à la situation.

Des changements dans la façon de voir les horaires des réunions

Des congrégations, qu’elles aient ou non leur propre Salle du Royaume, se situent dans des régions isolées. Les frères et sœurs doivent faire deux, quatre heures de marche, ou même davantage, sur un terrain accidenté, pour parvenir au lieu de réunion. Dans de tels cas, il est difficile de se réunir plus d’une fois par semaine. La plupart de ces congrégations tenaient donc toutes leurs réunions le même jour, sauf l’étude de livre. Les frères et sœurs venaient, préparés pour quatre réunions, et ils apportaient leur déjeuner. De cette façon, ils ne devaient parcourir cette longue distance qu’une fois par semaine et s’acquittaient des autres activités, telle la prédication, les autres jours, près de chez eux.

Durant les années 80, des congrégations dans des endroits pas aussi éloignés ou même dans des villes ont commencé à prendre cette même habitude. Peut-être à cause des difficultés économiques, certains proclamateurs songeaient avant tout aux moyens d’économiser de l’argent. En regroupant leurs réunions, ils limitaient les déplacements et les dépenses. D’autres se souciaient à l’excès de l’aspect pratique et poursuivaient, les autres jours de la semaine, des objectifs personnels dans des domaines comme les études ou le travail, par exemple.

De plus en plus de congrégations se sont mises à tenir quatre réunions, parfois même cinq, le même jour ! Mais c’était s’éloigner de plus en plus de la façon de faire du peuple de Jéhovah dans le monde entier, qui consiste à répartir les réunions sur trois jours. Les frères avaient quelque peu perdu l’équilibre dans ce domaine. Cette question a été portée à l’attention du surveillant qui a effectué la visite de zone en 1991. Ce dernier a consulté le Collège central, qui a répondu : “ Nous ne pensons pas que ce soit une bonne habitude, sauf s’il s’agit d’une situation vraiment exceptionnelle. ” Cette réponse a été transmise aux congrégations, d’abord dans les villes, puis dans la campagne.

Le Collège central a souligné non seulement que les congrégations se conformeraient ainsi au programme établi pour le monde entier, mais qu’elles retireraient davantage de profit spirituel d’avoir des réunions séparées, plutôt que d’essayer de les comprimer en trois heures et demie ou quatre heures. Les enfants et les personnes intéressées par la vérité trouvaient d’ailleurs un tel programme difficile à suivre. Les anciens, quant à eux, donneraient des discours de meilleure qualité en se préparant pour une ou deux réunions, pas plus.

Comment les congrégations ont-​elles réagi à ce conseil ? Positivement, pour la grande majorité, puisqu’elles ont organisé rapidement des réunions en milieu de semaine. Aujourd’hui, à l’exception des congrégations très éloignées, la plupart ont un programme spirituel hebdomadaire plus équilibré.

Des Salles d’assemblées

Pendant longtemps, les circonscriptions ont utilisé des tribunes d’école, des gymnases, des champs de courses et d’autres lieux publics pour tenir leurs assemblées. Malgré quelques inconvénients, les frères et sœurs appréciaient ces moments de rencontres joyeuses.

Il n’a pas été plus facile d’obtenir des Salles d’assemblées qu’il ne l’avait été de se procurer des Salles du Royaume. Là encore, les contraintes économiques entraient en ligne de compte. Néanmoins, de nombreuses circonscriptions étaient désireuses d’avoir leur propre lieu de réunion. C’est ainsi que plusieurs Salles d’assemblées modestes ont vu le jour. Elles servent à une ou deux circonscriptions seulement, et non à un groupe de circonscriptions comme dans beaucoup de pays. Souvent, le terrain a été offert ou acheté à un prix raisonnable, de préférence dans des zones rurales. Puis les frères et sœurs ont mis en commun leurs offrandes et ont construit des structures simples, la plupart du temps sans murs, avec simplement un toit pour abriter les assistants, un sol en béton, une estrade et des places assises.

Jadis, dans le Grand Manille, même cela n’était pas possible, en raison des prix exorbitants des terrains et du coût de construction d’une structure adaptée à la ville. Les congrégations de l’agglomération ont constitué un fonds dans ce but, mais le montant économisé ne couvrait même pas le prix d’un terrain. Dans les années 70, 80 et durant une bonne partie des années 90, les assemblées du Grand Manille ont donc eu lieu dans des écoles, des tribunes, etc.

Pendant ce temps, les congrégations et les circonscriptions ne cessaient de se multiplier dans le Grand Manille, ce qui rendait le besoin d’une Salle d’assemblées plus pressant encore. Les recherches d’un terrain convenable ont commencé. Les congrégations ont été informées par courrier qu’elles avaient le privilège de soutenir financièrement ce projet. En 1992, environ six hectares de terrain ont été trouvés près du district de Lagro, dans le nord du Grand Manille.

Les congrégations locales ont participé au projet en envoyant des offrandes et des travailleurs bénévoles. Des serviteurs internationaux sont venus, de différents pays, pour apporter leur aide. L’un d’eux, Ross Pratt, un Néo-Zélandais, raconte : “ En mars 1997, nous avons reçu le feu vert de Brooklyn. Nous avons commencé par d’importants travaux de terrassement : 29 000 mètres cubes de terre ont été retirés pour préparer les fondations. Il y avait 50 à 60 travailleurs permanents. La Salle d’assemblées a été achevée en novembre 1998. ” Puis elle a été inaugurée. Capable d’accueillir 12 000 personnes, elle sert aussi pour les assemblées de district. Ses ouvertures latérales laissent entrer la brise tropicale pendant que l’auditoire écoute le programme. Seize circonscriptions du Grand Manille et de sa périphérie profitent régulièrement de programmes spirituels dans cette salle.

L’agrandissement du Béthel

L’augmentation du nombre de congrégations et de circonscriptions a entraîné une charge de travail plus importante pour le Béthel. En 1980, il y avait environ 60 000 proclamateurs. Moins de dix ans après, les Philippines ont rejoint les rangs des pays qui comptaient plus de 100 000 proclamateurs. Dans le même temps, la famille du Béthel est passée de 102 à 150 membres. Cependant, dès le début des années 80, les locaux sont devenus trop petits. Il fallait agrandir.

Le Collège central a donné des instructions pour trouver de nouveaux terrains. Felix Fajardo raconte : “ Nous sommes allés de maison en maison pour voir s’il y avait des terrains à vendre près du Béthel. Les propriétaires philippins et chinois ont dit qu’ils ne vendaient pas. Inflexible, l’un d’eux s’est exclamé : ‘ Nous, les Chinois, nous ne vendons pas. Nous achetons. Nous ne vendons jamais. ’ ” Apparemment, rien n’était disponible à proximité du Béthel.

Les recherches se sont poursuivies ailleurs. Si nécessaire, le Béthel déménagerait hors de la ville. Plusieurs terrains ont été trouvés dans les provinces voisines. Le Collège central s’est intéressé de près à une grande parcelle, non loin de San Pedro (Laguna), qu’un frère proposait à un prix raisonnable. L’autorisation d’achat a été accordée. On a prévu de construire des bureaux, un bâtiment d’habitation et une imprimerie sur ce terrain. Mais, à mesure que le temps passait, il a semblé que ce n’était pas la volonté de Jéhovah de transférer les activités là-bas. Il n’y avait pas d’installations téléphoniques, la route était mauvaise et l’insécurité y régnait. Manifestement, ce n’était pas le lieu indiqué pour un Béthel. On en a donc fait une ferme qui subviendrait aux besoins de la famille du Béthel. Toutefois, le problème initial du manque de place demeurait.

Les événements ont pris une tournure imprévue qui a semblé indiquer la direction de Jéhovah. Felix poursuit : “ Du jour au lendemain, notre voisin immédiat nous a dit : ‘ Nous vendons notre terrain, 1 000 mètres carrés. Mais c’est à vous que nous aimerions le vendre. ’ Le Collège central nous a donc dit de l’acheter. Nous pensions que c’était tout, mais lorsque nous avons soumis notre projet de construction, il nous a répondu : ‘ Peut-être pouvez-​vous trouver d’autres terrains. Il vous en faut un peu plus. ’

“ Juste après cela, un médecin et un avocat sont venus nous dire : ‘ Nous aimerions vous vendre nos terrains. ’ Mille mètres carrés de plus. Puis une femme qui possédait un hectare tout près de là a voulu le vendre, et à un prix très raisonnable. Cette fois-​ci, nous pensions avoir suffisamment de place. Mais le siège mondial nous a dit de nouveau : ‘ Cherchez encore. ’ ”

C’est alors qu’une aide inattendue s’est présentée. Le médecin et l’avocat qui nous avaient vendu leurs terrains ont fait le tour des autres voisins et les ont convaincus de vendre eux aussi. L’un après l’autre, les voisins ont fait une offre à la filiale. Lorsque, pour ainsi dire, tout a été acheté, un autre projet a été soumis au siège mondial. La même réponse a été fournie : “ Il vous en faut plus. ” Les frères, qui avaient épuisé toutes les possibilités dans les environs, se sont demandé où ils allaient s’adresser.

À cette époque précisément, les frères ont reçu un appel téléphonique au sujet du terrain de l’homme d’affaires qui avait dit : “ Les Chinois ne vendent pas. ” Voilà que ce terrain était à vendre ! “ Frère Leach et moi-​même avons découvert que personne d’autre n’était intéressé, explique Felix. Nous avons donc obtenu un prix très bas. On pouvait manifestement y voir la main de Jéhovah. ” Cela faisait un hectare de plus. Finalement, le Collège central a estimé qu’il y avait suffisamment de terrain pour envisager de construire.

Avec le temps et l’évolution de la situation, la ferme de San Pedro a perdu de son utilité. Il était plus avantageux pour le Béthel d’acheter la nourriture en gros que de la produire. On a donc décidé de vendre la ferme. En 1991, elle a trouvé un acquéreur. Le fruit de la vente a servi à financer la construction des nouveaux bâtiments de la filiale.

La construction du nouveau Béthel

Le terrain acquis par la filiale était trois fois plus grand que la parcelle initiale d’un hectare, achetée en 1947. Le Bureau d’ingénierie régional de la filiale des Témoins de Jéhovah au Japon a participé à l’élaboration des plans, et les travaux de préparation du terrain ont commencé en 1988. Quelques-uns des vieux bâtiments en bois ont dû être démolis. Les nouveaux locaux comprendraient un bâtiment d’habitation de dix étages et une grande imprimerie d’un étage. Une Salle du Royaume devait être également érigée sur le terrain.

Outre les diplômés de Guiléad affectés au chantier, près de 300 frères et sœurs, serviteurs et volontaires internationaux (selon la durée de leur séjour), sont venus de cinq pays différents pour aider au projet. Des voisins ont été étonnés de voir des étrangers à l’œuvre. Leur surprise a été encore plus grande lorsqu’ils ont su que la majorité étaient venus à leurs propres frais ! Les frères et sœurs locaux ont ajouté à cette unité internationale ambiante.

La direction de Jéhovah, manifeste lors de l’acquisition du terrain, s’est aussi fait sentir au cours de la construction. Par exemple, une seule société dans le pays fabriquait le type de toiture nécessaire aux bâtiments. Mais la commande du Béthel était la 301e sur la liste d’attente ! Les frères ont pris rendez-vous avec le vice-président de la société en personne et lui ont expliqué le caractère bénévole de leur œuvre. Après s’être concertés, les membres du conseil d’administration ont accédé à la requête des frères et placé leur commande en première position sur le planning de production. Heureusement, car après réception des matériaux, les ouvriers de cette entreprise se sont mis en grève.

Les centaines de participants au chantier ont manifesté un excellent état d’esprit. Chaque semaine, environ 600 volontaires venus de congrégations voisines ont prêté leur concours. D’ailleurs, ce sont eux qui ont réalisé le tiers du travail.

Des normes de construction élevées ont été respectées. Étant donné que les îles Philippines se situent dans une zone sismique, les dessinateurs avaient conçu le bâtiment de dix étages de telle façon qu’il puisse supporter de fortes secousses. Quelle différence entre la qualité de ces bâtiments et celle de leurs prédécesseurs, dont un remontait aux années 20 ! Les plus vieux ont été démolis, faisant place aux nouveaux.

Finalement, l’inauguration a eu lieu le 13 avril 1991. John Barr, membre du Collège central, a prononcé à cette occasion un discours devant un auditoire de 1 718 personnes. Des frères et sœurs servant Jéhovah depuis plus de 40 ans ont été invités au programme et l’ont écouté aux côtés de délégués venus d’une dizaine de pays différents. Le lendemain, 78 501 personnes ont bénéficié d’un programme spirituel constructif retransmis par liaison téléphonique en six endroits de l’archipel.

Des serviteurs internationaux philippins

La construction du Béthel a été l’occasion pour les serviteurs internationaux venus de l’étranger de transmettre leurs compétences aux frères philippins. Hubertus Hoefnagels, l’un d’eux, fait cette remarque : “ De nombreux frères locaux, pleins de zèle, ont pu appliquer ce qu’ils avaient appris. ” Ainsi, au terme du projet philippin, certains frères formés ont eu la possibilité de partir en tant que serviteurs internationaux afin de participer à la construction de Béthels dans d’autres pays, particulièrement dans le sud-est asiatique.

C’est le cas de Joel Moral, de la province de Quezon. Initialement, il est venu travailler sur le chantier du Béthel de Manille avec l’idée d’y rester une semaine. Mais comme on avait besoin de lui, on lui a demandé de demeurer plus longtemps. Bien que n’ayant pas une longue expérience du bâtiment, sa participation sur le chantier lui a permis d’acquérir rapidement des compétences auprès des serviteurs internationaux.

Bien avant la fin du chantier des Philippines, on a demandé de l’aide pour le nouveau Béthel de Thaïlande. “ Sans que je m’y attende, on m’a invité à aller en Thaïlande, raconte Joel. Mon expérience acquise aux Philippines a été une excellente préparation pour le service international. ” Il est resté plus d’un an sur le chantier de Thaïlande.

Joshua et Sara Espiritu se sont connus sur le chantier du Béthel des Philippines. Peu après l’inauguration, ils se sont mariés et se sont fixé l’objectif d’être serviteurs internationaux. Au bout de quelques mois, ils ont été invités à participer à des chantiers à l’étranger. Depuis, ils se sont dépensés dans trois pays asiatiques et deux pays africains. Voici ce que déclare Joshua à propos de son expérience aux Philippines : “ En travaillant aux côtés des frères étrangers nous avons acquis un certain savoir-faire. Nous avions dès lors une connaissance que nous pouvions partager. ” Lorsqu’ils étaient envoyés dans d’autres pays, ils disaient aux frères et sœurs : “ Nous ne serons pas toujours là. À l’avenir, c’est vous qui continuerez le travail. ” L’objectif de Joshua lorsqu’il se rend à l’étranger ? “ Nous n’y allons pas simplement pour travailler, explique-​t-​il, mais nous nous efforçons réellement de former les frères et sœurs. ”

Bien sûr, se déplacer à l’étranger exige une certaine souplesse. Jerry Ayura a été envoyé à plusieurs endroits, dont la Thaïlande, les Samoa occidentales et le Zimbabwe. “ J’ai appris que Jéhovah utilise des gens issus de toutes sortes de milieux, explique-​t-​il. Nous les aimons parce que Jéhovah les aime. ” Quelle joie pour les frères philippins de pouvoir contribuer à l’œuvre de Jéhovah à l’échelle mondiale !

L’agitation n’arrête pas l’œuvre

Faire de la joie de Jéhovah sa forteresse signifie lui être constamment fidèle, même dans les moments difficiles. Les serviteurs de Jéhovah des Philippines ont eu de nombreuses occasions de le démontrer.

Même si la loi martiale a cessé d’être en vigueur le 17 janvier 1981, les troubles se sont poursuivis tout au long des années 80. En février 1986, le gouvernement a été remplacé. Toutefois, le changement s’est déroulé de façon relativement calme, et même les congrégations situées là où la révolution du “ People’s Power ” (“ pouvoir du peuple ”) avait eu lieu ont continué à tenir leurs réunions et à prêcher. Lorsqu’ils passaient devant des défilés du “ People’s Power ”, les proclamateurs remarquaient que des prêtres et des religieuses se mêlaient à la foule et l’incitaient à l’action.

Rapidement, le nouveau gouvernement a opéré un certain nombre de changements, sans toutefois parvenir à calmer l’agitation. Les trois premières années ont vu échouer plusieurs tentatives de coups d’État, parfois sanglantes. Un jour, alors qu’ils travaillaient sur le chantier du Béthel, des frères et sœurs philippins et étrangers ont été surpris de voir, de l’autre côté de la ville, des déserteurs bombarder leur propre campement militaire. Bien que relativement brefs, ces combats illustraient la nécessité d’encourager certaines congrégations à se réunir dans des Salles du Royaume situées en lieu sûr.

Les affrontements entre les troupes gouvernementales et leurs opposants ont continué pendant de nombreuses années en certains endroits de Mindanao. Tout en poursuivant leur ministère, les frères et sœurs devaient être prudents et mettre leur confiance en Jéhovah. Renato Dungog, diplômé de l’École de formation ministérielle, aujourd’hui surveillant de circonscription, a œuvré dans une région déchirée par les luttes. Un jour qu’il attendait un bateau, un soldat lui a demandé où il allait.

“ Je suis surveillant itinérant Témoin de Jéhovah, lui a expliqué Renato. Je rends visite à mes frères deux fois par an pour les fortifier et prêcher avec eux. ”

“ Dieu doit être avec vous, lui a répondu le soldat, autrement vous seriez déjà mort. ” Ainsi, malgré l’agitation, les frères et sœurs continuent leur œuvre, confiants en Jéhovah, ce qui leur vaut d’être très respectés.

De nouveau devant les tribunaux pour la question du salut au drapeau

Les jeunes ont vu leur fidélité à Dieu mise à l’épreuve. Le 11 juin 1955, le président Ramon Magsaysay a approuvé et signé une loi (Republic Act No. 1265) obligeant tous les enfants des écoles publiques et privées à saluer le drapeau philippin. Les enfants de Témoins de Jéhovah ont réagi en leur âme et conscience, comme tous les jeunes Témoins du monde (Ex. 20:4, 5). Bien que respectant l’emblème de la nation, leur conscience ne leur permet pas d’accomplir devant un objet ce qu’ils considèrent comme un acte d’adoration religieuse. En 1959, lorsque les enfants de la famille Gerona, de Masbate, ont été renvoyés de l’école pour avoir refusé de saluer le drapeau, l’affaire a été portée devant la Cour suprême des Philippines. Toutefois, la cour n’a pas respecté la position religieuse des Témoins de Jéhovah. Elle a soutenu que le drapeau “ n’est pas une image ” et qu’il est “ totalement dépourvu de toute signification religieuse ”. La cour a donc pris sur elle-​même de statuer sur ce qui est religieux ou non.

Cela n’a évidemment rien changé aux croyances des Témoins de Jéhovah. Les frères et sœurs ont soutenu fermement les principes des Écritures. La décision de la cour a suscité des difficultés certes, mais on aurait pu redouter le pire.

La question du salut au drapeau ne s’est plus posée ensuite jusqu’à ce que la décision de la Cour suprême soit incorporée au Code administratif de 1987. Après cela, en 1990, des enfants de Témoins de Jéhovah de la région de Cebu ont été renvoyés de l’école. Un surveillant des écoles faisait appliquer cette règle de façon intransigeante. Les expulsions se sont multipliées.

Ces événements ont été médiatisés. Un comité des droits de l’homme s’est alors penché sur le cas de ces enfants à qui l’on refusait le droit à l’instruction. Le climat semblait différent de celui qui régnait en 1959. Le moment était-​il venu pour Jéhovah d’exposer cette question au grand jour ? Ernesto Morales, à l’époque ancien à Cebu, a fait cette remarque : “ Des rédacteurs en chef, des journalistes, des professeurs et d’autres personnalités nous ont tous encouragés à porter l’affaire devant le tribunal. ” Les services juridiques du siège national et du siège mondial des Témoins de Jéhovah ont été consultés. Ils ont décidé d’intenter une action en justice.

Toutefois, le tribunal régional, puis la cour d’appel ont rendu des décisions défavorables. Ils ont refusé d’aller à l’encontre de la décision de la Cour suprême concernant l’affaire Gerona, en 1959. La seule façon de résoudre le problème serait de porter à nouveau l’affaire devant la Cour suprême. Serait-​elle prête à entendre cette cause ? Réponse de la Cour : oui ! C’est Felino Ganal, un avocat Témoin, qui a introduit la requête devant la plus haute instance du pays. En quelques jours, la Cour suprême a ordonné que tous les enfants renvoyés soient réadmis dans les écoles en attendant qu’une décision soit rendue.

Les deux parties ont produit leurs arguments. Après un examen minutieux, la Cour suprême a cassé la décision de 1959 et confirmé le droit des enfants de Témoins de Jéhovah à s’abstenir de saluer le drapeau, de réciter le serment d’allégeance et de chanter l’hymne national. La cour a expliqué ainsi cette décision capitale : “ L’idée que l’on doive saluer le drapeau [...] sous peine [...] d’être renvoyé de l’école est étrangère à la conscience de la génération actuelle des Philippins, lesquels ont été bercés aux accents d’une Déclaration des droits qui garantit aux citoyens les droits à la libre expression et au libre exercice de leur religion. ” La cour a également statué que l’expulsion des Témoins de Jéhovah des écoles serait “ une violation de leur droit [...], garanti par la Constitution de 1987, à recevoir une instruction gratuite ”. Le Manila Chronicle a déclaré : “ La Cour suprême corrige une injustice faite aux Témoins de Jéhovah depuis 35 ans. ”

Les parties adverses ont demandé un réexamen du dossier mais, le 29 décembre 1995, le tribunal a rejeté la demande. La décision est donc maintenue. Quelle victoire pour le peuple de Jéhovah !

L’œuvre se poursuit en dépit des désastres

Ainsi que l’a mentionné le début de ce rapport, les Philippines sont souvent victimes de catastrophes naturelles. Considérons-​en quelques-unes, qui ont affecté les frères et sœurs.

Tremblements de terre : Comme il se trouve à la jonction de deux grandes plaques tectoniques, le pays est exposé aux séismes. D’après un spécialiste, au moins cinq secousses ont lieu chaque jour, sans compter toutes celles qui sont imperceptibles à l’homme. La plupart sont sans conséquences mais, de temps en temps, de graves séismes causent des ravages.

C’est un de ces séismes, suivi de fortes répliques, qui a frappé les environs de Cabanatuan, ville du centre de Luçon, le 16 juillet 1990, à 16 h 26. La province de Benguet a aussi été fortement touchée. Des écoles et des hôtels se sont effondrés, causant la mort de beaucoup de personnes.

À l’heure où la catastrophe s’est produite, Julio Tabios, surveillant de district dans la région, se rendait avec sa femme à l’assemblée de circonscription dans les montagnes de Benguet, et il se trouvait à bord du camion d’un frère qui transportait des légumes pour les vendre à Baguio. Après une suite de lacets, ils sont arrivés à une portion de route étroite où ils ont dû laisser passer un véhicule venant en sens inverse. C’est alors que des pierres se sont détachées de la montagne. Ils ont compris que c’était un fort tremblement de terre. “ Le frère a réussi à faire marche arrière jusqu’à un emplacement plus large, raconte Julio, après quoi une grosse pierre s’est écrasée, avec un bruit sourd, à l’endroit même que nous venions de quitter. Comme nous étions heureux d’avoir la vie sauve ! Peu après, il s’est produit une deuxième secousse, et nous avons vu un énorme rocher près de nous se balancer, comme s’il dansait. ” Des flancs de montagnes se sont intégralement affaissés.

Les éboulements ont bloqué la route. Le seul moyen de gagner le lieu de l’assemblée ou quelque autre endroit était de gravir les montagnes à pied. À la tombée de la nuit, un habitant de la région leur a aimablement permis de loger chez lui. Le lendemain, ils ont escaladé une haute montagne pour arriver à destination. En chemin, ils ont rencontré plusieurs frères et sœurs qui s’entraidaient pour se remettre des effets du tremblement de terre. Finalement, après avoir suivi des sentiers dangereux, ils sont arrivés à Naguey, où l’assemblée devait avoir lieu. Julio raconte : “ Que de larmes de joie parmi les frères, qui avaient perdu l’espoir de nous voir arriver ! Bien que très fatigués, nous avons été revigorés par l’accueil joyeux de nos frères et sœurs. ” Malgré le séisme, beaucoup avaient fait l’effort d’être présents, démontrant ainsi à quel point ils estiment les choses spirituelles.

Peut-être vous rappelez-​vous que les nouveaux bâtiments du Béthel étaient alors en construction. Le tremblement de terre a été le premier test du bâtiment d’habitation, alors que celui-ci n’était pas encore achevé. Les oscillations ont donné la nausée à certains de ses occupants, mais le bâtiment a réagi exactement comme il était censé le faire d’après sa conception, et il est sorti indemne de la forte secousse.

Inondations : Le climat tropical humide soumet la majeure partie du pays à des pluies abondantes. Certains endroits sont particulièrement sujets aux inondations. Leonardo Gameng, serviteur à plein temps depuis plus de 46 ans, se souvient : “ Nous avons dû faire trois kilomètres à pied avec de la boue jusqu’aux genoux. ” Juliana Angelo, quant à elle, est pionnière spéciale dans des territoires de la province de Pampanga qui sont exposés aux inondations. “ Pour rencontrer les personnes intéressées par le message du Royaume, raconte-​t-​elle, nous nous déplacions en pirogue. Le frère qui pagayait devait avoir une bonne vue pour éviter les arbres dans lesquels se dissimulent des serpents, prêts à se laisser tomber dans l’embarcation. ” Corazon Gallardo, pionnière spéciale depuis 1960, a passé de nombreuses années dans la même région. Parfois, lorsqu’aucun bateau n’était disponible, elle devait marcher dans l’eau, qui lui arrivait presque jusqu’aux épaules. Ces obstacles n’ont toutefois pas altéré son excellent état d’esprit. Elle a appris à s’adapter et à compter sur Jéhovah, sachant qu’il n’abandonne jamais ses fidèles.

Depuis que le lahar du Pinatubo a submergé de nombreuses plaines, les inondations de Pampanga se sont aggravées, car l’eau se répand maintenant ailleurs. Generoso Canlas, surveillant de circonscription, explique que l’eau les oblige souvent à prêcher en bottes ou même pieds nus. Cependant, ces inconvénients n’empêchent pas les frères et sœurs de persévérer dans leur service.

Là où des inondations particulièrement dévastatrices touchent des villes entières, les Témoins de Jéhovah s’entraident et secourent aussi les non-Témoins. Ainsi, à Davao del Norte (dans le sud des Philippines), les autorités municipales ont tellement apprécié l’aide reçue qu’elles ont adopté une résolution pour exprimer leur gratitude.

Volcans : Parmi les nombreux volcans de l’archipel, le Pinatubo est celui qui a fait parler de lui dans le monde entier. En juin 1991, il est entré en éruption, en un spectaculaire nuage de la forme d’un champignon. Il faisait noir en plein jour. Certains ont pensé que c’était le début d’Har-Maguédôn. Il a plu des cendres jusqu’au Cambodge, à l’ouest. En peu de temps, le Pinatubo a craché presque 7 milliards de mètres cubes de matériaux pyroclastiques. Des toits, des constructions entières même, se sont effondrés sous le poids des cendres. Une grande partie des matériaux libérés ont formé des lahars, immenses coulées de boue qui ont rasé des maisons et en ont englouti d’autres. Cendres et lahars ont gravement endommagé ou même détruit des Salles du Royaume et certaines habitations de nos frères et sœurs. Julius Aguilar, alors pionnier permanent à Tarlac, raconte : “ Notre maison a disparu sous les cendres. ” Sa famille et lui ont été contraints de déménager.

Pedro Oandasan était surveillant de circonscription dans la région. “ Les frères et sœurs n’ont jamais abandonné leur culte et leur service pour Jéhovah, déclare-​t-​il. L’assistance aux réunions était toujours supérieure à 100 %. De plus, le lahar n’a pas affaibli l’amour des frères et sœurs pour la prédication. Nous avons continué de prêcher aux évacués et nous sommes même allés dans les zones sinistrées. ”

De telles catastrophes sont autant d’occasions de concrétiser l’amour chrétien par des actes. Pendant et après l’éruption du Pinatubo, les frères et sœurs ont fait preuve d’amour en se prêtant assistance pour évacuer les lieux. Rapidement, la filiale a envoyé un camion rempli de riz qui, une fois déchargé, a servi à déplacer les frères et sœurs vivant dans les zones sinistrées. Lorsque les frères et sœurs de Manille ont eu connaissance du besoin existant, ils ont immédiatement envoyé des fonds et des vêtements. À Betis (Pampanga), de jeunes frères ont organisé une brigade de secours aux victimes. Parmi celles qu’ils ont aidées figurait une femme intéressée par la vérité et dont le mari y était opposé. Lorsque les frères ont aidé ce couple à reconstruire sa maison, le mari a été tellement impressionné que par la suite il est devenu Témoin !

Typhons : De toutes les intempéries qui frappent le pays, les typhons, ou cyclones tropicaux, sont les plus destructeurs. Chaque année, une vingtaine en moyenne s’abattent sur l’archipel. Ces tempêtes, d’une intensité variable, se caractérisent par des vents violents et des pluies diluviennes. Elles sont souvent suffisamment fortes pour détruire des constructions. De plus, en ravageant les récoltes, elles mettent en péril les moyens de subsistance des agriculteurs.

À maintes reprises, des Témoins ont eu leurs maisons et leurs récoltes dévastées. Ce qui est remarquable, c’est la façon dont les frères et sœurs surmontent ces épreuves et continuent d’avancer. Par endroits, les typhons sont si fréquents qu’ils en deviennent presque banals. Les frères ont appris à gérer ces événements, affrontant les problèmes de la vie au jour le jour (Mat. 6:34). Bien sûr, aux alentours, ceux qui savent leurs frères et sœurs dans le besoin envoient spontanément des vivres ou de l’argent pour les aider. Il arrive qu’après des tempêtes d’une violence exceptionnelle les surveillants itinérants fassent appel au siège national, qui s’empresse d’organiser des secours.

La livraison des publications bibliques

Aux Philippines, nation aux îles nombreuses, les congrégations ont toujours eu du mal à obtenir les publications à temps et en bon état. Pendant longtemps, on a eu recours aux services de la poste. Malgré cela, souvent La Tour de Garde et Le ministère du Royaume n’arrivaient pas à temps pour être étudiés lors des réunions.

Jehu Amolo, qui travaille au service des expéditions du Béthel, se souvient de ce qui a provoqué un changement : “ Hormis le problème du retard des livraisons, les tarifs postaux ont monté en flèche en 1997. ” À raison de 360 000 périodiques envoyés tous les quinze jours, cela représentait une somme considérable.

Les frères du siège national ont proposé au Collège central d’effectuer eux-​mêmes les livraisons. Après une étude consciencieuse, la suggestion a été approuvée. À Luçon, des camions partent directement du Béthel. Cependant, étant donné que d’autres régions se trouvent séparées par la mer, le Béthel fait appel à un service de livraison fiable qui expédie les périodiques et les publications par bateau vers différents points dans tout l’archipel. De là, ils sont acheminés par camion vers les dépôts. Lorsque les chauffeurs sont éloignés de leurs points de départ, les frères et sœurs les accueillent volontiers chez eux pour qu’ils se reposent bien avant de reprendre la route.

Outre l’avantage pécuniaire d’une telle organisation, les frères sont heureux de disposer des publications nécessaires à temps et en excellent état. Autre bienfait, ils se sentent plus proches de l’organisation, car ils côtoient régulièrement les frères du Béthel. Beaucoup sont encouragés rien qu’à voir passer le camion, parce qu’il arbore le nom “ Watch Tower ”.

Cette disposition a permis de rendre témoignage sous une forme différente. Par exemple, alors qu’il livrait des publications pendant des inondations à Bicol, dans le sud de Luçon, un camion a été arrêté par les eaux sur l’autoroute et a stationné devant la maison d’un frère. Quand la famille de ce dernier l’a aperçu, elle a dit aux chauffeurs : “ Entrez donc, venez manger et restez ici jusqu’à ce que l’eau redescende. ”

Quand des chauffeurs, qui n’étaient pas Témoins et qui ne savaient pas où manger ni dormir, ont vu cela, ils ont demandé aux chauffeurs du Béthel : “ Mais comment connaissez-​vous ces gens ? ”

Les frères ont répondu : “ Ce sont nos frères spirituels. ”

Les autres ont alors continué : “ Alors, c’est comme ça, chez les Témoins ! Même si vous venez de faire connaissance, vous vous faites déjà confiance. ”

Au-delà des frontières

À présent, jetons un bref coup d’œil à l’extérieur du pays et suivons les nombreux Philippins résidant à l’étranger. À l’apogée de l’Empire britannique, on disait que “ le soleil ne se couchait jamais ” sur cet empire. Aujourd’hui, certains disent : “ Le soleil ne se couche jamais sur les Philippines. ” Bien que le pays soit petit, il y a des Philippins dans le monde entier. Pour le travail ou pour d’autres raisons, ils partent à l’étranger par centaines de milliers. En quoi cela a-​t-​il permis à certains de découvrir la vérité biblique ? Quant à ceux qui étaient déjà Témoins, comment ont-​ils aidé leurs semblables ?

Ricardo Malicsi était consultant dans les aéroports. Comme son métier l’amenait à voyager beaucoup, lui et sa femme, qu’il emmenait avec lui, en profitaient pour répandre la bonne nouvelle dans les pays où les proclamateurs étaient rares, et dans ceux où la prédication était soumise à des restrictions. Ainsi, alors qu’ils étaient au Bangladesh, en Iran, en Ouganda et en Tanzanie, ils ont eu la joie d’aider plusieurs personnes à connaître Jéhovah. Ils ont même contribué à former des congrégations. Parmi les autres pays dans lesquels ils ont prêché, citons le Laos, le Myanmar et la Somalie. Ils se sont déplacés pendant 28 ans, jusqu’à ce que Ricardo soit à la retraite. Quel bonheur pour eux d’avoir autant participé à l’expansion de la bonne nouvelle dans des territoires reculés !

D’autres n’étaient pas Témoins lorsqu’ils sont partis travailler à l’étranger, mais c’est là qu’ils ont découvert la vérité. Rowena, catholique, s’est d’abord rendue au Moyen-Orient, où elle s’est mise à lire la Bible. Plus tard, elle a obtenu du travail à Hong-Kong, où des milliers de Philippins sont employés en tant que personnel de maison. “ Je priais Dieu tous les soirs de m’envoyer les bonnes personnes pour me guider vers Son Royaume ”, raconte-​t-​elle. Sa prière a été exaucée lorsque deux missionnaires, John et Carlina Porter, l’ont rencontrée et l’ont aidée à étudier la Bible. Rowena a écrit à la filiale des Philippines pour raconter son histoire et pour demander que quelqu’un rende visite à son mari, resté aux Philippines, et lui communique le message biblique.

Les immigrés philippins forment de vastes communautés dans un certain nombre d’autres pays. Au début des années 1900, Hawaii souffrait d’une pénurie d’ouvriers dans les plantations. De nombreux Philippins ont comblé ce besoin. Certains ont été parmi les premiers à accepter la vérité à Hawaii. Aujourd’hui, l’archipel compte dix congrégations iloko et une tagalog.

Des milliers de Philippins, dont beaucoup de Témoins, vivent aux États-Unis. La première congrégation philippine du pays a été formée en 1976, à Stockton (Californie). La filiale des États-Unis rapporte : “ La prédication a si bien progressé parmi les Philippins que, le 3 septembre 1996, la première circonscription philippine a été créée. ” Au début de l’année de service 2002, il y avait 37 congrégations philippines pour un total d’environ 2 500 proclamateurs œuvrant sous la direction de la filiale des États-Unis. Il existe également des congrégations ou des groupes tagalog en Alaska, en Allemagne, en Australie, en Autriche, au Canada, à Guam, en Italie et à Saipan.

Bien que vivant à l’étranger, ces Philippins ont besoin, pour recevoir la nourriture spirituelle, du travail de leurs frères restés dans le pays, car la traduction des publications dans les langues philippines s’effectue au Béthel de Manille. De plus, certains pays, tels que Guam, Hawaii et les États-Unis, tiennent des assemblées en iloko ou en tagalog. Toutes les matières présentées lors de ces assemblées, y compris les drames enregistrés, sont traduites aux Philippines.

La prédication à d’autres groupes linguistiques

La plupart des gens qui habitent l’archipel et qui parlent la langue locale reçoivent un témoignage complet. Ces dernières années, cependant, les proclamateurs ont fait le maximum pour toucher ceux qui n’avaient pas encore eu cette possibilité. — Rom. 15:20, 21.

Pendant longtemps, il y a eu peu de congrégations anglaises dans le pays. Bien que la majorité des Philippins aient des notions d’anglais, ils ne parlent pas couramment cette langue. Dans certaines régions toutefois, tenir des réunions en anglais est devenu une nécessité. C’est en effet ce que les frères ont constaté à la fin des années 60, près de la base aérienne de Clark (Pampanga), où des sœurs mariées à des militaires américains en garnison ne parlaient aucune langue philippine. Ils ont donc organisé des réunions en anglais, lesquelles ont procuré pendant des années de grands bienfaits aux Témoins de la région.

Le même besoin a surgi dans le Grand Manille. Une sœur américaine y habitait à la fin des années 70 et au début des années 80. Pacifico Pantas, ancien dans la congrégation tagalog dont elle faisait partie, raconte : “ J’avais de la peine pour elle, parce qu’elle assistait régulièrement aux réunions mais n’en retirait pas grand-chose. ” Peu après, d’autres Américains sont arrivés dans la congrégation. Il a été suggéré de prévoir le discours public et l’étude de La Tour de Garde en anglais. C’est ce qui a été fait ; frère Pantas s’en est occupé. Par la suite, d’autres réunions ont eu lieu en anglais également et des frères ont été invités à apporter leur aide. David et Josie Ledbetter, Béthélites, ont accepté cette invitation. Au fil des ans, il y a eu un bel accroissement et ce petit groupe anglophone a donné naissance à deux congrégations.

Nombreux sont ceux qui tirent profit des congrégations anglaises. Citons Monica, originaire de Californie, où elle avait commencé à étudier la Bible avec les Témoins de Jéhovah. Ses parents, de fervents catholiques farouchement opposés, ont décidé de l’envoyer aux Philippines, dans un environnement catholique. Sa mère l’a accompagnée à Manille, où elle l’a laissée chez sa grand-mère catholique, privée de son passeport. Même si Monica arrivait à trouver une congrégation, elle ne pourrait pas continuer d’étudier la Bible car, ayant grandi aux États-Unis, elle ne connaissait pas le tagalog. Toutefois, la sœur avec qui elle avait étudié en Californie a appelé Josie Ledbetter pour s’assurer que quelqu’un prenne contact avec Monica. Josie lui a fait savoir qu’il existait désormais une congrégation de langue anglaise. Exactement ce dont Monica avait besoin ! Josie relate : “ Pendant ses six mois d’‘ exil ’ aux Philippines, Monica s’est fait baptiser. Deux semaines après son baptême, sa mère lui a dit : ‘ Tiens, voilà ton passeport. Reviens. ’ Monica était déjà Témoin. ” Comme elle était reconnaissante que la congrégation anglaise ait existé !

Autre avantage, les frères ont eu accès à des endroits qui n’avaient jamais été parcourus. Par exemple, beaucoup d’anglophones habitent les quartiers riches du Grand Manille. L’anglais a donc permis d’ouvrir la porte donnant sur ces territoires.

Le territoire chinois a également fait l’objet d’efforts particuliers. Au milieu des années 70, une étude de livre en cette langue a été formée. Elle avait lieu dans le magasin de chaussures de Cristina Go. Mais le groupe était très petit et avait besoin de renfort.

Elizabeth Leach, arrivée aux Philippines après son mariage avec Raymond, un missionnaire, avait prêché à Hong-Kong pendant 16 ans. Sa connaissance du cantonais et son expérience dans l’enseignement de la vérité aux Chinois ont été mises à profit. Environ à la même époque, Esther Atanacio (aujourd’hui Esther So) a été l’une des deux pionnières spéciales affectées à ce territoire. Elle se souvient : “ Lorsque nous avons commencé à prêcher, les gens ne savaient pas qui étaient les Témoins de Jéhovah. ” Néanmoins, la communauté chinoise de Manille s’est progressivement familiarisée avec le nom et le peuple de Jéhovah.

Même si les pionniers connaissaient le cantonais, ils ont dû apprendre un autre dialecte, car le dialecte chinois majoritairement parlé à Manille est le fujian. Tching Tcheung Tchua, un jeune homme qui connaissait la vérité depuis peu, s’est joint au groupe. Comme il parlait ce dialecte, il a servi d’interprète pendant les premières réunions.

Petit à petit, le groupe a progressé, puis s’est transformé en une petite congrégation, en août 1984. Malgré quelques obstacles à surmonter, ceux qui soutiennent cette congrégation se font une joie de prêcher dans ce territoire qui n’avait auparavant jamais reçu de témoignage complet.

Même les sourds “ entendent ”

Avec le temps, il est apparu que la volonté de Jéhovah était qu’on s’intéresse à une langue et à un territoire encore différents, ceux des sourds. Jusqu’au début des années 90, pour ainsi dire aucune disposition n’avait été prise pour aider les sourds du pays à connaître Jéhovah. Parmi les rares sourds et muets qui fréquentaient les congrégations, il y avait des cas exceptionnels. Par exemple, Manuel Runio, dont la mère était Témoin, avait connu la vérité biblique grâce à une sœur qui avait étudié avec lui au moyen de longues heures d’écriture. Il s’est fait baptiser en 1976. Sur l’île de Cebu, Lorna et Luz, des jumelles sourdes, ont découvert le message biblique grâce à leur oncle aveugle. Comment un pionnier aveugle a-​t-​il pu enseigner des personnes sourdes ? Il se faisait aider de sa cousine et utilisait des illustrations. De plus, sa cousine traduisait ce qu’il disait dans des signes que les jumelles pouvaient comprendre, car elles n’avaient jamais vraiment étudié la langue des signes. Elles se sont fait baptiser toutes les deux en 1985. Des cas comme ceux-là restent cependant rarissimes.

Plusieurs événements ont conduit à l’ouverture de ce territoire. Alors que Dean et Karen Jacek étaient en formation à Brooklyn, en 1993, les frères du service de la traduction ont demandé ce qui était fait pour aider les sourds philippins. Une jeune sœur des Philippines s’était inscrite à un cours de langue des signes dans l’intention de communiquer avec une amie sourde, membre d’une famille de Témoins. Quant à Liza Presnillo et à ses compagnes pionnières qui vivaient à Navotas, dans le Grand Manille, où elles rencontraient des sourds-muets sans pouvoir communiquer avec eux, elles envisageaient d’étudier leur langue afin de leur transmettre le message du Royaume.

Le Béthel a appris qu’Ana Liza Acebedo, pionnière permanente à Manille, travaillait dans une école pour les sourds et faisait partie des rares Témoins à posséder une connaissance approfondie de la langue des signes. On lui a demandé si elle était disposée à l’enseigner à des Béthélites.

Elle a répondu par l’affirmative. Elle s’était souvent demandé comment toutes les personnes sourdes pourraient recevoir le témoignage. Un cours a été organisé pour des Béthélites et des pionniers permanents de l’endroit. Les sœurs de Navotas, quant à elles, ont poursuivi le cours auquel elles s’étaient déjà inscrites.

Les choses ont alors évolué très rapidement. En six mois, les réunions étaient interprétées en langue des signes dans trois congrégations du Grand Manille. En 1994, les discours prononcés aux assemblées de circonscription et de district ont été interprétés pour la première fois. Un des principaux objectifs a été d’aider les enfants sourds de parents Témoins. Plusieurs ont été parmi les premiers sourds à se faire baptiser. Manuel Runio, qui pendant des années a assisté fidèlement aux réunions sans interprétation, a été heureux de bénéficier de ces nouvelles dispositions.

D’autres régions du pays n’ont pas tardé à réclamer de l’aide. Liza Presnillo, accompagnée d’une autre pionnière, a été envoyée comme pionnière spéciale temporaire à Olongapo, pour prêcher aux sourds. Cela a été utile pour beaucoup. En 2002, on recensait des groupes en langue des signes dans 20 communes à l’extérieur de Manille. En avril 1999, la formation de la congrégation en langue des signes du Grand Manille, la première dans le pays, a marqué un jalon dans la progression de cette activité. Joel Acebes, un Béthélite ayant assisté aux premiers cours de langue des signes et qui est aujourd’hui ancien dans cette congrégation, déclare : “ Nous sommes heureux d’être utilisés par Jéhovah dans cette œuvre si importante. ” Effectivement, même les sourds “ entendent ” le message du Royaume. Il est extrêmement réjouissant de constater les progrès réalisés dans ce territoire autrefois vierge.

Un agrandissement des installations s’impose

Avec l’ouverture de nouveaux territoires dans les années 90 et le travail qui s’effectuait en profondeur dans les plus anciens, le nombre de proclamateurs et de personnes réceptives à la vérité a augmenté régulièrement. Les besoins en périodiques se sont accrus, et davantage de livres et de brochures ont été traduits dans les langues philippines. La taille de la famille du Béthel s’en est trouvée considérablement augmentée : il fallait réaliser les travaux d’impression, de traduction, de correction et pourvoir à d’autres services répondant aux besoins des frères et sœurs ainsi qu’à ceux des congrégations. Peu après son achèvement en 1991, le nouveau bâtiment d’habitation était déjà complet. Il avait été conçu pour 250 personnes. Or, en 1999, la famille du Béthel comptait 350 membres.

Sur le terrain de la filiale, il y avait encore de la place pour construire. Par conséquent, le Collège central a approuvé le projet d’aménagement d’un autre bâtiment d’habitation, très ressemblant à celui qui avait été achevé en 1991. Les travaux ont débuté en 1999 et se sont terminés fin 2001. Ce bâtiment double presque la capacité de logement sur le site. De plus, il peut accueillir les bureaux supplémentaires qui faisaient cruellement défaut pour faire face aux besoins de l’œuvre en pleine expansion. Les nouvelles installations comprennent également une buanderie plus spacieuse, une salle de classe pour l’École de formation ministérielle et une bibliothèque plus moderne. Des volontaires philippins qualifiés et des serviteurs internationaux ont fait temporairement partie de la famille du Béthel pour réaliser ce travail. Une fois le nouveau bâtiment terminé, ils sont restés pour rénover celui de 1991. De tels projets de construction représentent un travail considérable, mais c’est dans un but bien précis : disposer d’installations qui facilitent la diffusion des vérités vivifiantes de la Bible.

L’École de formation ministérielle comble un besoin

Lors de la création, en 1987, aux États-Unis, de l’École de formation ministérielle, beaucoup de frères philippins se sont demandé s’il leur serait jamais possible de bénéficier de ce cours. Ils ont eu la réponse en 1993 quand on a annoncé que le cours serait donné aux Philippines l’année suivante. Il compléterait la formation de frères qualifiés qui, étant anciens ou assistants ministériels, avaient une certaine expérience en matière d’organisation. Des centaines de frères ont alors rempli une demande.

Deux surveillants itinérants et un missionnaire ont été formés pour être instructeurs. La première classe a débuté en janvier 1994. Les frères qui en faisaient partie sont devenus plus compétents pour servir les frères et sœurs des congrégations. Une congrégation a écrit ce qui suit au sujet d’un de ses membres, diplômé de l’école : “ Maintenant, après avoir fait l’école, il y a une nette différence dans sa façon de présenter ses participations aux réunions. ”

De nombreux élèves ont consenti des sacrifices matériels pour pouvoir tirer profit de cette formation spirituelle. Ronald Moleño, chimiste, a reçu une invitation au cours en même temps qu’une offre d’emploi qui lui garantissait, entre autres avantages, un salaire élevé, un logement et une assurance. Il a réfléchi à ces deux options et a choisi la plus spirituelle. Il a été diplômé de la 18classe et a poursuivi son service en tant que pionnier. Récemment, il a été invité à être missionnaire en Papouasie-Nouvelle-Guinée.

Après avoir assisté aux cours de la première classe, Wilson Tepait a été obligé de faire un choix. Il était enseignant, ce qui était un bon emploi, mais on l’invitait maintenant à devenir pionnier spécial là où on avait grand besoin de proclamateurs. Il raconte : “ J’aimais enseigner, mais je savais aussi que les intérêts du Royaume devaient avoir la priorité dans ma vie. ” Il a accepté le privilège d’être pionnier spécial et a constaté la bénédiction de Jéhovah dans son service. Il est actuellement surveillant de district dans le sud des Philippines.

La plupart de ceux qui assistent au cours sont philippins. Mais le Collège central a pris des dispositions pour que des élèves viennent d’autres pays asiatiques, comme le Cambodge, Hong-Kong, l’Indonésie, la Malaisie, le Népal, Sri Lanka et la Thaïlande. Certains sont originaires de pays où l’œuvre des Témoins de Jéhovah est sous restrictions. Pour eux, la formation en groupe a été une expérience très constructive. Anibal Zamora, un instructeur, déclare : “ Les élèves venant de pays sous restrictions racontent comment ils mettent leur confiance en Jéhovah en quelque situation que ce soit. Cela fortifie leurs compagnons des Philippines. ” À leur tour, les élèves étrangers apprennent comment des frères philippins d’humble condition servent Jéhovah dans des circonstances adverses.

“ J’en garde des souvenirs inoubliables, a déclaré Nidhu David, un élève sri lankais. Deux mois de formation par Jéhovah Dieu. C’était fantastique ! ”

Les locaux de l’école se situent au Béthel même. Non seulement les élèves bénéficient du programme préparé à leur intention, mais ils voient aussi de leurs propres yeux comment les activités sont organisées au Béthel. Ils côtoient des frères et sœurs spirituels qui constituent d’excellents exemples de foi. En outre, les frères des pays pauvres en proclamateurs ou sous restrictions pour l’activité chrétienne peuvent observer l’organisation sur une plus grande échelle.

À ce jour, il y a eu 922 diplômés issus de 35 classes. Sur le nombre des élèves philippins, 75 sont actuellement surveillants itinérants et beaucoup d’autres surveillants de circonscription suppléants dans les 193 circonscriptions de l’archipel. Six sont Béthélites, et dix missionnaires en Papouasie-Nouvelle-Guinée et en Micronésie. Des centaines sont pionniers permanents dans leur territoire d’origine ou dans des territoires ayant besoin de proclamateurs. Depuis la première classe, il y a huit ans seulement, plus de 65 000 personnes se sont fait baptiser dans le pays. Au vu de l’excellent esprit pionnier qui règne dans les congrégations et de l’accroissement sensible qui en résulte généralement, on ne peut s’empêcher de penser que ces frères ont appliqué ce qu’ils ont appris à cette école et que cela contribue à l’avancement de l’œuvre.

Les progrès de l’œuvre

Une œuvre incroyable s’accomplit dans toutes ces îles : des frères zélés, regroupés en près de 3 500 congrégations, proclament activement la bonne nouvelle relative au meilleur gouvernement imaginable, le Royaume de Dieu.

Les rapports récents sont très encourageants. Au cours de chacun des sept derniers mois de l’année de service 2002, un nouveau maximum de proclamateurs a été atteint. En août, 142 124 personnes ont proclamé le message du Royaume. Le nom et le dessein de Jéhovah sont communiqués aux habitants de nombreuses îles. Les serviteurs de Jéhovah y réalisent une œuvre semblable à celle prédite en Isaïe 24:15 : ‘ Ils glorifient le nom de Jéhovah dans les îles de la mer. ’

Parmi ces prédicateurs zélés figurent des milliers de pionniers permanents. En 1950, ils n’étaient que 307, mais à la fin du mois d’avril 2002, leur nombre s’élevait à 21 793. Avec les 386 pionniers spéciaux et les 15 458 pionniers auxiliaires de ce mois-​là, le total des pionniers a été de 37 637, soit 27 % des proclamateurs. Beaucoup d’autres ont franchi le pas et sont devenus serviteurs de Dieu à plein temps. En effet, au cours de l’année de service 2002, 5 638 demandes pour le service de pionnier permanent ont été acceptées.

Tout cela produit d’excellents fruits. Des milliers de personnes continuent à réagir favorablement. En mars 2002, on a compté 430 010 assistants au Mémorial. Près de 100 000 études bibliques sont dirigées chaque mois. Durant l’année de service 2002, 6 892 nouveaux disciples se sont fait baptiser. En 1948, il n’y avait qu’un Témoin pour 5 359 habitants. Aujourd’hui, la proportion est de un pour 549. Tant que Jéhovah en laissera encore l’occasion, on peut s’attendre à ce que des milliers d’autres personnes se joignent aux adorateurs de Jéhovah dans ces îles de la mer.

Déterminés à continuer

Lors de la visite de Charles Russell, en 1912, quelques graines de vérité avaient été jetées sur le sol philippin. Lentement mais sûrement, ces graines ont germé et poussé. Elles ont porté de bons fruits quand quelques personnes ont pris position pour la vérité ‘ en époque favorable et en époque difficile ’. (2 Tim. 4:2.) Particulièrement depuis la Seconde Guerre mondiale, l’accroissement s’est accéléré jusqu’à nos jours, où l’on compte des dizaines de milliers d’adorateurs de Jéhovah, qui s’emploient joyeusement à honorer le nom de Dieu aux côtés des quelque six millions de personnes composant la congrégation mondiale du peuple de Jéhovah.

Comme ce rapport l’a montré, l’œuvre n’a pas été exempte d’entraves. Malgré la beauté du pays, il a fallu aux prédicateurs du Royaume un courage à toute épreuve pour rencontrer les habitants des nombreuses îles. Certains ont accédé à des îlots reculés en bravant des mers démontées. Beaucoup sont partis à la recherche de “ brebis ” à travers la végétation dense des sommets montagneux. Même si les îles Philippines ont eu plus que leur compte de malheurs (tremblements de terre, inondations, typhons et éruptions volcaniques), les Témoins fidèles de Jéhovah n’ont pas pour autant interrompu leur activité.

Ils ressemblent aux Israélites qui se trouvaient dans un pays reconstruit pour rétablir le vrai culte. Même si tout semblait se liguer contre eux, la joie de Jéhovah était leur forteresse. Pareillement aujourd’hui, les Témoins de Jéhovah font preuve d’une ténacité et d’une confiance en Dieu remarquables. Ils savent que Jéhovah est avec eux et ils croient ce que déclare Psaume 121:7 : “ Jéhovah lui-​même te gardera de tout malheur. Il gardera ton âme. ” Avec le soutien de Jéhovah, ils ont le vif désir d’aider le plus grand nombre possible de leurs contemporains avant la fin de ce système de choses. Plus tard, ils espèrent enseigner des millions de ressuscités sur toute la terre, y compris dans ces 7 100 îles. Alors, la beauté paradisiaque de ce pays rayonnera, à la louange de son Créateur.

En attendant, les Témoins de Jéhovah sont déterminés à avancer, pleinement confiants que Jéhovah bénit leur œuvre. Ils s’efforcent d’harmoniser leur vie avec ces paroles du prophète de Dieu : “ Qu’on attribue la gloire à Jéhovah, et que dans les îles on publie sa louange. ” — Is. 42:12.

[Entrefilet, page 232]

“ Dieu doit être avec vous, autrement vous seriez déjà mort. ”

[Encadré, page 153]

Les premières graines de vérité sont semées

En 1912, Charles Russell et quelques compagnons se sont rendus aux Philippines. Quoiqu’ils aient été les premiers à représenter officiellement le siège mondial de Brooklyn dans l’archipel, des rapports indiquent que deux autres Étudiants de la Bible étaient déjà présents et aidaient autrui à apprendre la vérité biblique. Louise Bell, une Américaine, écrit :

“ En 1908, mon mari et moi avons émigré comme enseignants aux Philippines. Nous étions les seuls Américains dans la ville de Sibalom. Nous commandions à Brooklyn des tracts bibliques par centaines de kilos. Ils étaient expédiés de New York à San Francisco, puis à Manille en traversant le Pacifique, et enfin à Sibalom, grâce à un bateau qui faisait la navette entre les îles.

“ Nous distribuions ces tracts et nous parlions aux autochtones en fonction du temps et des occasions. Nous ne comptions ni les heures ni les publications distribuées. Bien que catholiques, les gens nous écoutaient volontiers. Nous étions professeurs dans le domaine médical, mais nous étions surtout messagers de la bonne nouvelle.

“ Nous voyagions à pied ou à cheval sur des routes accidentées. Il nous arrivait de dormir sur des sols en bambou tressé et de manger du poisson et du riz dans un plat commun.

“ Lorsque le pasteur Russell est venu à Manille en 1912, nous lui avons envoyé un télégramme. ”

Sœur Bell a assisté au discours ayant pour thème “ Où sont les morts ? ”, prononcé par frère Russell au Grand Opéra de Manille.

[Encadré, page 156]

Données générales

Le pays : Quelque 7 100 îles couvrant une surface de 300 000 kilomètres carrés s’étendent sur 1 850 kilomètres du nord au sud et sur 1 125 kilomètres d’est en ouest. Elles sont de taille très variable : la plus grande dépasse légèrement en superficie le Portugal, et la plus petite disparaît à marée haute.

La population : Elle est majoritairement d’ascendance malaise, bien que certains habitants aient des origines chinoises, espagnoles ou américaines.

Les langues : Sur les nombreuses langues parlées aux Philippines, le bicol, le cebuano, l’hiligaynon, l’iloko, le pangasinan, le samar-leyte et le tagalog sont parmi les plus répandues. On considère l’anglais et le pilipino comme les langues officielles. Le pilipino dérive principalement du tagalog.

Les sources de revenus : Elles sont très variées dans les villes, mais dans les zones rurales ce sont surtout l’agriculture et la pêche. Les principales cultures vivrières sont le riz, la canne à sucre, la banane, la noix de coco et l’ananas.

L’alimentation : En général, on sert du riz à tous les repas. Le poisson et les fruits de mer sont très courants, ainsi que les fruits et légumes qui poussent sous les tropiques.

Le climat : Le pays bénéficie d’un climat tropical, avec des températures relativement constantes d’une île à l’autre. L’ensemble du pays est abondamment arrosé par les pluies.

[Encadré/Illustration, pages 161, 162]

Entretien avec Hilarion Amores

Naissance : 1920.

Baptême : 1943.

Parcours : A connu la vérité sous l’occupation japonaise pendant la Seconde Guerre mondiale. À l’époque, il y avait peu de Témoins dans le pays.

Je me suis fait baptiser pendant la guerre, lorsque les frères pouvaient encore prêcher de maison en maison. Nous devions toutefois être prudents, car on portait un regard soupçonneux sur nos activités. Par la suite, nous avons dû fuir à la campagne, mais nous sommes retournés à Manille en 1945.

À l’époque, j’avais le privilège de traduire La Tour de Garde en tagalog. Ce travail m’occupait parfois jusqu’à deux heures du matin. Le texte traduit était ronéotypé et envoyé aux groupes de Témoins. Il fallait de l’abnégation, mais nous étions très heureux de voir que les besoins spirituels des frères étaient comblés.

Au fil des années passées dans la vérité, j’ai constaté combien Jéhovah est miséricordieux. Il prend vraiment soin de son peuple, à la fois spirituellement et matériellement. Je me souviens des secours envoyés aux Philippines après la guerre. C’est incroyable la quantité de pantalons, de chaussures et d’autres vêtements qu’on a reçus ! Beaucoup de pionniers ont redoublé d’efforts dans leur service à plein temps, tellement ils étaient reconnaissants. Jéhovah se soucie vraiment de son peuple en pourvoyant à tous ses besoins.

[Encadré/Illustration, pages 173, 174]

Un missionnaire bien-aimé

Neal Callaway

Naissance : 1926.

Baptême : 1941.

Parcours : Élevé dans une famille de Témoins, il commence son ministère à plein temps à la fin de ses études secondaires. Invité à la 12classe de l’École de Guiléad ; affecté aux Philippines, où il a été surveillant itinérant.

Neal Callaway était un missionnaire zélé, que les frères aimaient beaucoup. Comme il prenait vraiment à cœur l’œuvre du Royaume et qu’il avait un caractère jovial, il s’est dépensé aux quatre coins de l’archipel. Voici ses impressions sur le service itinérant :

“ Parfois, nous marchions deux heures durant dans les collines pour atteindre notre territoire, et nous chantions des cantiques. Avec un groupe de 15 à 20 personnes, nous parcourions les sentiers en file indienne tout en chantant ; j’étais vraiment heureux d’avoir accepté ce service à l’étranger.

“ Porter la Parole de Dieu aux habitants des petites maisons des zones rurales, voir ces gens humbles assis par terre, attentifs au moindre mot, et plus tard les rencontrer à la Salle du Royaume lors d’une visite suivante : tout cela m’a incité à me dépenser encore plus pour parler aux autres du Royaume de Dieu. ”

Neal a épousé Nenita, une sœur de Mindoro. Ensemble, ils ont servi Jéhovah fidèlement jusqu’à la mort de Neal en 1985. Les frères philippins parlent encore de lui avec tendresse. L’un d’eux a dit : “ Frère Callaway était un homme bon qui s’entendait bien avec les frères et sœurs. Il savait s’adapter à toutes les situations *. ”

[Note de l’encadré]

^ § 342 La biographie de frère Callaway est parue dans “ La Tour de Garde ” du 1er juillet 1972.

[Encadré/Illustration, page 177]

Entretien avec Inelda Salvador

Naissance : 1931.

Baptême : 1949.

Parcours : Envoyée, en mars 1967, missionnaire en Thaïlande.

Quand j’ai appris que j’étais nommée missionnaire en Thaïlande, ma réaction a été mitigée. J’étais heureuse, mais un peu inquiète, et les questions se bousculaient dans ma tête.

Je suis arrivée ici le 30 mars 1967. La langue me paraissait bizarre. C’est une langue tonale, avec des tons bas, hauts, graves, ascendants et aigus. J’ai eu des difficultés à l’apprendre, mais les frères autochtones et étrangers m’ont aidée avec amour.

De 1967 à 1987, j’ai vécu à Sukhumwit. Puis on m’a affectée à une autre congrégation. J’ai eu du mal à quitter des frères et sœurs avec lesquels j’avais collaboré pendant 20 ans. C’était mon sentiment en déménageant à Thon Buri. En réalité, tout se passait alors dans ma tête. En 1999, après 12 ans d’activité à Thon Buri, je suis retournée à Sukhumwit. Des missionnaires ont dit que c’était comme si je rentrais à la maison. Mais en ce qui me concerne, maintenant, quelle que soit la congrégation où l’on m’envoie, je me sens chez moi.

[Encadré/Illustration, page 178]

Souvenirs de l’apprentissage d’une langue

Benito et Elizabeth Gundayao

Parcours : Benito, accompagné de sa femme Elizabeth, a été surveillant de circonscription aux Philippines. En 1980, ils ont été nommés missionnaires à Hong-Kong. Ils ont aidé 53 personnes à connaître la vérité.

Apprendre le cantonais a mis à rude épreuve ceux d’entre nous qui n’avaient aucune notion de la langue chinoise. Il a fallu fournir des efforts soutenus, être persévérants et humbles.

Un jour, j’ai voulu dire : “ Je vais au marché. ” En cantonais, cela s’est transformé en : “ Je vais à la fiente de poulets. ” Une autre fois, en prédication, ma femme s’est exclamée, tout enthousiaste : “ Ah, je la connais ! ” en parlant d’une sœur que connaissait la maîtresse de maison. Mais en réalité, elle a dit : “ Ah, je la mange ! ” Quel choc pour son interlocutrice ! Nous avons d’excellents souvenirs de notre activité dans le territoire de langue chinoise.

[Encadré/Illustration, pages 181, 182]

Entretien avec Lydia Pamplona

Naissance : 1944.

Baptême : 1954.

Parcours : A été invitée à servir en Papouasie-Nouvelle-Guinée en 1980, après avoir été pionnière spéciale aux Philippines. A aidé plus de 84 personnes à connaître la vérité.

Quand j’ai reçu mon affectation, j’ai été très émue, car cela faisait longtemps que j’avais le désir de servir là où il y a grand besoin de prédicateurs. En même temps, j’appréhendais de quitter ma famille parce que c’était la première fois. Je ne savais pas grand-chose de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, et le peu que j’en avais entendu dire me faisait peur. Maman m’a encouragée ainsi : “ Jéhovah prend soin de nous partout où nous faisons sa volonté. ” J’ai donc écrit pour dire que j’acceptais.

À mon arrivée, les frères ont été très gentils, et j’ai trouvé les gens amicaux. Chaque mois, je distribuais une grande quantité de livres et de périodiques, plus que je n’en avais jamais laissé aux Philippines. Mais la langue et les coutumes étaient très différentes des miennes. Je me disais : “ Bon, je vais juste prêcher ici quelques années, puis je rentrerai à la maison et je serai de nouveau pionnière avec maman ! ”

En fait, après avoir appris deux des langues principales et adopté certaines coutumes locales, j’ai fait plus ample connaissance avec les gens. Depuis plus de 20 ans que je suis ici, j’ai eu le bonheur d’enseigner la vérité à bon nombre de personnes et d’apprendre à certaines à lire et à écrire pour qu’elles puissent bien étudier et prendre ainsi la vérité à cœur. En raison de toutes ces bénédictions, et de bien d’autres, je me sens maintenant chez moi dans ce pays. Si Jéhovah le veut, je serai heureuse d’être utilisée à son service, jusqu’à ce qu’il déclare l’œuvre achevée ou jusqu’à ce que je termine mes jours ici.

[Encadré/Illustration, pages 191, 192]

Entretien avec Filemon Damaso

Naissance : 1932.

Baptême : 1951.

Parcours : Il a entrepris le service à plein temps en 1953, puis s’est marié et a commencé le service de la circonscription. Il a élevé des enfants et poursuivi son ministère à plein temps en tant que pionnier spécial avec sa femme. Jusqu’à ce jour, il a reçu plusieurs affectations dans les Visayas et à Mindanao.

Dans les années 60, des épreuves pénibles ont entravé notre service à plein temps : nous manquions de nourriture, car les rats anéantissaient les récoltes de maïs et de riz ; nos vêtements et nos chaussures étaient tellement usés que nous ne pouvions plus aller prêcher dans les villes.

Alors nous allions dans les champs, dans les montagnes et dans les quartiers (barrios) éloignés, souvent pieds nus. Faute de vêtements convenables, j’ai failli ne pas donner de discours à une assemblée de district. Cependant, le surveillant de district, frère Bernardino, a eu la bonté de me prêter sa chemise, et j’ai pu ainsi prononcer mon discours. C’est vrai, bien des gens étaient plus démunis que nous. Mais Jéhovah nous a bénis pour notre détermination à persévérer.

En 1982, notre neutralité nous a valu des épreuves. À Mindanao, la rébellion contre le gouvernement battait son plein. Comme je dirigeais des études bibliques avec des personnes considérées comme les chefs des rebelles, les soldats du gouvernement m’ont qualifié de “ professeur ” des gauchistes. Néanmoins, un représentant du gouvernement a expliqué le caractère exclusivement biblique, et non politique, de notre enseignement.

En même temps, les rebelles me regardaient de travers car, lorsque j’allais prêcher, je m’adressais d’abord au commissaire de police du quartier et au commandant du détachement militaire. Mais ils me laissaient tranquille, étant donné qu’un de leurs représentants avec qui j’étudiais prenait notre défense.

Pendant des décennies, Jéhovah nous a aidés à survivre, malgré les épreuves et les difficultés. Nous lui rendons grâces pour sa miséricorde et sa protection ! — Prov. 18:10 ; 29:25.

[Encadré/Illustration, pages 217, 218]

Entretien avec Pacifico Pantas

Naissance : 1926.

Baptême : 1946.

Parcours : Diplômé de la 16classe de Guiléad, en 1951. Est aujourd’hui ancien à Quezon City.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, nous avions des voisins Témoins de Jéhovah dans la province de Laguna. Ils m’ont invité à puiser dans leur bibliothèque. Ils avaient de bons livres : Création, Justification, Réconciliation, Religion, Ennemis, Enfants et bien d’autres. Quand les Japonais ont incendié notre ville, nous avons été séparés des Témoins, mais je les ai retrouvés un peu plus d’un an après, à Manille. Je me suis mis à assister à leurs réunions puis, après m’être fait baptiser, je me suis joint à un groupe de pionniers. Notre territoire comprenait toute la province de Tayabas, rebaptisée depuis Quezon. Nous prêchions de ville en ville et nous dormions dans des bus vides, chez des sympathisants, et à d’autres endroits.

Lorsque nous avons gagné Mauban, un groupe de guérilleros a fait une incursion dans la ville. Nous étions endormis au premier étage du bâtiment de la mairie. Le vacarme nous a réveillés. Apparemment, les policiers au rez-de-chaussée avaient été pris au piège. Nous les avons entendus jeter leurs armes à terre.

Les soldats ont gravi les escaliers avec fracas. L’un d’eux a braqué une lampe électrique sur nous et a demandé qui nous étions. Nous avons fait semblant d’être endormis. Il a réitéré sa question, en ajoutant : “ N’êtes-​vous pas des espions de la gendarmerie philippine ?

— Non, monsieur, avons-​nous répondu.

— Mais vous êtes habillés de kaki. ”

Nous lui avons expliqué que nos vêtements étaient des dons et que nos chaussures faisaient partie des secours envoyés par nos frères américains.

“ Très bien, je prendrai les chaussures ”, s’est exclamé le commandant. Je me suis donc déchaussé. Il a aussi voulu mon pantalon. Finalement, nous nous sommes tous retrouvés en sous-vêtements. Heureusement que nous avions mis quelques habits de côté, pas loin ! Tout compte fait, nous étions contents qu’ils aient confisqué nos vêtements. Autrement, toute la ville nous aurait pris pour des espions de l’armée !

Nous nous sommes acheté des sabots, puis nous sommes rentrés à Manille avant de partir pour les Visayas, où nous avons poursuivi notre prédication.

Frère Pantas a été ministre à plein temps et serviteur des frères (aujourd’hui appelé surveillant de circonscription) avant d’aller à l’École de Guiléad. De retour aux Philippines, il a été surveillant de district, puis Béthélite. Ensuite, il a fondé une famille.

[Tableau/Illustrations, pages 168, 169]

LES PHILIPPINES — REPÈRES HISTORIQUES

1908 : Débuts de la prédication à Sibalom avec deux Étudiants de la Bible américains.

1910

1912 : Discours de Charles Russell au Grand Opéra de Manille.

1934 : Ouverture du siège national. Publication, en tagalog, de la brochure Le Royaume : Un refuge dans la détresse.

1940

1947 : Arrivée des premiers diplômés de Guiléad.

1961 : Premières classes de l’École du ministère du Royaume.

1964 : Premiers pionniers philippins invités à entreprendre le service missionnaire dans des pays voisins.

1970

1978 : Premières classes de l’École des pionniers.

1991 : Construction et inauguration de nouveaux bâtiments pour la filiale. Éruption du mont Pinatubo.

1993 : Parution, en tagalog, des Écritures grecques chrétiennes — Traduction du monde nouveau.

2000

2000 : Parution, en tagalog, de la Traduction du monde nouveau, édition intégrale.

2002 : 142 124 proclamateurs actifs aux Philippines.

[Graphique]

(Voir la publication)

Total des proclamateurs

Total des pionniers

150 000

100 000

50 000

1940 1970 2000

[Graphique, page 199]

(Voir la publication)

Progression dans l’assistance aux assemblées (1948-​99)

350 000

300 000

250 000

200 000

150 000

100 000

50 000

0

1948 1954 1960 1966 1972 1978 1984 1990 1996 1999

[Cartes, page 157]

(Voir la publication)

LES PHILIPPINES

LUÇON

Vigan

Baguio

Lingayen

Cabanatuan

Mont Pinatubo

Olongapo

Quezon City

MANILLE

MINDORO

LES VISAYAS

Masbate

CEBU

MINDANAO

Surigao

Davao

PALAUAN

El Nido

[Illustrations pleine page, page 150]

[Illustration, page 154]

Charles Russell et William Hall durant leur séjour aux Philippines en 1912.

[Illustration, page 159]

Joseph Dos Santos, ici avec sa femme Rosario, en 1948, est demeuré un proclamateur zélé du Royaume malgré trois ans d’emprisonnement cruel pendant la Seconde Guerre mondiale.

[Illustration, page 163]

Les premiers frères philippins envoyés à Guiléad : Adolfo Dionisio, Salvador Liwag et Macario Baswel.

[Illustration, page 164]

À pied dans les montagnes pour aller prêcher.

[Illustration, page 183]

Des milliers de pionniers ont tiré profit de l’École pour les pionniers.

[Illustration, page 186]

La photocomposition informatisée a commencé en 1980.

[Illustrations, page 189]

La bonne nouvelle est accessible dans de nombreuses langues philippines.

[Illustration, page 199]

L’assemblée internationale “ L’enseignement divin ”, en 1993.

[Illustration, page 199]

Baptêmes à l’assemblée de district de 1995 “ Louons Dieu dans la joie ”.

[Illustration, page 200]

Des missionnaires philippins de retour chez eux pour l’assemblée.

[Illustration, page 202]

Les “ Écritures grecques chrétiennes — Traduction du monde nouveau ” ont paru, en tagalog, aux assemblées de 1993.

[Illustration, page 204]

Traduction de la Bible au moyen d’outils informatiques.

[Illustration, page 205]

Radieux, un pionnier brandit la “ Traduction du monde nouveau ”, en intégralité, dans sa langue.

[Illustration, page 207]

Le Comité de la filiale, de gauche à droite : (assis) Denton Hopkinson, Felix Salango ; (debout) Felix Fajardo, David Ledbetter, Raymond Leach.

[Illustration, page 211]

De nombreux réfugiés vietnamiens ont appris la vérité aux Philippines.

[Illustration, page 215]

Natividad et Leodegario Barlaan ont passé plus de 60 ans chacun dans le service à plein temps.

[Illustrations, pages 222, 223]

Des Salles du Royaume construites récemment.

[Illustrations, page 224]

La Salle d’assemblées du Grand Manille (en haut) et d’autres salles à l’extérieur de Manille.

[Illustration, page 228]

Ci-​contre : John Barr prononçant le discours d’inauguration du Béthel, en 1991.

[Illustration, page 228]

Ci-dessous : Le Béthel en 1991.

[Illustration, page 235]

Les journaux rapportent la victoire des Témoins de Jéhovah.

[Illustrations, page 236]

Tremblements de terre, volcans et inondations ont créé des difficultés, mais les proclamateurs zélés ont continué de prêcher.

[Illustration, page 246]

Des pionniers zélés ont appris la langue des signes pour aider les sourds à tirer profit des programmes spirituels.

[Illustration, page 246]

Les élèves et les instructeurs de la première classe de l’École pour les pionniers en langue des signes, début 2002.

[Illustration, page 251]

La 27classe de l’École de formation ministérielle.