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Un “ ruban de fer ” qui relie deux océans

Un “ ruban de fer ” qui relie deux océans

Un “ ruban de fer ” qui relie deux océans

IL Y A environ 150 ans, une bonne partie du Canada, le deuxième pays au monde en termes de superficie, était encore sauvage et inexplorée. L’historien Pierre Berton explique : “ Les trois quarts de la population vivaient dans un isolement relatif sur des fermes * ” et l’état des routes “ rendait tout déplacement virtuellement impossible* ”. Les déplacements sur les lacs et les fleuves étaient également limités, car ceux-ci étaient gelés jusqu’à cinq mois par an.

Devant ces obstacles, le premier ministre John Macdonald propose en 1871 la construction d’un chemin de fer qui relierait la côte atlantique à la côte pacifique. Un tel projet a été achevé aux États-Unis deux ans plus tôt. Mais le Canada a un budget plus restreint, une distance plus importante à couvrir et une population dix fois moins nombreuse que celle des États-Unis. Un homme politique canadien parle de cette proposition comme de l’“ une des entreprises les plus insensées qu’on [puisse] imaginer* ”. Un autre dit avec ironie que la prochaine idée du premier ministre sera une voie ferrée menant à la lune.

Un projet coûteux

Le gouvernement s’engage malgré tout à terminer l’ouvrage en dix ans. Standford Fleming, un ingénieur ferroviaire écossais, en estime le coût à 100 millions de dollars canadiens, une somme énorme pour l’époque. Bien que faire passer la ligne par les États-Unis soit plus court et moins compliqué, Macdonald insiste pour que le tracé reste entièrement canadien, ce qui permettrait de préserver les intérêts du pays en cas de guerre.

Beaucoup d’investisseurs sont réticents à se lancer dans une entreprise aussi coûteuse et risquée. Cependant, en 1875, la compagnie de chemin de fer Canadien Pacifique (CFCP) extrait la première pelletée de terre : les travaux de construction de la ligne principale ont commencé. Mais dix ans plus tard, ils menacent de s’arrêter complètement. Le CFCP a une dette de 400 000 dollars qu’elle doit rembourser le 10 juillet avant quinze heures, ce dont elle est incapable. Par bonheur, à quatorze heures ce même jour, le Parlement accepte d’accorder un prêt supplémentaire : le projet est sauvé.

Les difficultés posées par la construction

En posant des rails dans le nord de l’Ontario, les ouvriers tombent sur de la roche à seulement 30 centimètres de profondeur ; il faut donc faire venir de la terre de loin. Dans le centre du Canada, les températures descendent à – 47 °C en hiver, ce qui pose de sérieux problèmes. De plus, il tombe plusieurs mètres de neige chaque année. La portion de chemin de fer dans les Rocheuses, à l’ouest, est appelée “ l’endroit où la mort frappe sans prévenir ”. La construction de nombreux ponts et tunnels est nécessaire. Les ouvriers travaillent dix heures par jour, sous la pluie, dans la boue ou la neige.

Finalement, le 7 novembre 1885, le dernier crampon est fixé sans fanfare dans le col d’Eagle, en Colombie-Britannique, dans l’ouest du pays. La gare est baptisée Craigellachie d’après un village d’Écosse devenu un symbole d’audace et d’intrépidité pour avoir affronté une période difficile. Lorsqu’on lui demande de prononcer un discours, le directeur du CFCP fait cette simple remarque : “ Tout ce que je peux dire, c’est que le travail a été bien fait dans tous les domaines. ”

Les répercussions sur la population

On fait venir des milliers de travailleurs chinois, leur promettant un emploi stable. Le travail est souvent dangereux, particulièrement dans les Rocheuses. Ce n’est que plusieurs années après la pose du dernier crampon que nombre de ces ouvriers parviennent à rassembler assez d’argent pour retourner chez eux.

Avec l’apparition du rail, l’industrie et le commerce se déplacent vers l’ouest, ce qui a des conséquences négatives sur les modes de vie traditionnels. Des villages et des villes sont fondés, et les autochtones sont placés dans des réserves. Le long des anciennes routes commerciales, les petits négoces, comme les tavernes, ferment. Mais il y a aussi des conséquences positives : le train, dit-​on, “ lib[ère] les voyageurs de la saleté et de la boue et surtout du joug de l’hiver * ”. En outre, les produits alimentaires en provenance d’Orient qui arrivent sur la côte pacifique du Canada sont acheminés jusqu’aux villes situées à l’est en quelques jours seulement.

Bien que les trains jouent encore un rôle important dans le transport des marchandises d’un bout à l’autre du Canada, l’utilisation croissante de l’automobile et de l’avion a contribué au déclin du transport des passagers par voie ferrée. Cela dit, beaucoup apprécient toujours, pour échapper à la vie trépidante du XXIsiècle, de voyager à bord d’un train confortable de Toronto à Vancouver et d’admirer les paysages magnifiques défilant sous leurs yeux. Au lieu d’accélérer le rythme de la vie comme il l’a fait à une époque, le train permet aux voyageurs de se détendre et de réfléchir sur l’histoire passionnante du “ ruban de fer ” canadien, grâce auquel ils se rendent d’un océan à l’autre.

[Notes]

^ § 2 P. Berton, Le grand défi : le chemin de fer canadien, trad. P. Bourgault, Montréal, éd. du Jour, 1975, p. 24, 25 ; p. 17.

^ § 12 P. Waite, Histoire générale du Canada, Montréal, éd. du Boréal, 1990, p. 338.

[Encadré/Illustration, page 18]

NOUS COMMUNIQUONS NOTRE ESPÉRANCE GRÂCE AU “ RUBAN DE FER ”

Le chemin de fer reste le moyen de transport principal de certaines communautés au Canada. Les Témoins de Jéhovah s’en servent donc pour se rendre dans des régions isolées et communiquer le message de la Bible au sujet du Royaume de Dieu (Isaïe 9:6, 7 ; Matthieu 6:9, 10). “ C’est facile de parler de la Bible dans le train, expliquent-​ils, car les gens veulent savoir où nous allons et quel est notre but. ”

Des Témoins sont allés en train dans une réserve ojibwa, près du lac Nipigon, dans le nord de l’Ontario. L’un d’eux raconte : “ Le paysage et les animaux étaient impressionnants, mais c’est des gens dont nous gardons le meilleur souvenir. Comme ils ne reçoivent pas souvent de la visite, notre arrivée les a mis en effervescence. Certains nous ont prêté leurs canoës, et nous avons été autorisés à utiliser gratuitement la salle de classe. À la fin de notre journée de prédication, des membres de la communauté s’y sont réunis pour regarder une vidéo sur notre œuvre mondiale. ”

[Illustration, page 16]

John Macdonald.

[Illustration, page 17]

La construction du chemin de fer : une entreprise laborieuse.

[Illustrations, page 17]

Il a fallu construire de nombreux ponts et tunnels dans les montagnes.

[Illustration, page 17]

Pose du dernier crampon de la ligne transcontinentale au Canada.

[Illustration, page 18]

Le “ ruban de fer ” aujourd’hui.

[Crédits photographiques, page 16]

En haut : Canadian Pacific Railway (A17566) ; au milieu : Library and Archives Canada/C-006 513

[Crédits photographiques, page 17]

En haut, de gauche à droite : Canadian Pacific Railway (NS13561-2) ; Canadian Pacific Railway (NS7865) ; Library and Archives Canada/PA-066576 ; en bas : Canadian Pacific Railway (NS1960)

[Crédits photographiques, page 18]

En haut : Canadian National Railway Company ; à droite : avec l’aimable autorisation de VIA Rail Canada Inc.